Entre catholiques et luthériens, le pape exalte la « diversité réconciliée » Lors d’une prière précédée d’un échange avec des fidèles de l’Église luthérienne de Rome, le pape François a demandé dimanche 15 novembre « la grâce de la diversité réconciliée » pour catholiques et protestants, abordant longuement la question délicate de la communion eucharistique. VINCENZO PINTO/AFP Le pape à son arrivée à l’Église luthérienne de Rome, le 15 novembre. ROME De notre envoyé spécial permanent « Une seule foi, un seul baptême, un seul Seigneur. » Le pape François a fait valoir ce que partageaient ensemble catholiques et luthériens, lors d’une rencontre œcuménique organisée dimanche 15 novembre dans l’église luthérienne de Rome. Après Jean-Paul II en 1983 et Benoît XVI en 2000, il s’agit du troisième pape à se rendre auprès de la petite communauté protestante de la capitale italienne, composée en majorité d’Allemands, le plus souvent mariés à un conjoint italien. 1/2 À moins de deux ans du Ve centenaire de la Réforme engagée par Martin Luther, Jorge Bergoglio a dénoncé « le scandale de la division ». Il a invité au « pardon » réciproque après « tant de temps mauvais entre nous », en référence aux « persécutions », et demandé en conclusion « la grâce de la diversité réconciliée dans le Seigneur ». Communier à la même table ? Jusqu’à communier à la même table? La question de la reconnaissance mutuelle des sacrements a été posée au pape, au cours d’un dialogue avec des fidèles, à partir d’un cas concret. Une luthérienne mariée à un catholique a regretté qu’ils ne puissent communier ensemble. En pratique, elle ne peut communier lors d’une messe catholique. De fait, comme le rappelle un prélat du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens, « il n’y a pas de communion eucharistique sans communion ecclésiale ». Depuis Vatican II, l’hospitalité eucharistique existe entre catholiques et orthodoxes, mais pas avec les protestants, sauf cas exceptionnel autorisé par l’évêque. « Partager (la table eucharistique, NDLR), c’est dire qu’il n’y a pas de différences entre nous, que nous avons la même doctrine », a rappelé le pape à la femme protestante. « Mais n’avons-nous pas le même baptême? », s’est-il aussi interrogé, à propos du seul sacrement que catholiques et luthériens se reconnaissent mutuellement. Lire : Pour le pape, le dialogue œcuménique est « une rencontre, pas une confrontation d'idées « Un viatique pour marcher ensemble » Émettant des pistes de réflexion, le pape a expliqué comment ce même baptême servait de point de départ à un cheminement commun par la prière, la demande de pardon, la catéchèse aux enfants – « soit en langue luthérienne, soit en langue catholique, mais c’est la même ». Pour savoir si ce chemin pouvait aller jusqu’à une même communion, Jorge Bergoglio a distingué deux conceptions théologiques de ce sacrement. Celle de la communion comme finalité et celle, inverse, comme « viatique pour marcher ensemble ». Au cours de sa longue réponse qui laissait encore perplexe, le lendemain lundi 16 novembre au Vatican, le pape a appuyé cette seconde conception – mise en avant aussi durant le Synode sur la famille à propos de l’accès à la communion pour les divorcés remariés. Et il a invité, en conclusion, la femme luthérienne au discernement: « La vie est plus grande que les explications et les interprétations (…). Parlez avec le Seigneur et avancez. Je n’ose pas dire plus », a-t-il dit, ajoutant n’avoir « pas compétence » pour autoriser ou non qu’ils communient à la même table. Une telle décision relèverait d’un concile œcuménique. Dans l’immédiat, le pape a invité luthériens et catholiques à « prier ensemble, travailler ensemble pour les pauvres, pour les nécessiteux » et ainsi à « s’aimer (…) avec un vrai amour de frères ». Sébastien Maillard (à Rome) http://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Actualite/Rome/Entre-catholiques-et-lutheriens-le-pape-exalte-la-diversite-reconciliee-2015-11-16-1381012 2/2