Mesurer l`Atténuation des Lames pour le Contraste de

publicité
Mesurer l’Atténuation des
Lames pour le Contraste de Phase
avec un Microdensitomètre.
Par Charles Rydel,
Société Astronomique de France.
1.
Introduction.
La mesure par contraste de phase123 des
miroirs de télescope inventé simultanément par
Zernike et Lyot est trop rarement mise en
œuvre par les amateurs car elle nécessite une
lame d’atténuation choisie, reproductible le cas
échéant cela afin de pouvoir comparer diverses
pièces. Cette lame qui présente un trait étroit
de l’ordre de 0,2mm sur une lame de verre,
peut être réalisée par un dépôt sous vide
d’aluminium, un dépôt chimique d’argent,
voire simplement de suie à l’aide d’une bougie
et ses caractéristiques sont déterminées par la
nature du dépôt et par son atténuation.
Frits Zernike (1886-1956)
Afin de vérifier la valeur et la régularité de l’atténuation
le long du trait, on présente ici un microdensitomètre
simple à réaliser et à mettre en œuvre. En mesurant
précisément l’atténuation et sa variation, l’appareil
permet d’éviter les nombreux tâtonnements que cette
technique implique et les déconvenues qu’elle engendre.
2.
B.Lyot
Le microdensitomètre.
Afin de délimiter géométriquement la partie mesurée sur
la lame de phase, on constitue une fente de 200-300µ à
l’aide de deux lames de rasoir, par exemple sur lesquelles
on posera la lame de phase. Derrière cette lame se trouve
une cellule au silicium qui génère un courant sous un flux
1
J. TEXEREAU - Les principaux défauts réels des surfaces optiques engendrées par différentes
techniques de polissage. Ciel et Terre n°3-4, mars-avril 1950, p. 57.
www.astrosurf.com/tests/biblio/contrast.zip
2
http://www.astrosurf.com/tests/articles/contrast/contrast.htm#references
3
http://www.astrosurf.com/tests/biblio/biblio.htm#ref7
1
lumineux, courant qu’elle injecte dans les entrées inverseuses d’un double
amplificateurs CA3240 à très faible courant d’entrée (10pA ou 10-11A). Compte tenu
des résistances de contre-réaction des amplificateurs, cette cellule débite sur les deux
masses virtuelles que sont les entrées inverseuses, sur la cathode et l’anode.
Fig.1 Microphotométre à photodiode Si. La position du commutateur avec les résistances de
1K est inutile. Elles peuvent être supprimées dans le cas d’une 3x4 position standard.
La tension est donc nulle aux bornes de la photodiode qui débite sur le court-circuit de
la masse virtuelle. Il sera alors possible ainsi de mesurer des flux lumineux très faibles
sans être gêné par le courant de fuite de ladite photodiode. Les courants injectés
génèrent en sortie des amplificateurs des tensions qui sont égalent à -r*i+Val/2, r étant
la résistance de contre réaction, i le courant généré par la photodiode, Val la tension
d’alimentation. Un détail: les courants injectés dans les masses virtuelles sont en sens
contraire l’un de l’autre. En conséquence, les tensions de sortie seront de sens opposés,
c’est la raison pour laquelle il a été branché un galvanomètre de 1mA entre les sorties.
Le potentiomètre de 4,7k règle le 100% en l’absence d’atténuation, la résistance de 470
Ω limite le courant maximum. Au repos, cad sans flux lumineux, ces tensions seront
identiques, égales à celle du pont diviseur constitué de deux résistances de 10k
découplées par un condensateur de 10 nF.
L’avantage de cette structure sur celle plus
classique constituée d’un seul amplificateur,
réside dans le fait qu’en utilisant un double
amplificateur, on soustrait les tensions
d’offsets des deux amplificateurs tout en
réalisant un gain de 2. Réalisés sur la même
puce, les amplificateurs sont identiques et à la
même
température.
Les
spécifications
donnent une tension d’offset de 5 à 15mV
par amplificateur mais la valeur mesurée sur
le montage est inférieure à 0,5mV.
Ainsi on peut envisager un second étage avec un gain de dix fois, ce qui devrait pouvoir
permettre de mesurer des atténuations jusqu’à 10-6, si la diode est bien protégée dans le
boîtier des flux lumineux parasites. D’autres amplificateurs d’entrée plus modernes, à
2
entrées Cmos ou Jfet, sont bien sûrs utilisables et 200pA de courant d’entrée reste
largement tolérable, sachant que le courant généré sera de l’ordre de quelques 10-9 A.
On peut raccorder un voltmètre externe par l’intermédiaire de deux fiches bananes,
branchées sur un potentiomètre qui réglera la pleine échelle. L’alimentation se fait par
une ou deux piles de 9v en série ou un bloc de huit piles de 1,5V, au choix. Une
alimentation secteur est évidemment envisageable par l’intermédiaire d’un jack.
3.
Choix de la photodiode.
La photodiode utilisée dans le montage est d’un type particulier assez ancien, elle est de
forme rectangulaire. Je me souviens qu’elle était fabriquée par Siemens, mais je n’ai
plus sa référence en mémoire et je ne crois pas qu’elle soit encore fabriquée. La diode la
mieux adaptée est une diode de marque Silonex et de référence SLSD-71N400 de 25,4
mm de long et 2,5 mm de large. Elles coûtent environ 8€ à l’unité chez Farnell.
Une photodiode genre BPW21 (avec filtre correcteur visuel), BPW32, voire une simple
LED dans un enrobage transparent, fera probablement aussi très bien l’affaire même si
les performances en sensibilité seront notablement inférieures et demandera la mise en
place de résistances de valeurs plus élevées ou plutôt d’un second étage de gain élevé,
avec des amplificateurs à faibles offset.
Fig.2 Dimensions et caractéristiques de la photodiode SLSD-71N400
Accessoirement on note que la résistance en série avec le galvanomètre (et représentant
la résistance totale, compte tenu de la résistance du galvanomètre, ici de 100 Ω) et le
potentiomètre, sont dans un ratio de 10. En ajustant la source lumineuse pour la pleine
échelle de 100% avec le potentiomètre au maximum, on obtient un gain de 10
supplémentaire en tournant le potentiomètre au minimum. Des mesures à 10-4 pleine
échelle sont possible et des mesures à 10-5 sont fiables, bien au-delà de nos besoins.
3
4.
Précautions diverses.
On veillera à la bonne propreté du circuit imprimé, quitte à le nettoyer avec un pinceau
trempé dans l’alcool. Pour la tester, on s’assurera que la tension d’offset reste la même
ou n’est pas significativement différente sur les diverses positions, en particulier celle de
10 mégohms.
Les résistances ont été triées dans des
lots à 5%, mais l’utilisation de
résistances à couche métallique <1%
constituera un plus en termes de
stabilité. Il n’est pas obligatoire
d’utiliser les valeurs mentionnées, il
suffit qu’elles soient toutes dans un
rapport dix et appariées à mieux que
1%, ce qui n’est pas une performance
puisque que l’on y arrive avec des lots
de résistances à 5%. Pour la source
lumineuse, on choisira la lumière du
jour ou celle d’une ampoule halogène
en évitant celle des néons, laquelle est
pulsée à 100 hertz et pourrait saturer
Fig.3 Le Microdensitomètre tel qu’en lui-même.
les deux amplificateurs.
La mise sous tension se fait par un poussoir, ce qui évite d’oublier d’éteindre l’appareil.
Un galvanomètre de sensibilité 1 mA est ici idéal. Celui de l’appareil a été récupéré sur
un spectrophotomètre acheté d’occasion sur un site d’enchères. Il dispose d’une double
graduation, linéaire et logarithmique, ce qui est bien pratique, les atténuations
s’ajoutant en logarithmes.
Une contrainte importante est de veiller à l’étanchéité à la lumière de la boîte si on ne
veut pas introduire un offset sur la gamme la plus sensible. Dans le noir complet, avec
le potentiomètre -qui est en série avec l’indicateur- situé au minimum de sa valeur, sur
la gamme la plus sensible (10 MΩ & 10-5), la déviation de l’indicateur ne représente
que 2% de la déviation totale. Un autre aspect important est la stabilité de la source
lumineuse. Une lampe à filament voit son flux varier comme la puissance 3,3 du delta
de tension d’alimentation:
φ1

φ 2 = 
V1

V2 
3, 3
;
Une variation de seulement ±2% entraînera une variation de ±6,6% sur le flux, ce qui
est rédhibitoire et imposera l’utilisation d’un alimentation stabilisée. L’idéal sera de
récupérer le système optique d’un projecteur de diapositives alimenté par un bon vieux
régulateur à fer saturé tel qu’utilisé voilà longtemps pour les téléviseurs ou évidemment,
une alimentation continue stabilisée. En outre, on ne se privera pas d’utiliser le filtre
coupe IR généralement inclus afin de ne pas chauffer les diapositives. Egalement, on
pourra créer une fente à la place de celle-ci, en sorte que seul soit fortement illuminée la
fente de mesure du densitomètre. Quant aux lampes à « économie d’énergie », si elles
sont moins tributaires du secteur, il faudra attendre quelques minutes pour que le flux
lumineux se stabilise, sans exclure évidemment, de petites fluctuations.
4
5.
Améliorations possibles.
Tel que, le montage reproduit fidèlement en
sortie, le courant généré par la photodiode. Il
est intéressant de filtrer ce courant si l’on
souhaite se servir de néons comme source
lumineuse car le flux lumineux des tubes
fluorescents n’est pas continu mais à la
forme d’arches de sinusoïdes au double de la
fréquence du secteur. Pour cela il suffit de
connecter en parallèle avec chacune des
résistances un condensateur. Si l’on souhaite
atténuer dans un rapport 10 le fondamental
à 100 Hz, il faut que la fréquence de coupure
se situe à 10 Hz, puisque l’on a ici un filtre
du 1er ordre. En rouge, Fig.4, le signal
Fig.4 En vert, filtrage du signal néon.
d’entrée et en vert le signal filtré.
La formule à appliquer est la suivante: F3dB =
1
.
2.π .R.C
La valeur moyenne égale à la surface d’une arche a pour valeur Vmoy =
2
π
.V pic .
0n trouve 1,5µF pour la résistance de 10KΩ, 0,15µF pour celle de 100KΩ, 15 NF pour
la 1 MΩ et enfin, 1500pf pour la 10 MΩ. On prendra des condensateurs plastiques au
polypropylène ou au polystyrène qui seules possèdent le degré d’isolement nécessaire.
Naturellement, il faut un condensateur
pour chaque amplificateur. Si l’on
souhaite étendre la gamme de
sensibilité, voici à droite, le schéma d’un
double amplificateur de gain 10 non
inverseur, selon la valeur de la résistance
qui joint les deux entrées inverseuses.
Mais ces diverses considérations nous
amènent simultanément à améliorer les
performances
et
rendre
moins
dépendant le montage de la source
lumineuse tout en rendant l’ensemble
plus fonctionnel.
Fig.5 Ampli gain 10.
6.
Une version plus évoluée du Microdensitomètre.
Plutôt que de mettre un condensateur sur chaque résistance, une meilleure conception
consistera à réaliser le filtrage après le premier étage, lequel sera suivi d’un
amplificateur symétrique de gain 3 afin de diminuer la dynamique de sortie des
amplificateurs de tête. Ceci aura pour effet d’une part, d’être certain de ne pas saturer
le premier étage et d’autre part de réduire à une seule, la capacité à mettre en œuvre,
tout en relaxant la qualité de celle-ci en termes de résistance de fuite. Un condensateur
plastique ordinaire suffira. Comme on peut le voir sur le schéma figure 4, les fuites
éventuelles du condensateur affecteront de la même manière les deux amplificateurs.
5
L’erreur introduite par ce courant étant approximativement identique des deux côtés, il
sera négligeable au total.
Fig.4 Une version du microdensitomètre, indépendante de la source Fluorescent/Tungstène.
La sortance du CA3240 étant dissymétrique par construction, l’amplificateur utilisé ici
comme second étage est un très ordinaire LM2904 qui a l’avantage sur le CA3240
d’avoir une sortance en tension plus proche des tensions d’alimentations. Ainsi la
dynamique de sortie est mieux
exploitée tout en s’affranchissant
du type de source de lumière et
sans
la
complication
des Vers entrée
Vers entrée
condensateurs de haute qualité. À moins de
moins de
noter que la fréquence de l’ampli du
l’ampli du
coupure du filtre est de 10 Hz.
bas.
haut.
L’amortissement du cadre étant
ici correct, on a pu supprimer le
condensateur de 100 µF aux
bornes du milliampèremètre. A
été ajouté
en
outre,
un
commutateur
permettant
de
mesurer
la
tension
de
l’alimentation et de s’assurer de
l’état des piles. Le prototype a été
réalisé sur un circuit à trous. Vers sortie
Vers sortie
L’amateur soigneux réalisera un de l’ampli
de l’ampli
circuit imprimé sur lequel il
du bas.
du haut.
disposera les composants en prenant
bien garde à ce que la résistance de
10 MΩ soit bien isolée sur le
circuit. Une meilleure solution
encore consistera à disposer les
Fig.5. Les résistances
résistances entre deux galettes du
montées sur 2 galettes.
commutateur de sensibilité.
Il a été remarqué que le changement de gamme posait un problème. En effet, à chaque
changement de sensibilité, les amplificateurs d’entrée sont en boucles ouvertes, ce qui
6
fait partir l’aiguille en butée malgré le filtre passe bas situé après. Pour remédier à cela,
un condensateur de 10 nF en polystyrène (ou polypropylène) a été disposé entre la
sortie et l’entrée ‘’-‘’ des amplificateurs d’entrées ; gardant en quelque sorte « en
mémoire » la valeur de la tension, ils évitent ce désagrément. On remarque aussi sur le
schéma la présence d’une résistance de 10 KΩ en parallèle sur le potentiomètre de 10 KΩ
qui est à droite en série avec le galvanomètre. On peut remplacer l’ensemble par un
potentiomètre de 4700Ω évidemment.
7.
Construction.
La boîte a été réalisée en AG3 de 1,5 mm, ce qui est un peu élevé pour la petite plieuse
achetée 23€, mais on y arrive! Les joues sont en bois plaqué et sur les champs une feuille
découpée dans un tasseau de chêne à l’aide d’une scie sur table. Il s’agit ici d’un exemple de
réalisation et l’on peut acheter un boîtier du commerce.
8.
Tests de validation.
Il comporte trois volets. D’abord on masque la fente de mesure et l’on vérifie dans le
noir potentiomètre au minimum de résistance, la valeur de la tension d’offset. Elle doit
être la même sur toutes les gammes, avec une très légère augmentation sur la plus
sensible. Dans notre cas, avec une résistance totale de 500Ω sous 1 mA, la sensibilité
sera de 0,5 V. On trouve alors un offset constant de 10 mV qui passe à environ 13 mV
mV sur le calibre le plus sensible. De cela on déduit que les 3 mV supplémentaires en
sorties, sont apportés par le premier étage. Comme le gain est de 3 de chaque coté du
second amplificateur, la tension d’offset du premier étage est de 1 mV entre les deux
amplificateurs, soit 0,5 mV par amplificateur. Ceci correspond à un offset de 0,5.103
/107=5.10-11 A, soit 50 pA, probablement une fuite de lumière ou le courant de fuite
de la diode et/ou du PCB, voire des amplificateurs, ce qui peut aussi se tester en
déconnectant la photodiode.
Ensuite, toujours fente obstruée, on éclaire la boîte à l’aide d’un laser afin de localiser
d’éventuelles fuites du boîtier. Si la partie électronique a été bien isolée optiquement et
l’intérieur du boîtier noirci, il ne devrait rien se passer d’alarmant. S’il reste une fuite,
une feuille d’aluminium autocollante utilisée en isolation réglera le problème.
Enfin, on teste la linéarité. Pour cela on peut déplacer la source lumineuse ou utiliser
des filtres neutres étalons. En tout état de cause, on utilisera un voltmètre numérique
pour cette mesure en s’assurant de la parfaite stabilité de la source de lumière (<0,1%).
Nous n’avons pas constaté de problèmes de linéarité dans la limite de précision du
dispositif et des moyens de mesure (0,1%).
9
Conclusions.
La science commence par la curiosité et la mesure. N’importe quel amateur un peu
bricoleur peut réaliser cet appareil qui lui permettra de mesurer ses lames de phases et
de les reproduire, moyennant certaines précautions décrites. Outre cela, une
documentation nombreuse existe sur Internet concernant le test de Lyot et le contraste
de phase. Il contribuera ainsi à massifier ce test incontournable et à améliorer la qualité
des miroirs et donc, in fine, la qualité des images.
7
Téléchargement