LES AVATARS DE L’ENONCIATION Henri PORTINE TELANCO 5 Février 2004 Tarski, 1933 « Pojecie prawdy w jezykach nauk dedukcyjnych » Définition 17. x est une thèse (proposition admise), en symboles x T, si x est une conséquence de la classe de toutes les propositions premières. « […] dans cette étude, je ne cherche qu’à saisir les intuitions exprimées par la conception dite “classique” de la vérité […] “vraiment” signifie la même chose que “conformément à la réalité” » Deux grands menteurs • Epiménide le Crétois Je mens • L’horloge parlante “Héraclite d’Ephèse” Deux grandes tromperies • Ton chat n’est pas un chat • Mettez un tigre dans votre moteur L’énonciation un paradigme théorique • « Un sympathique lecteur [...] a préparé un index et a conclu que [le terme paradigme] est utilisé au moins de vingt-deux manières différentes » Kuhn, La structure... p.215 • Paradigme-modèle et paradigme-liste • Paradigme théorique = ensemble de théories ayant les mêmes présupposés épistémologiques et des buts analogues Bakhtine, 1929 Marksizm i filosofiia iazika En realidad, el acto de habla o, más exactamente, su producto, el enunciado, no puede en ninguna circunstancia ser considerado un fenómeno individual en el exacto sentido de la palabra y no puede explicarse en función de las condiciones psicológicas o psicofisiológicas individuales del hablante. El enunciado es un fenómeno social. [vyskazyvanje] Bally, 1932 / 1944 Linguistique générale et linguistique française • « Toute énonciation de la pensée par la langue est conditionnée logiquement, psychologiquement et linguistiquement. » (page 35) • « [...] il suffit que nous montrions un avion en même temps que nous disons Regardez ! pour que cet avion devienne [...] le complément d’objet du verbe. » (page 43) Damourette et Pichon, 1936 §1604 • Le langage est naturellement centré sur le moiici-maintenant, c’est-à-dire sur la personne qui parle s’envisageant au moment même où elle parle ; c’est ce qu’on peut appeler le nynégocentrisme naturel du langage. Néanmoins, [...], dans diverses provinces de la pensée-langage, l’esprit fait effort pour s’évader de ce centrage, pour se référer à un autre centre : il tend ainsi à se créer des allocentrismes. Damourette et Pichon, 1936 §1604 • Les faits linguistiques nous montrent : 1° d’une part que l’allocentre ne peut être conçu comme tel qu’en tant précisément qu’il diffère du moiici-maintenant ; 2° que le décentrement porte, [...], seulement sur un certain envisagement de la matière pensable, et non sur la cogitabilité entière de celle-ci. [...]. Il se produit en quelque sorte une perpétuelle oscillation de la pensée entre un pôle nynégocentrique et un pôle [...] détaché du moi, avec des évasions et des réinvasions très complexes. Benveniste • 1946 : Structure des relations de personne dans le verbe • il n’y a pas d’« objet » définissable comme je [1956 : 252] • ici et maintenant délimitent l’instance spatiale et temporelle co-extensive et contemporaine de la présente instance de discours contenant je [1956 : 253] • Benveniste reprend DP sous une forme référentielle Benveniste • Est « ego » qui dit « ego » [1958 : 260] • 1970 : L’appareil formel de l’énonciation • L’énonciation est [la] mise en fonctionnement de la langue par un acte individuel d’utilisation [1970 : 80] • Avant l’énonciation, la langue n’est que la possibilité de la langue. Après l’énonciation, la langue est effectuée en une instance de discours. le locuteur énonce sa position de locuteur. [1970 : 81-82] Benveniste • dans l’énonciation, la langue se trouve employée à l’expression d’un certain rapport au monde [1970 : 82] • Une troisième série de termes afférents à l’énonciation est constituée par le paradigme entier des formes temporelles, qui se déterminent par rapport à l’ego, centre de l’énonciation. [...]. De l’énonciation procède l’instauration de la catégorie du présent, et de la catégorie du présent naît la catégorie du temps. [1970 : 83] SUBJECTIVITÉ ? Culioli, 1973 Sur quelques contradictions en linguistique • énoncer, c’est construire un espace, orienter, déterminer, établir un réseau de valeurs référentielles, bref un système de repérage. Tout énoncé est repéré par rapport à une situation d’énonciation, qui est définie par rapport à un sujet énonciateur S0 [...], à un temps d’énonciation T0, pour ne considérer que ces deux repères. [1973 : 88] Culioli, 1973 Sur quelques contradictions en linguistique • Ce qu’il faut montrer, c’est comment d’un schéma instancié on peut dériver une famille d’énoncés en relation paraphrastique [...], mais on peut montrer qu’à tout énoncé on peut associer plusieurs interprétations [...]. D’où la double contradiction fondamentale de l’énonciation [...] ; d’un côté, il n’existe pas d’énoncé isolé [...] ; de l’autre, il n’existe pas d’énoncé qui ne soit modulé [...]. [1973 : 86] Culioli, 1973 Sur quelques contradictions en linguistique • C’est que le problème clé reste celui de la signification, c’est-à-dire d’une relation complexe entre des énoncés (textes), une situation d’énonciation, un sens (relation entre des « objets » linguistiques qui renvoient à des objets extra-linguistiques avec leurs propriétés physico-culturelles), des valeurs référentielles (modalités, temps, aspect, quantification, etc.). [1973 : 86] Culioli, 1973 Sur quelques contradictions en linguistique • Sit0 / Sit1 / … / Sitn E Siti [Enoncé E repéré par rapport à Siti] • Activité épilinguistique vs activité métalinguistique Culioli, 1973 Sur quelques contradictions en linguistique haut degré frontière intérieur extérieur Ducrot, 1985 1. Paramètres [Allons au bistro] on y sera toujours au chaud • • • • Objet O = bistro Propriété P = chaleur Fait F = au bistro, il fait chaud Conclusion r = allons au bistro Cf. A. Cadiot et alii Modèles linguistiques, 7 : 2. Ducrot, 1985 2. Enonciateurs • E1 présente un certain fait F [= P(O)] en le donnant comme un avantage de l’objet O • E2 fait apparaître le caractère favorable de P comme un argument pour r • E3 présente P comme un avantage fa ible • E4 réfute E2 : la faiblesse de F lui enlève toute valeur argumentative • E5 réfute E4 : P, avantage faible, demeure un argument recevable Ducrot, 1985 3. Locuteur L construit les énonciateurs précédents et occupe la position suivante : • L s’assimile à E1 et à E5 et assimile E3 à une opinion collective à laquelle il s’associe • En s’assimilant à E5, L adopte une conclusion r’ : r’ = F est un argument possible pour r Deixis / Enonciation DEIXIS personnelle temporelle spatiale localisatrice absolue relative ostensive Deixis / Enonciation factif locutoire allocutoire délocutoire locutif allocutif Damourette et Pichon délocutif Deixis / Enonciation énonciation historique énonciation de discours corrélation de personnalité corrélation de subjectivité non personne il personne subjective personne non subjective je tu Benveniste absence de personne il profération / opérations / instructions • L’énonciation comme « profération » • L’énonciation comme « jeu d’opérations » • L’énonciation comme « ensemble d’instructions » La notion de sujet • Le sujet comme pure instance profératrice • Le sujet comme sujet doué de sa pleine subjectivité • Le sujet comme sujet cognitif • Le sujet comme enjeu d’une polyphonie • Le sujet comme pure instance de socialisation Cinq domaines clés pour l’énonciation • La détermination / quantification • Les modalités • Le temps et les aspects • La connexion • L’anaphore La détermination / quantification • • • • • • être scalpel [notion/concept] Scalpel ! Un scalpel Le scalpel Tout scalpel / Chaque scalpel Quelques scalpels / Plusieurs scalpels Les modalités • Les modalités aléthiques Nécessaire/Possible [Lewis] • Les modalités déontiques Obligatoire/Permis [Von Wright] • Les modalités épistémiques Savoir/Croire [Kripke / Hintikka] • L’appréciation • L’intersubjectivité (volition, etc.) Le Temps et l’Aspect • L’aspect et la représentation du procès • Le temps et la structuration des repères • Temps et modalités La connexion en effet puisque bien que parce que comme NB. Question de l’asyndète toutefois La connexion en effet puisque bien que parce que toutefois comme Problème des réseaux intra-textuels, de l’argumentation et, partiellement, du text mining La connexion en effet puisque bien que parce que toutefois comme Problème des réseaux dictionnairiques de connecteurs La problématique anaphorique • La question de en Jacques a mangé deux tartines. Marie en a mangé trois. • L’anaphore associative « J’ai vu la moto de Jeanne. La roue avant en est voilée » vs « La roue avant est voilée » • La question de la relative avec subordonnant Exemple : les cas de la relative quotidienne en français et de la relative en anglais Quelle syntaxe pour l’énonciation ? • Une syntaxe fonctionnelle Exemple : rôle adjectival de la relative • Une syntaxe de dépendance Un noyau verbal • La question des positions Structure sous-jacente et ordre de surface • Le problème de l’analyticité de la théorie Exemple : relative et élément anaphorique