Actualités Facteurs prédictifs de récidive de la fibrillation auriculaire

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Actualités
Facteurs prédictifs de récidive de la fibrillation auriculaire
après cardioversion. Résultats du suivi de l’étude AFFIRM
Titre original et référence : Raitt M, Volgman A, Zoble R, et al. Prediction of the recurrence of atrial fibrillation after cardioversion in the Atrial Fibrillation follow-
Actualités
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up investigation of rhythm management (AFFIRM) study. Am Heart J 2006 ; 151 : 390-6.
Question évaluée par l’étude
Les patients présentant une fibrillation
auriculaire (FA) ont un risque 5 fois plus
élevé de présenter un accident vasculaire
cérébral (AVC) comparativement aux
patients en rythme sinusal. L’incidence
de la FA augmente de manière exponentielle au-delà de 65 ans, atteignant
presque 9 % des patients après 80 ans.
Les facteurs de risque de développement
de la FA incluent la maladie coronaire,
l’hypertension artérielle, la sténose
mitrale, le diabète et l’hyperthyroïdie.
La prise en charge actuelle des patients
en FA repose sur deux stratégies distinctes : d’une part le maintien du
rythme sinusal par un traitement pharmacologique et/ou une cardioversion,
d’autre part le ralentissement de la
cadence ventriculaire par des agents
pharmacologiques ralentisseurs agissant
sur le nœud auriculoventriculaire. Les
deux stratégies sont associées à un traitement anticoagulant en fonction de la
détermination du niveau de risque
thromboembolique. L’identification de
facteurs de récidive après cardioversion
permettrait de mieux préciser les places
respectives de ces deux stratégies.
Le but de cette sous-étude était d’évaluer les différents marqueurs cliniques,
échocardiographiques et ECG de récidive précoce et à moyen terme chez des
patients au décours d’une cardioversion
pour une FA persistante.
Méthodes
L’étude AFFIRM a été menée dans 213
centres nord-américains et canadiens
entre novembre 1995 et octobre 1999.
Il s’agissait d’une étude multicentrique
randomisée comparant une stratégie de
maintien du rythme sinusal par cardioversion et traitement antiarythmique à
une stratégie de ralentissement de la fréquence cardiaque par voie pharmacologique chez des patients en FA persistante.
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Les patients inclus avaient plus de 65
ans, et au moins un marqueur de risque
thromboembolique. Dans la stratégie
de maintien du rythme sinusal, le traitement antiarythmique était laissé au
choix du clinicien qui disposait cependant de recommandations spécifiques.
Dans la stratégie de ralentissement de
la fréquence cardiaque, bêtabloquant,
inhibiteur calcique et digoxine pouvaient être utilisés à la discrétion du clinicien.
Les critères de jugement analysés dans
cette sous-étude étaient la récurrence
de FA à 2 mois et le nombre de cardioversions au cours du suivi à 2, 4, 8 et 12
mois.
Résultats
Mille deux cent quatre-vingt-treize
patients en rythme sinusal après cardioversion constituaient la population
étudiée. Sept cent trente patients ont été
assignés au groupe contrôle du rythme.
Ils ont bénéficié d’une cardioversion
puis d’un traitement antiarythmique. Les
cardioversions étaient répétées si nécessaire pour maintenir le rythme sinusal.
Cinq cent trois patients ont été assignés
au groupe ralentissement de la fréquence cardiaque. Ils n’ont reçu aucun
traitement antiarythmique et n’ont pas
bénéficié de cardioversion en cas de
récidive.
Les données démographiques, échocardiographiques et ECG de ces deux
groupes ainsi constitués étaient globalement superposables. Il s’agissait de
patients âgés de plus de 70 ans dans
54 % des cas, majoritairement constitués d’homme (65 %), avec dans 30 %
des cas un antécédent d’insuffisance cardiaque, d’HTA dans 72 % des cas. La
fraction d’éjection ventriculaire gauche
était inférieure à 50 % dans 30 % des cas
Le groupe témoin du rythme a reçu un
traitement antiarythmique dans 99 %
des cas reposant dans 36 % des cas sur
mt cardio, vol. 2, n° 2, mars-avril 2006
de l’amiodarone et dans 35 % des cas
sur du sotalol. À 2 mois, 735 patients
n’ont pas présenté de récurrence alors
que 503 ont présenté une récurrence.
Les deux groupes ainsi constitués avaient
des données démographiques superposables. Il s’agissait de patients majoritairement de sexe masculin dans 75 %
des cas, âgés de plus de 70 ans dans
55 % des cas, présentant une FEVG
< 50 % dans 28 % des cas, un diamètre
de l’oreillette gauche > 45 mm dans
41 % des cas. Les seuls paramètres significativement différents étaient la durée
de l’onde P > 135 msec sur l’ECG postcardioversion.
La figure 1 décrit le taux de récurrence
en fonction du temps dans les deux stratégies analysées. L’essentiel des récurrences est survenu dans les 2 premiers
mois et à un niveau quasiment superposable dans les deux groupes. Entre le
2 et 4e mois le taux de récurrence est
resté élevé dans le groupe ralentissement de la fréquence cardiaque et a
diminué considérablement dans le
groupe témoin du rythme.
En analyse multivariée, les deux marqueurs indépendants de récurrence à 2
mois, étaient pour l’ensemble de la
population, la durée de l’onde P > 135
msec en post-réduction et l’absence de
maladie coronaire. Aucun paramètre
échocardiographique n’était significativement associé à la récidive dans les
2 premiers mois.
Lorsque l’analyse statistique est limitée
aux seuls patients du groupe témoin du
rythme, les résultats sont superposables
à ceux de l’ensemble de la population.
Lorsque l’analyse est restreinte au patient
de la stratégie ralentissement de la fréquence cardiaque, 4 marqueurs sont
significativement associés à un risque
de récidive en analyse multivariée : l’absence de maladie coronaire, un antécédent de FA, une FEVG < 50 % et un
épaississement de la valve mitrale. Dans
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Groupe ralentissement
de la fréquence cardiaque
Groupe contrôle du rythme
40
p < 0,001
20
0
0
1
2
3
4
5
6
Temps en année
Figure 1. Délai entre la randomisation et la 1ere récidive de FA.
le groupe contrôle du rythme, 106
patients ont présenté au moins 2 récidives au cours du suivi d’un an et 606
moins de 2 récidives. Les données
démographiques des deux groupes ainsi
constitués, les traitements, les paramètres ECG étaient superposables.
Un diamètre de l’oreillette gauche
> 45 mm et un épaississement de la
valve mitrale étaient, en analyse multivariée, les deux seuls paramètres significativement associés à un niveau élevé
de récidive.
Résultat essentiel. Les facteurs de risque
de récidive de la FA étaient dans les 2
mois suivant une cardioversion l’absence de cardiopathie ischémique et
une durée de l’onde P > 135 msec en
post cardioversion. Dans le sous-groupe
de patient ne recevant pas de traitement
antiarythmique, 4 marqueurs de risque
prédisent la récidive précoce : l’absence
de maladie coronaire, un antécédent de
FA, une FEVG < 50 % et un épaississement de la valve mitrale. La taille de
l’oreillette gauche et l’épaississement
de la valve mitrale sont dans le groupe
des patients sous traitement antiarythmique associé à un risque accru de réci-
dive et donc de recours à une nouvelle
cardioversion.
Cependant la sensibilité et la spécificité
de ces marqueurs ne sont pas suffisantes
pour en faire un outil pour le clinicien
Commentaire
La publication initiale de l’étude AFFIRM
[1] ainsi qu’une méta-analyse [2]
incluant l’ensemble des études comparant ces deux stratégies avaient montré
l’absence de bénéfice d’une stratégie
agressive vis-à-vis du maintien du
rythme sinusal par cardioversion.
De nombreuses études ont analysé les
marqueurs de récidive de la FA après
cardioversion. Flaker et al. [3] à partir
des données de l’étude SPAFIII avaient
montré qu’un diamètre de l’OG
> 50 mm était associé à un risque de
récurrence de la FA 4,5 fois plus élevé
que lorsque la taille de l’OG était inférieure à 40 mm. De même, une dysfonction ventriculaire gauche modérée
était associée à un risque accru de récurrence.
Cette étude montre que le taux de récidive précoce après cardioversion est
significativement moins important chez
mt cardio, vol. 2, n° 2, mars-avril 2006
les patients présentant une cardiopathie
ischémique ou une onde P dont la durée
est inférieure à 135 msec après cardioversion. Quatre-vingt-dix pour cent des
patients présentant une récidive ont au
moins un de ces marqueurs. Cependant
seuls 21 % qui n’ont pas de récurrence
ne présentent aucun de ces marqueurs.
En outre, l’intérêt de ces marqueurs pour
le clinicien peut donc être légitimement
discuté : la mesure de l’onde P ne pouvant être obtenue qu’après la cardioversion La valeur prédictive insuffisante
de ces marqueurs rend leur utilisation
impossible en pratique clinique pour
récuser une cardioversion. La taille de
l’oreillette gauche n’est pas associée
dans cette étude à une récurrence précoce mais à un taux de récidives dans
le temps plus important suggérant l’absence de lien entre anomalie structurale
et récidive précoce.
Cette étude présente plusieurs limites.
Ces résultats sont issus d’une analyse
rétrospective. Ils ne sont applicables
qu’à des patients âgés de plus de 65 ans
avec des facteurs de risques thromboemboliques. L’absence de randomisation du traitement antiarythmique et
celle de double aveugle entre les deux
groupes peuvent constituer des biais
importants.
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% de patients présentant une récidive de FA
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Stéphane Ederhy
Références
1. Wyse DG, Waldo AL, Di Marco JP, et al. A
comparison of rate control and rhythm
control in patients with atrial fibrillation. N
Engl J Med 2002 ; 347 : 1825-33.
2. De Denus S, Sanoski C, Carlson J, et al.
Rate versus rhythm control in patients with
atrial fibrillation. Arch Intern Med 2005 ; 165 :
258-62.
3. Flaker GC, Fletcher KA, Rothbart RM, Halperin JL, Hart RG. Clinical and echocardiographic features of intermittent atrial fibrillation that predict recurrent atrial fibrillation.
Stroke Prevention in Atrial Fibrillation
(SPAF) Investigators. Am J Cardiol 1995 ; 76 :
355-8.
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