UNE PATHOLOGIE PATHOLOGIE UNE EN IMAGES Cette rubrique a été réalisée avec le soutien institutionnel du laboratoire AstraZeneca Conception : Pr G. Steg Coordination : Dr D. Messika-Zeitoun Dans le respect total de l’indépendance scientifique et éditoriale. Non-compaction du ventricule gauche Golmehr Ashrafpoor*, Ludivine Perdrix*, Sébastien Fontaine*, Arshid Azarine* * Hôpital européen Georges-Pompidou, Paris La non-compaction du ventricule gauche, ou myocarde spongieux, est une variété de cardiomyopathie assez peu reconnue. Il s’agit d’une cardiopathie congénitale liée à un arrêt de développement prématuré du myocarde conduisant à un aspect de double couche myocardique : une couche externe, compacte et mince, et une couche interne non compactée, constituée de trabéculations plus ou moins enchevêtrées. Il en résulte une altération de la fonction contractile systolique. Cette dysfonction peut se compliquer, d’une part, de la formation d’un thrombus emboligène entre ces trabéculations où le sang stagne dans un ventricule gauche parfois dilaté, et d’autre part, d’une arythmie pouvant notamment conduire à la tachycardie ventriculaire et à la mort subite. Une revue générale a été donnée par Jenni en 2007 (1), qui établit les critères dits de Jenni au nombre de 4 : absence d’anomalie cardiaque associée ; structure myocardique en double couche avec, en échocardiographie, un rapport couche non compactée sur couche péricardique compacte supérieur à 2 en télésystole ; localisations prédominantes en inférieur et en latéral médian, ainsi qu’en apical ; mise en évidence par doppler couleur de la perfusion des récessus intertrabéculaires à partir de la cavité. Figure 1 . Échographie cardiaque, incidence 4 cavités en télédiastole. C’est le plus souvent l’échocardiographie qui évoque en premier lieu le diagnostic. L’aspect anormalement trabéculé, notamment des parois latérale et apicale, attire l’attention en diastole. Le rapport de l’épaisseur de la couche non compactée (flèche violette) sur la couche péricardique compacte (flèche jaune) se mesure sur une coupe petit axe ; s’il est supérieur à 2 en télésystole, on atteint un des critères de non-compaction du VG. La Lettre du Cardiologue • n° 454-455 - avril-mai 2012 | 41 UNE PATHOLOG PATHOLOGIE IE UNE EN IMAGES Non-compaction du ventricule gauche A B Figure 3. IRM c a r­d i a q u e , c o u p e petit axe 10 minutes après l’injection de gadolinium. Séquence de rehaussement tardif 3D, 10 minutes après l’injection du produit de contraste (gadolinium), incidence petit axe. Présence d’un rehaussement tardif en forme de strie médiomurale circonférentielle (flèches), typique d’une atteinte fibreuse dans les cardiomyopathies dilatées évoluées. Cet hypersignal est présent dans les formes évoluées de non-compaction du VG, mais il peut être absent dans les formes de début sans insuffisance cardiaque. La fibrose et la dysfonction du VG sont autant de substrats arythmogènes dans cette pathologie. Cette séquence, après l’injection de gadolinium, balaie toute la hauteur du VG et permet de rechercher également un thrombus, notamment enchevêtré entre les trabéculations. A B Figure 2. IRM cardiaque, incidence 4 cavités (A) et incidence petit axe (B) en télédiastole. IRM cardiaque réalisée pour explorer une cardiomyopathie dilatée : séquence ciné en “Steady State Free Precession” (SSFP), en télédiastole, incidence 4 cavités (A), coupe petit axe du ventricule gauche (VG) à l’étage moyen (B). On observe un aspect dilaté du VG et une accentuation des trabéculations en regard de la paroi latérale du VG, prédominant typiquement aux étages moyen et apical et évoquant une non-compaction du VG. On note également sur cette image une dilatation de l’oreillette gauche à 50 mm2 de surface. On retrouve les 2 couches classiquement décrites : 1 couche sousendocardique non compactée avec un aspect spongieux et 1 couche myocardique compacte souvent amincie. On retrouve ici la non-compaction en regard des parois antérieure, inférieure et latérale du VG, épargnant typiquement le septum. Sur la figure 2B, on mesure le rapport, en télédiastole, de l’épaisseur de la partie non compactée sur la partie compactée : ici 3,3 (seuil diagnostique de ce rapport supérieur à 2,3 en télédiastole, tel que décrit par Petersen en 2005 [2]). On atteint donc les critères IRM pour le diagnostic de non-compaction du VG. Figure 4. Scanner cardiaque après l’injection de produit de contraste iodé, en télédiastole, incidence 4 cavités (A) et incidence petit axe (B). Scanner cardiaque après l’injection du produit de contraste iodé, coupe petit axe apicale, montrant l’aspect spongieux typique. Par analogie avec l’IRM, le même rapport télé­diastolique entre l’épaisseur de la couche non compactée et celle de la couche compactée peut être mesuré. Références bibliographiques 1. Jenni R, Oechslin EN, Van der Loo B. Isolated ventricular non-compaction of the myocardium in adults. Heart 2007;93:11-5. 2. Petersen SE, Selvanayagam JB, Weismann F et al. Left ventricular non-compaction: insights from cardiovascular magnetic resonance imaging. J Am Coll Cardiol 2005;46:101-5. 42 | La Lettre du Cardiologue • n° 454-455 - avril-mai 2012