(J&o ARCHIV PRADER 9579 EDUCATION SEXUELLE AFRIQUE F TROPI CALE :.: CDU 613.88 (6) Centre de Recherches pour Ic Développement International Siege social: Case Postale 8500, Ottawa, KIG 3H9 édition microfiche: $1 EDUCATION SEXUELLE EN AFRIQUE TROPICALE Compte-rendu d'un séminaire interafricain tenu a Bamako du 16 au 25 avril 1973 sous les auspices du Ministère de l'Education nationale de Ia République du Mali en collaboration avec le Service Quaker (American Friends Service Committee). ío rr U;( &)J I WPMENT INTERNATIONAL DEVELOPMENT RESEARCH CENTRE OTTAWA, CANADA CENTRE DE RECHERCHES POUR LE DEVELOPPEMENT INTERNATIONAL 1973 un point de vue musulman sur I'éducation sexuelle Elbekaye Kounta, Bamako faut essayer de Je ne saurais mieux commencer mon exposé que par ce passage du Glorieux Coran, oü 1'ternd dit a son Envoyé: Appelle les hommes dans Ic sentier de ton Seigneur par la sagesse et par des admonitions douces; situ entres en dispute avec eux, fais-le de Ia manière Ia plus honnête, car, ton d'interrogation, auquel Seigneur connaIt le mieux ceux qui dévient de son sophic qui fait preuve d'indulgence et de souplesse afin d'atteindre son objectif sans provo- sentier et ceux qui suivent le droit chemin. M'inspirant de ce verset, mon exposé repassera done sur les versets coraniques, la Tradition du Prophéte, Ia jurisprudence musulmane, les moeurs et coutumes négro-Africaines. J'aurai également recours parfois aux témoignages de non-musulmans. De cc fait, cet exposé sera exempt de passion et de partialité. Avant de parler d'une philosophic de l'Islam il répondre. Indulgence et souplesse L'Lslam, pour traiter cc genre de question qui n'est pas a Ia base de ses fondements, a une philo- qucr de troubles chez ses adeptes. Mais quant aux fondements essentiels, tels que l'Unicité de Dieu, Ic refus de l'idolâtrie, l'Islam les aifronte directe- ment et franchemcnt pour couper court a toute équivoquc des Ic debut. Lcs philosophies dc l'Islam ont été unanimcs a affirmer que l'éducation morale était l'essence mêmc dc l'éducation islamique ct quc l'éducation sur l'éducation sexuelle et pour vous permettre de avait pour but Ia perfection morale, condition mieux saisir cet exposé, j'attire votre attention sine qua non de l'édification de sociétés saines et vcrtueuses. L'éducation sexuellc, sans sortir dccc sur deux signes caractéristiques de l'Islam qui ont fait son genie a l'époque ofl les musulmans cherchaient a connaItre le vrai visage de leur religion, et qui font, hélas, aujourd'hui son malheur a cause de I'ignorance de ses adeptes: Le fait d'avoir reconnu les instincts humains, mais en les assujettissant a des lois rééducatives. Mohammed son fondateur est comme tous les communs mortels: il mange, dort, se marie, connalt la joie, le bonheur et les difficultés du manage, fait des enfants et connalt La tendresse paternelle et l'amour filial. La souplesse et Ia facilité d'adaptation dont fait preuve a l'égard des moeurs et de Ia mentalité de ses adeptes. Ccci dit, voyons maintenant cc que pense 1'!slam de l'éducation sexuelle, et comment ce phénomène est traité par l'Islam. On peut dire, d'ores et déjà et sans ambiguité, que l'Islam préconise l'éducation sexuelle et exhorte même a Ia répandre. Mais comment? C'est là le point il 70 cadre général, a eu Ic privilege d'être mieux traitée, pour des raisons d'ordrc religieux, hygiénique, et social, par Ic Coran, les Hadiths ct La Jurisprudence musulmane. Par le Coran Les problèmcs sexuels traités - bien que de facon pcu approfondie - par Ic Coran sont a pcu près les suivants: La procreation, (de quoi l'homme est créé et comment.) L'ternel dit: "C'est lui qui vous a créés de poussièrc, puis d'unc gouttc dc sperme, puis d'un grumcau de sang coagulé, il vous fait naItrc cnfants. La virginité: L'terncl dit a propos de Ia Sainte Marie; "Et Marie fille d'Inran, qui conserva sa virginité, nous lui insufflâmes unc partie de notre csprit. Elle crut aux paroles du Seigneur, a scs livrcs; ct dIe était du nombre de personncs picuses. Jeune garçon a lécole coranique École coranique a Lagos, Nigeria Le Coran fait mention également des rapports sexuels, ejaculation et sperme; de l'ablution et du bain après les rapports sexuels; de La puberté et du manage; de l'interdiction de relations sexuelles en période de menstrues ou après l'accouche- sexe ne doit plus être considéré comme tabou, comme quelque chose dont on a honte de parler étant donné que Le Coran, malgré son caractére sacré, en fait mention. ment et avant l'arrêt du sang; de Ia stérilité, Traditions du prophète durée de grossesse, allaitement et sevrage; de La polygamie, de l'adultère, l'homosexualité, et du divorce. Dans tout ce queje viens d'énumérer, le Coran se borne le plus souvent a des informations générales, disons même élémentaires. Cependant nous pouvons en déduire l'idée suivante: La démystification de La sexualité, c'est-à-dire que le Après le glorieux Coran, les textes islamiques les plus importants sont les traditions relatives au 72 prophète Mohammed (Hadiths), transmettant ses dires, ses gestes, voire son attitude silencieuse, sur Les sujets les plus divers. C'est dans cette par- tie que nous trouverons le detail de tout ce qui a été sommairement brossé par le Coran. En plus, nous y trouverons quelques renseignements sur Ia circoncision et les moyens de regulation des naissances. Le Professeur 0. Hodas, de I'Ecole des Langues Orientales vivantes de Paris, dit dans son ouvrage sur, L'Islamisme (page 107,) que: Malgré Ia discretion accoutumée dont font preuve les musulmans, pour tout ce qui touche a leur gynécée, les femmes du Prophète ont subi, elles aussi, une constante interview dont les résul- tats sont insérés tout au long dans les Hadis. Nous connaissons dans tous leurs details leur conduite vis-à-vis de I'Envoyé de Dieu, nous savons comment elles faisaient leur toilette en toute circonstance, et il n'est pas une seule bonne musulmane qui ne cherche a observer scrupuleusement les usages et la conduite de ces épouses modèles qui figurent en bonne place parmi les traditionnalistes de la premiere heure." Je dois vous dire en passant qu'actuellement, même si toutes nos soeurs musulmanes ne cherchent pas a observer scrupuleusement les usages et La conduite des épouses du Prophète, néanmoins, certaines d'entre efles observent encore quelques préceptes islamiques dans les relations matrimoniales, tels l'ablution après Ia satis- faction des besoins naturels, aprés les rapports sexuels, l'abstention de toute relation sexuelle pendant Le cycle menstruel de La femme, etc. Si les musulmans du sexe féminin doivent imiter les épouses du Prophète, l'idéal de tout musulman du sexe masculin est de modeler sa conduite sur celle du Prophéte Mohammed dont les traditions nous font connaItre comment ii accomplis- sait les actes les plus- intimes de son existence terrestre, en entrant dans des details qui nous paraissent souvent superfius. Mohammed dit: ((Mon message organise les affaires religieuses et terrestres, les affaires spirituelles et corporelles, les affaires individuelles et communautaires. Voyons dotic, comment Le message de Mohammed a organisé le problème sexuel des êtres hu- mains qui, a mon avis, a un caractère a Ia fois religieux, terrestre, corporel, individuel et sexuels. II a ensuite élaboré des méthodes pour domestiquer cet instinct, qui se subdivisent en trois categories: Méthode basée sur la satisfaction du besoin sexuel en contractant le manage entre un homme et une a quatre femmes au maximum pour répondre a La nécessité bioLogique et sexuelle. Sur ce point, un esprit impartial ne trouvera aucun reproche solidement fondé contre 1' Islam. Faisons remar- quer que Ia polygamie n'est pas une institution islamique, elle était connue et pratiquée bien avant l'apparition de l'IsLam: les Juifs pratiquaient cette institution sous Molse, sans restric- tion aucune. La Bible est fort claire a ce sujet. Abraham, Jacob, David et Salamon étaient tous polygames. La polygamie n'était pas explicite- ment interdite aux premiers temps du Christianisme, car la mission du Messie était non d'abolir la loi Mosaique mais de Ia parfaire. (ELvangile selon St. Mathieu). Le Pasteur camerounais Bahokan dit: " On n'a pas le droit de condamner Ia polygamie, que même Le Christ n'a pas condamné chez Abraham. Chez nous ici, avant et beaucoup aprés Ia pénétration islamique, on contractait Ia polygamie, non limitée a quatre, mais pouvant s'étendre a des dizaines de femmes. Aujourd'hui, Ia pratique illicitement, et c'est ce qu'on appelle débauche. dans nos sociétés modernes, on Méthode spiritueLle Elle englobe I'éducation morale et civique basée généralement sur Ia vertu. Les premieres notions d'une vraie education sexuelle sont insérées dans cette méthode d'une maniére péda- gogique unique dans son genre. Quelques exemples: L'enfant: fille ou garçon est sensibilisé par I'iritérêt qu'on porte a son sexe depuis ses premiers mois. Après chaque eviction d'urine on verse un peau d'eau sur son sexe. A l'âge de sept ans, on l'invite a faire Ia prière. Ii apprend comment on se nettoie, comment on fait I'ablution pour prier. communautaire. A l'ãge de dix ans, on I'oblige a prier, on lui indique les signes de puberté qui sont presque tous Reconnaissance des instincts Premièrement, l'IsLam a reconnu tous Les instincts humains parmi Lesquels se trouve en pre- relatifs aux organes génitaux: l'appanition des poils pubiens, Ie cycle menstruel, l'éjaculation nocturne. A cet age également, L'enfant doit sa- mier lieu celui de La satisfaction des besoins voir les raisons qui obligent le musulman a faire 73 ou refaire une ablution ou un bain généralement appelé grande ablution. On Iui cite parmi ces raiSons: les rapports sexuels complets ou incomplets. Et a partir de dix ans, l'enfant peut approfondir ses connaissances, surtout quand on lui ensei- gne le code du manage; ii doit savoir pourquoi on se marie, comment choisir librement son conjoint, les avantages du manage, ses difficultés, pourquoi avoir des enfants, grossesse, accouchement, allaitement, sevrage et durée normale entre les naissances etc. Cet enseignement est donné pour les enfants d'un a dix ans, la plu- part du temps et dans la plupart des pays musulmans, par les parents, les grand-parents, ou par un autre membre de la famille. Au delà de dix ans l'enseignement revient généralement a des éducateurs particuliers qui se chargent de I'éducation de l'enfant soit dans sa maison soit chez les parents. Le père autrefois collaborait avec l'éducateur au choix des matières qui seront enseignées a son enfant. En cette période, quelques conseils pratiques sont donnés aux enfants. C'est ainsi que l'Islam conseille au fiancé de voir le visage, les mains et les pieds de sa future femme, d'entendre sa voix et d'apprécier sa conversation. L'Islam ordonne, en outre, aux hommes d'avoir beaucoup d'égards envers leurs femmes et d'être doux et cléments avec elles; ii dit: "Soyez convenable avec elles, malgré l'antipathie qu'elles peuvent vous inspirer, elles peuvent être pour vous une source de bonheur." Le meilleur gain de l'homme après la crainte de Dieu, dit-il, est d'avoir une épouse pieuse et obéissante, qui répand Ia gaieté dans Ia maison et protege, durant l'absence de son man, son honneur et ses biens. De même, le Prophète recommande a la femme d'être tendre avec son époux: ((Connais ton role envers ton man, car il depend de toi de faire de lui ton paradis ou ton enfer. L'Islam connaissant bien Ia nature des êtres humains ne s'est pas contenté des deux premieres méthodes que nous venons de voir. Ii a instauré les moyens de châtiment corporels pour Ia protection de ses institutions spirituelles Ct morales cents coups de fouet au célibataire, femme ou homme, pris en flagrant délit d'adultère. Les hommes et les femmes manes seront passibles de lapidation jusqu'ã ce que mort s'ensuive. 74 Ii faut souligner que les succès de l'Islam en Afrique sont dus en grande partie au respect qu'il porte a notre civilisation négro-africaine qui, depuis longtemps et avant la pénétration Islamique, chrétienne ou européenne, a montré son efficacité dans Ia protection de nos moeurs par une éducation sexuelle non moms importante que celle de l'Islam. Comme champ d'études, j'ai pris un groupe d'habitants d'une partie de Ia region de Bamako. En dépit de Ia presence de différentes ethnies, les élèments composant ce groupe prétendent qu'ils sont de Ia même origine. Ils sont communément appelés habitants de Dougou, Kerawané, Kiban, Kolobo, Dioni et Boidougou. Les habitants de quatre premieres localitès ont embrassé l'Islam depuis bien longtemps tandis que ceux des autres n'ont été convertis que vers les années 1950. Bien que musulmans depuis fort longtemps, les habitants de quatre premiers ont conserve la majeure partie des moeurs sexuelles de leurs ancétres animistes. A titre d'exemple nous pouvons fournir les indications suivantes: Toutes les jeunes flies de cette region portaient le 1impé compose de deux bandes de coton destinées a cacher leur nudité. Les jeunes, garçons et flues du même age, se rencontraient chez une vieille femme du village pour organiser des veillèes. Chaque garcon liait amitié avec une jeune flue. De ce fait, ii était tenu de défendre l'honneur et Ia vertu de son amie. La circoncision conférait au garcon le droit d'être intégré dans la société des adultes. Quant a Ia jeune flue, elle est admise dans Ia société des femmes a partir du moment oü elle échange son "limpé contre le pagne, c'est-à-dire le jour de son manage. Le "limpé est symboliquement coupé. Elle devient finitigui - porteuse ou femme mariée. Les musulmans de cette region sont conscients de Ia contradiction apparente qu'il y a entre les préceptes de l'Islam et des coutumes que je viens d'évoquer sommairement. Mais compte tenu de leur valeur morale et educative ils ont estimè devoir de les conserver. En guise de conclusion je dirai simplement que toute philosophie d'éducation sexuelle qui ne se fonde pas sur le penfectionne- ment moral de l'homme est vouée a l'échec, de même que toute civilisation qui ne se fonde pas sun Ia notion du bien et de Ia vertu est trompeuse et fictive. Elle n'est que mirage.