role des lymphocytes dans l`immunité des muqueuses

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ROLE DES LYMPHOCYTES DANS L’IMMUNITÉ
DES MUQUEUSES: EXEMPLE DU TISSU
LYMPHÖDE ASSOCIÉ À LA MUQUEUSE
DIGESTIVE
Pery P
To cite this version:
Pery P. ROLE DES LYMPHOCYTES DANS L’IMMUNITÉ DES MUQUEUSES: EXEMPLE
DU TISSU LYMPHÖDE ASSOCIÉ À LA MUQUEUSE DIGESTIVE. Annales de Recherches
Vétérinaires, INRA Editions, 1987, 18 (3), pp.304-309. <hal-00901732>
HAL Id: hal-00901732
https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00901732
Submitted on 1 Jan 1987
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ROLE DES LYMPHOCYTES DANS
EXEMPLE DU TISSU LYMPHÖDE
L’IMMUNITÉ DES MUQUEUSES:
ASSOCIÉ À LA MUQUEUSE DIGESTIVE
PERY P
INRA, Station de Recherches de Virologie
et
d’Immunologie 78850 Thiverval-Grignon,
France
Si Besredka date de 191 à 19 13 les observations fortuites qui lui suggérèrent l’idée d’une immunité
propre à l’intestin qu’il s’employa avec succès à démontrer au cours des 25 années qui suivirent, il fallut
ensuite attendre la découverte des IgA secrétoires dans les années 1960 pour que l’immunité locale soit
à nouveau explorée.
au tube digestif, trois points seront abordés: 1 ) l’archiassocié à la muqueuse, 2) les circulations de lymphocytes, 3) le rôle des
dans la protection de la muqueuse contre différents agents pathogènes.
Dans ce court
tecture du tissu
lymphocytes
rapport, volontairement limité
lymphoïde
1. Architecture du tissu
lymphoïde associé à la muqueuse digestive (GALT).
Le GALT comprend les plaques de Peyer, les nodules lymphoïdes isolés, l’appendice et le sacculusrotondus, les lymphocytes intra-épithéliaux, les lymphocytes de la lamina propria, et les ganglions
mésentériques.
1.1. Architecture
Le nombre, la taille, la localisation des plaques de Peyer (PP, agrégats d’au moins 5 follicules
lymphoïdes) varient en fonction de l’espèce animale et de l’âge. Ces plaques contiennent des centres
germinatifs centraux comprenant des cellules B se divisant très rapidement et entourés du côté de la
lumière intestinale par un dôme (cellules B et macrophages) et du côté de la séreuse par une zone T
dépendante qui s’étend entre les centres germinatifs et qui est riche en veinées post-capillaires. La
région sous-épithéliale contient des cellules B et T et est couverte d’un épithélium spécial sans cellules
secrétant du mucus mais pourvu de cellules M (pour membrane car elles restreignent l’entrée incontrôlée des substances de la lumière vers la lamina propria et le départ de lymphocytes vers le flot fécal,
ou plutôt pour Microfold à cause des replis qui apparaissent à la surface de certaines). Ces cellules M
assurent la transmission du matériel antigénique intraluminal vers les lymphocytes adjacents. Chez
1 semaine et chez le
l’homme, la nature lymphoïde des plaques de Peyer peut être démontrée vers la 20
lapin au 29’ jour de gestation. Pour d’autres espèces comme le rat, les lymphocytes ne peuplent les
plaques qu’après la naissance.
L’appendice important chez le lapin, vestigial chez l’homme et absent chez le rat et la souris a une
architecture très semblable à celle des PP.
Dans les régions dépourvues de PP, l’épithélium des villosités est parsemé de nombreuses cellules
lymphoïdes (IEL: lymphocytes intra-épithéliaux) qui furent identifiés comme leucocytes en 1864. La plupart de ces lymphocytes ont un volume supérieur à celui des lymphocytes sanguins et des classes (petits,
moyens, grands) peuvent être distinguées. 60 % contiennent des granules. 7 % des IEL isolées présentent des slg, alors que 40 % sont T dépendantes, et que 50 % sont donc « nulles De nombreux lymphocytes semblent capables de passer de la lamina propria à l’épithélium et vice versa, mais ils ne semblent
e jour et
pas entrer en grand nombre dans la lumière intestinale. Chez le lapin, ils apparaissent vers le 28
chez l’homme entre la 10
1 et la 20’ semaine de gestation, alors que la souris en est à peu près
dépourvue à la naissance. Les granules des IEL de souris CBA au nombre de 2 à 5 par cellules sont situés
vers l’appareil de Golgi et ont un diamètre de 0,4 à 0,9 pM. Les mucopolysaccharides des IEL peuvent
varier selon les espèces.
La lamina propria est très fortement peuplée en lymphocytes B, T et en plasmocytes sécrétant des
immunoglobulines, sans qu’il y ait de centre germinatif. Ces lymphocytes, contrairement aux précédents
ne possèdent pas de granules.
Pour clore ce chapitre, il faut signaler que si le nombre de cellules produisant des anticorps dans la
moelle osseuse, la rate et les ganglions lymphatiques de l’homme a été estimé à 2,5 x 10’°, il en
possède trois fois plus dans sa muqueuse intestinale.
1.2.
Marqueurs
et fonctions
En immunofluorescence, entre 17 et 23 % des cellules des PP de lapins âgés de 15 semaines sont
marquées par un anti-antigène de lymphocytes thymiques, 32 % possèdent des slgM, 16% des slgG et
30 % des slgA. Pour le rat, 50 % des lymphocytes des PP ont des slg, 0,25 % des clg, 18 % des lymphocytes sont des T dont 6,4 % ont un phénotype T suppresseur (Ts) et 10 % un phénotype T auxiliaire (Th).
Les isotypes exprimés à la surface des cellules B sont très différents entre rats adultes germ-free (4 %
IgM, 2 % IgG, 56 % IgA, 28 % IgE) et rats du même âge élevés de façon conventionnelle (23 % IgM, 1 %
IgG, 19 % IgA, 0 % IgE). Les cellules B des PP de souris portent des slgM (80 %) des slgA (20 %) et des
slgG. Les PP de souris CBA/N (xid) contiennent des lymphocytes B matures alors que la rate de ces souris en est dépourvue. La maturation des cellules B exigerait l’action d’une cellule T qui augmenterait l’expression des antigènes lyb 5. L’immunisation orale de souris conduit à l’induction de cellules régulatrices
isotype spécifiques: Th pour IgA, Ts pour IgG et IgE. Les cellules Th IgA seraient des cellules autoréactives (déterminant stimulateurs : MHC classe Il); elles entraînent une commutation préférentielle
des BsIgM vers les BsIgA. Cette prédominance n’existant pas chez les germ-free dépendrait de facteurs
d’environnement locaux. La stimulation antigénique entraînerait de plus l’apparition d’un circuit de
contrasuppression.
Si les PP jejunales
de mouton ont une composition semblable à celle des autres animaux, il n’en est
pas de même des PP iléales. Celles-ci sont très grandes et contiennent de nombreux follicules ( 100 000)
où les cellules B se divisent activement. Elles contiennent très peu de cellules T (< 1 %). Les cellules B
expriment des slgM et l’ablation chirurgicale de ces PP pendant la première semaine après la naissance
entraîne une réduction importante.du nombre de cellules B circulantes. Les PP jéjunales régressent après
la naissance, la régression complète étant obtenue au bout de 18 mois. Ces PP semblent être le lieu d’un
véritable génocide de cellules B, puisque 95 % d’entre elles seraient éliminées par les macrophages dès
leur apparition. Comme on n’a pas clairement démontré le rôle de la moëlle osseuse dans la production
des lymphocytes, ces PP iléales pourraient être des équivalents chez le mouton de la bourse de Fabricius
chez les oiseaux.
Les lymphocytes B sont très peu nombreux (< 1 % des IEL) dans l’épithélium intestinal du rat et de la
souris, alors que les Th sont très minoritaires. Les cellules de phénotype suppresseur cytotoxique constituent donc la majorité des IEL, mais beaucoup (70 % des IEL de la souris) sont dépourvues du marqueur
T (Thy-1 Il existe donc, chez la souris normale, mais aussi chez la souris nude une population Thy-1-, lyt
2+ qui serait thymo-indépendante, mais exprimerait l’antigène d’activation cytotoxique CT1 et la
marqueur J 1 d et serait cytotoxique. Bon nombre de ces cellules comportent des granules, mais ces,
granules peuvent être retrouvées dans tous les sous-groupes d’IEL. A côté de ces 50 % de cellules Thy1-,
lytl-,lyt2+, on trouve 35 % de Thy1+, lyt1+, lyt2+ qui sont sans doute des lymphocytes cytotoxiques
- spécifiques d’antigènes (CTL) et des précurseurs de CTL et 20 % de cellules Thy1 +, lytl-, lyt2- douées
d’activité NK. Certaines de ces cellules sécrètent sans doute des facteurs capables de moduler l’expression des antigènes la par les cellules épithéliales.
Le problème des IEL est loin d’être entièrement clarifié et A Petit, dans sa communication, donnera un
avis plus développé et plus pertinent sur ce sujet.
Dans la lamina propria (LP), la proportion des Th est plus importante que dans l’épithélium: seuls
39 % des lymphocytes T de l’homme sont OK T8+; 15 % des lymphocytes de la lamina propria de rat
sont Th contre 26 % Tcs, alors que 30 % ont des slg (cellules B). Peu de cellules de la LP sont granuleuses et l’activité NK est absente. Une activité CTL apparaît après immunisation. La LP est en outre le
lieu d’accumulation des plasmocytes: chez l’homme, on détecte 350 000 cellules contenant des IgA,
50 000 cellules contenant des IgM, 10 à 1 5 000 cellules contenant des IgG et 10 000 cellules contenant des IgE par mm’.
2. Les
phénomènes de circulation des lymphocytes
phénomènes de circulation des lymphocytes intéressent l’intestin: 1) Les lymphocytes B et T
continu du sang vers les tissus et vice-versa et le tube digestif est le site majeur de
circulation de ces cellules 2) Des lymphoblastes B et T sont déversés dans le sang par le canal thoracique et retournent dans l’intestin où ils sont momentanément ou définitivement retenus.
Chez le mouton, les petits lymphocytes provenant du tube digestif ont une très forte tendance à y
retourner lorsqu’ils sont injectés par voie intraveineuse, alors que les petits lymphocytes provenant des
ganglions périphériques sont capables d’y retourner préférentiellement. Il y a donc deux pools distincts
de lymphocytes recirculants. Chez la souris, cette différenciation n’existe pas. Des expériences de fixation sur des coupes de tissus ont mis en évidence sur les lymphocytes des récepteurs pour l’endothélium
des veinules post-capillaires des ganglions périphériques et des plaques de Peyer. Les petits lymphoDeux
sont en mouvement
cytes de souris expriment
sans doute les deux classes de récepteurs et sont donc capables de circuler
librement dans les organes muqueux ou périhériques. Cependant les cellules T se fixent mieux que les B
à l’endothélium des veinules post-capillaires (EVPC) des ganglions périphériques alors que les cellules B
se fixent mieux que les T à l’EVPC des plaques de Peyer (et cela quelle que soit l’origine des cellules B ou
T). De la même façon, les T lyt2- ont une préférence pour les PP.
En ce qui concerne les lymphoblastes activés (B ou T), ceux qui apparaissent dans les PP, migrent
les ganglions mésentériques, le canal thoracique et le sang pour revenir sélectivement vers les sites du
tissu muqueux en passant à travers l’endothélium des VPC des PP, alors que les blastes des ganglions
périphériques migrent sélectivement vers leur site d’origine. Une sévère inflammation peut cependant
détourner les blastes de leur trajet et les obliger à s’accumuler à l’endroit où cette inflammation est créée
(cas des parasitoses intestinales).
Les IEL isolés sont capables de se lier à l’endothélium des veinules post-capillaires des PP (et pas à
celui des ganglions périphériques) et de migrer sélectivement du sang vers les surfaces muqueuses. De
la même façon des cellules clgA purifiées à partir de la lamina propria sont capables de retrouver sélectivement cette LP. Cette exploration succincte de la circulation des lymphocytes ou des lymphoblastes est
sans doute incomplète et de nombreux transferts de compartiment à compartiment sont sans doute
encore à découvrir. Elle est cependant grossièrement vraie pour la plupart des espèces, mais pas pour le
porc chez lequel les petits lymphocytes provenant de l’intestin et les lymphoblastes du GALT entrent
dans le sang au niveau des ganglions mésentériques au lieu de prendre la voie lymphatique du canal
thoracique.
Pour sortir du cadre étroit de ce rapport, et pour être plus proche de la réalité, il faut signaler que la
du retour à la muqueuse des lymphoblastes sensibilisés dans une muqueuse n’est pas sélective, mais intéresse toutes les muqueuses: des lymphoblastes des ganglions mésentériques sont
capables de peupler l’intestin, mais aussi le tractus respiratoire, le tractus génital et les glandes mammaires. Ces faits ont donné naissance au concept d’un système immunologique commun aux différentes
muqueuses de l’organisme.
spécificité
3. Rôle des
lymphocytes dans la protection de la
muqueuse contre /es agents
paihogènes
Les études sur le rôle des lymphocytes dans la protection de la muqueuse contre les agents pathogènes sont entravées par le manque de modèles clairement définis. En effet, beaucoup d’agents infectieux à voie de pénétration intestinale ont une tendance marquée à la généralisation (signe de faiblesse
des défenses locales lors du premier contact avec l’agent pathogène ?): colibacillose septicémique,
abcès du foi dans l’amibiase, abcès puis granulomes dispersés dans certaines salmonelloses... Un
modèle adéquat serait constitué par un agent pathogène à multiplication intra-cellulaire dont le lieu de
multiplication serait limité à l’épithélium et aux zones de la lamina propria éloignées des vaisseaux
sanguins. Ce modèle n’existe pas pour le moment.
Ce rôle des lymphocytes B ou T dans la protection peut être étudié in vivo ou in vitro. Les études
réalisées in vivo ont mis en jeu des transferts de cellules ayant pour but de rendre immuns des animaux
neufs ou compétents des animaux immunodéficients. Les expériences réalisées dans les meilleurs des
cas avec des cellules de ganglions mésentériques ou des cellules du canal thoracique ont souvent
montré un caractère T dépendant de la protection (Nippostrongylus brasiliensis nématode du rat,
Trichinella spiralis nématode ubiquitaire, Giardia muris protozoaire de la souris) qui n’est peut-être que le
reflet d’une T dépendance de la réponse en anticorps. On rejoindrait alors le cas de l’infection de la souris
par Salmonella typhirnurium pour laquelle le transfert de cellules B est plus efficace que celui des
cellules T et pour laquelle une destruction des cellules B par de la cyclophosphamide conduit à une
multiplication incontrôlée de la bactérie. La mise au point de la purification des cellules des différentes
couches structurales de l’intestin et l’obtention d’hybridomes permettant d’en extraire des souspopulations définies apporteront vraisemblablement de nouvelles données. Les tests pratiqués in vitro
ne donnent peut-être qu’une image imparfaite et parcellaire des phénomènes intervenant dans la protection, mais ils permettent de disséquer cette protection.
Les lymphocytes B sensibilisés au niveau des PP se différencient en plasmocytes sécréteurs qui
peuplent les muqueuses et en particulier les muqueuses intestinales et mammaires, et il existe de
nombreux cas de protection passive transmise de la mère au nouveau-né par le colostrum et le lait ou les
IgA qui en sont purifiées, ou qui sont purifiées à partir de mucus intestinal : colibacillose et gastroentérite
transmissible du porc, poliomyélite de l’homme, giardiose de la souris, mais aussi teniasis de la souris
(Taenia taeniaeformis) et coccidiose de la poule (Eimeria tenella).
L’arrivée des IgA dans la lumière intestinale a lieu selon deux modalités: chez le rat, le lapin et le
poulet, elles suivent une voie hépatobiliaire et acquièrent le composant sécrétoire (SC) dans le foie, alors
espèces (y compris la souris) elles sont transportées localement et acquièrent le SC à
à la surface des cellules de l’épithélium. L’infection par de nombreux agents pathogènes
une interaction adhésive préalable entre l’agent et l’épithélium : la plupart des souches entéropathogènes d’Escherichia coli portent sur leurs pili des antigènes facteurs d’adhésion, K 88, K 99, 987P,
P1... (sur les colibacilles du porc) et il est possible de protéger passivement les porcelets nouveau-nés
grâce à l’immunité lactogène suscitée chez la truie en injectant des pili purifiés. Cette protection n’est
efficace que contre les souches possédant le facteur d’adhésion homologue. De plus des IgA obtenues
après immunisation de truie par E coli K 88+ sont capables d’éliminer le plasmide codant pour cet
antigène de la souche utilisée. L’antigène en cause n’est pas l’antigène K 88 conventionnel, mais est
sans doute relié à l’expression du plasmide au niveau des pili. Dans le cholera expérimental de la souris,
des IgA purifiées à partir de la lumière intestinale de souris germ free vaccinées par voie orale, protègent
passivement d’autres souris d’une infection similaire; cette protection est associée à une diminution des
vibrions capables de se fixer à l’intestin, et des IgA anti-surnageants de cultures de vibrions neutralisent
l’action toxique de la toxine cholérique. La découverte de cellules portant des récepteurs a a permis de
mettre en évidence des réactions de cytotoxicité cellulaire IgA dépendante (AQCC) qui impliquent cette
classe dans un rôle qui n’est plus simplement un rôle «d’interférence stérique». Des IgA sécrétoires anti
Shigella flexneri purifiées par immunoadsorption à partir de sécrétions d’anses de Thiry-Vella immunisées à l’aide de la bactérie ont une action cytotoxique spécifique lorsqu’elles sont ajoutées à des
cellules du CALT et en particulier à des IEL Thy 1-, c’est-à-dire à des lymphocytes phénotypiquement
nuls ou K. Au microscope électronique, des trophozoïtes de Giardia muris sont attachés à des lymphocytes dans la lumière intestinale et des organismes ingérés et détruits ont été identifiés dans les macrophages de la muqueuse. Des IgA antitrophozoïtes purifiées à partir du lait de souris immunes participent
à des réactions d’ADCC avec des neutrophiles ou des macrophages. Chez l’homme, des lymphocytes
T 4+ armés par des IgA spécifiques ont une action bactéricide sur Salmonella typhi. On peut penser que
ces réactions jouent un grand rôle dans la protection locale. L’immunité anti-trophozoïtes d’Entamoeba
histolytica qui semble à la fois anticorps et macrophages dépendante pourrait par exemple être réalisée
par ce mécanisme.
que dans les autres
l’intérieur
nécessite
ou
Des anticorps de classe IgG sont eux aussi capables de détruire in vitro des cibles normalement intestinales soit en présence de complément soit par ADCC (Giardia muris). Ce protozoaire reste normalement à la surface de la muqueuse, mais des IgG spécifiques peuvent être démontrées à la surface des
trophozoïtes in vivo. Si ces mécanismes existent réellement in vivo, il faut faire appel au petit nombre de
plasmocytes à IgG existant dans la muqueuse, à une pénétration des trophozoïtes dans la muqueuse
plus importante qu’on le pense, ou à une transudation des IgG à la suite de l’inflammation locale. « L’expulsion rapide»de Trichinella spiralis et de Nippostrongylus brasiliensis par le rat (dans le dernier cas il
s’agit de rats immuns) est due à l’englobement des parasites dans des amas de mucus qui empêchent le
parasite d’atteindre son lieu d’élection et dans le cas de la trichine, on a pu obtenir ces amas in vitro en
mettant le parasite en présence de mucines et d’anticorps IgC. Ces parasitoses sont accompagnées
d’une modification profonde de la structure de l’intestin qui, reproduite par un transfert de cellules T
provenant d’animaux immuns (diminution des villosités, augmentation des cryptes, inflammation) et on
peut là aussi faire appel à une transudation d’anticorps IgG locaux ou sériques. Cette fuite d’anticorps
pourrait être favorisée par des réactions d’hypersensibilité impliquant des réactions antigène-IgE à la
surface des mastocytes (dans les parasitoses intestinales, le nombre de plasmocytes à IgE et de mastocytes dans la lamina propria augmentent de façon notable). Les médiateurs solubles libérés au cours de
cette réaction anaphylactique ont peut-être de plus une activité antiparasitaire.
En ce qui concerne le rôle anti-infectieux des cellules T, les données sont beaucoup plus rares. Une
activité cytotoxique naturelle a été mise en évidence contre Salmonella thyphimurium parmi les lymphocytes des PP, des ganglions mésentériques et des IEL. Certaines de ces réactions supposées de type
natural killer effectuées par des cellules de plaques de Peyer de souris contre Salmonella typhi,
S enteritidis et Shigella sp X16 sont inhibées ou au contraire induites par des polysaccharides simples
qui montrent une spécificité pour des antigènes somatiques. Des protéines présentant des caractères de
lectines joueraient donc un rôle dans l’interaction. agent pathogène-cellule cytotoxique naturelle. Différentes cellules semblent douées d’activité cytotoxique naturelle contre Giardia lamblia (parasite de
l’homme). Dans l’état actuel du sujet et en attendant une définition des cellules agissantes, il convient
d’être prudent, certaines de ces réactions pouvant être dues à de l’ADCC. En effet si on considère le
dernier cas, les cellules «naturelles» proviennent d’individus sans passé connu de lambliose qui peuvent
avoir subi des infections inapparentes ou posséder de petites quantités d’anticorps donnant des réactions croisées avec le parasite. Des cellules du sang périphérique humain (grands lymphocytes granuleux) tuent des cellules Hela infectées par Shigella flexneri et leur activité est modulée par l’interleukine
2 et l’interféron a. Ce type de réaction expliquerait d’une part la destruction d’une bactérie cryptique par
des mécanismes envisagés précédemment et d’autre part par la pathogénie associée à la maladie par
des cellules épithéliales infectées. Des réactions de type cytotoxicité naturelle sont aussi
mises en évidence avec des IEL de porc contre des cellules infectées par le virus de la gastro-entérite
transmissible et avec des IEL de souris asialo GM 1 +, Thy 1-, Lyt-1- Lyt-2-, contre des cellules infectées
par le coronavirus entérique murin. Dans ce cas, le traitement in vivo des souris donneuses d’IEL par un
anti-asialo GM1 fait chuter la réactivité des cellules dans le test in vitro, cependant que le virus est
retrouvé jusqu’au jour 7 après l’infection virale de souris traitées, mais ne peut être mise en évidence
qu’au jour 1 chez des souris témoins. On peut donc penser que l’activité anti-virale des cellules
reconnues par l’anti-asialo GM1 est importante dans la résistance de la souris à l’infection.
Les lymphocytes T de la muqueuse participent à l’expression de l’immunité par leur caractère
(T accessoire ou T suppressive) comme il a été rappelé lors de l’étude des marqueurs des lymphocytes.
Lorsqu’ils sont stimulés, spécifiquement, certains d’entre eux sécrètent en outre des médiateurs solubles
à action non spécifique (interféron, facteurs de recrutement, interleukines, facteurs d’activation des
macrophages...).La question qui se pose est la suivante : est-ce que certains lyphocytes T sont des effecteurs spécifiques (lymphocytes cytotoxiques par exemple)? Des cellules cytotoxiques pour des cellules
de testicules du même porc infecté par le virus de la gastroentérite transmissible ont été obtenues dans
les ganglions mésentériques et les plaques de Peyer de porcs exposés par voie orale au virus. Cette cytotoxicité est diminuée après traitement des préparations cellulaires par un antisérum anti-thymocyte plus
du complément. Ceci suggère fortement le caractère de lymphocyte T cytotoxique (CTL) des cellules
éliminées par le traitement. L’injection de virus de la vaccine vivant à des rats par voie intraduodénale ou
intra-iliale fait apparaître 6 jours après des CTL (Tcs) dans les ganglions mésentériques des animaux. Des
effets cytotoxiques de cellules de ganglions mésentériques de Meriones unguiculatus souffrant
d’amibiase caecale à Entamoeba histolytica ont été décrits, mais lorsqu’on connaît l’efficacité cytolytique des macrophages activés dans cette maladie, on peut suggérer que l’effet des cellules T n’est
qu’indirect. Dans l’amibiase humaine, des cellules T qui pourraient avoir un rôle cytotoxique direct ne
sont mises en évidence que chez des patients ayant développé des abcès dans le foie. Ce sujet des
cellules T cytotoxiques sera sans doute plus facilement exploré lorsqu’on testera des cellules T monoclonales (clones ou hybridomes de cellules intestinales).
Pour conclure, il ressort de ce bref rapport: 1) que le système immunitaire intestinal est très développé et qu’il comporte une variété de sous-populations lymphocytaires supérieure à celle de la rate et
des ganglions périphériques (cellules Thy1-, lyt-1-, lyt-2-1; 2) que le système local de défense par les
anticorps IgA, qui deviennent protéases-résistantes grâce au SC et à la pièce J, est très efficace; qu’il
peut assez facilement être stimulé chez la mère pour qu’elle protège passivement ses petits par le colostrum et le lait et permet donc d’entrevoir une solution à certaines infections néonatales; 3) que les anticorps IgA en plus d’un rôle de masquage de site actif peuvent réaliser des réactions d’ADCC; 4) que des
cellules NK semblent avoir un rôle protecteur dans certaines infections; 5) que l’efficacité protectrice
des CTL est encore hypothétique. Il faut aussi se souvenir que certaines réactions immunitaires locales
peuvent avoir une action délétère (inflammation, modifications de la structure de l’intestin) et que la
protection contre un agent pathogène donné fait sans doute intervenir plusieurs des réactions que nous
avons énumérées en plus de facteurs non spécifiques ibarrière gastrique, barrière muqueuse, lysozyme)
constituant la résistance naturelle à l’agent infectieux.
destruction
Bibliographie restreinte
En ce qui
suivantes :
concerne
les deux
premiers paragraphes, la bibliographie peut être retrouvée à partir des
revues
Husband AJ, 1985. Mucosal immune interactions in intestine, respiratory tract and mammary gland. In R Pandey
(ed) Infection and immunity in Farm animals. Progress in veterinary microbiology and immunology. vol t, 25-27 Karger, Basel
Befus AD, Bienenstock J, 1982. The mucosa-associated immune system of the rabbit. In JG
of immunological processes. 167-220 Academic Press,
Hay (ed) Animal
models
Hay JB, 1982. Lymphocyte migration patterns in sheep. In J8 Hay (Ed) Animal models of immunological processes.
97-134 Academic-Press
Ernst PB, Befus AD, Bienenstock J, 1985. Leukocytes in the intestinal epithelium : an unusuai immunological compartment. Immunol Today, 6:50-551
Pour la
partie, la bibliographie
e
3
est très
éparse
et nous avons
Underdown BJ, Schiff JM, 1986. Immunoglobulin A:
Paul (ed), Annu Rev Immunol 4:389-417
sélectionné les articles suivants:
Strategic defense initiative
at the
mucosal surface. In: WE
Dupont HL, Pickering LK, 1980. Cholera and Escherichia coli diarrhea. ln: HL Dupont and LK Pickering (eds), Infecgastrointestinal tract. p 129-170, Plenum Medical book company
Tagliabue A, Nencioni L, Villa L, Keren DF, Lowell GH, Boraschi D, 1983. Antibody dependent cell-mediated antibacterial activity of intestinal lymphocytes with secretory IgA. Nature (London) 306:184-186
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against Salmonella typhimurium by peripheral and intestinal lymphoid cells in mice. J Immunol 130:903-907
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unique population of NK-Like cytotoxic cells active in the defense of gut epithelium to enteric murine coronavirus. J
tions of the
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Shimizu M, Shimizu Y, 1979. Demonstration of cytotoxic lymphocytes to virus-infected target cells in
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3
Issekutz TB, 1986. The response of
133:2955-3960
gut-associated
T
lymphocytes
to
pigs inocula-
intestinal viral immunization. J Immunol
EXPLORATION DE LA FONCTION LYMPHOCYTAIRE CHEZ LES BOVINS ET LES OVINS
PAR LE TEST DE TRANSFORMATION LYMPHOBLASTIQUE
RAI-EL-BALHAA G, ABDULLAH A PELLERIN JL, BODIN
G
Laboratoire d’Immunologie (INRA, Laboratoire de Prévention
Route de Gachet, BP 527, 44026 Nantes Cedex 03, France
H
HIRON
Globale), École Nationale Vétérinaire,
Le test de transformation lymphoblastique a été utilisé comme moyen diagnostique, pour détecter les
déficiences immunologiques congénitales et acquises, les réponses à médiation cellulaire contre les différents agents infectieux et parasitaires, ou observées dans certaines maladies auto-immunes, enfin ce
test a été utilisé pour apprécier les effets de différents traitements avec des agents immunomodulateurs
(immunodépresseurs ou immunostimulants).
Le Laboratoire d’Immunologie de l’École Nationale
Vétérinaire de Nantes s’intéresse
plus particulière-
l’étude:
1. des interactions entre le système
ment à
immunologique de la mère (vache et brebis) et le système foetoplacentaire en développement.
2. des conséquences du transfert de l’immunité passive de la mère aux jeunes (anticorps et cellules:
macrophages et lymphocytes).
Les nouveau-nés des espèces de ruminants domestiques diffèrent notablement des modèles de rongeurs de laboratoire. Leur système immunologique est complètement développé, bien avant la naissance, mais sa maturation nécessite la stimulation par les antigènes environnementaux, pendant les premiers jours de la vie.
La technique classique de mesure de mitoses des lymphocytes, par incorporation de la thymidine
tritiée, adaptée en microméthode, par souci d’économie, et optimisée pour les lymphocytes bovins, a
permis de fournir des normes de réactivité lymphocytaire des veaux âgés de 15jours à 3 semaines, par
rapport aux valeurs de référence observées chez les bovins adultes (2).
Cette technique appliquée à 50 veaux a permis de montrer une relative immunodéficience, par rapport
aux adultes (15 071 cpm, 42 564 cpm respectivement), liée à:
1. L’apport passif d’anticorps colostraux maternels, bloquant au moins partiellement les Ag environnementaux, stimuli indispensables à la mise en place d’une réaction immunologique intrinsèque efficace
11).
2. La présence de facteurs immunodépresseurs d’origine placentaire (a-foeto-protéine,
dont la concentration sérique décline progressivement jusqu’à 20 jours.
corticostéroïdes),
La mesure de la transformation lymphoblastique par l’incorporation de la thymidine tritiée, nécessite
laboratoire habilité pour la manipulation des produits radioactifs, et des équipements spéciaux de
sécurité et de mesure de la radioactivité, limitant l’utilisation de cette technique à quelques laboratoires
un
spécialisés.
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