Anthropologie, interculturalité

publicité
« Apport de l’anthropologie pour améliorer
l’interface entre patients et équipe soignante »
exemple de Da Ti Seni à Lyon
Présentation de l’intervenante, Albertine
PABINGUI-GONDJE :
 Anthropologue ;
 Coordinatrice bénévole à l’association Da
Ti Seni, (La Maison du bien-être)
www.datiseni.free.fr ;
 Médiatrice sociale au réseau Virages
Santé Lyon ;
 Vice-présidente du Corevih Lyon Vallée du
Rhône.
Plan
1 – Rappel du concept de l’Anthropologie
2 – La conception de la santé et de la maladie dans la pensée africaine
3 – Les représentations du VIH/Sida chez les migrants originaires d’Afrique
subsaharienne à Lyon
4 – Présentation de Da Ti Seni (la Maison du bien-être)
5 – Exemples de travail d’interface entre les migrants et les équipes soignantes des HCL
de Lyon
Introduction
De toutes les épidémies qu’a connu le monde, le VIH reste de loin la maladie qui a plus
mobilisé les chercheurs de toutes les sciences dont l’anthropologie.
L’expérience a montré que le VIH/Sida est un phénomène complexe, aux aspects
multiples et qui demande une étroite coopération interinstitutionnelle et des stratégies
multidimensionnelles.
Prise de conscience dans la communauté scientifique du rôle social que ces disciplines
peuvent jouer dans la lutte contre ce fléau de santé publique
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
Introduction
Depuis quelques années déjà, les chercheurs en sciences sociales et plus
particulièrement les anthropologues, se consacrent à l’étude des systèmes de
représentations et des déterminants socioculturels du Sida qui pourraient aider à
comprendre les comportements des individus face à cette pandémie.
Notre intervention se portera sur les différentes interprétations de cette maladie chez
les migrants d’Afrique subsaharienne du Grand Lyon. Comment réagissent-ils lorsqu’ils
apprennent leur séropositivité ? Quel est l’impact de leur culture d’origine sur leur
attitude face à la maladie du Sida ?
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
1 – Rappel du concept de l’Anthropologie
Du grec « anthropos » qui signifie l’homme et « logos », science, discours.
L’anthropologie est donc la science de l’Homme, c’est l’étude de l’homme tout entier,
l’étude de l’homme dans toutes les sociétés, sous toutes les latitudes, dans tous ses
états, et à toutes les époques. Elle s’efforce de comprendre ce qui fait l’unité de
l’Homme derrière les différences physiques, sociales, culturelles et autres qui marquent
la population dans son ensemble.(F. LAPLANTINE, 1988)
L'objectif de l'Anthropologie n'est pas la recherche de la vérité, mais l'étude de la
correspondance entre le discours (représentation) et la réalité des pratiques
Ne peut-être considéré comme anthropologique qu’une demande visant à prendre en
considération les multiples dimensions de l’être humain en société ; c’est l’étude
comparative de différentes cultures.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
1 – Rappel du concept de l’Anthropologie
L’anthropologue cherche à comprendre comme le dit C.L Strauss, ce que les hommes
n’ont pas songé a fixer sur la pierre et le papier ( nos gestes, nos échanges symboliques,
les moindres recoins de nos comportements) qui fait de cette approche
fondamentalement différent des approches sectorielles, des géographes, des
psychologues…
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
2 – La conception de la Santé et de la maladie
dans la pensée africaine
Selon Sossie ANDEZIAN : « Tout groupe socioculturel a sa manière spécifique
d’appréhender et d’expliquer les notions de santé et maladie, qui dépend étroitement
de sa représentation du monde, de la vie, de la mort, de son système de croyance et de
valeur, de son rapport avec l’environnement et de son univers relationnel »
La perception que chacun de nous a de sa santé ou de sa maladie dépend de notre
environnement culturel. Loin de se limiter aux seuls aspects physiologiques comme le
fait habituellement la biomédecine, les idées de la santé et de la maladie font référence
à un ensemble de notions beaucoup plus divers, par exemple la « bénédiction », la
punition divine, l’ensorcellement…
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
2 – La conception de la Santé et de la maladie
dans la pensée africaine
Les sociétés africaines reposent sur une double réalité matérielle et immatérielle, c’està-dire la réalité visible et invisible. La réalité visible est celle à laquelle nous participons
à travers ce que nous voyons, nous sentons, nous écoutons. Quant à la réalité invisible,
il est impossible d’y avoir accès sauf si l’on y est initié….
Les cultures africaines, c’est l’ensemble des éléments matériels et immatériels qui
permettent de concilier les réalités matérielles et immatérielles.
C’est du 2 en 1 ensemble.
La Santé repose sur l’équilibre entre le monde de l’invisible et du visible.
La maladie c’est plutôt le résultat d’une rupture de l’équilibre entre le monde visible et
du monde de l’invisible.
La Santé n’est pas que biologique, ni physiologique mais elle est sociale.
La Santé c’est la paix, le bonheur.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
3 – Les représentations du VIH/Sida chez les
migrants originaires d’Afrique subsaharienne à Lyon
Depuis son apparition dans les années 80, le Sida reste une maladie mystérieuse
mobilisant aussi un certain nombre de représentations et de réactions aussi bien dans
le champ du religieux que du profane.
Le SIDA: « Syndrome Imaginé pour Décourager les Amoureux », « la maladie des
Blancs, des homosexuels, des prostitués, des gens ayant des conduites immorales »,
« une maladie lancée par les collègues suite à une promotion », « une maladie des
sorciers…. »
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
3 – Les représentations du VIH/Sida chez les
migrants originaires d’Afrique subsaharienne à Lyon
Des exemples :
Une femme africaine nous dit : « Je n’ai pas cette maladie par cupidicité mais
simplement parce que j’ai été ensorcelée par ma sœur qui est jalouse de moi pour un
problème d’héritage, d’un terrain familiale. J’ai eu un rêve dans lequel Dieu m’a dit de
ne jamais prendre de médicaments contre cette maladie. J’ai fait le même rêve 3 fois de
suite, c’est pour ça que je ne prends pas de médicaments. Le faire c’est aller à l’encontre
de la volonté de mon Dieu. »
Une autre femme africaine nous dit : « Je suis séropositive et pas mon mari et depuis
toujours mon mari dit que ma maladie a été lancée parce que lui est négatif et moi
positive. J’ai même fait une enquête par rapport à un ami que j’ai rencontré avant de
venir en France qui m’a dit qu’il a fait ses examens et qu’il est négatif… »
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
3 – Les représentations du VIH/Sida chez les
migrants originaires d’Afrique subsaharienne à Lyon
Un travail d’interface peut être mené entre les patients africains séropositifs et le corps
médical. Pour que le traitement soit suivi avec rigueur, il faut une relation de confiance
avec le praticien. Pour cela, il faut écarter les malentendus liés à des situations
d’interculturalité. En Afrique, on parle souvent de la maladie sans la nommer. Nommer
c’est faire exister et cela déclenche de la peur chez le patient.
Travailler en amont avec les associations de migrants peut aider à la réflexion qui
amoindrirait certains malentendus entre soignants et soignés…
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
4 – Présentation de Da Ti Seni (la Maison du bien-être)
Da Ti Seni, la «Maison du bien-être», accueille
et accompagne dans un cadre chaleureux
toute personne touchée de près ou de loin par
le VIH/Sida, les hépatites et autres pathologies
lourdes.
Son public est composé :
· des migrants originaires d’Afrique
subsaharienne affectés ou touchés par une
pathologie lourde ;
· des familles et des proches des malades ;
· des personnes en souffrance psychologique ;
· des personnes s’intéressant à l’interculturalité
et notamment aux cultures africaines.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
4 – Présentation de Da Ti Seni (la Maison du bien-être)
Elle intervient par des actions collectives et
individuelles adaptées aux personnes migrantes
originaires d’Afrique subsaharienne mais aussi à
toute personne confrontée
à des pathologies lourdes.
Ses objectifs :
· Orienter vers les structures de droit commun ;
· Accompagner dans les démarches
administratives ;
· Eduquer à la santé de manière globale ;
· Promouvoir la santé communautaire ;
· Accueillir dans un climat convivial.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
5 – Exemples de travail d’interface entre les
migrants et les équipes soignantes des HCL de Lyon
Les femmes de Da Ti Seni sont adressées par les médecins des CIDAG, des services des
maladies infectieuses de l'Hôpital de la Croix Rousse, le pavillon P et le service des
Hépato-Gastroentérologies de l'Hôpital Edouard Herriot, le service PASS, les
travailleurs sociaux, les associations locales et régionales de lutte contre le Sida, le bus
info-santé du Rhône.
Dans un premier temps les femmes sont accueillies afin de mieux connaître leurs
besoins. Elles sont ensuite orientées vers les associations et/ou structures adaptées à
leurs besoins. Une fois les procédures engagées, elles sont suivies dans leurs différentes
démarches d'accès aux droits et aux soins. La coordinatrice bénévole reste disponible
en tout lieu pour les femmes souhaitant lui parler.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
5 – Exemples de travail d’interface entre les
migrants et les équipes soignantes des HCL de Lyon
Elles sont orientées vers les associations partenaires notamment pour l'instruction de
leur dossier à la Préfecture et vers les structures adaptées puis ensuite conviées à
participer aux groupes de discussion, aux permanences hebdomadaires à l'association
puis invitées à intégrer les groupes de parole sur la santé sexuelle des femmes
africaines séropositives co-animés par AIDES et la coordinatrice de Da Ti Seni dans leurs
locaux.
La rencontre avec ces femmes ont fait ressortir des problématiques qui nous ont amené
à mettre en place un travail entre les équipes soignantes, les responsables religieux et
quelques associations de lutte contre le Sida qui a abouti à l’organisation des journées
de réflexion sur les discours religieux et la prévention du VIH chez les migrants à Lyon.
Un travail partenarial entre Da Ti Seni et les structures hospitalières continue pour
l’amélioration de la prise en charge médicosociale de ces personnes.
Ce travail est un bel exemple d’interface entre les personnes séropositives et les
équipes soignantes.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
Conclusion
« S’il est un domaine dans lequel les hommes, de tous les temps, de toutes les races ont
dans tous les pays à l’origine de leur histoire, fait intervenir le Sacré, le Mystique, le
Religieux, c’est bien celui de l’art médical né de l’inquiétude humaine en présence de la
maladie et de la mort » J. KHERARO.
« Tout être humain a besoin de donner un sens à l’évènement maladie. Les
manifestations biologiques de la maladie s’inscrivent dans le corps d’individu, mais pour
être comprises elles font objets pour la plupart d’entre elles, d’une interprétation
sociale qui met en jeu et en cause des relations sociales entre individus. » F. HERITIER
Les acteurs qui prennent en charge la santé des migrants doivent aussi s’interroger sur
leur propre représentations de la la santé et la maladie.
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
Remerciements
- Toutes les femmes, les bénévoles et les membres du conseil d’administration de Da Ti
Seni
- les HCL et la Corevih Lyon Vallée du Rhône
- la Corevih de Bretagne
- Le laboratoire ViiVhealthcare
Albertine PABINGUI GONDJE
Rencontre Corevih Bretagne
Téléchargement