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Trente faits et demi qu’il est utile de connaître au sujet des Métis des Grands Lacs
Par Micheline Marchand
Les Métis, une force essentielle à la prise de Mackinac
Fait no 11 Les Métis gagnaient des guerres à la force de leurs bras
L’île Mackinac, située au confluent des lacs Huron et Michigan tout près de l’entrée du
lac Supérieur, est un lieu de villégiature prisé par les touristes. Un vrai havre de paix. Encore
aujourd’hui, du haut du promontoire de calcaire, on peut admirer les bateaux qui circulent
dans le détroit.
C’est difficile à imaginer les soldats américains et britanniques en train de se disputer
ce bout de terre où s’étaient installés de nombreux Métis. Mais ils reconnaissent l’importance
du lieu, pas juste pour la paix. Lorsqu’éclate la guerre de 1812, les belligérants savent que
contrôler les hauteurs de
cette île et le fort qui s’y trouve
est essentiel à la défense de
la région au nord des Grands
Lacs.
Malgré l’enjeu sérieux,
la séquence des événements
donne lieu à « une drôle de
guerre » qui pourrait sortir
tout droit d’une bande
dessinée d’Astérix.
Le 15 juillet 1812, le
capitaine Charles Roberts, le
commandant anglais du fort
Saint-Joseph dans l’île SaintJoseph reçoit l’aval de passer
à l’action. Il décide sur-leBritish Landing, île Mackinac
Photo : Micheline Marchand
champ de reprendre le fort
Mackinac des Américains.
Dès le lendemain, une expédition se met en marche. De nombreux Métis se joignent à cette
offensive militaire afin de défendre leur territoire, leurs intérêts, leur pays, leur mode de vie.
Ainsi, environ 180 Métis et Canadiens français (la moitié non armée parce que les
Britanniques n’ont pas assez de fusils pour tout le monde), 300 membres de Premières
Nations et plus d’une quarantaine de soldats britanniques embarquent à bord de bateaux, de
canots et du Caledonia, une brigue de la Compagnie du Nord Ouest, un vaisseau assez fort
pour contrer une résistance et qui porte beaucoup de marchandises, incluant 2 canons de
2,7 kg.
Il est évident qu’ils ne peuvent pas attaquer le fort à partir du bas de la falaise. Par
contre, l’arrière du fort dominé par un promontoire difficilement accessible est vulnérable.
Leur stratégie : arriver dans l’île Mackinac en pleine nuit, installer un canon sur la hauteur
surplombant le fort et surprendre l’ennemi. Le temps qui presse pousse les Métis et les
Canadiens français à pagayer comme des forcenés pour parcourir les 16 kilomètres qui les
séparent de l’île Mackinac.
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En route, la flottille croise un canoteur solitaire. Michael Dousman, avait été envoyé
par le lieutenant Porter Hanks, le commandant du fort Mackinac pour espionner les
agissements des Britanniques dans l’île Saint-Joseph. Quand les attaquants débarquent
dans l’île Mackinac en pleine nuit, ce « prisonnier » est libéré. Il accepte de ne pas souffler
mot aux militaires américains et s’engage à avertir les villageois de l’offensive qui se trame
afin de leur permettre de se mettre à l’abri. Même s’il est du côté des États-Unis, Dousman
est d’abord un commerçant de fourrures, un habitant de l’île.
Pendant ce temps, les Métis et Canadiens français débarqués dans une anse à
environ 3 kilomètres au nord-ouest du fort s’empressent de peine et de misère de traîner le
canon de 2,7 kg à travers la forêt jusqu’à un point au haut de la falaise qui surplombe le fort.
Le 17 juillet, à la levée du jour, les États-Uniens, ne sachant toujours pas que leur
président a déclaré la guerre, sont surpris par les Anglais, leurs alliés et l’artillerie qui les
menacent. Ils ont très peur. Non pas des Anglais, mais des guerriers autochtones. Les
Britanniques leur donnent l’impression qu’ils n’ont aucun contrôle sur leurs alliés qui, une fois
la bataille déclenchée, ne feront qu’à leur tête en coupant celles de leurs adversaires. On
est en pleine guerre psychologique. Les Américains cèdent le fort à l’ennemi sans coup férir.
Roberts décrira le rôle joué par les Métis et les voyageurs comme essentiel à cette
première victoire britannique de la guerre de 1812. De nombreux Métis sont heureux de se
réinstaller dans cette île tout comme les Anglais qui, sur la hauteur où ils ont surpris les
Américains avec leurs canons, construiront le Fort George, rebaptisé le Fort Holmes par les
Américains plus tard.
En 1814, après avoir brûlé le fort britannique dans l’île Saint-Joseph, les Américains
tenteront de reprendre le fort Mackinac en utilisant la même stratégie qui avait réussi aux
Britanniques. Ce truc, il ne fallait pas le faire deux fois. Les Anglais les attendaient de pied
ferme et ont repoussé les envahisseurs qui ne reviendront qu’en février 1815 lorsque le traité
de Gand rétablit les frontières qui existaient avant le conflit. Ce revirement de la situation est
un affront aux Métis et tous ceux qui avaient lutté pour conserver cette île dans leur giron.
On comprend la frustration des Métis qui devaient dire aux Anglais et aux Américains : «
Décidez-vous donc ! »
À cette époque, les Métis étaient peut-être des militaires non conventionnels, mais ils
ont été des guerriers efficaces et les Britanniques étaient fort heureux de combattre à leurs
côtés.
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