La crise des subprimes Henri Houben (Attac Bruxelles 1) Syndicat des Locataires 21 mai 2008 La crise des subprimes 1. La crise immobilière américaine 2. La crise fondamentale 3. Conclusions La crise des subprimes 1. La crise immobilière américaine 2. La crise fondamentale 3. Conclusions La crise immobilière américaine Qu’est-ce qu’un subprime? C’est un crédit à un acteur, particulier ou entreprise, à la solvabilité faible, c’est-à-dire avec un risque de nonremboursement élevé. Le subprime se définit par rapport au « prime rate ». Prime rate = taux de base Subprime = taux d’intérêt plus élevé. La crise immobilière américaine Ce sont les banques « privées » qui créent la monnaie. Aux Etats-Unis, 7% circulent sous la forme de pièces et billets; 93% sont des comptes ou crédits. Seulement, tout crédit doit avoir une contrepartie. La crise immobilière américaine Les banques s’approvisionnent sur le marché interbancaire. Certaines banques ont des liquidités, d’autres des besoins. Le plus grand marché est celui de Londres. Le taux d’intérêt de référence est le LIBOR: London Interbank Offered Rate (soit le taux offert sur le marché interbancaire de Londres). La crise immobilière américaine Les prêts accordés aux autres acteurs (Etat, ménages, firmes) sont rémunérés: LIBOR + marge Dès lors: Prime rate: LIBOR + marge faible Subprime: LIBOR + marge élevée La marge est fonction du risque de nonremboursement. C’est aussi le profit de la banque. La crise immobilière américaine Emprunteur LIBOR + marge Banques LIBOR Autres banques La crise immobilière américaine En cas de nécessité, les banques peuvent faire appel à la banque centrale. La banque centrale est le prêteur « en dernier ressort ». Elle fournit les liquidités en dernier recours. Le taux d’intérêt pratiqué détermine en dernière instance les autres taux. La crise immobilière américaine Depuis 1980, deux politiques aux EtatsUnis: - la volonté de faire de chacun un propriétaire de son logement; - la déréglementation financière. Evolution du taux de propriété aux Etats-Unis (en %) L’historique de la crise 70 69 68 67 66 65 64 63 62 61 60 1964 1969 1974 1979 Source: US Census Bureau. 1984 1989 1994 1999 2004 La crise immobilière américaine Or, en 2001, tout s’accélère. Un crise boursière et financière entraîne: - le maintien du taux directeur de la Federal Reserve (FED) à 1% de décembre 2002 à mai 2004 (18 mois); - le développement de nouveaux produits financiers; - l’offre de crédits immobiliers aux moins fortunés: les NINJA (No Incomes, No Jobs, no Assets, soit pas de revenu, pas d’emploi, pas de patrimoine). La crise immobilière américaine Les banques ne veulent pas assumer les risques. Elles veulent aussi multiplier les crédits. Elles créent des véhicules de financement particuliers (SPV en anglais) ou conduits. Elles placent les crédits immobiliers (en fait le droit à recevoir les intérêts) dans ces filiales. Ces conduits produisent des titres qu’elles mettent sur le marché financier. Les titres sont classés et rémunérés par ordre de risque croissant. La crise immobilière américaine Ménage 1 (confortable) Ménage 2 (intermédiaire) emprunts Ménage 3 (risqué) emprunts Banque Marché financier cession des crédits Véhicule de financement vente de titres Investisseur 1 vente de titres Investisseur 2 Investisseur 3 La crise immobilière américaine Pas de problème tant que les taux sont bas et que les prix de l’immobilier grimpent. Le crédit classique devient le 2/28: - emprunt à 30 ans; - 2 années à taux fixe bas; - 28 années à taux variables (sur base du LIBOR). Cela engendre la spéculation: on achète en s’endettant, mais on se paie grâce aux hausses des prix. Evolution de la hausse des prix du logement comparée au taux hypothécaire pratiqué (en %) L’historique de la crise 16 14 12 10 8 6 4 2 0 1964 1969 1974 1979 1984 Taux hypothèques Source: US Census Bureau. 1989 1994 Hausse des prix 1999 2004 La crise immobilière américaine Seulement les prix stagnent à partir de 2006. Les taux d’intérêt montent. Les ménages en difficultés ne peuvent plus payer. Les conduits ont des problèmes. Ce qui affecte les banques (capital, dettes, garanties). Les banques n’ont plus confiance entre elles. Injection de liquidités des banques centrales. Inquiétudes sur les Bourses. La crise des subprimes 1. La crise immobilière américaine 2. La crise fondamentale 3. Conclusions La crise fondamentale L’origine de la crise est 2001. Pourquoi? Il y a une crise boursière et financière aux Etats-Unis. La FED baisse ses taux jusqu’à 1%. Cela permet aux ménages de s’endetter à bas taux. Et de continuer à consommer. La consommation américaine est la clé pour comprendre la crise. La crise fondamentale Contribution à la croissance du PIB des Etats-Unis de 1950 à 2006 par période (en %) 73-50 80-73 90-80 95-90 00-95 06-00 Consommation 60,6 64,3 69,1 71,2 72,9 73,6 Investissements 17,5 16,7 12,7 17,7 24,4 14,0 Gouvernement 21,6 20,2 20,4 11,9 14,6 23,7 Exportations 7,6 13,2 9,0 16,3 11,7 11,0 Importations -7,3 -14,4 -11,2 -17,1 -23,6 -22,3 Total PIB 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 Source : Bureau of Economic Analysis (BEA) : http://www.bea.gov/national/index.htm#gdp La crise fondamentale Il faut remonter aux années 70. 1971-1973: problème sur le dollar; le dollar est dévalué et flotte. 1973: crise économique et krach boursier. 1975: défaite US au Vietnam et en Indochine. Montée du tiers-monde. Affaiblissement des Etats-Unis. L’élite américaine veut réagir. La crise fondamentale Trois décisions centrales: 1. Relever les taux d’intérêt à partir de fin 1979 par la FED. Renforcement du dollar. 2. Reagan: politiques fiscales pour les plus aisés et déréglementations financières. 3. Jack Welch (General Electric): politique des entreprises en faveur des actionnaires. La crise fondamentale Conséquences: - aux Etats-Unis, hausse des inégalités; croissance pour les plus aisés; stagnation pour les autres; - politique d’endettement consacrée à la consommation; - ailleurs, politique de compétitivité: être concurrentiel et donc bloquer les salaires pour pouvoir vendre aux USA. La crise fondamentale Les Etats-Unis attirent les capitaux et les marchandises. L’arrivée des capitaux tire à la hausse les marchés financiers (et boursiers). Les marchandises importées fournissent la consommation. La hausse des actifs sert de base à l’endettement. Donc à la consommation. PartL’historique du pour-cent le plus riche dans le de la crise patrimoine des Etats-Unis (en %) 45,0 40,0 35,0 30,0 25,0 20,0 15,030,4 10,0 32,2 31,3 33,8 31,6 37,4 37,2 38,5 38,1 33,4 34,3 21,9 5,0 0,0 1958 1962 1969 1972 1976 1983 1989 1992 1995 1998 2001 2004 Source: Calculs à partir d’Edward Wolff. Evolution des revenus réels des 20% les moins riches comparés aux 5% les plus aisés aux Etats-Unis (1979=100) L’historique de la crise 180 170 160 150 140 130 120 110 100 90 80 1967 1971 1975 1979 1983 1987 1991 1995 1999 2003 Premiers 20% Top 5% Source: Calculs à partir d’Emmanuel Saëz et Thomas Piketty. Evolution des avoirs nets des Etats-Unis de 1970 à 2006 (en milliards de dollars) Capital contre travail 1.000 500 0 -500 -1.000 -1.500 -2.000 -2.500 -3.000 1970 1973 1976 1979 1982 1985 1988 1991 1994 1997 2000 2003 2006 Source: Calculs à partir de Survey of Current Business. Evolution de la balance courante des Etats-Unis 1991-2006 (en milliards de dollars) 0 -100 -200 -300 -400 -500 -600 -700 -800 -900 1991 Source: BEA. 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 Evolution de la balance en capital des Etats-Unis 1991-2006 (en milliards de dollars) 800 700 600 500 400 300 200 100 0 1991 Source: BEA. 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 Rapport Epargne nette/PIB aux Etats-Unis de 1950 à 2006 (en %) 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 -1 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 Source: Calculs sur base de Federal Reserve, Flow of Funds Accounts. La crise fondamentale Hausse des avoirs de capital à l’étranger 826,9 Hausse des marchés boursiers et financiers 3.230 Hausse des revenus des «riches» à l’étranger Hausse des avoirs financiers des ménages «riches» 516,7 Hausse des importations Hausse de la consommation et services importés des ménages «riches» 811,5 chiffres de 2006 en milliards de dollars (BEA) La crise fondamentale Cercle « vertueux », mais dangereux. Un grain de sable et tout se dérègle. Et fuite en avant avec déséquilibres de la balance extérieure, épargne négative, etc. Or, la machine se dérègle petit à petit. La crise fondamentale La crise arrive en 1997 en Asie de l’Est, modèle de compétitivité. Les capitaux fuient l’Asie. Mais où vont-ils? Aux Etats-Unis, sur le marché boursier. La détention étrangère d’actions hausse de 894 milliards de dollars en 1997 à 1.526 milliards en 1999. Ces capitaux alimentent surtout le NASDAQ (Bourse des valeurs technologiques): de 1.410 points en août 1998 à 4.803 en mars 2000. La crise fondamentale Mais, en mars 2000, c’est le krach du NASDAQ. Il se répercute sur les autres Bourses. Les actifs financiers baissent. La FED décide de baisser les taux et de relancer l’endettement et la consommation. La hausse immobilière et la spéculation sortent les Etats-Unis de la crise de 2001. Evolution mensuelle des indices boursiers américains 1993-2007 (2001=100) L’historique de la crise 230 11 septembre 180 130 80 30 1993 1995 1997 1999 NYSE 2001 S&P 500 2003 Nasdaq 2005 2007 La crise fondamentale Décomposition de la croissance des actifs des ménages américains par type d’actifs et rapport dettes-actifs de 1950 à 2006 (en %) 50-73 73-80 80-90 90-95 95-00 00-06 Actifs immobiliers 29,7 33,6 30,5 15,8 24,1 49,6 Actifs financiers 62,0 57,5 61,6 78,5 71,7 45,4 8,3 8,9 7,9 5,8 4,2 5,0 Autres actifs Actifs Dettes 100,0 100,0 100,0 14,2 13,8 17,4 100,0 100,0 100,0 15,4 14,5 29,3 Source : Federal Reserve, Flow of Funds Accounts of the United States, 8 mars 2007: http://www.federalreserve.gov/releases/z1/20070308/ La crise fondamentale Les particuliers perdent 5.000 milliards de dollars d’avoirs financiers de 1999 à 2002. La spéculation et les capitaux vont vers l’immobilier. En 2006, les avoirs immobiliers des ménages augmentent de 10.000 milliards de dollars par rapport à 2000. Les gens s’endettent pour acheter une maison. Le crédit immobilier sert de garanties pour d’autres achats de consommation. La crise des subprimes 1. La crise immobilière américaine 2. La crise fondamentale 3. Conclusions Conclusions La situation est instable. La crise est profonde. Trois grands dangers: 1. Baisse de la consommation américaine: cela entraînerait une récession mondiale; la consommation US représente 20% du PIB mondial. 2. Krach boursier car inquiétudes financières; la dette des ménages US s’élève à 100% du PIB US. 3. Chute du dollar. D’où bouleversement international total. Fin