Surveillance des salariés travaillant à la chaleur par la Fréquence cardiaque 1ère journée Jean BERTRAN PARIS Le 26 septembre 2013 Professeur Alain CHAMOUX, Université d’Auvergne, CHU Clermont-Ferrand Le Travail à la chaleur Quelle Définition ? • A partir de l’ambiance extérieure ? (la température sèche, l’humidité de l’air) • En Référence aux « Critères canicule » ? - plus de 30°C le jour ET Humidité relative supérieure à 70 % ? - plus de 25°C la nuit ? PAS DE DEFINITION « PHYSIQUE » Le Travail à la chaleur Quelle Définition ? • À partir de la physiologie ? • Les astreintes en rapport avec l’exposition à la chaleur intègrent trois dimensions : - l’environnement (la température sèche, l’humidité de l’air, la vitesse de l’air, le rayonnement direct), - l’activité professionnelle (intensité du travail physique), - l’isolement au sens d’isolation thermique (habillement, la forme au sens de la position en boule ou non, etc …). Centrale de mesure d’ambiance thermique 1221 Inova, Autochim Transducers Operative Temperature Air Velocity Radiant Temperature Asymmetry Air Temperature Humidity Surface Temperature WBGT Dry Heat Loss Centrale d’acquisition 6 capteurs ex.: C. d’humidité ex.: C. de température 4 Le Travail à la chaleur Quelle Définition ? • À partir de la pathologie ? • Les valeurs limites existantes et applicables au monde du travail selon des normes internationales sont fondées sur certains risques déterministes : fatigue, déshydratation, coup de chaleur chez les sujets sains acclimatés ou non. Il n’est pas pris en compte le risque cardiaque potentiel donc l’état de santé des salariés. Le Travail à la chaleur Quels risques ? • – de 80 à 90 : fatigue, • – de 90 à 104 (plus de 29,4 °C et humidité supérieure à 60 %) : coup de soleil, crampes musculaires et épuisement physique, • – de 105 à 129 (plus de 32,2 °C et humidité supérieure à 60 %) : épuisement, coup de chaleur possible, • – de 130 et plus (plus de 37,8 °C et humidité supérieure à 60 %) : risque élevé de coup de chaleur, coup de soleil. HEAT INDEX et NIVEAUX DE RISQUE Source : la « National Oceanic and Atmospheric Administration (1985) » Le travail à la chaleur Quels chiffres retenir ? EXEMPLES de niveaux de départ en T air : - plus de 30°C pour un travail sédentaire - plus de 28°C pour un travail léger, - dès 24°C pour un travail lourd en atmosphère humide La classification NOAA n’atteint les niveaux 3 qu’au-delà de 32°C. Le Travail à la chaleur Quel rôle pour le médecin ? • Prévenir ! Et pour cela conseiller. • Sur quelles bases ? • La norme ISO 7933 fixe la limite tolérable à 0,75 litre de sueur à l’heure ou 5 litres par poste de huit heures, • La norme ISO 9886 fixe la limite à 1°C de stockage de température centrale et à 30 Bpm l’augmentation de fréquence cardiaque. Comment conseiller ? • En ayant une idée des activités exposantes et de leur potentielle dangerosité = étude a priori des postes de travail • En Surveillant la santé des opérateurs (plaintes, recensement des « cas ») • En Connaissant les astreintes réelles par enregistrement cardiaque (facilité par la pluridisciplinarité) notamment chez les sujets à risque ou en difficulté. Exemple 1 Niveau de base élevé entrecoupé d’activités soutenues sur des périodes de 20 minutes. Interprétation : Niveaux ne paraissant pas excessifs. Exemple 2 Niveau de base faible, activités brèves et ponctuelles avec une excellente récupération. Interprétation : Niveaux ne paraissant pas excessifs. Exemple 3 Niveau de base faible. Activités cycliques discontinues avec bonne récupération. Interprétation : Aucun problème. Exemple 4 Niveau de base élevé. Activité très régulière sans vraie phase de récupération. Pas de dérive thermique. Interprétation : Pénibilité vraisemblablement acceptable. SYNTHESE 1 La plupart du temps, les postes de travail « ordinaires » tenus régulièrement, ne posent pas de problème. MAIS, certaines activités occasionnelles (maintenance) ou certaines expositions brèves intenses mais répétées, peuvent poser problème. A quoi peut-on s’attendre en théorie ? La méthode de VOGT A quoi peut-on s’attendre en situation réelle ? FC(bpm) Explication ? Compréhension ? HEART RATE BEATS PER MINUTE OXYGEN CONSUMPTION L/MN Fréquence cardiaque et travail en ambiance chaude TIME IN MINUTES TIME IN MINUTES HEART RATE BEATS PER MINUTE OXYGEN CONSUMPTION L/MN Evolution de la fréquence cardiaque d’un sujet en fonction d’un travail test effectué à puissances progressivement croissantes pour deux ambiances thermiques différentes SYNTHESE 2 • Vérifier les fréquences maximales atteintes • Raisonner en médecin • Vérifier les récupérations • Tracer la ligne des minima RCVA Cas clinique 1 Opérateur de 44 ans (fréquence cardiaque de repos nocturne à 64 bpm), chargé de la maintenance de fours de silicates vitreux (ramonage vertical). Cuve à 1248° C, température four ouvert vers 65 – 70° C. Température sèche des locaux à 32° C. Ces tracés en situation montrent trois phases successives d’exposition à la chaleur à proximité de fours à plus de 1 000°C avec une forte activité physique. Trois interruptions d’activité permettent de juger du stockage thermique après quatre minutes de récupération (triangles noirs pleins). Cas clinique 1 (suite) Il est difficile d’apprécier la valeur initiale dite de repos : début de l’enregistrement vers 64 bpm, arrivée sur les lieux de travail = flèche vers 80 bpm, fin de l’habillage = base du premier triangle plein vers 93 bpm. La valeur finale de repos mesurée à 105 bpm après la troisième phase de travail comme le pic de fréquence au travail vers 170 bpm rendent bien compte d’une astreinte cardiaque excessive. Exemple de tracé de fréquence cardiaque pendant une activité de travail en ambiance thermique élevée Exemple des fortes astreintes cardiaques lors du travail en ambiance thermique élevée Cas clinique 2 Opérateur chargé d’opérations de maintenance dans une zone confinée, dans laquelle il est impossible de se déplacer debout et où la température sèche est très élevée de l’ordre de 65 à 70°C. L’opérateur régule luimême ses activités. Les interventions sont très courtes et le temps de récupération laissé à l’appréciation de l’opérateur. Du fait de la brièveté des phases d’exposition à la chaleur, de la difficulté d’apprécier la charge physique de travail et la performance des vêtements de protection, du fait également de l’impossibilité de réaliser un état stable suffisamment durable, il ne peut pas être utilisé la méthode de référence par le calcul de la sudation requise. Les phases d’exposition à la chaleur sont brèves, 5 à 7 minutes environ, de durées inégales et les périodes de récupération ont également une durée variable pratiquement du même ordre voire légèrement supérieure aux durées d’exposition à la chaleur. Cas clinique 2 (suite) Dans de telles circonstances, seule la fréquence cardiaque est à même d’intégrer les différents paramètres et de rendre compte d’une part de la tolérance, d’autre part du risque éventuel pouvant justifier une surveillance médicale particulière. Il y a donc lieu de vérifier la fréquence maximale atteinte et de contrôler notamment si elle dépasse 85 % du coût cardiaque relatif, auquel cas une surveillance médicale renforcée sera mise en place. Il y a lieu également de regarder la ligne des minimas pour voir si elle est horizontale ou ascendante. Une ligne des minimas ascendante traduirait un stockage thermique qui devrait être limité à 30 battements. Cas clinique 2 (suite) On s’aperçoit ici que la ligne des minimas est parfaitement horizontale ce qui signifie que l’opérateur vraisemblablement entrainé, régule parfaitement bien son activité. Alors que certaines abaques auraient pu faire craindre une activité professionnelle « hors limite », les niveaux d’astreinte observés montrent qu’ils sont soutenables et qu’il n’y a pas de stockage thermique excessif malgré les contraintes élevées. Exposition à la chaleur et récupération 2 1 : composante rapide métabolique (dFCM) 2 : composante lente thermique (dFCT) Les questions non résolues • Le Choix de la fréquence de base • Le Niveau de récupération à partir duquel réexposer à la chaleur • Possibilités de surveillance en direct biomonitorage CONCLUSIONS • La surveillance de la santé des salariés et la prévention des risques passent par l’observation et la mesure en situation réelle • Les décisions d’aptitude sont individuelles • Le traitement collectif des données, peut permettre d’objectiver les postes de travail à forte pénibilité (loi sur la retraite anticipée)