UNIVERSITE BORDEAUX 2 VICTOR SEGALEN U.F.R. DES SCIENCES MEDICALES ANNEE 2004 N°129 THESE pour l’obtention du DIPLOME D’ETAT de DOCTEUR EN MEDECINE QUALIFICATION EN MEDECINE GENERALE Présentée et soutenue publiquement le 7 octobre 2004 Par Séverine COGNET-ASPECT ANALYSE DE L’ADEQUATION ENTRE L’INFORMATION DELIVREE PAR LE MEDECIN GENERALISTE ET LES ATTENTES DE SES PATIENTS Travail dirigé par le Docteur Pascal ROGER JURY Monsieur le Pr. GAY Madame le Pr. GROMB Monsieur le Pr. AMOURETTI Monsieur le Pr. JANVIER Monsieur le Pr. PELLEGRIN Madame le Dr. MAURICE-TISON Monsieur le Dr. DUROUX Président Rapporteur Juge Juge Juge Juge Juge Remerciements A Monsieur le Docteur Pascal ROGER, médecin généraliste, correspondant ANAES. Il a dirigé et soutenu cette thèse. Son accompagnement précieux et constant, ses remarques pertinentes et rassurantes m’ont permis de mener ce travail à bien. Son souci de faire partager son expérience professionnelle, m’a permis de faire de la fin de mon internat une période de véritable compagnonnage auprès d’un modèle de rigueur et d’humanité. Je le remercie pour sa confiance amicale. 1 A Monsieur le Professeur Bernard GAY, médecin généraliste, Professeur associé de médecine générale, Président délégué du Collège National des Généralistes Enseignants. Il m’a fait l’honneur d’accepter la présidence de mon jury de thèse. Il m’a encouragée à entreprendre ce travail. Ses remarques m’ont été d’une grande aide. Qu’il soit assuré de ma gratitude et de mon profond respect. 2 A Madame le Professeur Sophie GROMB, Professeur des universités, Chef du service de Médecine Légale au CHU de Bordeaux. Elle m’a fait l’honneur d’accepter de juger ce travail. Qu’elle soit assurée de ma gratitude et de mon profond respect. 3 A Monsieur le Professeur Michel AMOURETTI, Professeur d’hépato-gastro-entérologie, Praticien Hospitalier, Hôpital Haut-Lévêque, Pessac ; Officier des Palmes académiques. Il m’a fait l’honneur d’accepter de juger ce travail. Qu’il soit assuré de ma gratitude et de mon profond respect. 4 A Monsieur le Professeur Gérard JANVIER, Professeur d’anesthésie réanimation, Chef du service d’anesthésie réanimation chirurgicale, Hôpital Haut-Lévêque, Pessac. Il m’a fait l’honneur d’accepter de juger ce travail. Qu’il soit assuré de ma gratitude et de mon profond respect. 5 A Monsieur le Professeur Jean-Luc PELLEGRIN, Professeur de médecine interne, Praticien Hospitalier, Hôpital Haut-Lévêque, Pessac. Il m’a fait l’honneur d’accepter de juger ce travail. Q’il soit assuré de ma gratitude et de mon profond respect. 6 A Madame le Docteur Sylvie MAURICE-TISON, Maître de Conférence des universités, Praticien Hospitalier, Directrice adjointe de l’ISPED. Elle a accepté de juger ce travail. Je la remercie pour son aide précieuse concernant l’étude épidémiologique de cette étude. Mais également pour sa chaleureuse disponibilité, la richesse de ses remarques et la spontanéité de nos entretiens. 7 A Monsieur le Docteur Gérard DUROUX, médecin généraliste, Maître de Conférence à l’université Bordeaux 2, membre correspondant ANAES. Je le remercie de m’avoir éclairée sur les aspects relationnels de la médecine générale grâce à la richesse de ses enseignements à la faculté. 8 Aux Docteurs Bernard, Gaceus, Janvier, Roger, Rupp et à Madame Poyer, du Cabinet Médical de La Souys à Floirac, Aux Docteurs Déjean, et Vandersnickt, du Cabinet Médical à Artigues, Aux Professeur Gay et Docteur Dervaux, du Cabinet Médical à Rions, Qui m’ont permis de recueillir les questionnaires des patients. Je les remercie pour la confiance qu’ils m’ont accordée. Aux médecins correspondants régionaux de l’ANAES, qui ont bien voulu répondre à cette enquête. Je les remercie pour leurs commentaires, et leurs encouragements chaleureux. Aux patients qui ont pris le temps de répondre à cette enquête, et d’une manière générale, à tous les patients qui ont bien voulu me communiquer leurs témoignages, pour leur sincérité, et l’émotion qu’ils ont souhaité me faire partager. A mes amis, qui ont participé à l’élaboration des questionnaires à l’occasion de soirées animées par de vives discussions. A Delphine, pour sa précieuse relecture. 9 Au Professeur Marc TARDIEU, Chef du service de Neuro-Pédiatrie au CHU de KremlinBicêtre, dont l’enseignement a marqué mes études par sa richesse en matière de communication et d’humanité. Au Docteur Pierre TAPIE, médecin de ma famille, qui m’a donné l’envie de faire le premier pas vers la médecine. Le souvenir de sa pratique humaine en même temps que rigoureuse m’a guidée sur la voie de la médecine générale. Je le remercie de m’avoir encouragée à suivre ses pas, qui resteront pour moi un modèle. Au Docteur Serge GOTTOT, Maître de conférence des universités et Praticien hospitalier, service de santé publique, hôpital Robert Debré, Paris. Pour nos discussions enrichissantes, pour son enthousiasme, et pour son amicale disponibilité. Au Docteur Isabelle ROGER, Médecin à l’unité de sécurité transfusionnelle et d’hémovigilance du CHU de Bordeaux. Pour son aide bibliographique précieuse et ses remarques pertinentes. Au Docteur Maïlys MICHOT, pour ses conseils et ses vifs encouragements. Et pour son énergie pétillante et communicative. Au Docteur Jacques GARBAY, sociologue, pour son précieux éclairage lors de l’établissement des questionnaires et la mise en place des entretiens. Je le remercie pour la richesse et la chaleur Toulousaine de nos entretiens. A Elodie SAUBUSSE, statisticienne à l’ISPED, pour son aide concernant l’aspect épidémiologique de ce travail. 10 A Laurent, pour son aide indispensable dans l’élaboration et l’analyse des questionnaires, pour ses remarques judicieuses, pour sa disponibilité. Pour sa patience, et ses encouragements à faire aboutir ce qui a été commencé. Pour notre complicité. Et pour tout le reste. A Oriane et Lisa, pour leur patience enfantine. A Annie et Alain ASPECT, mes parents, pour leur confiance inconditionnelle. Pour avoir su me laisser chercher ma route, et m’y soutenir. A Madeleine SALES et Denise ASPECT, ainsi qu’à Maïté ASPECT, pour la richesse de leur enseignement et leur affection. A Marguerite et Gaston BEUHORRY-SASSUS, pour leur générosité et l’intérêt qu’ils ont toujours su porter à mon avenir. A Raoul SALES et Alexandre ASPECT, qui n’ont jamais cessé de m’accompagner. A Laurent et Heidrun ASPECT, pour l’intérêt qu’ils portent à mes efforts ; Maximilian, Leopold et Constantin, pour leur enfantine affection. A Marie-Raymonde HITIER, pour nos vives discussions, pour ses témoignages, pour sa chaleur et sa spontanéité. A Georges COGNET, ainsi qu’à Andrée, pour leur écoute, et l’intérêt porté à mon travail. A Anne COGNET, A Christophe COGNET et Hélène HENDERSON, Alice et Emilie, Pour leur accompagnement amical. Et à ma famille. A Karen, pour sa fraternelle amitié. Et à mes amis. 11 « Savoir, faire, savoir faire, faire savoir … » Talleyrand 12 Sommaire Introduction........................................................................................................................15 1 Contexte de l’étude .....................................................................................................17 1.1 Bases historiques concernant l’information des patients .........................................17 1.2 Evolution juridique récente : rappel comparatif de la loi et du code de déontologie médicale ................................................................................................................19 1.2.1 Qui doit informer ?........................................................................................20 1.2.2 Qui doit être informé ? ..................................................................................20 1.2.3 De quoi doit-on informer ? ............................................................................21 1.2.4 Quelles sont les limites de l’obligation d’information ? .................................21 1.2.5 Dans quel but doit-on informer ? ...................................................................22 1.2.6 Comment apporter la preuve de l’information ?.............................................22 1.2.7 Généralisation aux diverses professions de santé. ..........................................23 1.3 Problématique actuelle : réflexions au sein de la communauté médicale.................24 1.3.1 Pourquoi informer ? Réflexion éthique. .........................................................24 1.3.2 Quels moyens sont nécessaires ? ...................................................................26 1.3.3 Comment informer ? .....................................................................................26 1.3.4 Différentes façons de s’informer....................................................................29 1.3.5 De quoi doit-on informer ? ............................................................................29 1.3.6 L’écoute........................................................................................................31 1.3.7 La mise en œ uvre des recommandations........................................................31 2 Enquêtes auprès d’une population de patients..........................................................33 2.1 Objectifs ................................................................................................................33 2.2 Population cible de l’étude.....................................................................................33 2.3 Mode de recueil des données..................................................................................33 2.3.1 Enquête par questionnaires ............................................................................33 2.3.2 Enquête par entretiens ...................................................................................34 2.4 Traitement des données..........................................................................................35 2.5 Résultats de l’étude par questionnaires auprès des patients.....................................36 2.5.1 Caractéristiques sociodémographiques de la population répondante ..............36 2.5.2 Fréquentation des professionnels de santé .....................................................37 2.5.3 Questions 1 et 2 : Connaissance de la loi .......................................................39 2.5.4 Questions 3 à 6 : Comment les patients se renseignaient en matière de santé .40 2.5.5 Questions 7 à 14 : Etat des lieux : satisfaction des patients concernant l’information apportée par leur médecin ........................................................41 2.5.6 Questions 15 à 21 : A quel point les patients souhaitaient être informés et être acteurs de leur santé ......................................................................................44 2.5.7 Questions 22 à 25 : Modalités de l’information souhaitée ..............................46 2.5.8 Questions 26 à 29 : Influence de l’information sur l’observance ....................48 2.5.9 Question 31 : Synthèse des commentaires libres ............................................50 2.5.10 Influence de l’âge sur les réponses des patients .............................................51 2.5.11 Influence du sexe des patients sur les réponses ..............................................51 2.5.12 Influence de l’expérience de l’hospitalisation sur les réponses des patients....52 13 2.5.13 Influence de l’expérience de la maladie grave sur les réponses des patients ...53 2.6 Résultats de l’enquête par entretiens avec des patients ...........................................54 2.7 Synthèse des résultats (questionnaire et entretiens).................................................57 2.7.1 Les patients souhaitaient être informés ..........................................................57 2.7.2 Ils ont ressenti une évolution .........................................................................58 2.7.3 Pour quelles raisons les patients souhaitaient être informés ...........................58 2.7.4 Sur quel type d’information il est apparu essentiel d’insister .........................60 2.7.5 Comment les patients souhaitaient que l’information leur soit délivrée : modalités de la délivrance de l’information ...................................................60 2.7.6 Quels obstacles se sont dégagés pour une bonne information.........................62 2.7.7 Les patients étaient plutôt satisfaits................................................................63 3 Enquêtes auprès d’une population de médecins........................................................64 3.1 Objectifs ................................................................................................................64 3.2 Population cible de l’étude.....................................................................................64 3.3 Mode de recueil des données..................................................................................65 3.3.1 Recueil de données au cours des séminaires de l’ANAES sur le thème de l’information aux patients..............................................................................65 3.3.2 Enquête par questionnaires ............................................................................65 3.4 Traitement des données..........................................................................................65 3.5 Résultats de l’étude par la participation aux séminaires de l’ANAES .....................65 3.6 Résultats de l’enquête par des questionnaires auprès de médecins ..........................69 3.7 Synthèse des résultats ............................................................................................71 4 Discussion....................................................................................................................74 4.1 Concernant la méthodologie. Biais de sélection......................................................74 4.2 Adéquation entre l’information délivrée par le médecin généraliste et les attentes de ses patients.............................................................................................................74 4.2.1 Les patients souhaitent être informés, en particulier par leur médecin généraliste .....................................................................................................75 4.2.2 Informer pour une meilleure prise en charge au quotidien..............................76 4.2.3 Obstacles à la délivrance de l’information .....................................................78 4.2.4 Modalités de la délivrance de l’information...................................................79 5 Perspectives d’application..........................................................................................80 Conclusion ..........................................................................................................................82 Annexes...............................................................................................................................83 A. Calendrier de réalisation ........................................................................................83 B. Questionnaire aux patients .....................................................................................84 C. Questionnaire aux médecins...................................................................................90 D. Tableaux des données et des tests réalisés sur le questionnaire aux patients............92 1. Influence de l’âge sur les réponses des patients. ............................................93 2. Influence du sexe sur les réponses des patients. .............................................96 3. Influence de l’expérience de l’hospitalisation sur les réponses des patients....98 4. Influence de l’expérience des maladies graves sur les réponses des patients. .99 E. Table des abréviations..........................................................................................100 F. Bibliographie .......................................................................................................101 14 Introduction La relation entre les médecins et les patients siège au cœ ur de la pratique de la médecine, qu’elle soit générale ou de spécialité. Elle a constamment évolué au cours des siècles, mais connaît aujourd’hui une profonde mutation. Ce qui apparaît à l’heure actuelle fondamental, c’est son évolution vers un plus grand partage de l’information ; cela consiste pour une part non négligeable en un transfert de connaissance, depuis un praticien qui détient des données acquises au cours de ses études et de ses expériences, envers un patient dont les acquis en matière de médecine sont très variés : cette discipline a ceci de particulier, que le savoir et la perception d’une personne sur son corps, sa physiologie, les pathologies et les traitements est extrêmement variable d’un sujet à l’autre. La maladie est avant tout une difficulté, plus ou moins surmontable, dans la vie d’un individu. L’objectif fondamental du médecin est d’atténuer voire de supprimer ce mal-être. Mais cela ne peut se faire qu’avec la participation du patient, pour plusieurs raisons. La première est une raison éthique : le choix de notre société, est celui de vivre dans un monde plus démocratique, où l’on respecte le droit des individus à choisir leur propre « bien », sachant qu’il est impossible, en tant que médecin, d’accéder à la perception du mal tel que l’éprouve le soigné ; aucune compétence particulière des médecins ne peut justifier qu’ils prennent seuls des décisions. La seconde raison est le souci d’efficacité du médecin, qui, en octroyant au patient une plus grande maîtrise sur sa vie, lui permet de mieux affronter les difficultés de sa maladie et de sa thérapeutique. La médecine du vingtième siècle est marquée par un considérable progrès dans les connaissances médicales et une meilleure information sur ces progrès grâce au développement des moyens de communication. Mais également, par des drames sériels comme celui du sang contaminé, avec une remise en question de la toute-puissance médicale, et un souci accru de responsabilisation des partenaires impliqués dans un projet thérapeutique. Cette dimension dans la qualité des soins revêt depuis peu un caractère juridique très présent dans l’esprit des praticiens. Par la loi du 4 mars 2002, le législateur consacre la notion de démocratie sanitaire, en établissant l’obligation pour le médecin de « respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix » (art. L.1111-4). Mais au-delà de cette démocratisation des connaissances et de sa nécessité éthique et juridique, nous nous sommes interrogés sur les réelles attentes des patients. Nous avons 15 souhaité proposer des éléments permettant une meilleure prise en charge des patients par les médecins dans le cadre de cette nouvelle loi, en fournissant à ces derniers des pistes de réflexion et des outils d’aide à la délivrance de l’information. Pour cela nous proposerons, dans une première partie, un état des lieux sur l’information aux patients en médecine générale. Nous présenterons dans une seconde partie une enquête réalisée auprès de patients dans des cabinets médicaux des environs de Bordeaux, menée sous forme de questionnaires écrits et d’entretiens. Dans une troisième partie nous exposerons les résultats d’une enquête réalisée auprès de médecins. Notre réflexion s’est aussi nourrie de la participation au groupe de travail chargé d’élaborer les recommandations ANAES sur le thème de l’information. Le calendrier de nos travaux figure en annexe. Tous ces témoignages, recueillis sur le terrain, dans un cadre réel et quotidien, nous ont permis d’élaborer une réflexion approfondie sur l’évolution de l’information en médecine, contemporaine des mutations de notre société. 16 1 Contexte de l’étude 1.1 Bases historiques concernant l’information des patients Le médecin a toujours lutté contre les dérèglements naturels de l’organisme, pendant longtemps au travers de la magie et de la religion, puis à l’encontre de celles-ci. Déjà au cinquième siècle av.J.-C., en Grèce, les médecins laïques contestaient la médecine des Asclépiades, secte de prêtres médecins, en fondant leur médecine sur le raisonnement et la philosophie. Telle était la médecine recherchée par Hippocrate. Cependant la médecine n’a commencé à faire de réels progrès qu’au 16ème siècle avec la naissance de la démarche scientifique. On commença à examiner l’organisme malade, puis, au 19ème siècle, à le confronter avec les données biologiques et les connaissances acquises de l’expérience. C’est par exemple au 19ème siècle que l’on s’est aperçu de l’importance du mode de vie par rapport à la santé. La lutte contre les maladies infectieuses fut alors fondée sur l’hygiène, enseignée par les médecins et les instituteurs. Jusqu’au 19ème siècle la médecine n’avait aucune influence sur la durée de vie. Elle avait alors deux rôles : celui de tenter d’expliquer, prédire le destin des personnes, et celui d’accompagner le malade et lutter contre sa solitude. Sa fonction était essentiellement psychologique, d’écoute, de compassion. Puis la connaissance médicale a connu un formidable essor, et avec elle les moyens de soigner et de guérir. Et pourtant, la défiance à l’encontre des médecins semble n’avoir jamais été si importante qu’aujourd’hui 1. Avec le progrès des possibilités thérapeutiques, le médecin s’est focalisé, au 20ème siècle, sur la lutte contre la maladie avec le concours de la science. Les progrès de la biologie ont considérablement développé nos moyens diagnostiques et thérapeutiques. L’aspect psychologique de la santé a été relégué au second plan. Mais d’une part, le médecin se trouve souvent démuni face à des maladies dont on ne connaît pas encore de traitement curatif, et il doit alors assumer un rôle d’accompagnant ; d’autre part, l’angoisse générée par l’interrogation sur notre civilisation met en avant les problèmes de société : les médecins sont de plus en plus interrogés sur des troubles psychologiques mineurs, des modes de vie, des problèmes sanitaires. On assiste donc de manière flagrante à un sévère déséquilibre de la balance entre connaissances scientifiques, préalable certes indispensable à des soins de qualité, et l’insuffisante prise en compte de l’aspect psychologique de la personne, condition pourtant essentielle de son bien-être. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) définit d’ailleurs la santé comme « un état de parfait bien-être physique, mental et social » et non 17 simplement comme l’absence de maladie. Pour cela, il est nécessaire d’accorder un soin particulier à la relation entre médecins et patients et à leur communication. Il a toujours existé des partisans de la transmission de l’information et de la franchise entre médecins et patients. Platon parlait déjà de la fonction de communication des médecins. Dans Les Lois, il décrivit les deux classes de médecins, le médecin esclave qui soignait les esclaves sans jamais leur donner « d’explication sur la maladie dont ils souffrent », et le médecin de condition libre pour qui le dialogue était présenté comme habituel : « après avoir procédé à un examen du mal(… )il entre en conversation, tant avec le patient lui-même qu’avec ses amis ; ainsi, en même temps que du malade il apprend personnellement les choses, en même temps aussi, dans toute la mesure où il le peut, il instruit à son tour celui qui est en mauvaise santé ; bien plus, il n’aura rien prescrit avant qu’il n’ait de quelque façon gagné sa confiance. » C’est chez les Hébreux qu’a été retrouvée la première référence au consentement du malade dans le Talmud (3ème siècle) : « le médecin ne peut exécuter aucune opération sans le consentement du malade ». La prière de Moïse Maimonide, médecin Juif de Cordoue au 12ème siècle, faisait référence au devoir du médecin vis-à-vis de son patient, et également à la confiance accordée par celui-ci : « Fais que mes malades aient confiance en moi et en mon art, qu’ils suivent mes conseils et mes prescriptions ». Dans le même temps chez les Arabes, les malades étaient soignés selon les préceptes d’Hippocrate, où l’accent était mis sur l’interrogation des patients, et où, dans le cas où les conseils et prescriptions thérapeutiques n’étaient pas compris, le médecin devait se charger lui-même du traitement2. En France au 14ème siècle, Henri de Mondeville, chirurgien de Philippe le Bel, affirmait son souci d’adapter ses explications à chaque malade : « le moyen pour le chirurgien de se faire obéir de ses malades, c’est de leur exposer les dangers qui peuvent résulter pour eux de leur désobéissance. Il les exagérera si le patient a l’âme brave et dure ; il les adoucira et les atténuera ou les taira si le malade est si pusillanime ou bénin de crainte qu’il se désespère ». On voit dans tous ces exemples le souci que constituait l’observance pour le médecin. L’information se concevait dans un objectif pratique d’efficacité des traitements. Nous reviendrons sur cette notion, au cours de l’analyse des témoignages de nos patients. Au 16ème siècle, Montaigne abordait l’aspect philosophique de cette question, en insistant sur la dignité du sujet auquel il fallait reconnaître l’aptitude à se connaître lui-même mieux que ne saurait le faire son médecin, ainsi que se faire comprendre si on prenait le soin de l’écouter. 18 Au 17ème siècle, Samuel Sorbière affirmait les avantages de la sincérité, mais soulignait déjà les risques qu’elle comportait pour la pratique médicale et le peu d’écho qu’elle rencontrait auprès de ses confrères3. Et en effet ce n’est qu’à la Révolution française avec la déclaration des droits de l’homme, que commença à s’affirmer de manière forte la démarche éthique favorisant la liberté des personnes. On voit dans tous ces exemples, différentes motivations pour le médecin de communiquer avec son patient, depuis le souci d’être efficace et d’acquérir la confiance du malade, jusqu’à la nécessité philosophique et éthique de démocratisation de l’accès aux connaissances et de prises de décisions concernant la personne humaine. 1.2 Evolution juridique récente : rappel comparatif de la loi et du code de déontologie médicale L’exercice de la médecine a toujours été encadré par des règles d’humanisme. Les principes déontologiques qui régissent l’information existent donc depuis longtemps, puisqu’ils sont contenus dans la base même de la déontologie médicale. Les principes juridiques régissant le domaine de l’information du patient ont, quant à eux, été posés il y a environ soixante ans. Le 20 mai 1936, l’arrêt Mercier établit une relation contractuelle entre le patient et le médecin, obligeant ce dernier à donner des soins consciencieux, attentifs, et conformes aux données de la science. Dès 1942, la Cour Suprême fut conduite à préciser que le médecin devait prévenir son patient des aléas de son traitement, et également recueillir le consentement de celui-ci (arrêt Teyssier du 28 janvier 1942). La notion de consentement fut inscrite dans le code de déontologie médicale datant de 19474. Celui-ci indiquait que l’exercice de la médecine ne devait pas être autoritaire, et il insistait sur la liberté des malades. Il insistait également sur la nécessité d’une relation de confiance entre médecins et malades, dans la mesure où d’une part le malade se devait de donner tous les éléments utiles au médecin pour pouvoir le soigner, et où, d’autre part, ce dernier se devait de l’éclairer en retour sur sa maladie. Par une série de décisions ultérieures, la Cour de Cassation fut amenée à préciser la notion de soins consciencieux pour dégager une obligation de conscience recouvrant notamment la question de l’information et du consentement du patient. L’acte médical relève d’une atteinte au corps humain, qui n’est autorisée dans le cadre exceptionnel de la médecine que sous réserve de respecter deux conditions : la recherche d’une finalité thérapeutique, et le respect du consentement de la personne5. Ce principe est 19 explicité dans l’article 16-3 du code civil de 1994 : « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne. Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. » Se pose ensuite la question de la preuve de la délivrance de l’information et de l’obtention du consentement par le médecin. Dans un arrêt de principe de 1951, la Cour de Cassation avait estimé que cette preuve devait être apportée par le patient. La Cour de Cassation décida dans un arrêt très remarqué du 25 février 1997, que la charge de cette preuve appartiendrait désormais aux médecins. Le 4 mars 2002, la loi inscrivit en droit positif cette évolution jurisprudentielle. Les dispositions de cette loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé régissent dorénavant les relations des professionnels et des établissements de santé avec les personnes malades. Elles opèrent une unification des règles et leur énonciation est d’importance, de par leur dimension symbolique et leur portée pratique. 1.2.1 Qui doit informer ? Art. L1111-2 : « Le devoir d’informer incombe à tout professionnel de santé et concerne toutes les spécialités. » L’Art. 45 du code de déontologie précise que « Tout médecin doit, à la demande du patient ou avec son consentement, transmettre aux médecins qui participent à la prise en charge ou à ceux qu’il entend consulter, les informations et documents utiles à la continuité des soins. Il en va de même lorsque le patient porte son choix sur un autre médecin traitant. » L’Art. 64 précise que «Lorsque plusieurs médecins collaborent à l’examen ou au traitement d’un malade, ils doivent se tenir mutuellement informés ; chacun des praticiens assume ses responsabilités personnelles et veille à l’information du malade. » 1.2.2 Qui doit être informé ? C’est bien entendu le malade qui doit être informé et donner son consentement. Cependant, la loi du 4 mars 2002 autorise la consultation d’une « personne de confiance » : l’Art. L1111-6 donne la possibilité de désigner une « personne de confiance qui peut être un parent, un 20 proche ou un médecin traitant, et qui sera consultée au cas où le patient lui-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin. » 1.2.3 De quoi doit-on informer ? L’article 35 du code de déontologie médicale précise que : « Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information claire, loyale et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’on lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension. » Selon le nouvel article L1111-2 du code de la santé publique, « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. » : précision importante si on s’intéresse à l’historique judiciaire de ces dernières années, l’information doit également porter sur les risques des traitements et ceux de l’absence de traitement. Les autres solutions possibles doivent être mentionnées afin de permettre au patient de choisir parmi celles-ci. Un défaut d’information sur les autres solutions a déjà été sanctionné par les magistrats (Cour de Cassation, 3 Mars 1998, n°430D). 1.2.4 Quelles sont les limites de l’obligation d’information ? Un arrêt de la Cour de Cassation du 7 octobre 1998 rend possible la dérogation à l’obligation d’information en cas d’urgence, d’impossibilité ou de refus du patient d’être informé : « Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser. Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel. La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission. » Cet arrêt modifie considérablement les recommandations de l’article 35 du code de déontologie, qui stipule que « Dans l’intérêt des malades et pour des raisons légitimes que le praticien apprécie en conscience, un malade peut être tenu dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic graves, sauf dans le cas où l’affection dont il est atteint expose les tiers à 21 un risque de contamination. (… ) Un pronostic fatal ne doit être révélé qu’avec circonspection, mais les proches doivent en être prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement interdit cette révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit être faite. » L’article 36 du code de déontologie mentionne également que « Le consentement de la personne examinée doit être recherché dans tous les cas. Lorsque la personne malade, en état d’exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences. » 1.2.5 Dans quel but doit-on informer ? L’objectif est de fournir au patient toutes les informations nécessaires pour qu’il puisse prendre lui-même les décisions concernant sa santé. L’Art. L1111-4 est formel : « Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d’accepter les soins indispensables. Aucun acte médical, ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne. » Les médecins ne conservent donc pas le droit de passer outre un refus de soins clairement exprimé, même lorsque le pronostic vital est en jeu, comme la jurisprudence l’avait jusqu’alors décidé notamment pour les témoins de Jéhovah. (Cour administrative d’appel de Paris le 9 juin 1998 et Conseil d’Etat du 26 oct. 2001). 1.2.6 Comment apporter la preuve de l’information ? En cas de litige juridique, les experts étaient auparavant régulièrement interrogés sur le thème du consentement libre et éclairé, mais les décisions des juges étaient très variables. Plusieurs décisions de justice ont clarifié la situation juridique ces dernières années : arrêts de la Cour de Cassation (Civ. 1re, 25/2/1997, affaire Hédreul) en matière de pratique privée, de la Cour administrative d’appel de Paris (9/6/1998) puis du Conseil d’Etat (5/1/2000) en matière de pratique publique. Elles avaient en commun le renversement de la charge de la preuve : Art.1315 du code civil : « Celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation ». Ce renversement de la charge de la preuve a provoqué l’inquiétude et 22 l’interrogation de la part des professionnels de santé. En effet selon la loi du 4 mars 2002, d’une part, «L’information doit être délivrée au cours d’un entretien individuel », et d’autre part, « il appartient au professionnel ou à l’établissement de santé d’apporter la preuve que l’information a été délivrée ». Cette preuve peut être apportée par tout moyen (Cour de Cassation, 14 oct. 1997) : en particulier par un faisceau de présomptions suivant les circonstances de l’espèce (par exemple demande de prise en charge par le régime d’assurance maladie, Cour de Cassation, 3 mars 1998). Nous décrirons dans le chapitre 1.3 les difficultés qu’a soulevé le renversement de la charge de la preuve au sein des communautés médicale et juridique. 1.2.7 Généralisation aux diverses professions de santé. Le devoir d’information s’applique également aux professions paramédicales ; le décret du 16 février 1993, relatif aux règles professionnelles des infirmiers, stipule : « L’infirmier (e) informe le patient ou son représentant légal, à leur demande, et de façon adaptée, intelligible et loyale, des moyens ou des techniques mises en œuvre. Il en est de même des soins à propos desquels il donne tous les conseils utiles à leur bon déroulement. » En milieu hospitalier, le décret du 14 janvier 1974 énonce les règles d’information du malade, en rappelant son caractère obligatoire. L’article L.710-2 du code de la santé publique (loi du 31 juillet 1991) mentionne : « Dans le respect des règles déontologiques qui leur sont applicables, les praticiens des établissements assurent l’information des personnes soignées. Les personnels paramédicaux participent à cette information dans leur domaine de compétence et dans le respect de leurs propres règles professionnelles ». Le droit à l’accès au dossier médical résultant de l’Art. 6 bis de la loi du 17 juillet 1978, modifiée le 11 juillet 1979, était cependant limité par une précision : « Les informations à caractère médical ne peuvent être communiquées à l’intéressé que par l’intermédiaire d’un médecin qu’il désigne à cet effet. » Citons également deux articles du code de la santé publique qui réglementent les relations des pharmaciens avec leurs clients : Art. R. 5015-46 : « Ils doivent répondre avec circonspection aux demandes faites par les malades ou leurs préposés pour connaître la nature de la maladie traitée ou la valeur des moyens curatifs prescrits ou appliqués . » 23 Art. R. 5015-47 : « Ils doivent s’abstenir de formuler un diagnostic ou un pronostic sur la maladie au traitement de laquelle ils sont appelés à collaborer. Notamment, ils doivent éviter de commenter médicalement auprès des malades ou de leurs préposés les conclusions des analyses qui leur sont demandées. » 1.3 Problématique actuelle : réflexions au sein de la communauté médicale L’obligation éthique d’informer les patients, qui a évolué au cours des âges, s’est doublée en mars 2002 d’une obligation légale. Nous allons voir dans ce chapitre par quel cheminement la société est parvenue à la nécessité d’une telle loi, et nous rapporterons diverses réactions face à l’apparition de ces nouvelles obligations. Pour cela nous décrirons quelques publications extraites de revues médicales, qui traduisent une réflexion de la communauté médicale en France, et nous replacerons cette réflexion dans un contexte international. Ayant pu participer aux séminaires de l’ANAES (Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé) lors de l’élaboration des recommandations sur l’information au patient, nous en présenterons les réactions qui m’ont paru les plus significatives, dans le chapitre des résultats. . 1.3.1 Pourquoi informer ? Réflexion éthique. La réflexion éthique sur le devoir d’informer est complexe. D’abord, parce qu’elle sous-tend une réflexion sur l’immense pouvoir du médecin, celui d’améliorer la vie d’autrui. Ce pouvoir s’appuie en premier lieu sur une connaissance, sur la mise en pratique de celle-ci, mais également sur la réceptivité de la personne malade et son acceptation. Cette dernière notion est apparue récemment, s’inscrivant dans une évolution globale de l’organisation de notre société. Ensuite, cette réflexion éthique est complexe parce que la notion de « vérité » révélée au malade peut être perçue comme positive ou au contraire négative, en fonction des situations et des convictions personnelles des individus, même si l’évolution de ces dernières décennies a tendu à la considérer davantage comme un bienfait que comme une nuisance6,7,8. Le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) a établi en 1990 un rapport sur le thème « Ethique et connaissance », où a été souligné le fait que la vulnérabilité d’une personne malade ne devait pas constituer un argument pour lui dénier l’information à laquelle elle avait droit. Le rapport Evin a confirmé ce point de vue9. Dans son rapport de 1998 sur « le 24 consentement éclairé et l’information des personnes qui se prêtent à des actes de soins ou de recherche », le CCNE a mis au premier plan le respect des personnes, considérées comme « morales et autonomes ». D’une manière générale, le CCNE a plaidé pour une meilleure communication entre soignants et soignés qui, concrètement, conduirait à une gestion plus autonome des patients. Il a cependant mis en garde contre le danger d’une contractualisation médicale exagérée et ses dérives judiciaires. La relation de confiance entre le patient et le médecin, indispensable à l’efficacité des soins, en pâtirait. Mais également le sentiment de responsabilité du médecin, qui ne chercherait plus qu’à répondre aux obligations formelles de la loi pour se soustraire aux risques de poursuites. Bernard Kouchner exprima en 1993, à propos du drame du sang contaminé, son inquiétude par rapport à l’évolution trop brutale d’une médecine se basant d’abord sur une ignorance absolue déguisée par un langage ésotérique, puis sur « l’illusion d’un savoir absolu, toujours servi par un langage hermétique au patient ». Le choc provoqué par le drame du sang contaminé a remis en cause ce savoir, et Bernard Kouchner proposa, pour éviter que les patients ne tombent dans une méfiance systématique, une transparence et un souci permanent d’explications et d’informations. Une étude réalisée en France la même année, mit en évidence que 95% des personnes interrogées attendaient que leur médecin généraliste dise la vérité10. Une autre enquête réalisée en 1995 a montré que 60.1% des patients interrogés percevaient leur médecin généraliste comme un conseiller 11. Dufour-Gompers nota lui aussi que les patients recherchaient de plus en plus l’information12. La charte du patient hospitalisé a consacré son titre 3 à « l’information du patient et de ses proches », demandant que tout le personnel « participe à l’information, chacun dans son domaine de compétence, afin que le patient puisse participer pleinement aux choix qui le concernent, et à leur mise en œuvre quotidienne. » 9 Cependant, le « baromètre de satisfaction des patients » de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris réalisé en 1997 révéla que si l’information était le critère de qualité jugé le plus important par les malades, elle recueillait un indice de satisfaction faible : 14.6% des personnes interrogées déclaraient n’avoir reçu aucune explication sur leur état de santé ; 12.7% déclaraient n’avoir reçu aucune explication sur leur traitement ; 22.8% déclaraient n’avoir reçu aucune information sur les examens pratiqués13. 25 Compte tenu des moyens grandissants des patients de s’informer via les médias et Internet, les médecins doivent donc désormais tenir compte du fait qu’ils ne peuvent plus prendre le risque qu’une vérité pénible soit révélée autrement que par eux. 1.3.2 Quels moyens sont nécessaires ? Les éléments nécessaires à une bonne information sont tout d’abord la bonne connaissance de l’information à délivrer de la part du médecin. En effet, si la sincérité est une condition nécessaire dans la délivrance de l’information, elle n’est pas suffisante, et n’exclut pas la possibilité d’une erreur. Ainsi la médecine, autrefois très limitée dans les connaissances, autorisait les médecins à ne rien expliquer. Actuellement, alors que les connaissances ont connu un essor exceptionnel, les médecins doivent rendre des comptes sur celles-ci. Mais cet apprentissage (savoir restituer dans un contexte de vie des connaissances acquises dans un cadre professoral) n’était, jusqu’à une époque récente, pas inclus dans les études. Les conclusions du rapport de Toronto de 1991 recommandaient déjà, dans ce cadre, d’inclure une « formation à l’information » dans les études médicales. Cette lacune a été dénoncée par le professeur Glorion, ancien Président du Conseil national de l’Ordre des médecins. Un remaniement dans ce sens a donc été ébauché (arrêté du 10 Oct. 2000), la relation médecinmalade et en particulier l’annonce d’une maladie grave faisant maintenant l’objet d’un cours lors du 2ème cycle des études médicales14,15,16. Remarquons qu’il existe des études universitaires sur ce thème montrant un intérêt constant de la part de médecins en formation17,18,19, et que la relation médecin-malade fait l’objet d’une littérature ayant comme objectif d’aider les médecins généralistes dans leur exercice20,21,22,23. Par ailleurs, il convient de rappeler que ce sujet, qui entre dans le cadre plus général de la relation entre médecins et patients, est enseigné depuis de nombreuses années à l’étranger, comme par exemple chez nos confrères Hollandais. 1.3.3 Comment informer ? L’obligation d’information a donné lieu à une jurisprudence abondante et bien connue des praticiens, surtout depuis 1997 et le renversement de la charge de la preuve. Le thème de l’information était déjà récurrent, et les publications à ce sujet s’appuyaient sur le code de déontologie médicale et les différents arrêts de justice24,25,26,27,28. La loi du 4 Mars 2002 a fait l’objet d’analyses élaborées par des magistrats et professeurs d’université29,30,31. Les revues spécialisées ont alors proposé une relecture et une analyse des 26 événements jurisprudentiels de ces dernières années ainsi que de la nouvelle loi ; les auteurs se sont interrogés sur la genèse de telles lois en faisant appel à des spécialistes en droit, et ont explicité en pratique les modalités de l’information à apporter : qui doit être informé, par qui, de quoi et comment 32,33,34,35,36,37,38,39,40. Des laboratoires pharmaceutiques eux-mêmes ont effectué des recherches sur ce thème, afin de proposer aux médecins des brochures pratiques sur ce sujet41,42. C’est sur la manière d’apporter l’information, que la presse grand public43,44,45 et la presse médicalisée ont été schématiquement marquées par deux tendances. Certaines se sont focalisées sur l’aspect jurisprudentiel, portant tous leurs efforts sur la recherche de la meilleure protection juridique pour le médecin. D’autres, au contraire, ont utilisé ce contexte actuel pour rebondir sur des considérations concernant l’évolution des relations entre les médecins et leurs patients, et sur la recherche de l’amélioration de celles-ci. 1.3.3.1 L’attitude défensive Cette obligation d’information a généré une difficulté incontournable concernant la preuve de l’information donnée, de sa véracité et de son étendue. Dans de nombreuses revues médicales, la recherche de la meilleure preuve de l’information délivrée a occupé une place importante, avec, au cœ ur de la discussion, les effets redoutés de cette « dérive à l’américaine » sur la relation soigné-soignant46. Le monde juridique s’est, lui aussi, intéressé avec une certaine inquiétude à cette réforme du système de santé. Reconnaissant l’intérêt de la transparence dans les rapports patient-médecin, certains ont cependant mis en avant les effets pernicieux d’une telle loi sur ces rapports, avec un risque de défiance de la part des deux parties30. De nombreuses associations médicales (syndicats ou sociétés) ont recommandé à leurs membres l’usage de formulaires détaillant les complications des interventions, qui devaient être signés par le patient. Le Sou Médical a ainsi suggéré un modèle d’attestation à faire signer par le malade, sous la forme suivante : « Je reconnais que la nature de l’examen (ou de l’intervention) ainsi que ses risques et avantages m’ont été expliqués en termes que j’ai compris et que le médecin a répondu, de façon satisfaisante, à toutes les questions que j’ai posées. ». En effet, l’information doit avoir été apportée au cours d’un entretien, et le praticien doit, de plus, s’être assuré que l’information a bien été comprise. En cas de difficulté, les juridictions se réservent le pouvoir de contrôler la qualité de l’information donnée. Cet usage de formulaires n’a cependant pas été validé par la législation ni par la Cour de Cassation 27 (hormis dans le cas de la recherche biomédicale, où le consentement est donné par écrit47), ni par le ministère de la santé, la preuve pouvant être apportée par tout autre moyen. Allant dans le même sens, le Conseil national de l’Ordre des médecins, et les compagnies d’assurance n’ont pas exigé la signature de tels documents48,49. Le CCNE a, en revanche, insisté sur l’importance du contenu du dossier, élément de poids en cas de litige : « faire signer un formulaire de consentement n’est pas dans les habitudes de la France, sauf cas spéciaux (dictés par la loi). Vu l’évolution de la jurisprudence, il est cependant recommandé de ne pas négliger de noter dans le dossier médical quelle information a été donnée, quand, et comment elle a été reçue. ». Par ailleurs, dans ses conclusions de Mars 2000, l’ANAES a insisté sur la primauté de l’information orale, même s’il est important d’en garder une trace dans le dossier médical. « La fonction du document d’information est exclusivement de donner des renseignements par écrit ( … ) Ce document n’a pas vocation à recevoir la signature du patient. De ce fait, il ne doit être assorti d’aucune formule obligeant le patient à y apposer sa signature. »50. On comprend par ailleurs que même un document signé ne peut pas constituer une décharge de responsabilité, l’information du patient ne couvrant que le problème du défaut d’information. En effet, si le risque évoqué se produit effectivement, une plainte peut quand même aboutir. Pour finir, il semble que la remise d’un tel document puisse être de nature à nuire à la relation entre le patient et le médecin, qui doit avant tout être une relation de confiance. 1.3.3.2 La réglementation comme prétexte à réflexion Une seconde attitude a consisté, au contraire, à voir dans ces décisions de justice, puis dans la nouvelle loi du 4 mars 2002, l’expression d’une évolution sociale. De nombreuses publications ont donc porté sur l’analyse de l’évolution de la relation médecin-patient, avec pour objectif de l’adapter à la demande du public, répondant du même coup à deux préoccupations des médecins : se prémunir contre une tendance procédurière, la qualité de la relation établie étant plus efficace que des papiers signés, et surtout, améliorer la qualité des soins, l’information étant alors considérée comme partie intégrante du bien-être psychologique du malade51,52. Cette recherche d’un meilleur confort psychologique pour les patients a donné lieu à de nombreux séminaires regroupant médecins, juristes et politiques, ainsi que patients53,54,55,56,57,58. 28 Par ailleurs, la loi du 4 Mars 2002 a clarifié le mode d’indemnisation des victimes d’accidents médicaux non fautifs, introduisant un dispositif d’indemnisation fondé sur la solidarité nationale5. Cependant il serait trop schématique de croire qu’une loi dans ce domaine puisse résoudre toutes les difficultés. La méfiance des soignants à l’égard de lois trop rigides, puise son origine dans leur expérience d’une inévitable complexité des relations entre soignants et soignés, et les incite à adopter des attitudes prudentes. « Ainsi, le soignant avance-t-il sur une ligne de crête étroite, en évitant deux écueils : d’un côté l’habitude, qui peut être faite de fausses certitudes. De l’autre, le dogmatisme qui, trop rigide, fait passer à côté des choses. »59. 1.3.4 Différentes façons de s’informer. La littérature a fait état des différentes façons de s’informer, via les médias ou les sites Internet. Les technologies de l’information ont, de fait, atténué la dépendance des patients visà-vis des professionnels de santé. En particulier, l’ouverture au public de la base de données médicales Med-line a vu le nombre de connexions à ce site augmenter considérablement. Une étude aux Etats-Unis a montré que 70% des internautes fréquentaient régulièrement les sitessanté60,61. En France, le bulletin de l’Ordre national des médecins de mars 1998 a montré que 61% des médecins trouvaient leurs patients de plus en plus informés. Cependant, la qualité des informations diffusées est restée inégale 62,63,64. 1.3.5 De quoi doit-on informer ? L’objectif est de faire connaître au patient le rapport bénéfice sur risque des soins proposés. Pour cela, les médecins doivent informer sur les effets bénéfiques des traitements avant d’en aborder les risques, et donner une idée de la fréquence de ceux-ci 65. Pour les aider dans cette démarche, des recommandations de pratique professionnelle leur fournissent une base de réflexion ; l’existence de formulaires rédigés par des sociétés savantes permet, dans ce cadre, de procurer aux patients une base de discussion, avec une information homogénéisée sur de nombreux établissements. Cela, pour rappeler que l’aléa médical relève d’une incertitude liée à la médecine et non pas au médecin. Cependant, en pratique, le médecin peut être rendu 29 responsable de l’aléa par le biais du manquement à l’obligation d’information. On constate donc une tendance à convertir l’obligation de moyens en obligation de résultats66. Par ailleurs, concernant la nécessité d’informer, les lois laissent libre de ne pas savoir, celui qui le souhaite. Le CCNE insiste sur ce point : « chacun est libre de ne pas vouloir savoir. Le souhait de ne pas être informé doit être respecté ». Il recommande également la prudence dans la manière d’informer, en rappelant, entre autres, les limites de la valeur d’un pronostic : « Tout pronostic étant incertain (probabiliste), la prudence se doit d’être à la fois conforme à la science et à la sagesse médicale traditionnelle »67,68,69,70,71,72. Dans le domaine de l’oncologie le problème de vérité se pose fréquemment aux médecins2. Dans les années soixante, environ 90% des médecins interrogés préféraient, en cas de cancer, ne pas en informer le malade73. Des ouvrages ont même été publiés en vue de recommander le mensonge74. Ceci, d’une part en raison de la sous-estimation du nombre de patients souhaitant connaître la vérité75,76, et, d’autre part, par la conviction ancrée que la connaissance de la vérité entraînait le plus souvent chez les patients des effets néfastes, même si des études ont montré que la franchise entraînait très rarement le désespoir des patients77,78. D’autres études ont même démontré que l’anxiété diminuait nettement au moment du traitement quand les patients avaient reçu une information exhaustive79, et qu’une information claire et loyale les rassurait80. Encore actuellement, les spécialistes évoquent le problème de l’information en oncologie81. Les anesthésistes décrivent leurs difficultés dans la prise en charge de la douleur chez des patients dans l’ignorance du diagnostic82. Il semblerait intéressant de développer des guides de pratique83,84 ou des accès personnalisés par informatique85, ou encore des enregistrements de consultations86, facilitant la démarche d’annonce du diagnostic et du pronostic ainsi que la compréhension de la pathologie par le patient. Ce thème est largement évoqué dans la presse grand public87. En effet, cette difficulté à envisager l’annonce du diagnostic entraîne bien souvent une annonce maladroite et brutale88. Notons également les difficultés propres à la maladie du SIDA, évoquées par Emmanuel Hirsch89,90. Il existe également des difficultés spécifiques au domaine de la pédiatrie. De nombreux ouvrages traitent de l’annonce des diagnostics aux parents d’enfants malades 91,92,93. Il convient ici d’évoquer une autre difficulté dans le cadre de l’information à des patients mineurs : celle de la confidentialité, et de l’information à l’entourage, la loi de mars 2002 30 ayant dans ce domaine partiellement comblé un vide juridique jusqu’alors préjudiciable à la relation de confiance entre jeunes patients et médecins94,95. De manière plus générale, le Journal of American Medical Association propose un modèle de conseils pratiques concernant le déroulement de la consultation, à proposer aux patients, dans lequel il leur est demandé de s’assurer qu’ils ont bien compris les recommandations du médecin 96. 1.3.6 L’écoute. De nombreuses études mettent en avant le fait que le problème de communication ne concerne pas seulement la manière d’informer, mais aussi la façon dont les médecins perçoivent l’attente de leurs patients. La demande de l’écoute apparaît comme un leitmotiv de la part des patients80,97,98,99,100. Or, les attentes des patients semblent bien souvent ignorées par le praticien101, et les deux parties n’ont pas la même perception des informations transmises, leur implication n’étant pas la même102,103. Dans l’éditorial publié en 2003 par EvidenceBased Medicine Journal 104, les auteurs proposent un modèle de décision clinique où les préférences et actions des patients seraient placées sur le même plan que les circonstances cliniques et les meilleures données scientifiques. Ce modèle consiste à replacer le patient et ses choix au centre des décisions thérapeutiques, et pour ce faire, privilégie l’écoute de son patient de la part du médecin. 1.3.7 La mise en œ uvre des recommandations. L’ANAES a la charge de diffuser les recommandations de bonnes pratiques médicales. Les faire admettre et les faire pratiquer par généralistes et spécialistes se révèle difficile105. Pour expliquer le niveau important de réticence des médecins 106, sont invoqués la lenteur des changements d’habitude, la faisabilité, le fond, l’interprétation107. La difficulté pratique de tenue et de mise à jour du dossier médical, avec comme facteur essentiel celui du manque de temps, est mise en avant par l’ANAES. La question des données absentes du dossier, des mises à jour, et de la conservation des informations médicales, non prévue par la loi du 4 mars 2002, pose également un problème pratique37. L’objectif concret de la communication de l’information est d’optimiser la prise en charge des patients, en leur permettant de participer aux décisions concernant leur santé. Cette 31 participation effective des soignés, a fait l’objet d’études108,109. Dans le domaine de la transfusion sanguine en particulier, la nécessité du recueil du consentement éclairé, dans un contexte où chacun a encore à l’esprit le drame du sang contaminé, pose le problème du niveau d’information donnée au malade110. 32 2 Enquêtes auprès d’une population de patients 2.1 Objectifs Nous avons réalisé une enquête auprès de patients afin de : • Déterminer de quelle manière ils se renseignent en matière de santé. • Evaluer leur satisfaction vis-à-vis de l’information apportée par leur médecin généraliste. • Savoir jusqu’à quel point et de quelle manière ils souhaitent être informés. • Comprendre les raisons qui les amènent à souhaiter une bonne information. • Evaluer en quoi une bonne information améliore la qualité des soins, en particulier en influant sur l’observance. 2.2 Population cible de l’étude Notre population cible était la clientèle de cabinets médicaux de la région Aquitaine : • Un cabinet de groupe de cinq médecins, en zone urbaine. • Un cabinet de groupe de trois médecins, en zone semi urbaine. • Un cabinet de deux médecins, en zone rurale. 2.3 Mode de recueil des données 2.3.1 Enquête par questionnaires Des questionnaires ont été déposés dans les salles d’attente, et parfois distribués par les secrétaires, dans trois cabinets médicaux de la région Aquitaine, pendant une période de 3 mois. Tous les questionnaires recueillis ont été inclus dans l’étude. Les patients avaient la possibilité de remplir le questionnaire pendant leur attente, ou de le rapporter ultérieurement au cabinet. Afin de préserver leur anonymat, ils remettaient le questionnaire dans une boîte fermée. 33 Les questionnaires avaient été testés au préalable auprès de 20 personnes d’âges, sexes et origines socioculturelles différents. Le questionnaire final utilisé figure dans l’annexe B. Le questionnaire était constitué de cinq pages, comportant : • 11 questions permettant d’établir la « fiche d’identité » du patient : il s’agissait de connaître les caractéristiques sociodémographiques du patient : âge, sexe, profession, lieu d’habitation, les personnes vivant sous le même toit ; et fréquentation des professionnels de santé : sédentarité médicale, fréquence des visites au cabinet, nombre d’hospitalisations, état de santé (antécédents de maladie grave et état de guérison). • 30 questions spécifiques à l’étude. • Il se terminait par la possibilité d’un commentaire libre. Les variables étudiées exploraient : • La façon dont les patients se renseignaient en matière de santé. • La connaissance des lois concernant l’obligation d’information. • La satisfaction des patients concernant l’information apportée par leur médecin. • A quel point les patients souhaitaient être informés et souhaitaient être acteurs de leur santé. • Les modalités de l’information souhaitée. • L’influence de l’information sur l’observance. • Les raisons qu’avaient les patients de souhaiter une bonne information. 2.3.2 Enquête par entretiens L’objectif de ces entretiens était de compléter l’analyse quantitative des questionnaires par une étude plus qualitative de la perception de l’information par les patients. Pour cela, nous avons réalisé des entretiens semi directifs. Une note sur l’affiche dans les salles d’attente informait les patients de notre souhait de réaliser ces entretiens. Il était demandé aux personnes intéressées de nous contacter elles-mêmes. La durée de l’entretien était d’environ 34 une heure. Le guide d’entretien avait été testé au préalable auprès de personnes de notre entourage (liste des thèmes devant être abordés, cf. 3.4.2, variables étudiées). Pour cela, nous nous sommes appuyés sur la lecture d’un ouvrage de sociologie111. Cela a permis de dégager plusieurs pistes de réflexion, au travers de divers témoignages. D’une part, des points de vue de patients ayant des pathologies lourdes ont été recueillis. Pour certains d’entre eux, la pathologie était une préoccupation quotidienne, avec persistance d’un handicap lourd ; d’autres patients ayant été confrontés à une maladie sévère ont fait part de leur réflexion après une guérison. Parmi eux, certains ont semblé être à la recherche d’une écoute, d’une oreille bienveillante, avec parfois un besoin d’exprimer un ressenti à l’égard d’une expérience qui ne les a, humainement, pas pleinement satisfaits. D’autre part, des points de vue de patients ayant été personnellement très peu confrontés à la maladie ont été recueillis, avec parfois l’existence de proches ayant été gravement malades. Des patients, soignants de profession, ont également fait part de leur point de vue, l’entretien ayant alors été enrichi par la double approche de soignant et de soigné. Nous avons choisi de mentionner les éléments les plus fréquemment évoqués par les patients, en reprenant l’ordre du questionnaire ; et de rapporter quelques propos caractéristiques parmi les entretiens menés. 2.4 Traitement des données Les questionnaires, établis sous Excel, ont été analysés sous ce même logiciel et contrôlés sous Epi-Info. Les résultats seront exprimés en pourcentages des 214 questionnaires recueillis. Nous préciserons pour chaque question, le taux de non réponse. 35 2.5 Résultats de l’étude par questionnaires auprès des patients 2.5.1 Caractéristiques sociodémographiques de la population répondante 2.5.1.1 Nombre de réponses exploitées 214 patients ont répondu au questionnaire. Tous les questionnaires recueillis ont été analysés, sans exclusion. 2.5.1.2 Age et sexe La répartition par âges dans la population étudiée montre que les deux tiers des répondants avaient entre 25 et 55 ans. Tranche d’âge < 25 ans 26 à 39 ans 40 à 54 ans 55 à 64 ans > 65 ans 6% 31 % 30 % 19 % 14 % La population étudiée était constituée de 68 % de femmes et 32 % d’hommes. 2.5.1.3 Lieu d’habitation Dans notre population, 60 % des patients ont déclaré habiter dans la Communauté Urbaine de Bordeaux. 26 % habitaient en dehors de cette zone et 9% habitaient Bordeaux intra muros. (5% n’ont pas répondu à la question). 2.5.1.4 Situation familiale 71 % des patients ont déclaré vivre en couple. 50 % vivaient avec des enfants. 8 % vivaient avec des parents. 2.5.1.5 Profession La question de la profession était ouverte. Cela nous a permis d’avoir des données détaillées sur l’activité exercée par le patient. Nous les avons utilisés pour la lecture qualitative et individuelle de chaque questionnaire. C’est dans un second temps, pour permettre l’analyse 36 statistique de ces données, que nous avons classé ces professions selon un classement simplifié de l’INSEE. Le taux de réponses à cette question a été de 88 %. Une partie des non-réponses est probablement liée au sentiment que pouvaient avoir les patients de perdre de leur anonymat en écrivant leur profession (professions rares par exemple). Les catégories les plus représentées étaient les employés, puis les retraités. Venaient ensuite les cadres moyens, techniciens. Puis, les personnes sans activité. A B C D E F G H I J K L Agriculteur exploitant Artisan, commerçant Chef d’entreprise Profession libérale Cadre supérieur d’entreprise, ingénieur, professeur Cadre moyen, technicien, agent de maîtrise, instituteur Employé Ouvrier Retraité Sans activité, chômeur, inactif Femme au foyer Etudiant 1% 2% 0.5 % 1% 5% 9% 31 % 3% 20 % 9% 1% 5% 2.5.2 Fréquentation des professionnels de santé 2.5.2.1 Sédentarité médicale : A la question : « Consultez-vous, autant que possible, toujours le même médecin généraliste ? » : 95 % ont répondu OUI. 3 % ont répondu NON. (2 % seulement ne se sont pas prononcés). 2.5.2.2 Fréquence des visites au cabinet du médecin généraliste : Pour le patient lui-même : >1 visite par mois Environ 1 par mois <1 visite par mois Pas de réponse 16 % 26 % 51 % 7% 37 Pour ses enfants : >1 visite par mois Environ 1 par mois <1 visite par mois Pas de réponse* 12 % 13 % 20 % 55 % * : non concernés par cette question. 2.5.2.3 Nombre d’hospitalisations au cours de la vie du patient : 0 1 2à5 >5 Pas de réponse 12 % 21 % 48 % 13 % 6% Les hospitalisations comprenaient également les hospitalisations en maternité des femmes consultantes, et les hospitalisations pour événements peu graves. 2.5.2.4 Etat de santé du patient : Le patient a-t-il eu une maladie grave ? 80 % ont déclaré l’absence de maladie grave. 18 % ont déclaré avoir eu une maladie grave. Parmi ces derniers, 49% ont déclaré avoir subi de 2 à 5 hospitalisations, et 29 % plus de 5. Si nous rapprochons le taux de patients déclarant ne pas avoir eu de maladie grave et la fréquence des hospitalisations, nous retrouvons certainement les hospitalisations pour accouchements ou pour événements peu graves. (2% n’ont pas répondu à cette question). Le patient était-il guéri de sa maladie grave ? Au total, 18 % ont déclaré être guéris d’une maladie grave, et 7 % non. Nous avons donc à cette question un taux de réponse de 25 %, supérieur au nombre de personnes concernées par une maladie grave. Les taux de réponse concernant la guérison ont donc été recalculés, en ne tenant compte que des patients ayant effectivement eu une maladie grave : 38 97 % ont répondu qu’ils étaient guéris, et 41 % qu’ils ne l’étaient pas. Il y a donc de nombreux doublons dans les réponses, les patients ayant coché les deux cases (« oui » et « non ») estimant probablement n’être que partiellement guéris. Raisons invoquées de la guérison d’une maladie grave : Guérison liée : A l’efficacité de la médecine A la volonté du patient A la relation de confiance avec son médecin Taux de Non concernés par réponse une maladie grave 0 15 % 85 % 8% 1% 9% 91 % 12 % 1% 13 % 87 % Oui Non 15 % Ce résultat met en exergue l’importance de la relation de confiance établie entre le patient et son médecin, qui du point de vue du patient a même influé sur sa guérison ; il met également en évidence la synergie de ces influences, compte tenu de la fréquence des maladies graves (18%). 2.5.3 Questions 1 et 2 : Connaissance de la loi (Q1) Nous avons demandé aux patients s’ils avaient entendu parler de la loi du 4 mars 2002 relative à l’information du patient : Oui Non Pas de réponse 57 % 39 % 4% (Q2) Puis nous avons posé trois questions concernant le contenu de cette loi : Vrai Faux Je ne sais pas Elle permet au patient d’obtenir son dossier médical complet 50 % 1% 16 % Elle incite les médecins à donner plus d’informations aux patients 39 % 5% 17 % Elle oblige un patient à avoir un médecin référent 12 % 21 % 24 % 39 Nous avons obtenu 14 % de trois réponses justes : Vrai Vrai Faux Et 25 % de 2 réponses justes sur les trois. 2.5.4 Questions 3 à 6 : Comment les patients se renseignaient en matière de santé (Q3) En lisant des magazines de santé ou se connectant à des sites santé sur Internet, en écoutant des émissions de santé, télévisées ou radio : Régulièrement Occasionnellement Jamais Ne se prononcent pas 16 % 60 % 22 % 2% (Q4) En lisant en détail les notices de leurs médicaments : Toujours Parfois Jamais Ne se prononcent pas 52 % 42 % 5% 1% (Q5) A l’occasion d’une maladie, ils ont déclaré recevoir une plus grande quantité d’informations par : Leur médecin Les médias Leur entourage Autre Ne se prononcent pas 93 % 8% 7% 3% 2% A la question « autre », un patient a précisé : « Dictionnaire médical ». 40 (Q6) En terme de qualité, ils ont déclaré accorder plus de confiance à l’information apportée par : Leur médecin généraliste Des spécialistes Le pharmacien Les kinésithérapeutes, infirmiers … Leur entourage Les médias Ne se prononcent pas 91 % 51 % 7% 4% 2% 1% 1% 2.5.5 Questions 7 à 14 : Etat des lieux : satisfaction des patients concernant l’information apportée par leur médecin (Q7) À l’issue d’une consultation, le patient était-il satisfait par l’information donnée par le médecin : Dans le cas de : Toujours Souvent Rarement Jamais Pas de réponse Une maladie grave 31 % 22 % 3% 0 44 % Une maladie bénigne et ponctuelle 55 % 31 % 2% 0 12 % Une maladie chronique 38 % 29 % 2% 1% 30 % Les réponses à « toujours » ou « souvent » ont été très majoritaires. Cependant, nous avons constaté un taux de réponse concernant les maladies graves ou chroniques, supérieur à celui de la population ayant effectivement eu une maladie grave ou chronique. D’autre part les taux de non-réponses ont été très différents dans les trois cas de maladies proposées, correspondant éventuellement au fait que les patients n’étaient pas tous concernés par la maladie grave ou chronique. Nous avons donc ramené les réponses de satisfaction aux seuls patients ayant répondu pour chaque type de maladie : Dans le cas de : Toujours Souvent Rarement Jamais Une maladie grave 55 % 39 % 5% 1% Une maladie bénigne et ponctuelle 62 % 35 % 2% 1% Une maladie chronique 54 % 41 % 3% 1% 41 Nous avons alors constaté que la tendance restait la même quel que soit le type de maladie. (Q8) Les patients avaient le sentiment de participer aux décisions thérapeutiques concernant leur santé : Toujours 20 % Souvent 49 % Rarement 20 % Jamais 3% Pas de réponse 8% (Q9) Et concernant la santé de leurs enfants : Toujours 17 % Souvent 28 % Rarement 6% Jamais 1% Pas de réponse* 48 % *non concernés. (Q10) Les patients avaient-ils ressenti une évolution ces dernières années : leur médecin se préoccupait-t-il plus qu’avant de les informer ? Oui Non Pas de réponse 67 % 25 % 8% (Q11) À l’issue d’une consultation, se sentaient-ils à l’aise pour re-contacter leur médecin sur le même sujet ? Oui Non Pas de réponse 92 % 5% 3% (Q12) Pensaient-ils que leur médecin devrait prendre plus de temps pour les écouter ? Oui Non Pas de réponse 40 % 54 %* 6% * ont déclaré être satisfaits du temps imparti. 42 (Q13) Concernant la maladie ayant fait l’objet de la consultation, les patients se posaient des questions (ne se prononcent pas : 5 %) : 77% 41% 13% Sur le moment, face à A la sortie du cabinet leur médecin médical 10% A leur retour chez eux, en y réfléchissant Par la suite, en en parlant à leur entourage 5% En se renseignant par le biais des médias (Q14) Lorsque l’information n’était pas suffisante, c’était parce que : (Ne se prononcent pas : 15 %). 43 2.5.6 Questions 15 à 21 : A quel point les patients souhaitaient être informés et être acteurs de leur santé (Q15) 96 % des patients ont considéré important d’être bien informé concernant la prise en charge de leur santé et 3 % n’ont pas considéré cela. (Q16) Les patients auraient-ils préféré prendre plus de décisions eux-mêmes : Dans le cas de : OUI NON Une maladie grave 29 % 52 % Une maladie chronique 28 % 48 % Une maladie bénigne et ponctuelle 35 % 45 % (Q17) 68 % des patients ont déclaré souhaiter que leur généraliste consacre une consultation au seul but de mieux les informer, dans le cas d’une maladie contraignante, contre 23 % qui ne le souhaitaient pas (8 % n’ont pas répondu). (Q18) Existait-t-il des situations justifiant que le médecin n’informe pas totalement ? OUI NON Pas de réponse 26 % 71 % 3% Ainsi, la majorité a estimé qu’aucune situation ne justifiait une information incomplète. Les patients déclarant avoir eu une maladie grave au début du questionnaire ont plus souvent répondu à cette question par la négative (p=0.032). OUI NON Ayant eu une maladie grave 15 % 79 % N’ayant pas eu une maladie grave 28 % 69 % 44 Cette différence est encore plus marquée en comparant les réponses apportées par les patients ayant subi plus de 2 hospitalisations et les autres (p=0.024) : OUI NON Ayant subi 0 ou 1 hospitalisation 35 % 65 % Ayant été hospitalisés plus de 2 fois 20 % 77 % Au total, nous avons constaté que plus les patients avaient rencontré la maladie, moins ils acceptaient de ne pas être informés. (Q19) Quelles étaient les situations justifiant que le médecin n’informe pas totalement ? En cas de maladie grave 21 % En cas de maladie curable mais de traitement pénible 7% En cas de maladie bénigne et ponctuelle 5% En cas de maladie chronique 2% (Q20) Les raisons de préférer ne pas être informé : pour ne pas s’inquiéter, sachant que le médecin ferait de toute façon tout ce qu’il faut pour bien soigner les patients 31 % parce que cela ne servait à rien 3% parce que ce n’était pas du ressort des patients 1% Pas de réponse 65 % (Q21) Beaucoup d’informations concernant l’état de santé des patients : Rassure 77 % Angoisse 18 % Pas de réponse 8% 45 5% 18% Rassure Angoisse Ne se prononcent pas 77% Les réponses à la question ouverte « autres » ont été : • Cela permet de se faire une idée juste de la situation et de participer au projet thérapeutique. • Cela permet de s’adapter et de réagir positivement, et facilite la prise en charge. Enfin, certains patients ont fait remarquer que cela pouvait tantôt rassurer tantôt angoisser, suivant le cas. 2.5.7 Questions 22 à 25 : Modalités de l’information souhaitée (Q22) De quelle façon les patients souhaitaient que l’information leur soit délivrée ? Avec une distinction entre les différents types de maladie : En cas de maladie grave Maladie curable mais de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle Avec les termes médicaux précis 36 % 34 % 32 % Ou, en des termes plus simples, au risque d’être moins précis 32 % 34 % 36 % 26 % des patients ne se sont pas exprimés sur cette question. On a obtenu le même résultat pour les deux propositions, et ce, quel que soit le type de maladie. 46 De manière complète En cas de maladie grave Maladie curable mais de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle 58 % 55 % 46 % 8% 18 % Ou, résumée en quelques 7% mots-clés 30 % des patients ne se sont pas exprimés sur cette question. La grande majorité a déclaré souhaiter être informée de manière complète, et ce, d’autant plus que la maladie est grave ou de traitement pénible. En une seule consultation En cas de maladie grave Maladie curable mais de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle 37 % 42 % 50 % 19 % 8% Ou, progressivement, par 22 % étapes 35 % des patients ne se sont pas exprimés sur cette question. La grande majorité a déclaré souhaiter être informée en une seule consultation, mais les patients préférant être informés progressivement, par étapes, ont préconisé cette modalité si la maladie est grave ou de traitement pénible. Sans cacher la gravité En cas de maladie grave Maladie curable mais de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle 62 % 59 % 55 % 5% 7% Ou, en des termes optimistes, au risque de 6% minimiser la gravité de la maladie 30 % des patients ne se sont pas exprimés sur cette question. La grande majorité a déclaré souhaiter être informée sans que soit cachée la gravité. Il n’est pas apparu de différence significative entre les types de maladies. (Q23) Il est déjà arrivé à 42 % des patients de se faire accompagner pour une consultation, mais 50 % ont déclaré ne jamais se faire accompagner (8 % n’ont pas répondu). (Q24) Les raisons énoncées pour cela ont été : • Des raisons pratiques : lorsque le patient est trop jeune, ou ne peut pas se déplacer seul. 47 • Parce que la consultation concerne les deux personnes présentes (grossesse, enfant). • Parce que la maladie du patient influe sur sa vie de famille, et en particulier sa vie de couple. De nombreux patients ont déclaré considérer normal d’être systématiquement présent en couple aux consultations. • Parce que penser aux questions à poser, bien comprendre les explications et les mémoriser est plus facile à deux. • Pour être soutenu en cas de gravité. (Q25) Au cours d’une consultation, la présence d’un proche était perçue par les patients de la façon suivante : OUI NON Elle améliorait la qualité de l’information apportée par le médecin 19 % 33 % Elle leur permettait de mieux mémoriser et comprendre les propos du médecin 35 % 21 % C’était un frein à la bonne délivrance de l’information 11 % 34 % Elle ne changeait rien concernant l’information 31 % 17 % (Pas de réponse : 25 %). 2.5.8 Questions 26 à 29 : Influence de l’information sur l’observance (Q26) Cela a pu arriver aux patients de ne pas suivre un traitement prescrit : Toujours Souvent Rarement Jamais En cas de maladie grave 1% 1% 10 % 56 % En cas de maladie curable mais de traitement pénible 1% 1% 12 % 48 % En cas de maladie bénigne et ponctuelle 2% 15 % 26 % 38 % En cas de maladie chronique 3% 7% 16 % 42 % (Pas de réponse : 32 %). 48 (Q27) Si oui, les raisons avancées ont été : Par manque d’information sur le traitement : ils ne comprenaient pas le rôle des médicaments 4% Parce qu’il leur paraissait inutile 11 % Parce qu’il leur paraissait dangereux 7% Parce que l’un des médicaments contenait des substances faisant peur 9% Par peur de l’accoutumance 9% (Pas de réponse : 58 %). Les autres raisons énoncées pour cela ont été : • D’un point de vue pratique, l’apparition d’effets secondaires ou d’une intolérance. • L’oubli, la négligence. • Le traitement paraissait trop long au patient qui s’estimait guéri. (Q28) Dans le cas où ils décideraient de ne pas prendre un traitement, ils ont déclaré prendre cette décision : Face au médecin, et ils le lui disaient 34 % Face au médecin, mais ils n’en disaient rien 7% Après avis extérieur (pharmacien, famille, amis, lecture) 7% A la lecture de la notice des médicaments 18 % (Pas de réponse : 37 %). (Q29) Si toutefois ils en parlaient à leur médecin, une explication concernant le traitement pouvait suffire à les convaincre : Toujours Souvent Rarement Jamais 15 % 46 % 9% 0% (Pas de réponse : 29 %). 49 (Q30) Raisons pour lesquelles il paraissait important aux patients d’être bien informés : En cas de maladie grave Maladie curable mais de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle Moyenne 59 % 53 % 53 % 60 % 46 % 46 % 40 % 48 % Pour être rassurés 44 % 40 % 39 % 45 % Pour avoir un droit de regard et de contrôle 44 % 39 % 32 % 42 % 29 % 29 % 35 % 34 % 24 % 23 % 22 % 25 % 18 % 20 % 18 % 21 % Parce que c’était une question d’éthique 19 % 15 % 14 % 18 % Parce que c’était la loi 12 % 8% 8% 10 % Cela renforçait leur confiance envers leur médecin Cela les motivait pour bien respecter les prescriptions Par curiosité intellectuelle Cela améliorait l’efficacité du traitement Cela leur donnait une plus grande autonomie (Pas de réponse : 9 %). 2.5.9 Question 31 : Synthèse des commentaires libres Les thèmes récurrents dans les commentaires libres des patients, ont été : La confiance, considérée comme indispensable entre le patient et son médecin généraliste. Il est apparu dans plusieurs remarques qu’elle était renforcée dans le cas où le médecin recherchait une information médicale complémentaire, ou adressait le patient à un spécialiste. L’écoute, élément majeur de l’attente du patient à l’égard de son médecin. La capacité d’adaptation du médecin à son patient, en fonction de sa connaissance du patient et de son mode de vie, a également été citée. Nous avons relevé un commentaire caractéristique, sur le questionnaire d’une femme retraitée, soignée et guérie d’une maladie grave : « La relation de confiance avec son médecin généraliste me semble nécessaire. La responsabilité de notre santé nous incombe totalement. Le médecin est là pour nous écouter, nous aider à comprendre ce qui se passe dans notre corps, nous conseiller, nous aider et nous 50 soulager par la prescription de médicaments ou l’orientation vers des spécialistes. Son aide est nécessaire pour rassurer, baliser nos angoisses, nous remettre sur les rails : c’est pour cette raison qu’un suivi régulier s’impose à mon sens, même en l’absence de maladie. » 2.5.10 Influence de l’âge sur les réponses des patients Il n’y a pas eu de différence significative pour les questions : « fréquentation d’un même médecin », « nombre d’hospitalisations », 2 à 4, 6 à 8, 11 à 16A, 17 à 20, 22AB, 26AC, 27E, 30EHI. Le détail chiffré des différences est présenté dans l’annexe D1. Les patients les plus âgés avaient davantage entendu parler de la loi, mais ils ne connaissaient pas mieux son contenu. Les plus jeunes recevaient plus d’information de la part de leur entourage et des médias. Concernant leur observance au traitement, ils se disaient plus influençables par des avis extérieurs et par la lecture des notices. Cependant à tout âge les patients estimaient que leur plus grande source d’information était leur médecin. Les plus âgés avaient davantage remarqué une évolution de l’information apportée par leur médecin, ce qui est à rapprocher de leur plus longue expérience dans leur relation avec leur médecin. Dans les cas des maladies bénignes ou chroniques, les plus jeunes souhaitaient en plus grand nombre prendre des décisions ; dans le cas des maladies graves, tous s’en remettaient de manière prépondérante à leur médecin. Au total, les jeunes patients semblaient plus influencés par les avis extérieurs, et souhaitaient plus fortement être acteurs de leur santé, tout en étant plus facilement angoissés. Il convient cependant de mettre en exergue le fait que pour la plus grande majorité des patients, quel que soit leur âge, beaucoup d’information les rassurait (de 63% à 83%). 2.5.11 Influence du sexe des patients sur les réponses Il n’y a pas eu de différence significative pour les questions : 1 à 8, 10 et 11, 14 à 22, 24, 25BC, 26 à 27B, 27F et 28A, 29, 30CDGHI. Le détail des différences est présenté en annexe D2. 51 Les hommes étaient deux fois plus nombreux que les femmes à déclarer avoir eu une maladie grave (26% versus 14%). Les hommes avaient beaucoup moins le sentiment que les femmes de participer aux décisions thérapeutiques concernant leurs enfants. Les femmes se faisaient un peu plus accompagner pour les consultations. Elles étaient deux fois plus nombreuses à considérer que cela améliorait la qualité de l’information délivrée par le médecin. Les femmes trouvaient plus souvent que les hommes que le médecin devrait prendre plus de temps pour les écouter (46% versus 28%). Il n’arrivait pas davantage aux femmes de ne pas prendre un traitement. Parmi celles qui décidaient parfois de ne pas prendre le traitement prescrit, elles manifestaient plus d’inquiétudes que les hommes concernant sa dangerosité : elles déclaraient plus souvent que les hommes qu’elles avaient peur des substances qu’ils contenaient, ou de l’accoutumance. Dans le cas où elles choisissaient de ne pas prendre un traitement, elles prenaient cette décision face au médecin mais sans le lui dire, ou bien après un avis extérieur, et le plus souvent à la lecture de la notice (une sur quatre). Les femmes manifestaient plus de curiosité intellectuelle à l’égard de l’information en santé (32% versus 25%), et cette information leur semblait plus importante pour être rassurées. Au total, les femmes exprimaient plus d’inquiétudes à l’égard des traitements, et l’information avait tendance à plus les rassurer. D’autre part elles estimaient bénéficier d’un temps d’écoute insuffisant. 2.5.12 Influence de l’expérience de l’hospitalisation sur les réponses des patients Il n’y a pas eu de différence significative pour les questions : 1, 2, 4 à 7, 9 à 15, 16B à 17, 20 à 21, 22BC, 23 à 25, 26B à 27B, 27D à 30. Le détail des différences est présenté en annexe D3. Les patients ayant été beaucoup hospitalisés lisaient deux fois plus que les autres la presse sur le thème de la santé. Ils avaient deux fois plus le sentiment de participer aux décisions thérapeutiques concernant leur santé. 52 Ils étaient peu nombreux à considérer qu’il existait des situations justifiant de ne pas être informé. Et ce n’était en tout cas pas dans le cas des maladies graves que cela se justifiait. Ils souhaitaient plus que les autres être informés en des termes précis, et surtout pas en des termes optimistes. Ils invoquaient plus que les autres la dangerosité des traitements pour justifier de ne pas les prendre. Au total, les patients ayant subi plusieurs hospitalisations recherchaient une information plus précise que les autres, même si cette précision n’était pas de nature à les rassurer. 2.5.13 Influence de l’expérience de la maladie grave sur les réponses des patients Il n’y a pas eu de différence significative pour les questions : 1, 3, 5 à 6, 7B à 10, 12 à 17, 19, 22 à 25C. Le détail des différences est présenté en annexe D4. On n’a trouvé aucune différence concernant la demande d’écoute et le besoin de prendre des décisions. (HF, GNG). Les patients ayant eu une maladie grave savaient que la loi permet aux patients d’obtenir leur dossier médical. En revanche ils ont moins bien répondu que les autres patients aux autres items concernant la loi sur l’information. Ils ne lisaient pas plus la presse que les autres, mais ils lisaient de manière plus systématique les notices et aucun d’entre eux ne s’en désintéressait totalement. A la question de satisfaction concernant l’information donnée en cas de maladie grave, certains patients qui n’avaient pas été atteints de maladie grave ont quand même répondu. Et ils déclaraient une moindre satisfaction que les patients réellement atteints de maladie grave. Les patients ayant eu une maladie grave se déclaraient moins à l’aise que les autres pour contacter à nouveau leur médecin. Ils étaient peu nombreux à trouver qu’il existait des situations justifiant de ne pas être informé totalement. Aucun d’entre eux n’a trouvé que l’information ne servait à rien. Ils étaient encore moins nombreux à être angoissés par l’information, que les patients n’ayant pas eu de maladie grave (15% versus 19%). Ils étaient peu nombreux, par rapport aux autres, à trouver que la présence d’un proche ne change rien 53 concernant l’information. S’ils décidaient de ne pas prendre un traitement, c’était plus que les autres par manque d’information, et ils avaient moins peur des médicaments que les autres ; enfin, ils prenaient cette décision plus souvent que les autres après avis extérieur. Au total, les patients ayant eu une maladie grave étaient plus tempérés dans leurs opinions, et demandaient plus systématiquement à être informés que les autres. 2.6 Résultats de l’enquête par entretiens avec des patients Concernant la façon de s’informer : Les patients ont insisté sur l’importance de leur médecin généraliste pour transmettre l’information : d’une part, en tant que médecin de famille, les patients l’ont considéré comme principal protagoniste dans cette fonction, d’autres professionnels de santé ayant également été mentionnés, tels que le personnel paramédical hospitalier. D’autre part, sa disponibilité en matière d’écoute et de dialogue, était considérée comme plutôt satisfaisante, les patients ayant facilement la possibilité de se ré-adresser à lui en cas de besoin de précisions. Concernant l’évolution : Les patients rencontrés ont fait part de leur impression d’évolution dans l’écoute qui leur était conférée par leurs médecins. Une patiente travaillant en maison de retraite a mentionné ses difficultés face à un grand nombre de résidents non informés sur leurs pathologies ; elle a constaté un fréquent désintérêt et une méconnaissance de leurs traitements ; elle a remarqué que, dans la plupart des cas, c’est la famille qui demandait l’accès aux dossiers médicaux112. Concernant la présence d’une personne accompagnante : Certains patients ont revendiqué le droit au tête-à-tête avec le médecin, avec le sentiment que les médecins devraient plus clairement rappeler qu’ils sont tenus au secret professionnel, ce qui faciliterait l’instauration d’une confiance mutuelle. Concernant la nécessité de ne rien cacher : 54 dans les entretiens réalisés, les patients se sont accordés à considérer que le médecin se devait d’informer son patient dans tous les cas. La raison principale en était que trop peu d’information avait surtout pour effet d’inquiéter. Les patients porteurs de pathologies lourdes souhaitaient être davantage informés sur ces pathologies, que sur d’autres maladies plus bénignes. Ce plus faible souhait d’information dans le cas de pathologies bénignes se retrouvait également chez des patients sans problème particulier de santé : un jeune patient de niveau socioculturel élevé m’a exprimé son souhait de ne pas prendre plus de décisions luimême, et surtout a rappelé que « trop d’information tue l’information » : « c’est au médecin de décider. C’est lui le professionnel de santé. S’il m’expliquait je ne comprendrais certainement pas tout, car ce n’est pas dans mes compétences. Je lui fais confiance. Je n’ai pas envie qu’il passe trop de temps à m’expliquer ou à me faire choisir, parce que je n’ai pas le temps, le plus important pour moi c’est le résultat : l’efficacité de son traitement. Concernant les explications que j’attends, elles doivent avoir pour objectif de me donner les moyens de prévenir la maladie, me donner les moyens (hygiène de vie par exemple) de ne pas tomber à nouveau malade.» Toujours dans ce cadre, ce patient considérait cependant inexcusable de ne pas informer sciemment en cas de maladie grave, car l’information permettait au moins de se préparer à la transformation de son mode de vie au quotidien. Ce souhait est apparu dans d’autres entretiens : le médecin devait informer totalement et immédiatement, en cas de maladie qui entraînerait des conséquences sur la vie quotidienne, afin de pouvoir s’organiser. Ici, on pressent l’importance de la qualité de l’écoute du médecin afin de connaître les attentes spécifiques de ses patients. D’autres patients ont insisté sur cette qualité d’écoute : « le médecin doit savoir décrypter ce que j’attends de lui ». Concernant la recherche de l’information médicale du médecin : tous les patients se sont déclarés paradoxalement rassurés quand le médecin reconnaissait qu’il ne savait pas, et allait rechercher l’information ailleurs. Présentation d’une situation rencontrée en pratique courante : Pour illustrer cette recherche, j’évoquerai une situation caricaturale rencontrée en pratique clinique, particulièrement symptomatique des conséquences de l’absence d’information dans le cadre a priori banal d’une maladie courante et sans particulière gravité. 55 Il s’agit d’une consultation d’un bébé amené par ses deux parents, au cours d’un remplacement de médecine générale. Dans un état d’anxiété exacerbé, ceux-ci ont commencé par expliquer que leur première idée était de se rendre directement aux urgences, que c’est d’ailleurs très certainement ce qu’ils feraient à l’issue de la consultation. Le problème médical était, après examen clinique, celui d’une otite, d’ailleurs déjà diagnostiquée par un autre médecin dans la matinée, et pour laquelle le traitement requis avait été prescrit. Mais, aucune explication n’avait été fournie aux parents. La raison de leur inquiétude était la persistance de la fièvre quelques heures après l’instauration du traitement antibiotique. L’objectif de cette consultation a donc finalement été d’expliquer, d’une part la légitimité du traitement prescrit et son mode d’action, d’autre part les règles hygiéniques élémentaires encadrant la prescription, concernant la fièvre et la pathologie ORL de l’enfant. Sont apparues ici quelques clés de la délivrance de l’information : tout d’abord, le facteur temps, dont le médecin ne dispose pas toujours suffisamment ; d’autre part, l’écoute, qui permettait de comprendre que ces parents consultaient manifestement surtout pour se rassurer ; enfin, le désir d’expliquer et le fait d’être sensibilisé à ce sujet. De cet exemple, est également ressortie l’importance de l’information dans un contexte d’actualité, de lutte contre le nomadisme médical. Concernant la détermination pour ces patients de consulter une seconde fois, et leur souhait pour être plus rassurés d’être pris en charge aux urgences de l’hôpital (ce qui sous-tendait l’utilisation d’un plateau technique spécialisé, la prise en charge par un pédiatre, une éventuelle prise de sang … ), rappelons que des études qui ont montré qu’un bon accord entre médecin et patients éviterait des consultations spécialisées et des examens de laboratoire. Enfin, nous avons tenu à présenter cette situation parce qu’il est courant d’en rencontrer de semblables dans une pratique quotidienne de la médecine, qu’elle soit hospitalière ou ambulatoire, et pas seulement dans le cas tragique d’annonce de maladies graves ; et parce que des expériences de ce type ont largement contribué à l’envie de mener une réflexion personnelle approfondie sur ce thème. 56 2.7 Synthèse des résultats (questionnaire et entretiens) 2.7.1 Les patients souhaitaient être informés 2.7.1.1 Les patients s’intéressaient à leur santé. Les patients recherchaient l’information. En effet, 96% estimaient important d’être bien informés (Q15). Par ailleurs, 71% estimaient qu’il n’y avait aucune situation justifiant de ne pas être informés (Q18). Les patients, lors des entretiens, ont pour cela invoqué des arguments pratiques (le fait de savoir permettait de s’organiser). 52% lisaient toujours les notices et seulement 5% d’entre eux ne les lisaient jamais (Q4). 68% souhaitaient que leur médecin consacre une consultation au seul but de les informer sur une maladie contraignante (Q17). 2.7.1.2 Cependant ils connaissaient mal les nouvelles lois, ou ne s’en préoccupaient pas. En effet, 57% avaient entendu parler de la loi Kouchner et seulement 14% ont répondu juste concernant son contenu (Q 1 et 2). 10% estimaient devoir être informés parce que c’était la loi (Q30). 2.7.1.3 Mais ils étaient critiques sur la source : le médecin restait la source d’information de référence. En effet, 16% se renseignaient régulièrement auprès des médias, et 60% occasionnellement (Q3). Seulement 8% recevaient une plus grande quantité d’informations par les médias, alors que 93% la recevaient par leur médecin (Q5). 91% accordaient plus de confiance à l’information apportée par leur médecin généraliste, et 51% par leurs spécialistes (Q6). Seulement 1% accordait une plus grande confiance aux médias. 57 2.7.1.4 Le médecin, et en particulier le médecin généraliste, était placé au cœ ur de l’information. Les patients avaient confiance en leur médecin. En effet, 95% consultaient autant que possible toujours le même (Q0). 93% recevaient une plus grande quantité d’informations par leur médecin (Q5). 91% accordaient plus de confiance à l’information apportée par leur généraliste (Q6). 60% trouvaient qu’être bien informés renforçait leur confiance envers leur médecin (Q30). 2.7.1.5 Les patients se sentaient acteurs de leur santé et souhaitaient l’être encore plus. En effet, la moitié des patients ayant été gravement malades estimait que leur guérison était liée à l’efficacité de la médecine, et à une relation de confiance avec leur médecin. Le tiers estimait qu’elle était liée à leur volonté (Q0). 75% avaient le sentiment de participer aux décisions, autant quand elles les concernaient euxmêmes que lorsqu’elles concernaient leurs enfants. (Q8). 38 % auraient préféré prendre plus de décisions, et ce autant pour les maladies graves, bénignes ou chroniques (Chi deux, Q 16). 42% trouvaient important d’être informés pour avoir un droit de regard et de contrôle (Q30). 2.7.2 Ils ont ressenti une évolution 67% estimaient que leur médecin se préoccupait de plus en plus de les informer (Q10). Le ressenti était le même pour tous les patients rencontrés en entretien. Ces derniers avaient le sentiment que cette préoccupation était plus présente chez les jeunes médecins. 2.7.3 Pour quelles raisons les patients souhaitaient être informés Les patients invoquaient majoritairement des raisons pratiques. Les réponses étaient les mêmes, quel que soit le type de maladie invoquée : maladie grave, maladie chronique, maladie bénigne. 58 2.7.3.1 La confiance. Pour 60%, cela renforçait leur confiance envers leur médecin (Q30). 2.7.3.2 Pour être rassurés. 77% des patients étaient rassurés par beaucoup d’information (Q21). Alors que 18 % étaient angoissés par beaucoup d’information. 45% trouvaient important d’être bien informés pour être rassurés (Q30). Lors des entretiens, des patients ont fait remarquer que l’information était anxiogène surtout lorsqu’elle était délivrée de manière partielle. 2.7.3.3 Pour une meilleure observance. Dans le cas où les patients décidaient de ne pas prendre leur traitement, une explication suffisait à les convaincre : Toujours, dans 22% des cas ; Souvent, dans 64% des cas ; Ce qui représentait 86% (Q29). Par ailleurs, 48% trouvaient qu’être bien informés les motivait pour bien respecter les prescriptions, et 25% trouvaient que cela améliorait l’efficacité du traitement (Q30). Dans le cas où ils décidaient de ne pas prendre un traitement, c’était pour 28% à la lecture de la notice (Q28). 2.7.3.4 Pour être acteurs de leur santé. 42% des patients estimaient devoir être bien informés pour avoir un droit de regard et de contrôle. 20% des patients trouvaient que cela leur donnait une plus grande autonomie (Q30). Cela a été la première raison spontanément invoquée lors des entretiens. 2.7.3.5 L’éthique. 18% des patients jugeaient important d’être bien informés pour des raisons d’éthique (Q30). 59 2.7.4 Sur quel type d’information il est apparu essentiel d’insister Sur la nécessité des traitements et leurs effets secondaires. En effet : • Les patients lisaient massivement les notices : 52% toujours, et 42% parfois (Q4). • Dans le cas où ils décidaient de ne pas prendre un traitement, c’était pour 28% d’entre eux à la lecture de la notice (Q28). • 18% des patients ne suivaient souvent pas leur traitement, dans le cas d’une maladie bénigne ou chronique, et seulement 3% dans les maladies graves ou de traitement pénible où ils étaient d’emblée convaincus de la nécessité du traitement (Q26). Voici les raisons qui amenaient les patients à ne pas prendre un traitement (Q27) : • Parce qu’il leur paraissait inutile. (27%) • Parce qu’il contenait des substances leur faisant peur (cortisone … ). (22%) • Parce qu’ils avaient peur de l’accoutumance. (21%) • Parce qu’il leur paraissait dangereux. (17%) Lors des entretiens, les patients ont insisté sur l’importance d’informer sur les règles de vie pratiques, préventives et curatives par rapport à leur pathologie. L’information avait selon eux un rôle prépondérant dans la guérison, en tant que conseil de mode de vie. 2.7.5 Comment les patients souhaitaient que l’information leur soit délivrée : modalités de la délivrance de l’information Concernant les maladies graves ou de traitement pénible : • Autant de patients attendaient une information en termes médicaux précis, qu’en des termes plus simples (Q 22). (Même résultat pour les maladies bénignes). • 87% des patients ne souhaitaient pas qu’on leur cache la gravité de la maladie. (Même résultat pour les maladies bénignes). • 81% des patients souhaitaient une information complète. (Et 66% pour les maladies bénignes). • 60% des patients préféraient disposer de toute l’information en une seule consultation (ce chiffre passe à 76% pour les maladies bénignes) et 31% progressivement, par étapes. 60 Sans cacher la gravité 83% En des termes optimistes, au risque de minimiser la gravité de la maladie 9% Ne se prononcent pas 8% Figure : Modalités de la délivrance de l’information 61 81% 66% 26% 11% De manière complète Résumée en quelques mots-clés Maladie grave ou de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle 76% 60% 31% 12% En une seule consultation Progressivement, par étapes Maladie grave ou de traitement pénible Maladie bénigne et ponctuelle 2.7.6 Quels obstacles se sont dégagés pour une bonne information 2.7.6.1 Le facteur temps. • Les patients estimaient manquer de temps : en effet, 40% pensaient que leur médecin devrait prendre plus de temps pour les écouter (Q 22), et 30% estimaient que lorsque l’information n’était pas suffisante, c’était du fait d’une consultation trop courte (Q14). 62 • Mais surtout, il leur fallait un temps de maturation à l’issue de la consultation : 41% se posaient des questions à leur retour chez eux, en y réfléchissant (Q13), et 49% trouvaient que lorsque l’information n’était pas suffisante, c’est parce que les questions ne leur étaient venues qu’à l’issue de la consultation (Q14). • Enfin, ils se sentaient massivement à l’aise pour re-contacter leur médecin (92%). 2.7.6.2 La gêne des patients vis-à-vis de leur médecin. 26% des patients estimaient que quand l’information n’avait pas été suffisante, c’est parce qu’ils n’avaient pas su formuler leurs attentes (Q14), et 19% parce qu’ils n’avaient pas osé poser des questions. De plus, 42% des patients déclaraient s’être déjà fait accompagner pour une consultation, et 46% estimaient que cela leur permettait de mieux mémoriser et comprendre (même si cela ne changeait rien concernant l’information elle-même : 41%). (Q23). 2.7.7 Les patients étaient plutôt satisfaits. A l’issue d’une consultation, 57% des patients étaient toujours satisfaits par l’information apportée et 38% l’étaient souvent, ce qui représente un total de 95% (Q7). De plus, ils l’étaient autant si leur maladie était grave, bénigne ou chronique. (Chi deux). 63 3 Enquêtes auprès d’une population de médecins 3.1 Objectifs L’enquête réalisée auprès des médecins avait pour objectifs : • D’évaluer l’impact des nouvelles lois sur l’information sur la pratique des médecins, ainsi que l’évolution de leur pratique dans ce domaine. • De déterminer les raisons qui conduisent les médecins à informer au mieux leurs patients. • Enfin, de décrire de quelle manière les médecins ont le sentiment d’informer leurs patients. 3.2 Population cible de l’étude L’ANAES, Agence Nationale d’Accréditation et de l’Evaluation en Santé, a été chargée d’élaborer de nouvelles recommandations de bonne pratique sur le thème de l’information des patients. Pour cela des séminaires ont été organisés, rassemblant un groupe de travail multidisciplinaire, comprenant des professionnels de santé -médecins, infirmiers- ainsi que des juristes et sociologues, et des usagers du système de santé. L’objectif de ces séminaires était de proposer aux médecins une aide plus concrète concernant la manière d’informer les patients, à la lumière des nouvelles lois de mars 2002. En complément des réactions recueillies au cours de notre participation aux séminaires, nous avons mené une enquête auprès des médecins correspondants régionaux de l’ANAES. Il s’agit de médecins généralistes et spécialistes provenant de diverses régions françaises, et, pour ceux chargés d’élaborer une nouvelle recommandation sur l’information aux patients, sensibilisés à ce sujet. Les correspondants régionaux que nous avons contactés sont répartis de la façon suivante : 101 médecins libéraux (82 médecins généralistes et 19 médecins spécialistes) ; 34 médecins hospitaliers (33 spécialistes et 1 généraliste). 64 3.3 Mode de recueil des données 3.3.1 Recueil de données au cours des séminaires de l’ANAES sur le thème de l’information aux patients Notre participation à ces séminaires nous a permis d’étayer notre réflexion à la lumière des réactions et des idées qui y ont été développées. 3.3.2 Enquête par questionnaires Des questionnaires ont été envoyés par courrier électronique à tous les médecins correspondants de l’ANAES. Tous les questionnaires recueillis ont été inclus dans l’étude. Les questionnaires reçus ont été immédiatement imprimés sans trace de leur origine. L’anonymat a, de cette façon, été respecté. Nous avons réalisé une seule relance, également par courrier électronique. (Voir l’annexe C). Le questionnaire était constitué d’une page, comprenant 6 questions. Les variables étudiées étaient : • L’impact sur la pratique des médecins des nouvelles lois relatives à l’information. • L’évolution de la pratique des médecins dans ce domaine. • Les raisons qui amènent les médecins à informer au mieux leurs patients. • Les raisons qui peuvent amener les médecins à ne pas informer leurs patients. • La manière dont les médecins ont le sentiment d’informer leurs patients. 3.4 Traitement des données Les questionnaires, établis sous Excel, ont été analysés sous ce même logiciel. 3.5 Résultats de l’étude par la participation aux séminaires de l’ANAES La tâche de l’ANAES consiste, entre autres, à élaborer des recommandations de bonne pratique. Sur le thème de l’information des patients, un texte de recommandations avait déjà été rédigé en mars 2000. Cependant, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, renforce le droit d’information du patient. De nouveaux 65 séminaires ont donc été organisés par l’ANAES dans le but de réactualiser les recommandations. Ils nous ont permis de recueillir des réflexions de la part de médecins sensibilisés à ce sujet. La première réaction majoritaire des médecins a été une inquiétude face au caractère de plus en plus légaliste de leur profession. Le malaise est peut-être venu du fait que, cette fois, c’est dans le domaine du relationnel avec le patient que les lois ont fait irruption. En effet, la manière d’informer le patient était jusqu’alors à l’initiative du médecin : il l’adaptait au patient grâce à son expérience de celui-ci. Le caractère légal imposé sur le sujet du relationnel ne risquait-il pas de porter tort, justement, à la relation de confiance établie entre le médecin et son patient ? Le débat s’est donc tout d’abord porté sur l’objectif des recommandations : celles-ci ne devaient pas encourager une attitude défensive portant préjudice à la relation entre médecins et patients, mais devaient cependant être suffisamment pratiques pour être exploitables par les médecins. Le nœ ud du problème étant cette nécessité d’allier les aspects relationnel et technique des praticiens. Réflexions d’ordre juridique : Madame Dominique Thouvenin, Professeur de droit, qui avait présidé le groupe de travail à l’origine de la recommandation de l’ANAES de mars 2000, a exprimé son point de vue en rappelant que les règles juridiques n’étaient qu’une variété de règles sociales. La loi a suivi une évolution de société, où la personne malade est devenue une catégorie juridique. D’un objet de soins, il est passé à un acteur de santé. Dans le contexte d’inquiétude de la part des médecins, elle a proposé un survol des preuves possibles que l’information a bien été donnée par le médecin, en rappelant toutefois qu’aucune n’avait véritablement de valeur légale, et que d’un point de vue pratique, l’information apportée gagnait à être mentionnée dans le dossier et transmise pour une meilleure cohérence. Enfin, elle a noté qu’il était encore plus intéressant de mentionner ce que le patient a compris et retenu de l’entretien33,41. Le Docteur Etienne Dusehu, médecin hospitalier et conciliateur, a présenté un survol comparatif du code de déontologie et de la loi de mars 2002, rappelant qu’effectivement les deux se rejoignaient. Si cette loi a comblé un vide juridique, elle a cependant été élaborée en bonne harmonie avec une évolution déjà présente dans les habitudes. Réflexions de santé publique : L’impact de l’information sur la santé a été démontré. Par exemple, le simple fait de reparler du tabac à chaque consultation avec un patient fumeur, fait diminuer significativement le 66 tabagisme. Il s’agit donc surtout de se questionner sur la meilleure façon d’apporter l’information, dans l’objectif d’améliorer la qualité des soins. Avec la loi du 4 mars 2002, un patient a désormais directement accès à son dossier médical. Ce moyen ne semble cependant pas suffisant, car un dossier médical est généralement rédigé par des médecins pour un meilleur suivi, et destiné à assurer la continuité des soins entre les acteurs de santé. Le caractère purement technique d’un tel dossier en rend la lecture difficile pour un patient. Nous nous intéresserons donc plutôt à la meilleure façon de faire passer une information, entre un médecin généraliste et son patient. La primauté de l’information orale : Il s’agit en particulier de l’information apportée par le médecin à son patient, dans le cadre d’une consultation. Elle s’adapte au cas individuel du patient et s’inscrit dans un climat relationnel de confiance. Le premier garant d’une information efficacement délivrée est la bonne relation entre le patient et son médecin. Des facteurs favorisant l’information ont été retenus. Nous allons en rapporter quelques-uns sous forme de conseils d’ordre très pratique. Concernant le climat, d’abord. L’information gagne à être délivrée dans une atmosphère calme et sereine, et, en cas d’annonce difficile, à l’abri du dérangement du téléphone. La situation du médecin par rapport au patient est importante. Outre la volonté d’humaniser la relation entre le patient et son médecin, il est souhaitable de limiter au maximum l’inégalité entre eux, afin de parvenir à une explication plus adaptée de la part du médecin, et une meilleure compréhension du patient. Madame Landry-Dattée, psychanalyste, a rappelé l’importance de se situer au même niveau de regard que le malade, c’est à dire médecin et patient assis, patient habillé, ou, si l’état du patient implique qu’il soit allongé, le médecin assis à côté de lui. De même, certains médecins trouvent avantage à se placer du même côté du bureau que le patient, lors d’annonces de diagnostics particuliers. Elle a rappelé l’importance de la gestuelle, depuis la poignée de main établissant le contact au début de la consultation, à l’attitude calme et sûre mais réceptive du médecin. Le temps est également un élément clé : une bonne information nécessite du temps, même si la qualité du temps passé avec le patient est probablement plus importante que sa quantité. Il est également bénéfique de laisser un peu de temps au patient pour intégrer ces informations, et lui redonner un autre rendez-vous, en particulier dans le cas de l’annonce d’un diagnostic difficile, où il existe une « sidération » de la pensée : le patient se focalisant sur un mot-clé et n’entendant plus tout ce qui pourra suivre. 67 Par ailleurs, la répétition de l’information sous des formulations différentes en facilite la compréhension et la mémorisation. Concernant les mots employés, l’article 35 du code de déontologie qualifie l’information qui doit être donnée de « loyale, claire et appropriée ». Le médecin doit donc trouver un juste équilibre entre une information en des termes techniques parfaitement exacts mais parfois incompréhensibles pour le patient, et une information incomplète de par sa reformulation en des termes courants. Le niveau d’équilibre dépend bien sûr du niveau de compréhension qu’il pense pouvoir trouver de la part du patient. De la même façon, l’information ne doit pas chercher à être exhaustive, « trop d’information tue l’information ». On s’est également interrogé sur les bénéfices et les risques de la présence d’une tierce personne dans la communication de l’information. Celle-ci, moins émotionnellement concernée, peut constituer la mémoire de l’information donnée et la restituer secondairement à distance de la consultation, en particulier lors de l’annonce d’un diagnostic grave. Le risque est cependant celui d’une information restituée qui est biaisée. Un autre moyen utilisé est la reformulation : il s’agit de faire reformuler par le patient ce que le praticien vient de lui annoncer. Cette technique apporte tout d’abord un retour utile qui permet de corriger une mauvaise compréhension, mais également elle permet au patient de mieux fixer l’information. Eléments limitant l’information : Madame Landry-Dattée a rappelé la distinction entre vérité et transparence113. L’annonce d’un diagnostic péjoratif est un traumatisme pour le patient mais également un stress pour le médecin : « c’est ce qu’un médecin n’a pas envie de dire à un malade qui n’a pas envie d’entendre ». Le médecin doit savoir expliquer, même si le contenu de l’information est traumatisant. Il ne s’agit pas de minimiser les faits ou de les occulter pour ménager le patient. Cependant, l’annonce d’un diagnostic nécessite l’emploi de grandes précautions, sans lesquelles on risque soit l’incompréhension totale donc l’échec de l’information, soit de créer un traumatisme dommageable pour le patient et éventuellement l’évolution de la maladie. Il convient de respecter quelques étapes dans la transmission de l’information. Un rappel de l’historique suivi du commentaire du patient, peut précéder l’annonce de la nouvelle, faite graduellement avec des mots simples. Il est bon d’encourager l’expression des sentiments, même si cela se révèle être une épreuve pour le médecin … On peut alors évoquer un projet thérapeutique afin de proposer des repères qui soulagent l’angoisse, et en particulier donner 68 un rendez-vous rapproché. Il est par ailleurs crucial de laisser place à l’espoir. Informer « avec des mots gentils » c'est-à-dire atténuer la réalité sans cependant en faire l’économie ; « toujours laisser une porte ouverte » sont des termes énoncés par des patients. Philippe Bataille, sociologue, a rappelé l’importance de la qualité de la relation (la manière dont l’information est présentée). En particulier, les patients estiment généralement avoir été mal informés si la relation n’a pas été bonne, et ce, même si l’information en elle-même a été correctement délivrée. Par ailleurs, le médecin doit savoir replacer la personne au centre de la discussion, afin de lui permettre une reconstruction et une réappropriation de soi43. Enfin, Didier Natanson, Chef de projet à l’ANAES, a rappelé l’importance de l’écoute : il a été montré que les médecins sous-estimaient très majoritairement le niveau d’information souhaité par le patient, d’où la nécessité pour le professionnel de se repositionner sur l’attente de son patient, et de commencer par s’informer lui-même sur les représentations qu’a le patient sur sa maladie. Didier Natanson a également proposé d’être vigilant face aux termes d’« information » et d’« explication » eux-mêmes, qui présentent une vision à sens unique de la relation entre le patient et le médecin. Peut-être serait-il plus approprié de redéfinir la relation entre médecins et patients, en des termes de discussions et d’échanges, bilatéraux et réactifs. 3.6 Résultats de l’enquête par des questionnaires auprès de médecins Nous avons recueilli 37 réponses. (Q1) La loi du 4 mars 2002 influait sur la relation des médecins avec leurs patients : Positivement 51.4 % Négativement 13.5 % Sans influence 35.1 % (Q2) Les médecins avaient le sentiment d’être plus attentifs qu’avant à bien informer leurs patients : Oui 75.7 % Non 24.3 % 69 (Q3) Les médecins informaient au mieux leurs patients : Par conviction éthique Par respect de la loi et du code de déontologie médicale Afin d’améliorer l’efficience des soins Afin de donner aux patients une plus grande autonomie 89.2% 56.8% 97.3% 83.8% (Q4) Il leur arrivait de ne pas informer un patient sciemment : Jamais 24.3 % Parfois 75.7 % Souvent 0% Si oui : • Pour protéger le patient : Jamais 27 % Parfois 64.9 % Souvent 8.1 % Parfois 35.1 % Souvent 0% • Par manque de temps : Jamais 64.9 % • A cause de la présence d’une tierce personne : Jamais 32.4 % Parfois 64.9 % Souvent 2.7 % (Q5) De l’avis des médecins, deux patients de profils différents devaient recevoir la même information : Oui 21.6 % Non 89.2 % 70 (Q6) Les médecins avaient l’habitude de délivrer les informations : Avec les termes médicaux précis Ou, en des termes plus simples 10.8 % 91.9 % De manière plutôt complète Ou, résumées en quelques mots-clés 62.2 % 37.8 % Sans cacher la gravité Ou, en des termes optimistes 62.2 % 37.8 % 3.7 Synthèse des résultats L’évolution : La moitié des médecins a considéré que la loi avait amélioré la qualité de leur relation avec leurs patients. Un tiers d’entre eux l’ont jugée sans influence, et 13% ont ressenti une dégradation des relations liée à la loi. Rapprochons ces réponses de celles des patients, qui montraient que ceux-ci ne se préoccupaient pas vraiment des lois : la moitié des patients avaient entendu parler de la loi de mars 2002, et 14% seulement répondaient juste concernant son contenu. Par ailleurs, seulement 10% d’entre eux estimaient devoir être informés parce que c’était la loi. Une majorité des médecins se sont déclarés plus attentifs qu’avant à bien informer leurs patients (76%). Pour un quart des médecins, il n’y a pas eu de changement. Ce résultat est très corrélé à celui retrouvé dans le questionnaire aux patients, où 67% des patients estimaient que leur médecin se préoccupait plus qu’avant de les informer. Les raisons d’informer : Les médecins ont massivement considéré (97%) que la raison principale, était d’améliorer l’efficience des soins. Toujours du point de vue pratique, 84% d’entre eux ont déclaré informer pour donner une plus grande autonomie aux patients. La raison éthique a également 71 représenté un fort pourcentage (89%). En revanche, seulement la moitié des médecins a déclaré informer par respect des lois. Les patients, quant à eux, étaient surtout attachés à l’aspect pratique, c'est-à-dire à la relation entre information et efficience du traitement : la moitié d’entre eux considérait que cela améliorait leur observance au traitement. Par ailleurs, ils souhaitaient majoritairement être informés pour être rassurés et renforcer leur confiance envers leur médecin. Concernant l’autonomie, ils étaient 42 % à souhaiter être informés pour avoir un droit de regard et de contrôle, et 20% pour avoir une plus grande autonomie. L’aspect éthique, en revanche, préoccupait peu les patients (18% seulement estimaient devoir être informés pour des raisons d’éthique), et l’aspect légal recueillait encore moins de suffrages (10% seulement des patients estimaient devoir être informés parce que c’était la loi). Ce résultat devrait contribuer à rassurer les médecins concernant la dérive procédurière de la pratique médicale. Ne pas informer : Les trois quarts des médecins ont déclaré qu’il leur arrivait de ne pas informer sciemment. Aucun ne le faisait souvent, et le quart restant ne le faisait jamais. Les trois quarts le faisaient parfois ou souvent pour protéger le patient. Ils ont été légèrement moins nombreux à invoquer la présence d’une tierce personne, et le manque de temps n’a été invoqué que par un tiers d’entre eux. Ce résultat est particulièrement frappant quand on se rappelle celui retrouvé dans le questionnaire aux patients : 96% des patients jugeaient important d’être bien informés, et 71% considéraient qu’aucune situation ne justifiait de ne pas être informés. Et là encore, ce sont des arguments pratiques que les patients ont invoqués lors des entretiens (le fait de savoir permet de s’organiser). Adaptation de l’information au patient : Les médecins ont considéré massivement que deux patients de profils différents ne devaient pas recevoir la même information (89%). On retrouve ce résultat présenté sous une autre forme, dans le questionnaire aux patients : d'une part, ceux-ci étaient très attachés à la capacité d’écoute de leur médecin, préalable nécessaire pour que le médecin connaisse ce que 72 souhaite savoir le patient. D’autre part, la disparité des réponses, en particulier à la question 22 concernant la manière d’être informé, a traduit la complexité des souhaits des personnes en matière d’information. On a pu extraire quelques données permettant de discerner schématiquement quelques grands groupes de patients, en croisant les réponses aux questions de souhait et de satisfaction, et les éléments de connaissance des patients (sexe, âge, état de santé). Modalités de transmission de l’information : Une grande majorité des médecins ont déclaré opter pour des termes simplifiés (92%). Cependant, 62% ont estimé informer de manière complète. Les patients, quant à eux, souhaitaient pour moitié être informés en des termes médicaux précis, et pour moitié en des termes plus simples, et ce pour tous les types de maladies. Les deux tiers souhaitaient une information complète concernant les maladies bénignes, et 81% la souhaitaient complète en cas de maladie grave. Les réponses des médecins ont été plus modérées concernant la vérité, puisque 62% d’entre eux ont déclaré avoir l’habitude de ne pas cacher la gravité, tandis que 38% avaient l’habitude de choisir des termes optimistes. Les patients, quant à eux, souhaitaient qu’on ne leur cache pas la vérité dans 87% des cas, et ce, quel que soit le type de maladie. 73 4 Discussion Nous aborderons en première partie de cette discussion la méthodologie de notre étude. En seconde partie, nous élaborerons une réflexion à partir des principaux éléments recueillis auprès des patients et des médecins, illustrée de données extraites de la littérature. 4.1 Concernant la méthodologie. Biais de sélection Certaines difficultés sont inhérentes à ce type d’étude. Tout d’abord, la question de la représentativité de notre population. L’objectif n’était pas d’obtenir une population représentative de la population générale d’Aquitaine, ce qui aurait nécessité un échantillon beaucoup plus important sur un grand nombre de cabinets. Nous souhaitions essentiellement obtenir des pistes de réflexion par une étude auprès de patients qui consultent. Ensuite le biais d’auto sélection, comme dans toute enquête par sondage, n’a pas pu être contourné. En effet, la longueur du questionnaire et la complexité de certaines questions ont restreint le champ des répondants. Par l’effort que ce questionnaire nécessitait, il y a donc eu sélection des patients, d’une part, capables d’y répondre, et d’autre part, éventuellement intéressés par cette question. Les questionnaires étaient présentés sous forme de questions fermées pour l’essentiel, et malgré leur longueur, nous avons obtenu un taux de réponses satisfaisant jusqu’à la fin du questionnaire. (Taux de réponses généralement > 90%, y compris pour la dernière question). Ceci est probablement lié à la structure du questionnaire, qui alternait une forme d’enquête d’opinion et des questions d’ordre plus pratique. La tendance des patients à être globalement intéressés par la question de l’information peut être à rapprocher de la qualité de relation avec les médecins de ces cabinets. Cependant, il n’est pas possible de connaître le nombre de patients qui, voyant le questionnaire en salle d’attente, ont choisi de ne pas répondre en raison du sujet de l’enquête. 4.2 Adéquation entre l’information délivrée par le médecin généraliste et les attentes de ses patients 74 Nous rappellerons en premier lieu l’importance de l’information pour les patients, en la replaçant dans un contexte plus global d’évolution sociale, ainsi que la place qu’occupe pour eux le médecin généraliste dans la réalisation de cette mission. En deuxième lieu, nous développerons les raisons qui motivent patients et médecins à souhaiter une information de qualité. En troisième partie, nous extrairons de notre enquête les difficultés et les obstacles à la bonne délivrance de l’information qui ont été mentionnés. Enfin en quatrième partie, nous examinerons la manière dont les deux parties envisagent la délivrance de l’information. 4.2.1 Les patients souhaitent être informés, en particulier par leur médecin généraliste Un premier objectif de l’étude consistait à déterminer la place de l’information dans la pratique des soins, du point de vue des patients. Les patients ont affirmé rechercher l’information de manière massive. Très majoritairement, ils estimaient qu’aucune situation ne justifie de ne pas être informé totalement par son médecin, notion qu’on retrouve fréquemment dans la littérature10,80. Cette proportion était majorée chez les patients ayant été en contact avec la maladie (ayant eu une maladie grave ou bien ayant été souvent hospitalisés). Et pourtant, les trois quarts des médecins ont déclaré qu’il leur arrivait de ne pas informer sciemment. La plupart d’entre eux faisaient ce choix pour protéger les patients, même si la notion que l’information puisse être nuisible aux patients est aujourd’hui remise en cause dans ses fondements par des données de la littérature. En effet, même dans le cas d’annonce de mauvaises nouvelles, il est plus nuisible de ne pas informer les patients6. Finalement, le choix de ne pas informer permet surtout de contourner deux difficultés majeures : celle d’essayer d’approcher la meilleure manière possible d’informer, et celle pour le médecin de surmonter ses propres angoisses. En effet, ces annonces difficiles renvoient le médecin à lui-même et à sa propre représentation de la maladie, et il convient de rappeler ici que le professionnalisme du médecin, ne saurait effacer sa nature d’être humain et de patient potentiel. La place du médecin généraliste pour les patients qui souhaitent s’informer sur leur santé, a, elle aussi, été redéfinie. Les patients ont tendu à émettre davantage de réserves face aux assertions de leur médecin, sans pour autant qu’il soit apparu de véritable défiance nuisible à 75 la qualité des soins11. Cette nouvelle tendance révèle simplement l’intrication du monde médical et de la réalité sociale, qui progressent ensemble dans un même mouvement. Le climat social contemporain, plus individualiste, mais aussi où chaque personne gagne en autonomie en accédant à toutes les informations requises grâce aux outils de communication modernes, a gagné le domaine de la santé. Les médecins, quant à eux, ont pris peu à peu conscience qu’ils devaient s’adapter à cet éloignement radical du modèle paternaliste traditionnel. Ces possibilités pour les patients de s’informer ailleurs, ne relèguent cependant pas le médecin au second plan. Les patients continuent de placer leur médecin au cœ ur de l’information, et les médecins généralistes deviennent les traducteurs et médiateurs d’une information qui, parfois, a déjà été donnée mais n’a pas été entendue ou comprise. On pressent une évolution dans les témoignages apportés par les deux parties. La majorité des patients ont, en effet, estimé participer aux décisions concernant leur santé, et 2/3 d’entre eux ont déclaré avoir ressenti une évolution récente dans ce domaine ; les médecins euxmêmes ont affirmé être plus sensibles qu’auparavant à la transmission de l’information. On peut se demander si cette évolution est en rapport avec les nouvelles lois sur l’information. Le premier élément à noter est que les patients interrogés connaissaient mal les lois, et s’en préoccupaient peu. En particulier, ils ont été peu nombreux à invoquer les lois comme raison pour souhaiter être informés. En revanche, celles-ci semblent bien avoir influencé le comportement des médecins, puisque la moitié d’entre eux ont considéré que la loi avait amélioré la qualité de leur relation avec leurs patients. Ces données montrent la complexité des rapports entre les lois et la réalité pratique. Elles sont surtout de nature à rassurer les médecins inquiets de l’évolution légaliste de la médecine, problème qui finalement semble davantage préoccuper les médecins et les juristes que les patients eux-mêmes. 4.2.2 Informer pour une meilleure prise en charge au quotidien Nous nous sommes intéressés aux raisons qui motivaient patients et médecins à privilégier l’information dans le déroulement des soins. La première motivation invoquée par les patients a été la confiance, renforcée pour ceux ayant reçu des explications. L’importance de la confiance au sein de la relation de soins a été affirmée par la très large majorité, et a constitué un thème récurrent dans les commentaires libres des patients à la fin du questionnaire. On retrouve d’ailleurs dans la littérature le fait que pour les patients dont le médecin généraliste a déjà fait part de ses incertitudes, le sentiment ressenti est la confiance80. D’autre part, la 76 grande majorité des patients a répondu qu’une grande quantité d’informations les rassurait. Il est intéressant de mentionner ici que les patients ayant eu une maladie grave étaient encore moins nombreux que les autres à être angoissés par beaucoup d’informations ; de la même façon, les patients ayant souvent été hospitalisés recherchaient une information plus précise. Sans doute est-ce parce qu’ils ont fait l’expérience du bénéfice que pouvait leur procurer l’information ; une partie d’entre eux a peut-être fait, au contraire, les frais d’un manque d’information. Remarquons cependant qu’il convient de ne pas négliger les 18% de patients qui ont déclaré être angoissés par l’information, car c’est peut-être pour ceux-là qu’on sera le plus délétère en ne respectant pas leur angoisse. Il conviendra donc de les reconnaître, et ce par une bonne connaissance de la part du médecin de son patient. Il s’agira en fait surtout, d’apporter un soin particulier à la manière de délivrer l’information. C’est également le résultat qui ressort d’une étude publiée en 2000114. Les médecins, quant à eux, ont considéré en grande majorité que la raison principale pour bien informer, était d’améliorer l’efficience des soins ; et également, de donner une plus grande autonomie aux patients. Les patients ont été, eux aussi, attachés à l’aspect pratique, et ils ont reconnu un lien fort entre information et efficience du traitement ; en particulier, la moitié d’entre eux a considéré que cela améliorait leur observance au traitement. Ils souhaitaient également être informés pour conserver une plus grande autonomie, et l’étude par entretiens a montré qu’ils étaient à la recherche d’informations concrètes intégrant le retentissement de leur maladie sur leur vie quotidienne. Il nous apparaît ici intéressant de détailler l’impact de l’information sur l’observance. Les patients interrogés ont invoqué comme raisons pour ne pas suivre un traitement prescrit, un sentiment d’inutilité ou de dangerosité à l’égard du médicament. Le plus souvent, ils ont déclaré prendre cette décision au cours de la consultation, l’énonçant auprès du médecin, ce qui laissait à celui-ci la possibilité d’influencer le comportement du patient par des explications. Un tiers des patients a déclaré prendre cette décision à la lecture des notices ; or, la grande majorité d’entre eux lisent les notices. D’autre part, les patients déclarant ne pas souhaiter respecter une prescription, ont affirmé être convaincus par des explications, toujours ou souvent dans 86% des cas. On voit donc que le médecin peut modifier considérablement le comportement de ses patients, en relativisant les effets secondaires afin de préparer à la lecture des notices, qui est bien souvent systématique. Cette idée est à rapprocher d’une étude 77 réalisée en 2001, qui a montré que le conseil personnalisé avait un effet significatif sur l’observance, à l’inverse de la délivrance de documents écrits115. Par ailleurs, les réponses aux questions ouvertes et les entretiens avec les patients, nous ont permis de définir un autre élément d’importance dans la prise en charge de la maladie, et qui ne se conçoit que par le biais d’une bonne information : il s’agit de la qualité du mode de vie des patients. Ceux-ci ne pourront s’adapter, s’organiser, réagir positivement par rapport à leur maladie qu’en étant bien informés de la conduite à tenir thérapeutique, des effets secondaires possibles, ainsi que du pronostic de celle-ci. Dans cette perspective il convient de mentionner ici l’existence de programmes d’éducation thérapeutique116 proposés aux malades porteurs de pathologies chroniques comme le diabète, l’asthme 117 ou le VIH, comme par exemple les programmes menés par l’ADEPA en Aquitaine118. L’enjeu consiste non seulement à informer les patients, mais également à les accompagner dans la mise en œ uvre du programme thérapeutique et dans la réorganisation de leur vie quotidienne, afin de favoriser leur autonomie. 4.2.3 Obstacles à la délivrance de l’information Nous nous sommes ensuite intéressés aux conditions de bonne délivrance de l’information. Parmi les facteurs invoqués en cas d’insuffisance de l’information, le facteur temps a joué un rôle important. En particulier, la durée de la consultation est ressortie de manière significative. Ce facteur a également été mentionné dans une autre question, où 40% des patients pensaient que leur médecin devrait prendre plus de temps pour les écouter. Cependant, l’élément qui est apparu le plus fréquemment est le fait que les questions ne venaient souvent aux patients qu’à l’issue de la consultation. Ce résultat n’est pas péjoratif, puisque les patients ont déclaré être majoritairement à l’aise pour contacter de nouveau leur médecin. Il semble donc que les patients avaient besoin d’un temps de maturation après la consultation. L’importance du temps d’écoute, mais également d’information, se trouve donc également assortie de la nécessaire disponibilité des médecins, d’ailleurs reconnue par la plupart des patients. Par ailleurs, il ressort du questionnaire qu’en cas d’information insuffisante, les patients ont déclaré prendre volontiers une part de responsabilité (22% n’ont pas su formuler leurs attentes, 16% n’ont pas osé poser des questions). 78 Le problème des idées fausses que peuvent se faire les médecins sur les connaissances pré existantes du patient a également été signalé. Le décalage entre la croyance du médecin que, la maladie étant simple et bénigne, elle est bien connue des patients, et le souhait des patients d’en savoir plus au contraire, est un obstacle à la satisfaction des patients concernant l’information qui leur est apportée. Cette notion nous fait entrevoir le caractère primordial dans l’écoute que le médecin accorde à ses patients. Nous avions intriqué la notion du temps et de l’écoute, à la question 12 du questionnaire aux patients : 54% des patients étaient satisfaits du temps consacré par leur médecin pour les écouter ; tandis que 40% d’entre eux ont estimé manquer de temps. Il convient de noter ici que cette réponse concernait 46% de femmes et 28% d’hommes ; elle doit être lue en se rappelant que les cabinets médicaux d’étude comptaient neuf praticiens hommes et une femme, et il est vraisemblable que cela puisse influencer l’écoute ou le sentiment d’écoute de la part des patients. 4.2.4 Modalités de la délivrance de l’information Nous intéressant à la manière de délivrer l’information, nous avons interrogé patients et médecins sur la façon de communiquer les informations. Une grande majorité des médecins a déclaré opter pour des termes simplifiés (92%) ; cependant, les deux tiers ont estimé informer de manière complète. Les patients, quant à eux, ont été aussi nombreux à souhaiter être informés en des termes médicaux précis, qu’en des termes plus simples, pour tous les types de maladies. Les premiers étant dans un souci de ne pas être exclus de la connaissance médicale, les autres souhaitant avant tout comprendre leur maladie. Une grande majorité d’entre eux a déclaré souhaiter être informée de manière complète, et ce résultat a encore été majoré dans le cas d’une maladie grave, mais avec le souhait d’être informé plus progressivement. Il apparaît encore un décalage entre les attentes des patients et le comportement des médecins, concernant la notion de vérité. Les patients ont déclaré souhaiter, pour 87% d’entre eux, qu’on ne leur cache pas la vérité, et ce quel que soit le type de maladie. Les réponses des médecins ont été plus modérées concernant la vérité, 62% ayant l’habitude de ne pas cacher la gravité, contre 38% préférant choisir des termes optimistes. 79 5 Perspectives d’application La grande variété de réponses à nos questionnaires, démontre l’extrême importance de l’adaptation du médecin à son patient. Il se dégage ici deux notions essentielles : d’une part, la connaissance de son patient par le médecin, acquise au fil du temps grâce au suivi régulier et grâce à l’écoute que le médecin lui accorde104 ; d’autre part, la connaissance globale du souhait majoritairement exprimé par les patients présentant telle ou telle caractéristique. Les médecins ont massivement considéré que deux patients de profils différents ne devaient pas recevoir la même information. De la même manière, les patients se sont déclarés très attachés à la qualité d’écoute de leur médecin. La répartition très disparate de leurs réponses concernant les différentes manières que devait avoir leur médecin de les informer, traduit la complexité des souhaits des personnes en matière d’information ; par ailleurs, la recherche de la bonne connaissance du souhait des patients de la part des médecins nécessite un temps dont ils ne disposent pas toujours suffisamment. Pour les aider, nous avons envisagé l’élaboration d’un outil de travail qui leur serait destiné. Dans un premier temps, cet outil peut se concevoir selon le modèle suivant : afin d’aider les médecins à savoir a priori comment se comporter, on proposerait aux médecins une typologie des patients où figureraient les souhaits du plus grand nombre, en fonction de leurs caractéristiques telles que leur âge, leur sexe, leur état de santé ; nous en donnons ici un exemple, qui s’appuie exclusivement sur les données obtenues dans notre questionnaire aux patients. Les femmes expriment un besoin plus important d’être écoutées. Par ailleurs, pour améliorer l’observance, il sera nécessaire de les informer davantage sur la nécessité des traitements et leurs effets secondaires, car elles sont plus méfiantes à leur égard. Il faudra d’ailleurs plus les informer de manière générale, car l’information a davantage tendance à les rassurer que les hommes. Les patients ayant été atteints de maladie grave ne trouvent, en grande majorité, aucune situation justifiant que le médecin ne les informe pas. L’observance aux traitements leur fait moins peur qu’aux autres patients. Cependant, ils ont besoin d’être informés pour bien respecter les prescriptions. Ils sont, plus que les autres, rassurés par l’information. Il faudra donc mettre l’accent sur l’information des patients ayant été atteints de maladies grave. C’est 80 également le cas des patients ayant été de nombreuses fois hospitalisés, qui recherchent une information plus précise que les autres. Les jeunes patients sont plus influencés par des avis extérieurs, il faudra donc insister sur l’information concernant les traitements, pour améliorer l’observance. Ils émettent, plus que les autres, le souhait d’être eux-mêmes les acteurs de leur santé. On retrouve d’ailleurs cette notion dans la littérature114. Dans un second temps, on pourrait proposer un autre outil de travail aux médecins, basé sur l’écoute et l’interrogatoire du patient, reprenant par exemple la question 22 du questionnaire aux patients : les médecins pourraient explicitement demander à leurs patients comment ils souhaitent être informés, en cas de maladie grave, chronique ou bénigne (en des termes simples ou précis ? ; de manière optimiste ou sans cacher la gravité ? ; de manière exhaustive ou partielle ?; en une seule consultation ou progressivement ?). Ils pourraient poser ces questions de manière systématique aux patients, au même titre qu’ils les interrogent déjà sur leur profession ou leurs antécédents. Il faudrait bien sûr une mise à jour régulière, les réponses étant susceptibles d’évoluer, comme on l’a vu dans les questionnaires aux patients, avec l’âge et les pathologies rencontrées. Nous avons bien conscience du caractère très schématique et non exhaustif de tels outils. Nous savons en particulier qu’ils ne remplaceront en aucun cas la finesse psychologique et l’intuition dont le médecin doit savoir faire preuve pour s’installer avec son patient dans une relation de confiance et de compréhension mutuelles. 81 Conclusion La médecine est source de pouvoir pour celui qui l’exerce, et ce pouvoir est d’autant plus grand que le savoir médical reste l’apanage du soignant. Accepter d’informer, c’est accepter de partager cette connaissance, c’est se repositionner par rapport à l’interlocuteur. La manière dont les médecins ont informé leurs patients au cours des âges, est symptomatique des relations entre soignants et soignés, replacée dans le cadre plus large d’une organisation et d’une hiérarchisation sociale. Le modèle de notre société contemporaine vient de gagner la profession médicale : cette société éprouve le besoin de redéfinir le couple soignant-soigné, et ce repositionnement se comprend dans deux cadres : le cadre social, où le professionnel se doit de transmettre ses connaissances à son partenaire social, son patient ; le cadre légal, où la personne malade devient une catégorie juridique. Cependant, l’étude présentée dans ce mémoire se révèle rassurante pour les médecins inquiets de l’évolution juridique de la médecine. En effet, elle montre que les patients ne se sentent globalement pas concernés par cette tendance légaliste, et recherchent surtout l’amélioration de la qualité des soins. Au-delà de ces nécessités sociale et juridique, la complexité des relations entre patients et médecins impose une réflexion philosophique et éthique. C’est donc également dans cet impératif éthique, que le médecin se doit de répondre à une demande d’information des patients concernant leur santé. Pour mener à bien cette mission, des principes fondamentaux sont à respecter : replacer le patient au centre de la consultation, en tant que personne, et non pas en tant qu’objet à soigner à l’aide d’un savoir purement technique ; savoir analyser la demande de chaque patient, l’intuition du médecin devant être employée à discerner des angoisses et des souhaits non formulés. Le travail réalisé dans cette thèse a mis en évidence la grande disparité des comportements des patients, à travers la grande variété de réponses et de témoignages. Ce résultat évoque la nécessité de s’adapter aux patients, ce qui est d’une grande complexité et nécessite un temps important de la part des médecins. Pour les aider dans cette tâche, nous leur avons proposé des outils de travail basés sur l’écoute et les attentes des patients. L’objectif est de constituer une sorte d’« aide à l’information » au même titre qu’il existe déjà des « aides au diagnostic ou au traitement ». Ces outils peuvent aider les médecins qui auraient l’utilité à inclure la pratique de l’information dans leur activité, non sur injonction de la loi, mais dans le désir de répondre aux attentes de leurs patients. 82 Annexes A. Calendrier de réalisation Décembre 2002 : Participation au premier séminaire de l’ANAES sur le projet d’élaboration des recommandations concernant l’information aux patients. Décembre 2002 à Mars 2003 : Constitution d’une bibliographie, mise en place du projet et élaboration du questionnaire aux patients. Avril 2003 : Tests des questionnaires auprès de patients et modifications. Mai 2003 : Participation au deuxième séminaire de l’ANAES sur ce sujet. Mai à Juillet 2003 : Recueil des questionnaires déposés dans les salles d’attente de trois cabinets médicaux. Août et Septembre 2003 : Saisie des données et analyse statistique. Octobre 2003 : Participation au troisième séminaire de l’ANAES sur ce thème, et présentation orale de nos premiers résultats sous forme de diaporama. Janvier à Avril 2004 : Elaboration, recueil par courrier électronique avec une relance, puis saisie des données et analyse des questionnaires aux médecins. Novembre 2003 à Juin 2004 : Rédaction de la thèse. 83 B. Questionnaire aux patients Affiche adressée aux patients Le 2 avril 2003 Madame, Monsieur, Dans le cadre d’une thèse en médecine générale dont le sujet est : « Évolution récente de l’information au patient », Merci de bien vouloir remplir le questionnaire présent dans la salle d’attente. Ce questionnaire restera bien évidemment anonyme et les informations qui découleront de son exploitation n’auront aucune autre utilité que leur intérêt scientifique. En vous remerciant de votre précieuse collaboration. Séverine Cognet 84 Madame, Monsieur, Merci de participer à ce travail de recherche qui vise à renforcer la compréhension mutuelle entre les patients et les médecins généralistes. Cochez la ou les réponses qui semblent le mieux correspondre selon vous. Si vous n'avez pas eu le temps de le compléter intégralement, merci de nous le déposer ultérieurement. Informations générales (indispensables pour l'interprétation du questionnaire) Moins de 25 ans Age Entre 26 et 39 ans Entre 40 et 54 ans Entre 55 et 64 ans Plus de 65 ans Féminin Sexe Bordeaux Lieu d’habitation Masculin CUB Autre conjoint Personnes vivant avec vous enfants parents Profession : _______________________________________ Consultez-vous, autant que possible, toujours le même médecin généraliste ? Oui Non Fréquence des visites au cabinet de votre médecin pour vous-même (par mois) : plus de 1 ~1 moins de 1 pour vos enfants (par mois) : plus de 1 ~1 moins de 1 1 2à5 Nombre d’hospitalisations au cours de votre vie 0 Avez-vous eu une maladie "grave" ?- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - Oui Non En êtes-vous guéri(e) ? - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - Oui Non Oui Non >5 Si oui, cette guérison est-elle liée : à l'efficacité de la médecine à votre volonté Oui Non à une relation de confiance avec votre médecin Oui Non autre Début du questionnaire 1. Avez-vous entendu parler de la loi du 4 mars 2002 (loi Kouchner) relative à l’information du patient ? Oui 2. Si oui, cette loi : VRAI Non FAUX Je ne sais pas Permet au patient d’obtenir son dossier médical complet Incite les médecins à donner plus d’informations aux patients Oblige un patient à avoir un médecin référent 3. Lisez-vous des magazines de santé ou des sites santé sur Internet, écoutez-vous des émissions de santé, télévisées ou radio ? régulièrement occasionnellement jamais 85 4. Lisez-vous en détail les notices de vos médicaments ? Toujours Parfois Jamais 5. A l’occasion d’une maladie, vous recevez une plus grande quantité d’informations par : votre médecin votre entourage les médias Autres 6. En terme de qualité, vous accordez plus de confiance à l’information apportée par : votre médecin généraliste des spécialistes le pharmacien kiné, infirmières… votre entourage les médias Autres 7. A l’issue d’une consultation, êtes-vous satisfait par l’information donnée par le médecin Dans le cas de : Toujours Souvent Rarement Jamais Une maladie grave Une maladie bénigne et ponctuelle Une maladie chronique 8. Avez-vous le sentiment de participer aux décisions thérapeutiques concernant votre santé ? 9. Et à celles de vos enfants ? Toujours Souvent Rarement Jamais Toujours Souvent Rarement Jamais 10. Avez-vous ressenti une évolution ces dernières années : votre médecin se préoccupe-t-il plus qu’avant de vous informer ? Oui Non 11. A l’issue d’une consultation, vous sentez-vous à l’aise pour re-contacter votre médecin sur le même sujet ? Oui Non 12. Pensez-vous que votre médecin devrait prendre plus de temps pour vous écouter ? Oui Non 13. Concernant votre maladie ayant fait l’objet de la consultation, vous vous posez des questions : Sur le moment, face à votre médecin A la sortie du cabinet médical A votre retour chez vous, en y réfléchissant Par la suite, en en parlant à votre entourage En vous renseignant par le biais des médias 86 14. Lorsque l’information n’est pas suffisante, c’est : Du fait de votre médecin : Consultation trop courte Par choix délibéré du médecin de ne pas tout dire Parce que le médecin n’a pas écouté vos questions Parce que le médecin n’a pas compris vos questions Il estime que la maladie est bénigne, ou bien que vous la connaissez bien Parce que vous n’avez pas compris les explications du médecin (vocabulaire incompréhensible) De votre fait : Parce que vous n’avez pas osé poser des questions Parce que vous n’avez pas su formuler vos attentes Parce que vous n’étiez pas prêt à entendre ce qu’il avait à vous dire Parce que les questions ne vous sont venues qu’à l’issue de la consultation Autre : 15. Pour vous, est-il important d’être bien informé concernant la prise en charge de votre santé? Oui Non 16. Préféreriez-vous prendre plus de décisions vous-même ? Dans le cas de : Oui Non Une maladie grave Une maladie bénigne et ponctuelle Une maladie chronique 17. Souhaiteriez-vous que votre généraliste consacre une consultation au seul but de mieux vous informer sur une maladie contraignante? Oui Non 18. Pour vous, y a-t-il des situations qui justifient que votre médecin ne vous informe pas totalement ? Oui Non 19. Si oui, lesquelles ? En cas de maladie grave En cas de maladie curable mais de traitement pénible En cas de maladie bénigne et ponctuelle En cas de maladie chronique 20. Dans ces situations, pourquoi préférez-vous ne pas être informé ? Pour ne pas vous inquiéter, sachant que votre médecin fera de toute façon tout ce qu’il faut pour bien vous soigner Cela ne sert à rien Ce n’est pas de votre ressort Autre 21. Beaucoup d’informations concernant votre état de santé : Oui Non Vous rassure Vous angoisse 87 22. Vous préférez que l’information vous soit délivrée : en cas de maladie : Cochez, pour chacune des 3 situations suivantes : (1) grave (2) curable mais de (3) bénigne et traitement pénible ponctuelle Avec les termes médicaux précis -----------------------------------------------ou, en des termes plus simples, au risque d’être moins précis ------------De manière complète -------------------------------------------------------------ou, résumée en quelques mots-clés -------------------------------------------En une seule consultation --------------------------------------------------------ou, progressivement, par étapes ------------------------------------------------Sans cacher la gravité ------------------------------------------------------------ou, en des termes optimistes, au risque de minimiser la gravité de la maladie 23. Vous est-il déjà arrivé de vous faire accompagner pour une consultation ? Oui Non 24. Si oui, pourquoi ? 25. Au cours d’une consultation, la présence d’un proche vous accompagnant va : Oui Non Améliorer la qualité de l’information apportée par le médecin Vous permettre de mieux mémoriser et comprendre les propos du médecin Être un frein à la bonne délivrance de l’information Ne rien changer concernant l’information 26. Cela vous arrive-t-il de ne pas suivre un traitement prescrit ? Toujours Souvent Oui Non Rarement Jamais En cas de maladie grave En cas de maladie curable mais de traitement pénible En cas de maladie bénigne et ponctuelle En cas de maladie chronique 27. Si oui, pourquoi ? Par manque d’information sur le traitement : vous ne comprenez pas le rôle des médicaments Parce qu’il vous paraît inutile Parce qu’il vous paraît dangereux Parce que l’un des médicaments contient des substances vous faisant peur (cortisone, … ) Parce que vous avez peur de l’accoutumance Autre 28. Dans le cas où vous décidez de ne pas prendre un traitement, vous prenez cette décision : Oui Non Face au médecin, et vous le lui dites Face au médecin, mais vous n’en dites rien Après avis extérieur (pharmacien, famille, amis, lecture) A la lecture de la notice des médicaments Autre 88 29. Si toutefois vous en parlez à votre médecin, une explication concernant le traitement peut-elle suffire à vous convaincre ? Toujours 30. Pour quelles raisons vous paraît-il important d’être bien informé ? En cas de maladie : Souvent Rarement Jamais Cochez, pour chacune des 3 situations suivantes : (1) grave (2) curable mais de (3) bénigne et traitement pénible ponctuelle Par curiosité intellectuelle Pour avoir un droit de regard et de contrôle C’est une question d’éthique C’est la loi Cela renforce votre confiance envers votre médecin Pour être rassuré Cela vous donne une plus grande autonomie Cela vous motive pour bien respecter les prescriptions Vous avez le sentiment que cela améliore l’efficacité du traitement 31. Ce questionnaire vous inspire-t-il d'autres commentaires : Merci d'avoir consacré du temps à ce questionnaire et de le déposer dans la boîte prévue à cet effet, afin de préserver votre anonymat. Séverine Cognet 89 C. Questionnaire aux médecins Lettre adressée aux médecins Chère consoeur, cher confrère, Dans le cadre de ma thèse sur l’information au patient, j’ai eu le plaisir de présenter au cours du séminaire du mois d’octobre 2003, les résultats d’une enquête réalisée auprès de patients de la région Bordelaise. Afin de compléter mon travail, votre point de vue de médecin me serait très précieux. Je me permets donc de vous solliciter pour répondre au court questionnaire joint au fichier attaché. Quelques minutes sont suffisantes pour le remplir et nous le renvoyer par E-mail. En vous remerciant par avance pour votre précieuse collaboration, Bien cordialement, Séverine Cognet 90 QUESTIONNAIRE AUX MEDECINS Suivant les questions, cochez la case ou sélectionnez la réponse qui vous convient le mieux dans le menu déroulant qui apparaît lorsque vous cliquez sur les parties grisées. Q1 : Au sujet du texte de loi du 4 mars 2002 (loi Kouchner) relative à l’information, vous paraît-elle influer sur votre relation avec les patients : Positivement (Choix multiple parmi : Positivement, négativement ou Sans influence) Q2 : Avez-vous le sentiment d’être plus attentif qu’auparavant à bien informer vos patients ? Oui Non Q3 : Vous informez au mieux vos patients : Par conviction éthique Par respect de la loi et du code de déontologie médicale Afin d’améliorer l’efficience de vos soins Afin de donner à vos patients une plus grande autonomie Oui Oui Oui Oui Non Non Non Non Q4 : Vous arrive-t-il de ne pas informer votre patient sciemment : (Choix multiple parmi : jamais, parfois ou souvent) Jamais (Choix multiple parmi : jamais, parfois ou souvent) Dans quels cas ? Pour protéger le patient (cas d’une maladie grave par exemple) Par manque de temps A cause de la présence d’une tierce personne Jamais Jamais Jamais Q5 : Pour vous, deux patients de profils différents (socioculturel, âge, état de santé… ) doivent-ils recevoir la même information ? Oui Non Q6 : Vous avez l’habitude de délivrer les informations : -Avec les termes médicaux précis -Ou, en des termes plus simples, au risque d’être moins précis -De manière plutôt complète -Ou, résumées en quelques mots-clés -Sans cacher la gravité -Ou, en des termes optimistes, au risque de minimiser la gravité de la maladie 91 D. Tableaux des données et des tests réalisés sur le questionnaire aux patients Nous restituons dans les paragraphes suivants les pourcentages de réponses aux différentes questions (Q numérotées comme dans le questionnaire aux patients), là où différentes catégories de patients ont répondu de manière différente. Nous avons analysé les différences de réponses entre : • Trois tranches d’âge différentes (<39 ans, entre 40 et 54 ans, >55 ans). • Les hommes et les femmes. • Les patients ayant été peu hospitalisés et ceux l’ayant été plus de deux fois. • Les patients ayant eu une maladie grave et ceux déclarant ne pas en avoir eu. Pour chaque question, les pourcentages sont restitués ligne par ligne dans l’ordre de réponses du questionnaire. Pour chaque différence significative, nous reportons le résultat du test statistique du Chi-2. Nous considérons comme statistiquement différentes les réponses dont le test du Chi-2 donne un degré de signification p < 0.05 (5%). 92 1. Influence de l’âge sur les réponses des patients. A : > 55 ans, B : 40-54 ans, C : < 39 ans Question Fréquence des visites Maladies graves Q1 Q5 Q9 Q10 Q16B Q16C Q21 Q22C Age Degré de signification A 21% 34% 36% B 18% 28% 45% C 9% 16% 71% A 30% 70% B 14% 82% C 11% 87% A 67% 24% B 57% 40% C 47% 52% A 90% 3% 3% B 97% 3% 11% C 94% 13% 10% A 4% 14% 4% B 20% 38% 9% C 27% 30% 5% A 73% 13% B 75% 23% C 54% 37% A 19% 47% B 48% 34% C 38% 52% A 16% 46% B 35% 43% C 32% 54% A 83% 0% 9% 16% B 63% 6% 23% 14% C 82% 9% 22% 33% A 29% 29% 33% 20% 17% 13% B 46% 49% 55% 18% 14% 6% C 38% 47% 59% 28% 25% 5% p=0.001 p=0.009 p=0.007 p=0.024 p=0.001 p=0.003 p=0.003 p=0.037 p=0.002 p=0.023 93 Q23 Q25A Q25B Q25C Q25D Q26B Q26D Q27A Q27B Q27C Q27D Q28A Q28B A 27% 63% B 40% 51% C 56% 39% A 16% 24% B 18% 29% C 23% 44% A 33% 13% B 29% 17% C 41% 32% A 9% 19% B 14% 26% C 11% 53% A 16% 10% B 32% 11% C 43% 28% A 1% 0% 3% 41% B 0% 0% 18% 48% C 1% 4% 15% 53% A 3% 3% 7% 43% B 2% 5% 23% 40% C 4% 14% 18% 43% A 1% 10% B 2% 23% C 8% 27% A 9% 7% B 9% 20% C 15% 23% A 6% 7% B 3% 20% C 11% 27% A 9% 6% B 9% 18% C 10% 25% A 31% 7% B 32% 17% C 37% 27% A 1% 6% p=0.003 p=0.049 p=0.013 p=0.0003 p=0.001 p=0.017 p=0.031 p=0.004 p=0.020 p=0.003 p=0.012 p=0.013 94 Q28B Q28C Q28D Q29 Q30A Q30B Q30C Q30D Q30F Q30G B 6% 18% C 11% 39% A 1% 7% B 5% 22% C 13% 41% A 7% 6% B 14% 20% C 30% 30% A 26% 37% 3% 0% B 9% 52% 9% 0% C 11% 48% 15% 1% A 13% 13% 16% B 31% 31% 32% C 43% 42% 53% A 24% 26% 23% B 51% 40% 28% C 57% 49% 44% A 10% 7% 7% B 20% 20% 15% C 25% 19% 20% A 6% 4% 4% B 11% 8% 6 C 19% 11% 14% A 30% 31% 30% B 34% 34% 29% C 65% 52% 54% A 10% 9% 9% B 22% 25% 17% C 23% 25% 28% p<10-5 p<10-5 p<10-5 p=0.009 p<10-5 p=0.0003 p=0.007 p=0.011 p=0.00004 p=0.001 Pas de différence significative pour les questions : Médecin unique, Hospitalisations, Q2 à 4, Q6 à 8, Q11 à 16A, Q17 à 20, 22AB, Q26AC, Q27E, Q30EHI. 95 2. Influence du sexe sur les réponses des patients. H : hommes, F : femmes Question Maladie grave Q9 Q12 Q13 Q23 Q25A Q25D Q27C Q27D Q27E Q28 B Q28C Q28D Q30A Q30B Sexe Degré de signification H 26% F 14% H 4% 36% 4% 0% F 23% 23% 7% 2% H 28% 64% F 46% 50% H 78% 6% 33% 9% 1% 6% F 76% 16% 45% 11% 7% 1% H 33% 61% F 46% 46% H 12% 32% F 23% 34% H 28% 10% F 32% 20% H 3% 14% F 9% 20% H 1% 14% F 13% 18% H 4% 14% F 11% 19% H 3% 14% F 8% 26% H 4% 16% F 8% 28% H 6% 17% F 23% 20% H 25% 28% 26% F 32% 30% 39% H 35% 28% 23% F 49% 44% 37% p=0.043 p = 0.0002 p=0.010 p=0.027 p=0.036 p=0.047 p=0.049 p=0.039 p=0.001 p=0.050 p=0.014 p=0.039 p=0.0007 p=0.019 p=0.002 96 Q30E Q30F H 64% 51% 52% F 57% 54% 53% H 26% 29% 26% F 52% 45% 45% p=0.002 p=0.0002 Pas de différence significative pour les questions : 1 à 8, 10 et 11, 14 à 22, 24, 25BC, 26 à 27B, 27F et 28A, 29, 30CDGHI. 97 3. Influence de l’expérience de l’hospitalisation sur les réponses des patients. P : peu hospitalisés : <2 fois, T : très hospitalisés : 2 fois ou plus Question Q3 Q8 Q18 Q19 Q22A Degré de signification P 10% 57% 33% T 18% 63% 16% P 12% 43% 30% 7% T 23% 52% 17% 1% P 35% 65% T 20% 77% P 32% 9% 4% 4% T 15% 6% 5% 2% Précis 32% 26% 23% termes simples 39% 43% 48% Précis 40% 40% 37% termes simples 30% 31% 32% sans cacher 61% 62% 55% Termes optimistes 13% 10% 14% sans cacher 65% 61% 58% Termes optimistes 3% 3% 4% P 0% 1% 16% 48% T 2% 1% 6% 61% P 1% 19% T 10% 18% P T Q22D P T Q26A Q27C p=0.015 p=0.003 p=0.024 p=0.038 p=0.020 p=0.006 p=0.037 p=0.011 Pas de différence significative pour les questions : Q1, Q2, Q4 à 7, Q9 à 15, Q16AB à 17, Q20 à 21, Q22BC, Q23 à 25, Q26B à 27B, 27D à Q30. 98 4. Influence de l’expérience des maladies graves sur les réponses des patients. G : déclarant avoir eu une maladie grave, NG : déclarant ne pas en avoir eu Question Q2 Q4 Q7A Q11 Q18 Q20 Q21 Q25D Q26D Q27A Q27D Q28C Degré de signification G 64% 0% 3% 28% 5% 10% 10% 13% 21% NG 47% 2% 19% 42% 5% 18% 12% 22% 24% G 69% 31% 0% NG 48% 45% 6% G 44% 41% 5% 0% NG 27% 19% 2% 1% G 74% 18% NG 95% 2% G 15% 79% NG 28% 70% G 23% 0% 3% NG 33% 4% 1% G 74% 0% 15% 15% NG 78% 6% 19% 23% G 15% 23% NG 35% 16% G 8% 10% 8% 33% NG 2% 7% 18% 43% G 8% 10% NG 2% 23% G 10% 8% NG 9% 19% G 10% 15% NG 6% 26% p=0.001 p=0.001 p=0.003 p=0.0001 p=0.032 p=0.050 p=0.028 p=0.003 p=0.016 p=0.005 p=0.022 p=0.039 Pas de différence significative pour les questions : 1, 3, 5 à 6, 7Bà10, 12à17, 19, 22 à 25C. 99 E. Table des abréviations ANAES : Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé AP-HP : Assistance Publique-Hôpitaux de Paris CCNE : Comité Consultatif National d’Ethique INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques ISPED : Institut de Santé Publique, d’Epidémiologie et de Développement MACSF : Mutuelle d’Assurance du Corps de Santé Français OMS : Organisation mondiale de la Santé SIDA : Syndrome de l’Immunodéficience Acquise 100 F. Bibliographie 1 Tubiana M. Les chemins d’Esculape, Histoire de la pensée médicale. Flammarion, 1995. 2 Hoerni B, Benezech M. L’information en médecine, Evolution sociale, juridique, éthique. Paris : Masson, collection abrégés, 1994. 3 Sorbière S. Avis à un jeune médecin sur la façon dont il doit se comporter en la pratique de la médecine, vu la négligence que le public a pour elle, et les plaintes qu’ont fait les médecins, cité dans Katz J. The silent world of doctor and patient. 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L’objectif premier de l’étude était de comprendre les attentes des patients, et d’évaluer leur satisfaction vis-à-vis de l’information apportée par leur médecin généraliste. Elle a mis en évidence la grande disparité des comportements des patients en fonction de leur âge, leur sexe, et leur état de santé. Par ailleurs, même si elle a montré de nombreuses concordances entre les attentes des patients et la pratique de leur médecin, elle a également mis en avant une volonté forte du patient de recevoir une information complète là où le médecin est parfois plus réservé. Cette demande est encore plus marquée de la part de personnes ayant été atteintes de pathologies lourdes, la certitude d’une information complète étant pour les patients un élément essentiel de la confiance qu’ils accordent à leur médecin. Il s’agissait également de savoir en quoi l’information peut améliorer la qualité des soins. Un résultat significatif de l’enquête est l’impact très fort de l’information donnée par le médecin généraliste sur l’observance vis-à-vis des traitements. Enfin, l’enquête a révélé que les patients ont le sentiment d’être de mieux en mieux informés par leurs médecins. De leur côté, les médecins confirment être de plus en plus sensibilisés à la question de l’information de leurs patients.