La Grande Chaloupe Le Cap La Houssaye Cayenne La Pointe au Sel Anse des cascades Pointe de Trois Bassins L’Etang du Gol Grande Anse Bois Blanc Marine de Vincendo Terre Rouge 1 La contribution suivante a été réalisée à partir de l’étude coordonnée par M. CERLES en 2007 et intitulée « Stratégie de biodiversité du Conservatoire du Littoral outre-mer : Etat des lieux, menaces, enjeux » ainsi que divers rapports d’activité de l’antenne Océan Indien. Pour toute information supplémentaire, merci de contacter : Antenne La Réunion – 41 rue Ste Anne – 97 400 St Denis – tel : 02 62 23 59 61 ; fax : 02 62 23 59 64 ; email : [email protected] LE CONSERVATOIRE DU LITTORAL DANS L‘OUTREMER FRANÇAIS : Malgré une superficie réduite (0,08 % de toutes les terres émergées), les collectivités d’outre-mer abritent 3 450 plantes et 380 vertébrés endémiques, soit plus que toute l’Europe continentale. Elles confèrent à la France des responsabilités majeures, avec notamment une présence dans 5 des 25 « points chauds » de la biodiversité planétaire. En effet, sur une surface terrestre 4 fois moindre qu’en métropole, les départements et collectivités outre-mer hébergent plus d’espèces pour tous les groupes. Depuis plus de 30 ans, le Conservatoire du littoral acquiert des espaces naturels situés sur les rivages maritimes et lacustres. Cette intervention foncière permet d'assurer la protection définitive des espaces naturels les plus fragiles et les plus menacés. Au 1er janvier 2008, le Conservatoire du littoral assure la protection définitive de 113 000 hectares, représentant environ 1000 km de rivages maritimes au niveau national. Ce n’est que depuis quelques années que le Conservatoire du littoral s’implique de façon structurée en outre-mer : la création d’antennes permanentes au sein des départements d ‘Outremer (Guyane, Martinique, Guadeloupe, Réunion) et des collectivités de l’outre-mer ((Mayotte, Saint Martin, Saint Barthélemy, Saint Pierre et Miquelon) ne remonte qu’à 2002. En 2007, le Conservatoire du littoral intervient sur près de 19 000 ha outre-mer (132 sites répartis en 52 unités de gestion écologique répartis pour 1/4 dans l’Océan Indien et 2/3 en Guyane), qui recèlent des richesses biologiques exceptionnelles à l’échelle mondiale. Ces terrains se répartissent entre des espaces terrestres qui s’étendent depuis le trait de côte jusqu’à une altitude de 500 mètres et des espaces maritimes parmi lesquels on relève de nombreux milieux naturels littoraux lacustres ou marins (forêts inondées, mangroves, herbiers et formations coralliennes). Avec l’affectation des dépendances naturelles des cinquante pas géométriques, prévue par la loi du 30 décembre 1996, ce sont environ 350 km de rivages naturels qui sont ainsi concernés dans les DOM et les COM. Surface (ha) % sites CEL en surface Surface moyenne des sites opérationne ls (ha) Surface collectivité % surface CEL / surface totale collectivité 14,4% 1886 9,9% 99 1128 1,7% 60 45,5% 1921 10,1% 32 1700 1,1% 1 15 16,6% 354 1,9% 24 24 14,8% St Barthélemy 1 0 0% 0 0,0% 0 52 0,0% Guyane 6 11 8,3% 12527 65,6% 1138 86504 0,1% St Pierre et Miquelon 1 1 0,8% 168 0,9% 168 227 0,7% Nombre d'unités de gestion Nombre de sites opérationnels % sites opérationnels CEL en nbre Martinique 12 19 Guadeloupe 13 St Martin Collectivité Mayotte 7 10 7,6% 1354 7,1% 135 374 3,6% Réunion 11 16 12,1% 872 4,6% 55 2512 0,3% Total 52 132 19082 Répartition des interventions du Conservatoire du littoral outre-mer 2 Afin de déployer une stratégie d’intervention et de gestion à long terme adaptée aux contextes locaux - géographiques, biologiques et humains – le Conservatoire a réalisé entre 2006 et 2007 une étude intitulée « stratégie de biodiversité du Conservatoire du Littoral Outremer : état des lieux, menaces et enjeux ». Nous reprendrons ci-après les éléments principaux de cette étude en ce qu’ils nous paraissent révélateurs des difficultés particulières auxquelles se trouve confronté le Conservatoire du Littoral en Outre-mer vis-à-vis de la biodiversité ; puis nous mettrons en lumière les actions concrètes de lutte menées sur quelques sites de La Réunion. LES DOM ET COM PRESENTENT A L’AUNE DE LA FRANCE HEXAGONALE QUELQUES PARTICULARISMES SUSCEPTIBLES D’INFLUER SUR LA BIODIVERSITE DES MILIEUX LITTORAUX : Isolement et insularité : La plupart des collectivités d’outre-mer françaises sont des îles dont l’isolement très ancien a permis une spéciation locale à l’abri des prédateurs et de la concurrence des espèces exotiques. Depuis l’arrivée de l’Homme dans ces territoires, les prélèvements directs, la destruction des milieux naturels et la diffusion bien plus rapide des espèces envahissantes ont déjà fait disparaître une partie des espèces animales et végétales indigènes, dont de nombreuses endémiques. Les écosystèmes côtiers sont souvent les premiers à subir ces atteintes. Climat et nature des sols des DOM et COM des régions tropicales : En raison des fortes précipitations et d’une topographie souvent accidentée, toute altération significative du couvert végétal expose généralement les sols à une forte érosion. Ce risque est aggravé par la faible épaisseur de l’humus qui caractérise les sols des régions tropicales. Il en découle une baisse de la capacité de récupération des formations végétales originelles, souvent remplacées par des formations secondaires très banales voire monospécifiques. En outre, l’érosion entraîne une pollution terrigène qui fragilise les écosystèmes aquatiques et marins. La pression soumise par la fréquentation des espaces littoraux est une source d’aggravation de ce phénomène. Risques naturels et exposition aux changements climatiques : Les catastrophes naturelles sont nettement plus intenses et fréquentes en outre-mer qu’en métropole et les changements climatiques en cours comportent des risques sans précédent. Ils touchent en effet l’avenir de l’outre-mer à plusieurs titres : - risque de blanchissement massif et de fragilisation des récifs coralliens ; - menaces de disparition à terme de la plupart des espèces à aire de répartition réduite ; - risques écologiques, économiques et sociaux en cas de hausse du niveau de la mer. La combinaison d’une régression des barrières coralliennes, d’une montée du niveau des eaux et d’une intensification des phénomènes climatiques extrêmes pourrait avoir des conséquences désastreuses pour les écosystèmes côtiers et pour toutes les activités humaines liées (pêche, aquaculture, tourisme). 3 Pression démographique : L’augmentation rapide de la densité de population sur des territoires restreints et fragiles est une donnée fondamentale, quoique variable selon les collectivités. Mayotte, La Réunion, Saint Martin, la Guadeloupe et la Martinique sont celles qui présentent à la fois une forte densité et un accroissement rapide de la population. A Mayotte, la densité atteint 430 habitants au kilomètre carré, contre 113 en France métropolitaine, et double tous les 14 ans. Le besoin d’espace et la pression foncière sont également des problèmes croissants dans certaines îles. Dans tout l’outre-mer, c’est sur la frange littorale que se concentrent les besoins d’espace, les conflits d’usage et les pressions humaines directes et indirectes. DE FAIT, LES ECOSYSTEMES QU’ABRITENT LES DOM ET COM SONT EN GENERAL PLUS FRAGILES QUE CEUX DU CONTINENT. LA PERTE DE RICHESSE BIOLOGIQUE AUXQUELS ILS SONT ACTUELLEMENT CONFRONTES RESULTE DE PRESSIONS, D’ORIGINE NATURELLE OU ANTHROPIQUE. Le développement de pestes végétales se traduit par la disparition progressive des habitats indigènes. La Réunion et Mayotte sont les collectivités les plus touchées par ce phénomène : 78% des unités de gestion écologique des sites de l’Océan Indien sont soumises à des invasions biologiques. Par contre, la pression exercée par des espèces animales exotiques (rats, chiens errants, chats, mangoustes, cabris) sur les milieux et les espèces (reproduction des tortues marines, des oiseaux et de l’Iguane des Petites Antilles) concerne les sites de toutes les collectivités. L’érosion littorale représente une pression plus ou moins importante selon les collectivités. C’est en Guyane que le mouvement des côtes varie le plus entre érosion et engraissement. D’autres collectivités sont également très exposées à ce phénomène, comme sur le site de l’Isthme de Miquelon Langlade par exemple. Certaines catastrophes naturelles (cyclones, éruptions volcaniques) sont par ailleurs des facteurs de régulation de la biodiversité. La modification des habitats naturels (altération, fragmentation), voire leur destruction, par les activités humaines est l’un des mécanismes les plus dévastateurs de la biodiversité. Elle agit dans toutes les collectivités, de différentes manières (exploitation forestière et agricole, urbanisme et construction d’infrastructures, pollution industrielle et domestique, tourisme de masse…). En Outre-mer, les principales menaces pour la biodiversité outre-mer sont l’urbanisation, le braconnage, l’exploitation excessive des ressources par la chasse et la pêche, le défrichement et le dépôt de déchets (cf tableau ci-dessous). 4 % Martinique Guadeloupe Guyane Mayotte Réunion Erosion littorale et terrestre 33 15 50 71 18 Invasion biologique 8 15 0 71 82 Dégradation par espèces exotiques 17 31 33 57 18 Pb de régénération 25 23 0 0 36 Catastrophe naturelle 25 8 0 0 9 Urbanisation et infrastructures 50 54 17 43 27 Squat 25 23 33 0 9 Expansion agricole 0 15 33 86 0 Mauvaises pratiques agricoles 25 31 0 43 0 Braconnage, chasse ou pêche 67 46 83 29 36 Défrichements 50 46 50 57 18 Surfréquentation ou pb d'usages 33 31 0 14 27 Feux, incendies 8 23 17 43 27 Véhicules à moteur 33 38 17 0 0 Déchets et pollutions 67 62 83 14 45 Proportion des unités de gestion touchées par chaque pression, par collectivité (en %) Plus de la moitié des unités de gestion sont affectées par le braconnage et la pollution par dépôt de déchets. En Guyane, la principale menace est le braconnage et la chasse, notamment sur les Monts de Cayenne et sur la Pointe Isère-Amana. Le défrichement est particulièrement intense sur les sites guyanais et mahorais. Alors que les littoraux de Guyane et de Mayotte sont surtout menacés par des expansions agricoles, les rivages naturels des Antilles sont davantage exposés à la pression touristique et au développement d’infrastructures. Il apparaît d’ailleurs que 42% des unités de gestion d’outre-mer sont directement soumises à la pression de l’urbanisation. D’autres pressions anthropiques sont constatées sur les sites du Conservatoire : prélèvements sélectifs, feux, squat, fréquentation anarchique… Le nombre de gardes du littoral et les moyens de police affectés à la surveillance des sites du Conservatoire du Littoral sont actuellement insuffisants en Outremer pour neutraliser ces pressions. En conséquence, les formations littorales primaires ont régressé. Elles tendent encore à régresser aujourd’hui, même sur les terrains naturels pourtant protégés par le Conservatoire du littoral : - Altérés, appauvris, secondarisés, réduits ou encore fragmentés, les peuplements forestiers perdent leurs potentialités d’évolution climacique naturelle ; - Certaines essences endémiques ou indigènes se régénèrent faiblement, difficilement ou encore ne réussissent plus du tout à se régénérer naturellement : on constate la réduction de l’effectif de plantes adultes, comme le Bois gaulette ou le cactus Tête à l’anglais ; - La faible voire l’absence de compétitivité face à d’autres essences exotiques ; 5 - La perte des conditions nécessaires de reproduction, comme le Bois Blanc (Hernandia mascarenensis )à La Réunion (Bois Blanc) ou le Gaïac en Guadeloupe (Ile de Petite Terre). Les espèces animales subissent le même sort que les espèces végétales : réduction des populations, perte de leur habitat et/ou de leurs ressources alimentaires, compétition avec d’autres espèces exotiques…. 6 7 L’ETAT DE LA CONNAISSANCE DE LA BIODIVERSITE DANS LES SITES OUTRE-MER EST TRES VARIABLE suivant les sites et les taxons ; certains d’entre eux ayant fait l’objet d’inventaires relativement complets, d’autres restant encore totalement inconnus. Certains sites et donc certaines collectivités sont mieux renseignés que d’autres. Très peu d’inventaires ni de documents de gestion simplifiés ont été effectués sur les sites des 50 pas géométriques récemment remis en gestion au Conservatoire, d’où la forte proportion d’unités de gestion encore mal connues à Mayotte, en Guadeloupe, à Saint Martin et à Saint Barthélemy En outre, les inventaires sur les terrains du Conservatoire sont très incomplets et plusieurs sites sont mal connus. Au sein même des documents de gestion, les informations sur la biodiversité sont très hétérogènes ; très précises lorsqu’un travail scientifique approfondi a eu lieu ou lorsque le site correspond à une ZNIEFF, plus succinctes en l’absence d’études, dans la plupart des cas. Il est donc difficile d’avoir une idée globale de la richesse et de la diversité en espèces à l’échelle des collectivités et de l’ensemble du territoire d’intervention du Conservatoire. De même, l’évaluation de sa participation à la conservation de cette biodiversité n’est pas facile puisque rares sont les sites qui ont bénéficié d’un diagnostic patrimonial complet au moment de leur acquisition. Certains taxons ont été recensés avec précision dans les documents de planification (oiseaux, mammifères, arbres et arbustes). Ce sont donc les catégories les mieux représentées dans la liste des espèces remarquables. D’autres, en revanche sont quasi-absents de l’inventaire (ichtyofaune, amphibiens, mollusques, échinodermes, lianes, mousses et herbacées aquatiques). Ils ne représentent que 5% du total d’espèces remarquables. D’autre part, les espèces recensées relèvent plus du règne animal que du règne végétal, et plus du milieu terrestre que du milieu marin. 8 9 Pour chaque unité de gestion, des formations végétales et autres formations ou habitats « remarquables » ont été identifiés, selon l’avis des acteurs rencontrés et l’analyse des documents bibliographiques. Suivant la nomenclature du Conservatoire, 15 types d’habitats sont à distinguer. Ont été considérés comme habitats « remarquables » les habitats rares, mal représentés à l’échelle régionale, nationale ou internationale, présentant un bon état de conservation, ou encore présentant un intérêt en raison de leur stade d’évolution, ou sur le plan fonctionnel (ressources en eau, lutte contre érosion ou la sédimentation, protection/filtration, interface terre-mer, conservation humidité…). Ainsi, les habitats remarquables les plus fréquents sur les sites du Conservatoire sont les forêts et les zones humides. La forêt sèche ou xérophile est la plus représentée (16 unités de gestion abritent une forêt xérophile remarquable). Les formations forestières sont qualifiées de « remarquables », en raison de leur rareté pour certaines, de leur état de conservation ou de leur dynamique végétale pour la plupart (stade subclimacique ou climacique) : Continuum forestier du stade mésophile au stade hygrophile climacique aux Versants Nord Ouest de la Montagne Pelée en Martinique ; Continuum forestier du stade xérophile au stade hygrophile climacique aux Monts Caraïbes de Guadeloupe ; Forêt xérophile climacique des Falaises atlantique de Guadeloupe ; Forêt primaire de Crique et Pripri de yiyi en Guyane ; Forêt xérophile primaire de Pointes et Plages de Saziley et Charifou, de Pointes et Ilots du Nord à Mayotte ; Forêt semi-xérophile primaire de la Grande Chaloupe à la Réunion. 1 52 1 1 6 1 1 1 1 4 1 1 2 7 1 5 1 Forêt xérophile Forêt mésophile Forêt hygrophile 3 3 1 3 4 4 7 1 2 2 1 1 1 1 2 1 1 2 Forêt littorale sur sable 1 Forêt marécageuse 1 Mangrove 1 4 1 Savane, fourré sec 1 Marais d’eau douce Lagune, marais saumâtre 1 Vasière Mare, étang, plan d’eau Herbier 2 2 1 Falaise et rocher 12 13 2 6 7 11 Plage et dune Martinique Guadeloupe St Martin Guyane Mayotte Réunion St Pierre et Miquelon Total Récif corallien DOM ou COM Nombre d'unités de gestion De nombreuses zones humides ont aussi été identifiées comme remarquables, pour leur fonctionnalité ou leur rareté essentiellement. Au total, les mangroves, forêts marécageuses, vasières, marais, lagunes ou étangs sont présents 26 fois sur les divers sites et préservés de toute urbanisation. 3 1 4 Nombre et type d’habitats remarquables pour chacune des collectivités 10 1 1 5 7 5 4 16 2 4 6 Total 17 27 3 7 9 9 2 74 11 Selon l’état des connaissances actuelles, les sites outre mer hébergent 726 espèces définies comme remarquables, dont 240 espèces floristiques et 486 espèces faunistiques. Certaines espèces sont représentées sur plusieurs sites et collectivités différentes et ce sont au total 1516 entrées d’espèces remarquables qui ont été enregistrées dans la base de données pour caractériser chacun des sites du Conservatoire. Sur l’ensemble des sites outre mer sont présentes : - - - 402 espèces protégées dont 67% sont des oiseaux et 86% des espèces d’oiseaux identifiées sont des espèces d’oiseaux protégées. 116 espèces endémiques, soit 12% des 726 espèces remarquables. Parmi celles-ci, 58 espèces sont strictement endémiques, dont les 2/3 proviennent de l’Océan Indien. 34 espèces menacées et figurant dans la liste rouge de l’IUCN (Tableau ci-dessous) comme « quasi-menacées », « vulnérables », « en danger » et « en danger critique d’extinction » ; parmi celles-ci, 15 espèces sont classées « en danger » et « en danger critique d’extinction » . 56 espèces considérées ou supposées comme « rarissimes », dont près de la moitié se trouve en Martinique. Seules 2 espèces rarissimes sont retrouvées sur 2 collectivités différentes : L’Acomat franc (Sideroxylon foetidissimum), un arbre des forêts sèches climaciques en extinction locale en Guadeloupe et en Martinique, et l’oiseau Ani à Bec lisse (Crotophaga ani), considéré comme rarissime sur ces 2 mêmes DOM. 12 ESPECES « EN DANGER » ET « EN DANGER CRITQUE MART GUAD StM GUY MAY REUN SPM D’EXTINCTION » Racoon (Procyon minor) Loutre géante (Pteronura brasiliensis) Tortue luth (Dermochelys coriacea) Tortue verte (Chelonia mydas) Tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata) Tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea) Moqueur gorge blanche (Ramphocinclus b. brachyurus) Crabier blanc (Ardeola idae) Héron de Humblot (Ardea humbloti) Papangue ou Busard de Maillard (Circus maillardi) Petrel de Barau (Pterodroma baraui) Bois blanc (Hernandia mascarenensis) Bois blanc rouge (Poupartia borbonica) Bois de lait (Tabernaemontana persicariaefolia) Latanier (Latania lontaroïdes) Espèces menacées (Liste Rouge de l’UICN) présentes sur les sites du Conservatoire du littoral Représentativité de chaque critère dans chaque collectivité d’outre-mer 13 15 LES CINQ AXES DE LA STRATEGIE OPERATIONNELLE : En conséquence de cet état des lieux, le Conservatoire du Littoral a élaboré une stratégie opérationnelle autour de cinq axes : l’intervention foncière, la gestion écologique, les travaux de conservation et de restauration de la biodiversité, la sensibilisation et mobilisation des acteurs et compléments de connaissances. L’intervention foncière Pour obtenir des continuums écologiques entre sites protégés et pour préserver des habitats et des espèces remarquables ou menacés, il est nécessaire de poursuivre et d’engager les acquisitions inscrites dans la stratégie. Le rythme actuel des acquisitions et des affectations est très important, et ce sont déjà près de 40.000 hectares qui sont en cours de négociation et pour lesquels le Conseil d’administration du Conservatoire a délibéré favorablement. La stratégie à moyen terme du Conservatoire couvre environ 70.000 ha pour l’outre-mer. Pour certaines collectivités, actualiser les périmètres d’intervention terrestres en intégrant des « points chauds » de biodiversité littorale dans la stratégie d’intervention foncière du Conservatoire, est également un enjeu fort de préservation du patrimoine naturel littoral d’outre-mer. Martinique Guyane Mayotte Petit Cayenne Réserve du Trésor Fausse Montagne d’Argent Ilots (Bandrele, Montagne des Trois Kolo Issa, Pitons Pengoua, autres) Rocher à Pointe Béhague Savane Trois Rois Les sites d’intervention foncière prioritaires Saline de Trois Rivières Baie de Génipa Cap Enragé La Fouquette Bellefond Pointe Melon Réunion Vincendo Littoral nord-est Beaufonds Pierrefonds Etang de Bois Rouge Concernant les sites des 50 pas ou ZPG, la conservation des milieux littoraux et des espèces remarquables présentes est assurée par une protection foncière large de 81,20 mètres. De cette particularité historique se dessinent deux enjeux fondamentaux de préservation de ces milieux naturels littoraux : la protection foncière complémentaire en arrière des 50 pas, nécessaire pour obtenir une bonne fonctionnalité écologique de ces sites, et la définition d’une gestion écologique adaptée. Enfin, la stratégie d’intervention sur le domaine public maritime est en cours de définition pour chacune des collectivités. La Gestion écologique L’étude réalisée en 2006-2007 révèle que le principal enjeu de biodiversité pour la majeure partie des sites acquis et transférés est la mise en place d’une gestion pérenne et permanente. Selon les cas, il s’agit en premier lieu d’élaborer le document de gestion et de disposer d’un gestionnaire de site. 16 En raison des nombreux et récents transferts de sites relevant particulièrement des 50 pas géométriques, 74 sites ont des dimensions inférieures à 25 ha et ce sont au total 90 sites qui sont à ce jour dépourvus de documents de gestion. En sus de leur rédaction, il conviendrait de s’adjoindre de nouveaux outils comme le suivi par images satellitaires des espaces boisés ce qui permettrait de surveiller les défrichements de dimension très importante ou difficilement accessibles. Les sites qui nécessitent la mise en place d’une gestion écologique se situent principalement en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion. Il s’agit essentiellement de sites acquis, de dimension assez importante et dépourvus de protection réglementaire particulière (régime forestier, réserve naturelle…) : - En Martinique : Habitation Blin (Presqu’île de la Caravelle), Morne Benguette (Côte atlantique sud), Morne Aca-Pointe Borgnesse et le Morne Larcher ; - En Guadeloupe : Golconde Belle Plaine, Marie-Thérèse, La Grande Vigie-Barre de Cadoue, Monts Caraïbes, Ilet Kahouanne, Vendrier – Saragot ; - A Saint Barthélemy : Fort Karl ; - En Guyane : Mont Mahury, Iles du Salut, Iles de Rémire, Montagne d'Argent ; - A La Réunion : Rocher des Colimaçons (Rivages de la Petite Ravine à la Pointe des Châteaux), Cap la Houssaye. D’autres sites bénéficient déjà d’une gestion écologique, mais ponctuelle ou insuffisante. Diversifier les actions des gardes du littoral contribuerait à mieux conserver les milieux naturels : - Renforcer la surveillance contre le braconnage et les défrichements, en priorité en Guyane et à Mayotte ; - Entretenir les boisements, les zones humides et les milieux ouverts ; - Contribuer au nettoyage des milieux ; - Mettre en place des banques de semences pour des espèces végétales endémiques et/ou menacées d’extinction, en priorité à La Réunion et en Guadeloupe ; - Renforcer les suivis d’espèces : avifaune, tortues marines. Régulariser l’usage du foncier et mettre en place ou actualiser des conventions d’usage contribuerait par ailleurs à reconnaître les usagers comme acteurs de l’entretien des milieux et à définir et adopter avec l’avis des usagers des pratiques respectueuses de l’environnement (type de cultures, agro forêt, pastoralisme, règles d’usage du feu). Les Travaux de conservation ou de restauration de la biodiversité La biodiversité animale et végétale est généralement préservée lorsque son biotope est conservé en état. Engager des travaux de préservation ou de restauration des milieux contribue à maintenir la diversité biologique des sites. Ces travaux, qui relèvent plus de l’investissement du propriétaire que du gestionnaire, consistent en priorité à: - Maîtriser la fréquentation humaine sur les sites (canaliser la fréquentation par la réalisation de sentiers, reculer le stationnement, interdire la fréquentation de certaines zones pendant les périodes de ponte,…). 18 unités de gestion sont concernées par cette problématique ; - Conforter la dynamique évolutive naturelle des boisements par un enrichissement floristique ou par l’éradication d’espèces exotiques. 17 Par ailleurs, il faut engager des opérations de restauration de zones humides (biotope de l’avifaune), de dunes ou de forêts littorales (biotope des tortues marines) sur 17 unités de gestion écologique d’outre mer. Pour favoriser la reproduction d’espèces, il est en outre urgent d’éradiquer des espèces animales exotiques, comme les rats sur les îlets où se reproduisent les oiseaux marins par exemple. La Sensibilisation et mobilisation des acteurs L’organisation d’animations dans les maisons de la nature des sites, la création de dépliants et de panneaux d’exposition sur la biodiversité, la réalisation de parcoursdécouvertes ou d’aménagements dédiés à la sensibilisation contribuent à la prise de conscience du grand public sur les enjeux de biodiversité littorale d’outre mer. Accueillir et sensibiliser les visiteurs aux enjeux de biodiversité concerne la quasi-totalité des unités de gestion. Mobiliser les acteurs pour instaurer une gestion pérenne des sites et pour former les gardes du littoral est un des enjeux prioritaires de préservation des milieux pour l’ensemble des sites d’outre mer. Impliquer les collectivités et les acteurs locaux dans la restauration de milieux anthropisés ou dégradés (pestes végétales, décharge, pollution des eaux par rejets domestiques et industriels…) et la modification des réglementations est également une problématique récurrente en Guyane, dans les Antilles et l’Océan Indien. Développer des réseaux d’échanges devrait permettre un transfert des compétences et des expériences, à la fois en interne au sein des antennes du CEL, mais aussi entre les gestionnaires des sites. Les thématiques d’échanges à développer sont variées : - Réseau tortue : restauration biotope et suivi ; - Réseau lutte contre les espèces invasives : lutte mécanique et biologique ; - Réseau avifaune : suivi, dératisation, chasse ; - Réseau flore : banque de semences, enrichissement de milieux, régénération d’espèces ; - Réseau animations et maisons de la Nature : expositions, animation ludiques ; - Réseau sur les usages traditionnels : pastoralisme, élevage, charbon de bois en forêt sèche ; - Réseau érosion littorale et terrestre: restauration, études et actions ; - Réseau hydrologie et zones humides (lagune, étang, mares) : entretien, restauration, diagnostics. Enfin, il apparaît nécessaire au Conservatoire du Littoral de normaliser le niveau des inventaires sur les sites terrestres et marins pour connaître le caractère patrimonial de chaque site, pour réaliser des documents de gestion pertinents et pour intervenir selon des enjeux de biodiversité avérés. D’après l’avis des acteurs rencontrés, il faudrait engager des diagnostics complémentaires auprès de 60% des unités de gestion écologique. Mettre au point des indicateurs de biodiversité sur des sites « pilote » contribuerait par ailleurs à mener un suivi des milieux et des espèces, à fournir des compléments de connaissance pour la gestion de la biodiversité et à mesurer les impacts des changements globaux, des activités et des aménagements sur les sites. 18 Des compléments de connaissance spécifiques ont aussi été préconisés selon les caractéristiques de chaque site (problèmes de circulation hydrologiques, lutte biologique d’espèces invasives, impact du charbonnage dans les forêts xérophiles…). UN ZOOM SUR LA REUNION : A La Réunion, la mise en œuvre des pratiques de restauration écologique sur les sites du Conservatoire du Littoral a démarré activement depuis quelques années. Le site de la Grande Chaloupe totalise 260 ha localisés à une dizaine de kilomètres au Sud-Ouest de St Denis sur la commune de la Possession et est essentiellement constitué du rempart gauche de la ravine de la Grande Chaloupe et une partie de la planèze la surplombant. Ce site s’inscrit dans le grand massif « naturel » de la Montagne, d’un seul tenant, qui forme un gradient altitudinal continu avec les milieux naturels de plus haute altitude. Au sein de ce massif s’imbriquent des mosaïques de taille variable de formations secondaires ainsi que de reliques de forêt semi-xérophile. Menacée à l’échelle mondiale, la forêt semi-xérophile l’est également à La Réunion. Des 56 800 ha de la végétation semi-xérophile de La Réunion, il ne reste à peine plus de 560 ha soit 1 % de la surface originelle (STRASBERG et al., 2001). Des travaux cartographiques et de nombreuses prospections de terrain donnent à penser que le massif de la Montagne recèle à lui tout seul près de la moitié de ces reliques d’habitats semi-xérophiles (255 ha), dont une soixantaine d‘hectares situés sur le site du Conservatoire du Littoral à la Grande Chaloupe. Ces habitats semi-xérophiles présentent des faciès variables (tant du point de vue de la structure que de la composition floristique). Faute de connaissance et suivi écologique fin sur le moyen terme, on est dans l’incapacité d’évaluer leur fonctionnalité écologique actuelle. Par ailleurs, comme déjà dit plus haut, ces reliques se présentent sous forme de spots dont la surface unitaire dépasse rarement 3 ha. Cette faible taille associée à leur dispersion pose à nouveau le problème de la fonctionnalité écologique à l’échelle de chacun de ces spots ainsi qu’à l’échelle plus petite du complexe d’habitat (connectivité écologique). Enfin, la topographie abrupte du massif de la Montagne et la localisation préférentielle des reliques d’habitats semi-xérophiles dans des zones de forte voire très forte pente, rend encore plus ardus leur analyse et leur suivi. Les spots d’habitats semi-xérophiles sont noyés au sein d’habitats plus ou moins secondarisés qui se présentent sous forme de savane et de fourrés d’espèces communes, exotiques et parfois envahissantes au sein desquels peuvent se trouver localement des plantes indigènes et endémiques de la forêt semi-sèche. Ces fourrés secondaires peuvent comporter des sous-formations à Faux poivriers (Schinus terebenthifolius), à Cassi (Leucaena leucocephala), à Tamarin de l’Inde (Pithecellobium dulce), etc… Quant à la savane, elle recèle parfois quelques espèces rares patrimoniales (Heteropogon contortus, Doratoxylon apetalum). 19 Vue de la ravine de la Grande chaloupe depuis l’amont vers l’aval Les principales menaces pesant sur les habitats naturels du site de la Grande Chaloupe sont - les incendies, qui peuvent parcourir régulièrement les planèzes et contre lesquels n’existe actuellement aucun dispositif de lutte adapté ; - les défrichements et prélèvements illicites, destructeurs de feuilles/écorces... d’espèces rares ; - la multiplication des pénétrations motorisées, soit à des fins de loisirs (développement anarchique des pratiques de quad, moto voire VTT), soit à des fins de chantier (entretien de lignes haute tension et autres infrastructures à venir), soit à des fins de circulation (le site est bordé au Nord par la route du littoral, traversé au sud par la Route Départementale 41 et bientôt traversé en souterrain par un tram-train) ; - enfin, par l’invasion biologique d’espèces exotiques. A L’ECHELLE DE LA REUNION, DE NOMBREUSES ESPECES ET LEURS BIOTOPES ONT DEJA DISPARU OU SONT FORTEMENT MENACES D’EXTINCTION EN RAISON DE LA DESTRUCTION DES HABITATS ET DE L’INVASION DES MILIEUX NATURELS ET SEMI-NATURELS PAR DES "PESTES VEGETALES" (STRASBERG ET AL., 2001) Pour ce qu’on en connaît, les reliques d’habitat semi-xérophile de la Grande Chaloupe sont aujourd’hui menacées par la prolifération d’espèces comme : - La Liane papillon (Hiptage benghalensis) Cette liane vigoureuse étouffe toute végétation en s’enroulant autour des troncs, elle contrarie la croissance des arbres, provoque un étouffement pouvant entraîner leur mort. - Le Choca vert (Furcraea foetida) Cette espèce de la famille des Agavacées a été cultivée pendant près d’un siècle à La Réunion pour ses fibres utilisées dans la fabrication des cordages. Son omniprésence envahissante est due à son mode de reproduction très dynamique. Très présente dans les habitats semi-xérophiles, son fort pouvoir de recouvrement empêche toute régénération. - Le Faux Poivrier blanc (Rhus longipes) Anacardiacée d’origine angolaise, cette espèce introduite et naturalisée est commune dans les régions sèches de basse altitude . 20 - Le Cassi (Leucaena leucocephala) : Cette Mimosée originaire d’Amérique du Sud envahit les clairières et les sous-bois créant ainsi des fourrés mono spécifiques par étouffement progressif des formations en place. - Le Jamrosat (Syzygium jambos) Myrtacée originaire d'Inde et de Malaisie, elle envahit les clairières et colonise les bords de ravines. - Le Faux Poivrier (Schinus terebinthifolius) Anacardiacée d'origine brésilienne, le genre Schinus regroupe une dizaine d’espèces dont certaines sont devenues plus ou moins pantropicales. Le Faux Poivrier est le seul qui s’est naturalisé dans les Mascareignes. Cette liste n’est pas exhaustive. Tache d’Hiptage benghalensis au milieu d’une relique semi-xérophile dégradée. Fond de la ravine de la Grande Chaloupe : invasion par Hiptage benghalensis S’agissant des espèces animales potentiellement invasives à la Grande chaloupe, leur rôle n’est pas évoqué compte tenu de l’absence d’observations en la matière. Dans ce contexte marqué par la lacunarité des connaissances et la prégnance des menaces, le Conservatoire du Littoral a décidé de: 1) Démarrer des travaux de restauration écologique sur certaines des reliques d’habitats semi-xérophile ; 2) Participer financièrement et intellectuellement avec d’autres acteurs réunionnais de la conservation à un programme public d’envergure portant sur les reliques de forêt semi-xérophile du massif de la Montagne (appel à projets LIFE + 2008, volet biodiversité en cours d’attribution) ; 3) Etendre sa maîtrise foncière à court terme sur le Massif de la Montagne en ciblant les espaces naturels recélant des reliques de forêt semi-xérophile, actuellement sous statut foncier privé et ne faisant l’objet d‘aucune mesure conservatoire ; 4) Concevoir et mettre en œuvre un plan de Défense Contre l’Incendie pertinent à l’échelle des reliques semi-xérophiles de la Montagne. 21 Les premiers travaux de restauration écologique ont démarré en 2006. Ils ont concerné deux zones géographiquement et écologiquement distinctes du site de la Grande Chaloupe : Une première zone était située en rive droite de la ravine de la Petite Chaloupe à une altitude de 200m environ. Cette zone recèle un faciès très dégradé d’habitat semixérophile : les espèces arborées caractéristiques de cet habitat sont rares, dispersées et le niveau d’invasion par les espèces exotiques est élevé, principalement liane papillon (Hiptage benghalensis) et choca vert (Furcraea foetida). Dans cette zone légèrement supérieure à 6 ha, l’association Genès, financée par le Département de La Réunion, a entrepris un travail de repérage des individus d’espèces végétales protégées présents ainsi qu’une destruction manuelle systématique pied par pied des individus de liane papillon et de choca vert au moment de leur floraison suivi d’un passage pour traitement des souches de liane papillon au phytocide quelques semaines après l’abattage. L’ensemble du travail accompli a représenté un effort de 30 Hommes.jours pour chaque hectare traité. La poursuite de cette intervention et l’évaluation de son efficacité dépendent désormais de la possibilité pour l’association Genès de mobiliser les moyens humains et financiers nécessaires. Coupe de la liane papillon et badigeonnage des souches au phytocide Mât de choca abattu au moment de la 22 floraison Une deuxième zone située en rive gauche de la ravine de la Grande chaloupe à une altitude de 500 m environ. Cette zone de 3.1 ha recèle une relique de forêt semixérophile considérée comme représentative de ce que pourrait être une forêt semixérophile climacique ou au moins écologiquement fonctionnelle : tous les étages de végétation sont présents et bien pourvus en espèces, le couvert est souvent fermé, la régénération présente voire ponctuellement abondante. Les espèces exotiques invasives présentes sont le jamrosat (Syzygium jambos), la liane papillon (Hiptage benghalensis) et, dans une moindre mesure, le Choca vert (Furcraea foetida) ainsi que l’avocat marron (Litsea glutinosa). Leur niveau d’invasion est proportionnellement faible. Dans cette zone, l’Office National des Forêts, a procédé à : - - l’inventaire des espèces végétales présentes y compris au stade plantule ; la destruction raisonnée des espèces exotiques de manière à maintenir le couvert végétal fermé et favoriser la régénération des espèces caractéristiques de l’habitat. Cette destruction s‘est faite manuellement ou à la tronçonneuse après élagage de manière à minimiser les impacts de chute des arbres au sol. le « rangement » des débris végétaux au sol en andain afin de ne pas occuper une surface trop importante susceptible de gêner d’ éventuelles germinations ; le repassage pied à pied après quelques semaines pour traiter au phytocide les souches d’espèces exotiques ; la compilation et la description précise de l’intervention réalisée de manière à pouvoir en assurer un suivi pertinent y compris à moyen-long terme ainsi que d’en définir progressivement les modalités techniques les plus adéquates. L’ensemble du travail accompli a représenté un effort de 25 Hommes.jours pour chaque hectare traité. Le Conservatoire du Littoral compte poursuivre le financement de ces travaux de restauration écologique en routine chaque année. Du fait de sa politique d’acquisition ou bien d‘affectations de zones naturelles des 50 pas géométriques, le Conservatoire du Littoral est présent sur la côte sous le vent de La Réunion avec des sites de petite taille mais très fréquentés. Ces sites, anthropisés depuis très longtemps, abritent majoritairement des habitats secondarisés ou dégradés. Ca et là, quelques vestiges moins dégradés subsistent ponctuellement, la majeure partie du temps dans les zones moins fréquentées. La corrélation entre dégradation et fréquentation conduit à la mise en œuvre de travaux de restauration s’appuyant sur 2 piliers distincts mais complémentaires : - le contrôle des flux d’usagers : recul des stationnements, pose de blocs rocheux, fermeture de certains sentiers, contournement et éloignement des formations végétales sensibles… - la lutte contre les espèces exotiques envahissantes et les plantations d’espèces indigènes. 23 Seule la mise en œuvre conjointe des 2 axes peut permettre une restauration de la qualité et de la fonctionnalité des habitats ciblés. Affecté au Conservatoire du Littoral depuis février 2006, la Pointe de Trois Bassins est un site naturel recouvert d’une savane sèche composée principalement d’herbacées de type graminées et d’arbustes exotiques disposés en bouquet répartis sur tout le site. Cette savane est le résultat de l’arrivée de l’homme il y a un peu plus de trois siècles, qui a défriché ou brûlé la forêt ou la savane primaire qui préexistait, afin de la mettre en culture ou d’y faire pâturer des bœufs moka ou des cabris. Cette alternance de feu et de pâturage a modelé ce paysage ouvert que l’on peut observer aujourd’hui. Le long du littoral, au plus près des embruns et du rivage, un cordon de végétation indigène s’est cependant maintenu, constitué principalement de Patate à Durand (Ipomoea pes-capraea) et de Manioc marron bord de mer (Scaevola taccada). Une euphorbiacée endémique a même été retrouvée récemment par le Conservatoire Botanique National des Mascarins sur ces trottoirs rocheux, la Chamaesyce reconciliationis. Ce cordon littoral se trouve menacé aujourd’hui par l’invasion de certaines espèces exotiques qui prennent le dessus et notamment l’une d’entre elles, visiblement très bien résistante au sel, le Prosopis juliflora, ou Z’épinards. Le risque majeur se situe surtout dans une fermeture totale du milieu par cette fabacée épineuse, associée à d’autres espèces exotiques envahissantes présentes plus à l’intérieur des terres, en raison de la disparition de l’alternance pâturage-feu qui entretenait la savane herbacée. 24 Vue aérienne du site avec visualisation de l’impact causé aux formations végétales du fait de la multiplicité des pénétrations pédestres et motorisées. Depuis, la majeure partie des accès a été fermée et seuls 3 sentiers sont maintenus. 25 A l’issue d’une cartographie des espèces exotiques envahissantes réalisée en 2006 par l’ONF, il a été décidé d’entreprendre des travaux d’arrachage mécanisés progressifs de ces plantes. Cartographie du Z’épinard (Prosopis juliflora) sur le site de Trois-Bassins 26 Un opérateur mandaté par l’ONF muni d’une pelle araignée a arraché les plants et les a broyés sur place afin de limiter au maximum la repousse. Par la suite, l’ONF est venue appliquer un herbicide sur les souches afin de limiter encore les éventuels rejets. La chronologie des arrachages s’est faite de manière à favoriser au mieux le confortement de la végétation indigène : - intervention au plus près des formations indigènes puis en s’en éloignant progressivement ; - destruction raisonnée des exotiques de manière à valoriser, lorsque cela est possible, l’écran de protection qu’elles constituent face aux embruns pour le recru d’espèces indigènes. Envahissement par le Prosopis juliflora (en arrière plan) Arrachage de Prosopis juliflora On estime qu’à l’issue de quatre passages, l’intégralité des tâches de Prosopis julifera aura été traitée, l’éradication de l’espèce sur le site devant être ensuite annuellement contrôlée dans le cadre d’un entretien soigné. Le coût moyen de traitement des tâches de Prosopis incluant le passage de l’engin mécanique puis le passage en traitement phytocide manuel est de 3,76 € par m2. Afin de redynamiser les populations de Scaevola taccada et d’aider cette espèce à reconquérir les espaces qu’elle a pu occuper par le passé, le CIRAD a été sollicité pour 27 mettre en place un chantier de bouturage, méthode très bien maîtrisée et très efficace dans ce contexte. Le chantier consiste en une récolte sur site de boutures, puis un élevage en pépinière jusqu’à maturité des plants (incluant une période de servage hydrique afin d’élever le taux de survie in situ) et enfin, une réimplantation dans le milieu accompagnée dans les premières semaines par un arrosage en fonction des besoins. Cette opération, initiée en 2007 avec le concours du CIRAD dans le cadre d’un chantier d’insertion financé par la commune de Trois Bassins et le Territoire de la Côte Ouest, a permis la production en pépinière de 1500 boutures de manioc dont 750 ont survécu à la période de sevrage hydrique et ont été plantées en décembre 2007. Depuis, un nombre non négligeable de plants a été détruit par les usagers du site. Il est prévu en 2008 de poursuivre cette action de renforcement du peuplement de manioc marron par la plantation de 1000 boutures supplémentaires. Fourré à Scaevola taccada Enfin, une opération de revégétalisation de la savane par semis de graines issues de récoltes sur place est programmée pour l’entrée en saison des pluies 2008. Les actions de restauration présentées ci-dessus témoignent des efforts entrepris par le Conservatoire du Littoral à La Réunion pour lutter concrètement contre l’érosion de la biodiversité sur ses sites. D’autres interventions sont en cours d’élaboration technique, d’acceptation administrative ou bien de recherche de cofinancements : - récoltes d’espèces protégées pour production de plants aux fins de renforcement des peuplements arborés semi-xérophiles de la Grande chaloupe ; - mise en œuvre de lutte biologique contre la prolifération des jacinthes d’eau (Eichornia crassipes) et laitues d’eau (Pistia stratiotes) sur les étendues d’eau douce littorales dont l’étang du Gol ; - implantation d’un verger à graines conservatoire à Bois blanc pour l’espèce Hernandia mascarenensis dont quelques individus seulement subsistent à La Réunion… 28 Associées aux opérations de régulation des flux d’usagers, elles sont nécessaires à la sauvegarde d’une relative diversité biologique sur les espaces littoraux. Dans certains cas, il convient même de tenter de recréer de la diversité. TOUTES CES OPERATIONS ONT UN COUT ET LEUR MULTIPLICATION INDUIT DES COUTS D’INVESTISSEMENT DE PLUS EN PLUS LOURDS A SUPPORTER. D’OU, LA ENCORE, LA NECESSITE DE PRIORISER LES INTERVENTIONS : A L’ECHELLE DE L’OUTRE MER, 22 UNITES DE GESTION ONT ETE IDENTIFIEES COMME PRIORITAIRES (A LA FOIS DE GRANDE VALEUR PATRIMONIALE ET TRES MENACEES) ; 15 D’ENTRE ELLES DOIVENT FAIRE L’OBJET D’ACTIONS RAPIDES DE PRESERVATION OU DE RESTAURATION. 29 30