L`Église catholique est encore aussi puissante que le

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LA PRESSE
MONTRÉAL
DIMANCHE
18
AVRIL
A9
2004
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FORUM
Questionnements
L’Église catholique est encore aussi puissante
que le Titanic, mais pas autant que la banquise!
JEAN-PAUL LEFEBVRE
M. Lefebvre est
journaliste et
écrivain.
Le mystère de la
résurrection du
Christ étant au
coeur de la foi et
de la culture
chrétiennes, Pâques et son octave sont de bonnes
occasions pour les croyants (pratiquants ou non) de s’interroger sur
l’avenir du christianisme.
La crédibilité de l’Église est mise à
rude épreuve en raison d’une pensée
unique et inflexible, et d’une action
pastorale figée dans des coutumes
ecclésiastiques qui n’ont rien à voir
avec l’esprit des Évangiles. Posonsnous deux questions précises reliées
à la capacité du magistère de l’Église
de s’adapter aux réalités du monde
moderne.
Quel est l’héritage
de Jean-Paul II ?
On ne saurait confondre le trésor
de l’Église avec l’héritage d’un pape.
Le legs unique et irremplaçable offert au Peuple de Dieu, ce sont les
Paroles du Christ. Elles appartiennent à tous ceux et celles qui ont déjà choisi ou qui choisiront de les accueillir.
L’héritage du pape Jean-Paul II,
c’est l’état actuel de l’institution mise
sur pied par les 12 apôtres choisis
par Jésus. Celui qui est venu sur terre pour parler de l’amour du prochain, de son Père et de l’Esprit.
En quelques siècles seulement, les
petites communautés chrétiennes
créées chez les Juifs et chez les Gentils, dans la simplicité et la fraternité,
furent transformées par la conversion de l’empereur Constantin. À
compter de l’an 313, le christianisme
devint la religion de l’Empire romain. Le compagnonnage entre le
régime impérial et les messagers de
la Bonne Nouvelle transmit à ces
derniers certaines valeurs, notamment en matière de gestion de l’autorité et de la fortune, dont l’Église
ne s’est jamais départie. Même si, au
cours des siècles, il y eut des moines
et des moniales pour prêcher la simplicité et la fraternité évangéliques.
Dix-sept siècles plus tard, cet héritage est un poison pour l’Église. Les
monarchies absolues n’ont pas la cote de nos jours. Elles se font de plus
en plus rares. On parle même de démocratiser le Moyen Orient !
Il est paradoxal mais vrai que le
pape Jean-Paul II a contribué de façon significative à instaurer la liberté
et la démocratie dans le récent empire soviétique... mais il a codifié, année après année, la mainmise absolue de l’évêque de Rome sur l’Église
PHOTO ASSOCIATED PRESS
Il est paradoxal mais vrai de dire que le pape Jean-Paul II a contribué de façon
significative à instaurer la liberté et la démocratie dans le récent empire
soviétique... mais il a codifié, année après année, la mainmise absolue de
l’évêque de Rome sur l’Église catholique.
catholique. Si bien que les pouvoirs
législatif, exécutif et judiciaire sont
clairement aux mains du pape et de
la Curie romaine !
L’Église catholique est encore aussi
puissante que le Titanic, mais pas autant que la banquise ! Cette fois, la
banquise est formée par les valeurs
de liberté, de justice et d’égalité qui
sont presque totalement absentes du
droit impérial, et éventuellement canonique, qui fut le cadeau empoisonné du quatrième siècle au christianisme.
La Bonne Nouvelle a été alourdie,
déformée, vidée en partie d’un rapport essentiel avec la réalité vécue
aujourd’hui. Le prochain pape et les
évêques du monde entier doivent
unir leurs efforts pour actualiser les
Paroles du Christ. Cela veut dire
parler vrai, tenir un discours adapté
aux situations très diverses de chaque société et de chaque personne.
Comme le Christ l’a fait.
Qui a droit au mariage civil ?
Le récente décision de la Cour
d’appel du Québec d’autoriser le
mariage entre personnes du même
sexe et sa mise en application par le
gouvernement du Québec ramènent
au premier plan de l’actualité une
question sur laquelle les Québécois
et l’ensemble des Canadiens sont
très divisés.
Il y a, dans la société canadienne et
dans beaucoup d’autres pays des
gens qui sont près à coucher avec
tout ce qui bouge, indépendamment
des sexes, des âges et des nombres,
pour satisfaire un appétit sexuel déraisonnable. Ce groupe n’est pas à
confondre avec les homosexuels et
les lesbiennes qui réclament le droit
à la consécration de leurs amours par
un engagement permanent à la fidélité et au partage de leurs biens.
C’est, malheureusement, l’amalgame
qu’ont fait un certain nombre d’ecclésiastiques de haut rang dans le
débat entourant le projet de loi fédéral sur le mariage gai. L’évêque de
Calgary, Mgr Fred Hendry, a menacé
le premier ministre Jean Chrétien de
l’enfer ! L’archevêque de Montréal a
demandé, en conférence de presse, si
cela impliquait qu’un père pouvait
marier son fils et une mère, marier
sa fille ! Notre sympathique cardinal
a sans doute oublié que l’inceste est
interdit par le code criminel depuis
des lustres !
Où se trouve le problème ? Les
vrais amoureux chez les homosexuels et chez les lesbiennes veulent sortir de l’ombre et du mépris
et, pour ce faire, ils réclament la possibilité de consacrer leurs amours et
leur fidélité en formant un couple
permanent, reconnu par la société civile, dans un contrat de « mariage ».
Contrairement à la pédophilie, qui
est un crime dans notre pays et dans
les autres sociétés régies par le règle
de droit, l’homosexualité entre adul-
tes consentants est un droit, reconnu
dans la Constitution ! Pourquoi la
formation de couples stables ne le
serait-elle pas dans une loi votée par
le Parlement ? Les amours durables
sont préférables, au plan moral,
comme au plan spirituel, au vagabondage et à l’amour « libre » !
Pour les homosexuels comme pour
le hétérosexuels !
Au Québec, comme en France, on a
créé une institution particulière pour
ces couples. Chez nous c’est l’union
civile. En France, on utilise un autre
nom pour la même réalité. Certains
États américains ont adopté la même
formule.
Il est maintenant reconnu que
l’orientation sexuelle est généralement irréversible. Même si elle a été
longtemps camouflée sous un mariage hétérosexuel par la pression sociale et les prescriptions religieuses.
Combien de pères et de mères de famille ont émergé de la clandestinité
après 20 ou 30 ans pour accéder à
l’amour qui était inscrit dans leurs
gênes, dans leur cerveau... ?
Les jugements de cour dans trois
provinces ont décrété qu’il était contraire à la Charte des droits et libertés de refuser aux gais et aux lesbiennes le droit au mariage. Ces
jugements sont à l’origine du projet
de loi du gouvernement fédéral qui
propose de définir désormais le mariage comme « l’union de deux personnes ». Un projet maintenant soumis à la considération de la Cour
suprême. Mais le débat public n’est
qu’ajourné. Il reviendra forcément
au Parlement de trancher. En tant
que catholique, je souhaite que le
haut clergé renonce à ses positions
moyenâgeuses afin d’éviter une confrontation inutile et coûteuse.
Il est sans doute téméraire pour un
simple scribe, qui n’est ni avocat, ni
juge, de risquer une hypothèse susceptible de rallier les deux camps retranchés autour du mot « mariage ».
Ne serait-il pas possible que le Parlement du Canada, sans changer un
iota à la loi actuelle du mariage,
adopte une autre loi, voisine de la
première, qui statuerait sur le « mariage gai » en le définissant comme
« l’union permanente de deux personnes du même sexe » ?
Depuis toujours et pour toujours,
les hétérosexuels et les homosexuels
demeureront différents. Les couples
homme-femme sont des entités différentes des couples de même sexe.
Que ces deux entités distinctes portent chacune le nom qui les définit
ne les empêcherait pas d’être égales
devant la loi.
Pourquoi pas deux lois sur le mariage, puisqu’il y a deux groupes
différents qui en ont besoin ? Pour
satisfaire une minorité, faudrait-il
contrarier la majorité ? L’objectif
n’est-il pas que les citoyens soient
égaux devant la loi, pas semblables ?
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Les dessous d’une publicité
PAULE BERNIER
L’auteure est
nutritionniste
clinicienne à
Montréal.
Une publicité télévisée de la
compagnie Tim
Horton, actuellement en ondes,
m’a fait réagir. On y voit un papa et
son très jeune enfant se balader en
carriole dans une érablière et papa
de donner tout gentiment une belle
bouchée de beigne à son joli bambin...
L’esthétique est fort belle, mais le
fond l’est moins. En effet, les publicités font plus qu’inciter à acheter des produits : elles véhiculent
des messages qui peuvent avoir
une portée qui n’avait peut-être pas
été prévue à l’origine. Or cette publicité de Tim Horton porte à réfléchir. Cautionne-t-elle les comportements qui peuvent être jugés
comme étant inappropriés ? Fait-
elle appel à une fibre sensible qui
rassure le parent et le déculpabilise
lorsqu’il agit de la sorte ? Encourage-t-elle à développer le goût chez
les jeunes enfants pour les aliments
gras et sucrés puisque c’est à cet
âge si malléable que s’établissent
les bases de nos habitudes futures ?
Ce qu’elle fait certainement, c’est
banaliser l’impact de nos comportements alimentaires individuels sur
l’ensemble de la société, car rappelons-le, le système de santé public
traite en très grande partie des gens
qui souffrent de diabète, d’insuffisance rénale, de désordres du métabolisme des lipides (hypercholestérolémie...), de maladies coronariennes.
Ce sont là toutes des pathologies qui
ont souvent en commun un type de
malnutrition : l’obésité.
Or, puisque le résultat est une utilisation accrue des ressources telles
l’hémodialyse, les pontages coronariens, les séjours aux soins intensifs, les complications infectieuses
en présence de diabète mal contrôlé, personne ne devrait plus ignorer
cette cascade où l’accessibilité aux
services de santé est grandement
réduite.
réorganiser l’espace physique à
l’intérieur d’un centre hospitalier.
L’impact économique est aussi
très important pour les entreprises
où la productivité des employés
malades est diminuée et où le taux
Un impact économique majeur
Pour le ministère de la Santé, d’absentéisme des patients, qui
donc pour chaque citoyen contri- sont en traitement plutôt que d’être
buable, l’impact économique est actifs, affecte l’organisation du tramajeur. Les séjours hospitaliers vail. La productivité et le taux
coûtent cher, non seulement parce d’absentéisme des aidants dits naque la durée de séjour lors de com- turels (les conjoints et la famille
des patients) influencent aussi la performance des entreVanter la consommation de beignes à un jeune enfant, prises. Par ailleurs, les primes
d’assurance collective augc’est banaliser l’impact de nos comportements
mentent de façon fulgurante
(tout comme le régime d’assualimentaires
rance médicaments provincial). Du point de vue individe chirurgies de ce genre est en for- plications est significativement duel, la situation économique et
te hausse depuis qu’on a commen- plus longue, mais aussi parce que sociale se détériore en présence de
cé à les pratiquer, l’accès à l’unité les coûts par jour augmentent car il la maladie chronique.
Bref, nous avons tous une influendes soins intensifs pour les patients y a utilisation accrue de ressources
présentant d’autres types de patho- (soins spécialisés, consultations au- ce sur les coûts de santé. La responlogies tels choc septique, insuffi- près des diverses spécialités médi- sabilité individuelle certes, mais
sance respiratoire, surveillance cales et professionnelles, analyses aussi la responsabilité des compapost-opératoire, peut être compro- de laboratoire et imagerie médica- gnies qui mettent en marché leurs
mis. La décision d’agrandir l’unité le, pharmacothérapie). Le Ministè- produits et celle des diffuseurs pudes soins intensifs s’impose donc. re doit aussi investir dans les infra- blics et privés sont ici mises en
Par ailleurs le temps disponible au structures, ne serait-ce que pour cause.
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Prenons l’exemple des pontages
coronariens (remplacement de vaisseaux artériels bouchés du coeur
par des vaisseaux « sains » de la
jambe). Il se pratique au Québec
chaque année plusieurs milliers de
ces interventions ; tous ces patients
sont mis sur ventilateurs et transitent par l’unité des soins intensifs.
La plupart évoluent bien, mais certains développent des complications majeures. Puisque le nombre
bloc opératoire pour les chirurgies
de tous genres est affecté et cela
contribue à allonger les listes d’attente.
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