PDF: LE CORPS AU CINÉMA: KEATON, BRESSON, CASSAVETES

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addresses the more general experience
of moviegoers in the early ‘30s, as it
was represented in trade journals:
“Congregated together in crowds of
hundreds, and sometimes thousands,
audiences reacted in a group unity that
was garrulous and demonstrative,
sometimes boorish and unruly, often
communal and choral.”
virtue of their proximity to one
another. Indeed, American Movie
Audiences challenges its readers to
attempt this kind of synthesis.
Carleton University
LE CORPS AU CINÉMA: KEATON,
BRESSON, CASSAVETES
That Doherty’s article seems more
general than the others in this anthology speaks to a difficulty intrinsic to
the study of movie audiences.
Specific case studies beg the formulation of generalizeable conclusions;
general theories of audience behavior,
on the other hand, frequently seem to
lack grounding in the experience of
actual spectators. Most of the essays
in American Movie Audiences are specific
case studies that shy away from discussing how the implications of their
findings might lead to a more general
understanding of audiences.
Though meticulous and wellresearched, these articles suggest to
the reader a perpetual fragmentation
of audience-study in which intersecting notions (such as the “magic bullet” theory of media effects) or conflicting conclusions are rarely
addressed. Even as the anthology
begins with a plea for greater detail
and specificity in the study of early
movie audiences, these essays seem to
demand comparison, generalization
and contextualization, if only by
114 Volume 10 No. 1
Vincent Amiel
Paris: Presses Universitaires de France,
1998, 121 pp.
Reviewed by Diane Cantin
Le corps au cinéma donne d’abord
l’impression d’avoir été écrit sous l’effet
d’une nostalgie provoquée par l’époque actuelle et ses représentations électroniques. Dans sa préface, l’auteur
accuse en effet les corps de s’éloigner,
la chair de disparaître, les couleurs, les
formes, les densités et le mouvement,
de n’être réduits qu’à de simples “informations.” Question d’économie, nous
explique-t-il. Amiel s’interroge sur la
perte des “qualités sensibles de l’image”
et de “ces corps tangibles qui, de Rubens
à Salgado, de Vigo à Cassavetes, ont
pesé sur le mouvement des êtres, ont
pesé sur l’acte et le geste, ont infléchi
l’idée ou la narration.”
Pourtant, très vite on s’aperçoit que
c’est surtout une grande partie du cinéma classique qu’Amiel dénigre et compare à notre vidéo contemporaine.
Selon lui, le cinéma, très tôt, aurait
“joué avec l’effacement de ces gestes,
de cette corporéité,” préférant utiliser
les corps pour leur fonctionalité. Le
cinéma, écrit-il, “dématérialise les
corps pour n’en faire plus que des éléments de reconnaissance, de l’ordre de
l’idée.” L’auteur estime que toute l’histoire du cinéma a en fait consisté à
légitimer cette perte et à l’imposer
contre l’image. Il nous enjoint de cesser
d’intellectualiser afin d’établir un rapport direct, intime, avec le corps de
l’acteur; afin d’apprécier le mouvement
et le physique pour ce qu’ils sont et
s’ouvrir aux sensations pures. Or, seul
une poignée de cinéastes auraient réussi à “saisir le corps,” d’où l’intérêt des
Keaton, Bresson, et Cassavetes. Il s’agit dès lors d’interroger les façons
qu’ont ces cinéastes de représenter le
corps comme autre chose qu’un simple
accessoire propre à la fiction réaliste.
Comment donner sens à des corps et
maintenir leur présence? Dans quel
contexte ou quel système de représentation peut-on envisager un cinéma
vivant, où le corps ne serait pas aliéné?
Ce qui s’avère intéressant dans Le corps
au cinéma, ce n’est pas tant le regard critique que porte l’auteur sur le cinéma
classique (d’autres l’ont fait avant lui),
que la façon dont cette critique juxtapose Keaton, Bresson et Cassavetes. Si
chacun d’eux a su imposer son style
propre, Amiel découvre en eux un
dénominateur commun à travers l’instrument même de leur art, soit le
corps, et en l’examinant non pas en
tant que vecteur de sens, mais bien de
sensation. Pour résumer brièvement
(mais est-ce vraiment possible?)
l’essentiel de la réflexion d’Amiel, disons d’abord que pour lui, la véritable
création est d’offrir le corps à voir, à
sentir, comme ce qu’il y a de plus réel
et de plus immédiat. Pour lui, le corps
est le lieu idéal et critique de la représentation, parce qu’il est objet et vecteur d’un double mouvement permettant au spectateur à la fois d’éprouver
l’émotion du corps offert à l’écran, et
de comprendre l’émotion par rapport
au personnage.
En analysant le travail des cinéastes
choisis, Amiel conclut que cela ne peut
s’accomplir que par une renonciation
au découpage (à distinguer du montage), opération intellectuelle par
excellence qui morcelle la réalité et
assujettit chaque plan à une continuité,
prévoyant par le fait même leur insuffisance et ne faisant exister le corps
que dans une succession de simulacres. Au-delà donc des différences
thématiques, esthétiques et narratives
chez Keaton, Bresson et Cassavetes, se
trouve un refus du découpage lequel
permet une représentation inhabituelle
des corps. Chez Keaton, cela se manifeste “en deça du découpage,” en favorisant
l’unité de temps, d’espace et de geste
et évitant ainsi de réduire les acrobaties à de simples gags ou performances.
Dans le cas de Bresson et de Cassavetes,
cela se manifeste au contraire “au-delà
du découpa ge,” par une “opé ra tion
CJ FS • RCEC
115
d’assemblage a posteriori” posant le mouvement dans son autonomie, et éliminant “toute hypothèse préconçue,
toute articulation mécaniste.”
Le corps au cinéma se divise en quatres
chapitres distincts. Le premier s’attarde sur Keaton, le second sur Bresson,
le troisième sur Cassavetes, et le
dernier vient synthétiser—sous le
titre “Une esthétique désincarnée”—
l’ensemble de l’analyse critique. Ces
chapitres ne fonctionnent toutefois
pas de manière autonome, Amiel
n’hésitant pas à établir des parallèles
éclairants entre les trois cinéastes à
l’étude, ce qui donne au livre une véritable cohésion. Amiel a également eu
l’excellente idée, pour clore ses chapitres, d’inclure dans la discussion une
référence à un créateur contemporain,
de façon à mettre en relief ce qu’il
considère être, pour chaque cas, une
déviation de la norme. À Keaton,
Bresson et Cassavetes, il oppose donc
Chaplin, Guitry et Woody Allen.
Le chapitre qui porte sur Keaton nous
fait découvrir un acteur qui se détache
réellement de la vogue burlesque de
son époque, et qui arrive, grâce au
mutisme de sa physionomie et de
l’extrême acuité de son corps, à effectuer des courses et des acrobaties propres à “une autre logique.” Amiel fait
remarquer, en effet, que le corps de
Keaton prend en charge les enchaînements de ses gestes et mouvements
avec une précision, une rigueur, qui lui
donnent une grande liberté. Son corps
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est comme détaché, il s’affirme indépendamment de la narration; son
visage, en rupture avec la psychologie naissante du cinéma narratif
puisqu’aucune émotion ne peut y être
décelée, vient souligner que c’est le
corps qui est transporté par les émotions. Le spectateur n’a finalement
d’autre choix que de ressentir “corporellement” une émotion, non-intellectualisée, étant donné l’absence d’identification à laquelle il est habitué.
“Peut-être est-ce là,” dit-il, “très précisément, l’expérience esthétique: l’émotion de la forme, ni intellectualisée ni
objectivée, mais ressentie, comme par
appro pria tion.” C’est là en quoi
Keaton s’oppose à Chaplin.
Chez Bresson l’autonomie du corps se
retrouve dans “la pesanteur acceptée,
et le morcellement des gestes,” le montage serré ne répondant à aucune exigence extérieure, puisque c’est le corps
ici qui nous accroche à la vérité, ce
sont les gestes qui comptent et qui
nous font oublier les raisons. Bresson
crée une fragmentation antérieure à la
supposée totalité, accordant ainsi le
statut de “tout” à la partie. Par opposition, Guitry offre une compréhension
globale de l’action et ce, malgré son
mépris “pour le corps-cliché du cinéma.”
A propos de Cassavetes, Amiel souligne sa triple rupture par rapport au
cinéma classique: au plan de l’intrigue
d’abord, puis sur les plans psychologique
et stylistique. L’auteur souligne
l’engloutissement des personnages
dans le geste présent, ce qui a pour
effet de suspendre l’action en imposant
au récit les éclatements de la sensation
physique. Ici encore, on retrouve
l’autonomie du corps; le resserrement
du cadre isole le geste, le corps existe
autrement. Amiel voit cette constante
chez Cassavetes: “Pour exister en soi,
pour lui-même, le corps se doit d’être
espace, soit trop large pour l’écran, soit
trop près, soit fragmenté.” Quand
Amiel compare Allen à Cassavetes, il
dit le faire par l’absurde. Il constate
l’omniprésence thématique du corps
chez Allen, mais aussi son effacement
physique. “L’idée du corps est là; mais
la présence ne se concrétise pas.” On
assiste, même dans l’acte sexuel, à un
effacement du corps qui laisse toute la
place au discours.
Tout au long du livre, Amiel propose
des analyses détaillées pour soutenir et
illustrer son propos. Et s’il emprunte
assez peu à d’autres auteurs, certains
sont parfois conviés afin de renforcer
la démonstration, dont Maine de Biran
(Essai sur les fondements de la psychologie et
sur ses rapports avec l’étude de la nature),
Michel Henry (Philosophie et phénoménologie du corps), Michel Guérin
(Philosophie du geste), et Gilles Deleuze
(L’Image-Temps). Amiel fait aussi régulièrement référence à des peintres, des
sculpteurs, afin de mieux illustrer son
propos. Par exemple, dans sa discussion sur Keaton, il écrit: “Comme dans
un rêve, encore une fois, ou comme
dans ces représentations oniriques de
Chirico ou de Magritte, c’est ‘de
l’extérieur’ que nous ressentons la vérité émotionnelle de ce corps.”
Même si l’ouvrage d’Amiel ne convaincra
pas tout le monde de la non-valeur du
cinéma classique et de ses représentations “intellectualisées,” il n’en demeure pas moins que Le corps au cinéma offre
une perspective critique radicale, précisément par ce rejet en bloc des représentations traditionnelles du corps au cinéma,
et originale, de par sa démonstration, à
l’aide des exemples du cinéma de
Keaton, Bresson et Cassavetes, de la
façon dont il est possible pour le spectateur de vivre une “expérience esthétique
rare,” non intellectualisée, ne devant
donc rien aux mots ou aux idées, mais
tout au corps de l’acteur qui happe le
spectateur dans son émotion. Avec ce
bouquin, Amiel nous offre une véritable
réflexion sur le cinéma.
Concordia University
SCREEN STYLE: FASHION AND
FEMININITY IN 1930S
HOLLYWOOD
Sarah Berry
Commerce and Mass Culture, vol. 2,
Minneapolis: University of Minnesota
Press, 2000, 235pp.
Reviewed by Kay Armatage
This book begins with a telling little
story about a 1939 promotional short
called Hollywood—Style Center of the
World. The film intercuts scenes of
CJ FS • RCEC
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