Chapitre 9 Transferts thermiques Introduction Jusqu'à présent, nous n'avons considéré un flux de chaleur qu'au travers des effets qu'il pouvait avoir sur l'énergie interne, l'enthalpie ou l’entropie d'un système thermodynamique. Indépendamment de cet aspect qui est relatif aux bilans et aux principes de la Thermodynamique, on peut étudier la façon dont s'établit un flux de chaleur et en déduire une expression de ce dernier. C'est l'objectif de ce chapitre introductif aux Transferts thermiques. On distingue classiquement trois modes de transport de l'énergie thermique : • la conduction ; • la convection ; • le rayonnement. Nous n'étudions ici que les deux premiers modes de transfert. 1. La conduction La conduction est un mode de transport qui se produit au sein de la matière immobile au niveau macroscopique. Il s'agit d'un phénomène de propagation analogue à la conduction de l'électricité. Il est donc plus facile d'envisager le phénomène de conduction dans le cas des solides, cependant celle-ci se produit aussi dans les gaz et les liquides. Pour ces phases fluides, la conduction est en général accompagnée de mouvements internes, appelés convectifs, qui rendent l'étude du phénomène conductif plus difficile expérimentalement. Ces mouvements sont dus aux différences de masse volumique engendrées par les différences de températures : les portions de fluide chaud ont alors tendance à s'élever comme le fait une Montgolfière, sous l'effet des forces d'Archimède. 1.1. Mise en contact de deux corps à températures différentes Nous avons déjà considéré cette situation plusieurs fois. Lorsqu'on met en contact deux corps isolés solides à températures différentes, on constate que ces dernières tendent à devenir égales : c'est l'équilibre thermique. U1, T1 U2, T2 Figure 9.1 : Mise en contact de deux solides en déséquilibre thermique. Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 63 Le système étant globalement isolé, son énergie interne totale U1 + U2 reste constante au cours du processus. Il y a simplement transfert d'énergie d'un corps vers l'autre, ce transfert cessant lorsque l'équilibre est atteint. Si maintenant on souhaite aller plus loin dans la description et calculer par exemple l'évolution temporelle des températures T1 et T2, la simple écriture du bilan d'énergie U1 + U2 = cte ne suffit pas si on ne se donne pas une représentation indépendante du flux de chaleur qui transite entre les deux corps. 1.2. Propagation de la chaleur dans une barre métallique Si on met au contact d'une flamme à température élevée l'extrémité d'une barre métallique (cf. figure 9.2), on constate que la température de l'autre extrémité s'élève aussi. T x t Figure 9.2 : Propagation de chaleur dans une barre métallique. On peut en déduire que l'énergie thermique fournie par la flamme se propage le long de la barre. On conçoit aussi, comme dans l'exemple précédent, que c'est parce que la température de la flamme est plus élevée que celle de la barre que l'énergie thermique se propage ainsi. 1.3. La température : force motrice du transfert de chaleur C'est bien parce que la température des milieux mis en contact sont différentes que naît un flux de chaleur dont la tendance est de ramener les corps à l'équilibre thermique. On dit que la température est la force motrice du transfert de chaleur. Inversement, tout transfert cesse si la température dans un système est uniforme. L'idée vient alors de considérer que le flux de chaleur est une fonction de la variation spatiale de la température : lorsque cette variation spatiale est nulle, le flux est nul. La notion mathématique qui permet de rendre compte de cette notion de variation spatiale est la notion de gradient. Nous allons introduire progressivement cette notion dans le cas particulier du gradient de température. 1.4. Analyse de la situation dans le cas d'une seule dimension 1.4.1. Mise en évidence de la notion de gradient Considérons un corps solide de forme allongée tel que la barre métallique représentée figure 9.2. On peut en première approximation faire l'hypothèse que la température ne dépend que de la variable d'espace x et le cas échéant du temps t. Plaçons nous en un point donné x de la barre où la température est T (x,t ) et considérons la température d'un point très proche de x où la température est T (x + e,t ) (cf. figure 9.3). Ayant admis que la température est la force motrice du transfert de chaleur, on conçoit que le flux de chaleur qui existera au point x sera d'autant plus grand que la différence T (x + e,t ) - T( x,t ) rapportée à la distance e sera grande. Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 64 Fx A x x+e Figure 9.3 † : Notion de gradient dans le cas monodimensionnel. On est ainsi conduit à poser que Fx , le flux de chaleur dans la direction x, est proportionnel à T (x + e,t ) - T( x,t ) la quantité et que cette quantité sera d'autant plus représentative du flux e au point x que e est petit. On arrive alors naturellement à considérer que le flux de chaleur est T(†x + e,t ) - T (x,t ) ∂T lim = (x, t ) qui n'est autre que la dérivée de T par proportionnel à e ∂x eÆ0 rapport à la variable d'espace x à un instant donné t : c'est par définition la dérivée partielle de T par rapport à x. Par ailleurs, la chaleur se propageant dans le sens des températures décroissantes, si T (x + e,t ) > T(x, t ) , le flux de chaleur sera dirigé dans la direction des x décroissants et inversement si T (x + e,t ) < T(x, t ) . La direction du flux est donc opposée au ∂T ∂T signe de la quantité . Si > 0 , la température a tendance à augmenter avec x et le flux ∂x ∂x ∂T est dirigé dans le sens des x décroissants et inversement si < 0. ∂x 1.4.2. Expression du flux!dans le cas monodimensionnel : relation de Fourier Fourier a posé que le flux de chaleur Fx dans la direction x est proportionnel à selon la relation!: Fx = -lA ∂T (W ) ∂x † † ∂T ∂x (9.1) où A est la section transversale de l’objet considéré (cf. figure 9.3). Le signe - permet de tenir compte du fait que la chaleur se propage dans le sens des températures décroissantes alors †qu'on peut montrer que le vecteur gradient est orienté dans le sens opposé. Le coefficient de proportionnalité l s'appelle la conductivité thermique du milieu considéré. C'est a priori une quantité susceptible de varier avec la température, la pression, la composition et qui prend des valeurs assez différentes dans les gaz, les liquides et les solides. Son unité dans le système international est le W.m-1.K-1. A partir de la relation (9.1), on peut définir le flux de chaleur par unité de surface ou densité de flux J x dans la direction x!: J x = -l † ∂T (W.m-2 ) ∂x (9.2) A titre indicatif, on donne quelques valeurs de l dans le tableau 9.1 ci-dessous. Il y a grossièrement un facteur 10 entre la conductivité thermique des gaz et des liquides et un †facteur 100 entre celle des liquides et celle des solides. On observe cependant de grandes variations de cette propriété en fonction de la nature du corps. Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 65 Composé Température (°C) Cuivre (solide) Cuivre (solide) Fer (solide) Eau liquide (1bar) Eau liquide (1 bar) 0 100 20 20 100 Conductivité thermique l (W.m-1.K-1) 386,12 379,14 73,27 0,598 0,682 Vapeur d'eau (1 bar) Vapeur d'eau (1 bar) Air Air 100 500 20 100 0,0245 0,0673 0,02512 0,0307 Tableau 9.1 : Quelques valeurs de conductivités thermiques (Aide mémoire du Thermicien, Editions Européennes Thermique et Industrie, 1982) 1.5. Généralisation au cas à trois dimensions 1.5.1. Expression de la densité de flux selon la relation de Fourier On a implicitement admis précédemment que le flux est une variable caractérisée par une valeur et une direction. C'est donc un vecteur. Par ailleurs, il apparaît assez naturel de ramener ce flux à l'unité de surface dans la mesure où, toutes choses égales par ailleurs, il sera d'autant plus élevé que la surface concernée est élevée : le vecteur flux par unité de surface, r qui sera noté J ici, est la densité de flux en W.m-2 dans le système international. Fourier a posé que cette densité de flux est colinéaire à un vecteur qui généralise à l'espace à trois dimensions la notion de variation spatiale de la température telle que nous l'avons introduite r dans le paragraphe précédent : ce vecteur est le gradient de température noté gra d(T ) dont les coordonnées sont dans un système de coordonnées cartésiennes : Ê ∂T ˆ Á ˜ ∂x ˜ Á ∂T r grad( T) = Á ˜ (K.m-1 ) Á ∂y ˜ Á ∂T ˜ Á ˜ Ë ∂z ¯ (9.3) La relation de Fourier est alors : † r r J = -lgrad( T) (W.m-2 ) (9.4) 1.5.2. Expression du flux traversant une surface dA † Considérons un élément r de surface dA en un point quelconque d'un système. Si le vecteur densité de flux est J en ce point, on conçoit aisément que suivant l'orientation de la r surface dA, représentée par un vecteur unité n normal à cette surface, le flux qui la traverse Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 66 est plus ou moins rélevé. Ainsi, si la densité de flux est tangente à la surface dA, c'est à dire perpendiculaire à n , le flux est nul. r J r n dA Figure 9.4 : Flux traversant une surface dA caractérisée par sa normale. Le flux de chaleur dF n qui traverse la surface dA est simplement donné par le produit scalaire!: rr dFn = JndA (W) (9.5) r r qui est bien nul si J est perpendiculaire à n c'est à dire tangent à dA. Par railleurs, le signe de dF indique la direction du flux. Si dF n > 0 , le flux est orienté suivant n et inversement si † n dF n < 0 . 1.6. Méthode générale d'établissement des équations permettant la résolution d'un problème de transfert de chaleur par conduction Il s’agit de rechercher l'évolution temporelle et spatiale de la température dans un système immobile siège d'un transfert de chaleur. Nous avons jusqu'à présent mis en évidence deux notions très importantes : • la notion générale de bilan d'énergie ; • dans le cas de la conduction, l'expression du flux de chaleur selon la relation de Fourier. En combinant ces deux outils, on peut traiter ce type de problème en établissant une équation dont la température recherchée est solution. Dans le cadre de ce cours introductif, il n'est question que de traiter des cas assez simples : en particulier, nous nous restreindrons à l'analyse de systèmes en régime permanent et mono dimensionnels, c’est à dire à une seule variable d’espace. 1.7. Exemples d'application de la méthode 1.7.1. Transfert de chaleur par conduction dans une plaque plane de grande dimension On considère une plaque plane telle que représentée figure 9.5. Cette plaque peut par exemple représenter le mur d'une maison. Elle a une épaisseur e et une surface latérale A. Compte tenu de sa forme, on peut supposer, comme dans le cas d'une barre allongée, que la température ne varie qu'avec x. On se place par ailleurs en régime permanent donc on ne considère pas l'évolution temporelle de la température. L'objectif est de connaître l'évolution de la température dans la plaque avec x ou profil de température T (x) et de connaître le flux de chaleur Fx qui traverse la plaque selon la direction x. Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 67 dx A Tpi Tpe e 0 Jx(x) Jx(x+dx) x dx Figure 9.5 : Le problème de la conduction en régime permanent dans une plaque plane. Le résultat qu'on va obtenir est effectivement utilisé par les ingénieurs chargés de prévoir les besoins en chauffage des bâtiments par exemple. L'équation dont T (x) est solution résulte du bilan d'énergie associé à la relation de Fourier. Séparons bien ces deux temps de l'établissement de l'équation. 1.7.1.1. Bilan d'énergie On considère une tranche de solide d'épaisseur dx telle que représentée figure 9.5. C'est notre système selon la terminologie de la thermodynamique. Pour qu'il s'agisse d'un système thermodynamique, rappelons qu'il doit malgré tout être suffisamment épais pour contenir un nombre de particules élémentaires tel que les notions macroscopiques utilisées ont un sens. La seule énergie échangée par ce système est l'énergie thermique selon le processus de la conduction. Le bilan s'écrit alors : J x ( x) A = J x ( x + dx) A (9.6) où J x est la densité de flux suivant l’axe x. En utilisant le développement de Taylor à l'ordre 1 de J x +dx , on a : † J x (x + dx) ª Jx ( x) + dJ x dx dx (9.7) En reportant (9.7) dans (9.6), on trouve finalement que : dJ x =0 dx (9.8) 1.7.1.2. Prise en compte de la relation de Fourier En reportant dans le bilan (9.8) l’expression du flux (cf. relation (9.2)) donnée par Fourier, on trouve la relation recherchée : Ê dT d Ë -l ˆ¯ dx = 0 dx Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I (9.9) 68 1.7.1.3. Cas particulier où l = cte : profil de température et expression du flux Fx L'équation (9.9) devient : d 2T =0 dx2 (9.10) dont la solution est simplement : T (x) = ax + b . Les constantes a et b sont calculées en fixant ce qu'on appelle des conditions aux limites. Par exemple, si on suppose que les températures de la plaque sont fixées en x=0 et x=e, respectivement Tpi et Tpe (cf. figure 9.5), on trouve facilement les expressions de a et b et le profil de température est : Ê T - Tpi ˆ ˜˜ x + Tpi T(x ) = ÁÁ pe e Ë ¯ (9.11) Finalement, on calcule le flux selon la relation de Fourier : Ê ˆ Á ˜ Ê ˆ T T T T pi pe Fx = -lA dT = -lAÁ pe = Á pi (9.12) ˜ (W) ˜ dx Ë e ¯ Á e ˜ Ë lA ¯ e La quantité R Th = (K.W -1 ) s'appelle la résistance thermique de la plaque par analogie lA avec la résistance électrique d'un conducteur. Le flux de chaleur est alors analogue à †l’intensité du courant et la température à la tension électrique. † Transfert de chaleur par conduction dans un tube de grande longueur 1.7.2. On considère un cylindre creux de longueur L, de rayon intérieur Ri et de rayon extérieur Re (figure 9.6). r Jr(r) Jr(r+dr) r dr Ri Re Figure 9.6!: Le problème de la conduction en régime permanent dans un cylindre. Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 69 Ce cylindre peut représenter une canalisation de transport d’eau de chauffage central par exemple. La longueur L est supposée très supérieure aux rayons Ri et Re. De ce fait, la température ne dépend que de la position radiale r. L'objectif est de connaître l'évolution de la température dans le tube avec r (ou profil de température T(r ) ) et de connaître le flux de chaleur Fr qui traverse le tube. Le résultat qu'on va obtenir est effectivement utilisé par les ingénieurs chargés de prévoir les pertes de chaleur dans des canalisations par exemple. L'équation dont T(r ) est solution résulte toujours du bilan d'énergie associé à la relation de Fourier 1.7.2.1. Bilan d'énergie On considère une tranche de solide de forme cylindrique et d'épaisseur dr telle que représentée figure 9.6. La seule énergie échangée par ce système est l'énergie thermique selon le processus de la conduction. Le bilan s'écrit alors : J r (r )2PrL = Jr ( r + dr)2P(r + dr )L (9.13) où J r est la projection du vecteur densité de flux suivant le seul axe pertinent, r. En utilisant le développement de Taylor à l'ordre 1 de J r( r + dr ) , on a : J r( r + dr ) ª Jr ( r) + dJ r dr dr (9.14) En reportant (9.14) dans (9.13), les termes en dr 2 étant toujours négligés, on trouve finalement que : dJ r r + Jr = 0 dr Le bilan!se met aussi sous la forme : d( rJr ) dr =0 (9.15) 1.7.2.2. Prise en compte de la relation de Fourier Cette relation devient le long de l'axe r : J r = -l dT (W.m-2 ) dr (9.16) soit en reportant dans le bilan (9.15) la relation recherchée : † Ê dT d Ë -rl ˆ¯ dr = 0 dr (9.17) Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 70 1.7.2.3. Cas particulier où l = cte : profil de température et expression du flux Fr L'équation (9.17) devient : Ê dT d Ë r ˆ¯ dr = 0 dr (9.18) dont la solution est obtenue en intégrant deux fois l’équation (9.18) : Ï r dT = a soit dT = a Ì dr dr r ÓT (r ) = aLnr + b (9.19) Les constantes a et b sont calculées en fixant les conditions aux limites. On suppose que les températures du tube sont fixées en r=Ri et r=Re, respectivement à Tpi et Tpe (cf. figure 9.6). On trouve alors les expressions de a et b et le profil de température est : T (r ) = Tpi - Tpe Ê r ˆ Ln Á ˜ + Tpi ÊÁ R i ˆ Ë Ri ¯ ˜ Ln Ë Re ¯ (9.20) Finalement, on calcule le flux selon la relation de Fourier! F r = -l2P rL dT dr soit!: Fr = Tpi - Tpe (W) Ê Re ˆ 1 LnÁ ˜ 2PlL Ë R i ¯ (9.21) On trouve bien que le flux Fr est constant du fait de l'hypothèse initiale de régime stationnaire. Il n'en est pas de même de la densité de flux Jr qui diminue lorsque r augmente †du fait de la croissance de la surface offerte au flux de chaleur avec r. La quantité ÊR ˆ 1 R Th = LnÁ e ˜ (K.W -1 ) est la résistance thermique de conduction du tube. 2PlL Ë R i ¯ † 2. Le transfert de chaleur par convection : notion de coefficient de transfert de chaleur entre un fluide et une paroi 2.1. Position du problème Il existe de nombreuses situations pratiques où un solide est au contact d'un fluide à une température différente. Par exemple, considérons le mur d'une maison au travers duquel on souhaite évaluer le flux de chaleur (c'est un calcul nécessaire pour estimer les besoins de chauffage). On se donne la température intérieure de la maison Ti et la température extérieure Te, c'est à dire les températures de l'air loin de la paroi et non pas les températures de surface de la paroi Tpi et Tpe. Si on veut calculer le flux F x , il est nécessaire de représenter l'étape de Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 71 transfert de chaleur entre l'air et la surface du mur : la notion de coefficient de transfert de chaleur a pour but une telle représentation. 2.2. Mécanismes de transfert de chaleur par convection entre un fluide et une paroi La difficulté vient du fait qu'un fluide siège de transferts de chaleur est rarement immobile. On peut le mettre en mouvement par un moyen mécanique extérieur : par exemple, on fait circuler l'eau dans les radiateurs de chauffage des bâtiments à l'aide de pompes (figure 9.7). On parle dans ce cas de convection forcée entre le fluide en mouvement et la paroi considérée. De tels mouvements naissent aussi naturellement du fait des forces d'Archimède. Ainsi, lorsqu'on regarde l'horizon dans un désert, les images du lointain sont floues et apparaissent en mouvement : c'est l'air qui, au contact du sable chaud, s'élève du fait que sa densité diminue avec la température. Ecoulement dans une canalisation : convection forcée Air au contact d'une plaque chaude : convection naturelle Figure 9.7 : Mécanismes de la convection thermique. Si on veut décrire de façon détaillé ces mécanismes, il faut résoudre un grand nombre d'équations d'une grande complexité. Une approche plus globale et à caractère empirique consiste à définir un coefficient qui globalise l'ensemble des phénomènes : ce dernier est mesuré. 2.3. Définition du coefficient d'échange de chaleur a Considérons une paroi de forme quelconque, plaçons nous en un point de cette paroi où la température est Tp et considérons le fluide situé à ce niveau de la paroi mais loin de celleci!: sa température est notée T• (figure 9.8). Fluide T• Tp r n Solide Figure 9.8 : Notion de coefficient de transfert de chaleur par convection. L'idée est que, quelle que soit la complexité du mécanisme de transfert entre le fluide et la paroi, le flux de chaleur entre ces deux zones reste proportionnel à l'écart de température. Le coefficient de transfert de chaleur a est alors défini comme suit : Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 72 J n = a( Tp - T• ) = (T p - T• ) (W.m-2 ) 1 a (9.22) a peut être vu comme une conductance thermique par unité de surface et son inverse comme une résistance thermique par unité de surface. La densité de flux J n est perpendiculaire à la †paroi solide, c'est à dire colinéaire au vecteur normal à la surface. Si T > T , la densité de p • flux est orientée depuis le solide vers le fluide et si Tp < T• , la densité de flux est orienté depuis le fluide vers la paroi. Compte tenu de l'unité de J n (W.m-2), le coefficient a s'exprime en (W.m-2.K-1) dans le système international. Nous donnons dans le tableau 9.2 quelques ordres de grandeurs de a. Situation Convection naturelle Dans les gaz Dans les liquides Convection forcée Dans les gaz Dans les liquides visqueux Dans l’eau a (W.m-2.K-1) 3 à 20 100 à 600 10 à 100 50 à 500 500 à 10000 Tableau 9.2!: Ordre de grandeur du coefficient de transfert de chaleur par convection a (Bird, Stewart, Lightfoot, Transport phenomena, Wiley and Sons, 1960) Il n’est pas dans l’objectif de ce cours d’aller plus loin dans l’étude du phénomène de convection. Il existe dans les ouvrages spécialisés en Transfert Thermique des relations permettant de calculer a dans diverses situations. Il suffit pour l’instant d’avoir compris sa définition et les phénomènes qu’il représente. 3. Calcul des flux de chaleur dans des plaques ou parois composites!: exploitation de l'analogie électrique Ces calculs constituent des exemples des relations étudiées précédemment et s’appliquent à des situations pratiques comme : • le calcul des besoins en chauffage d’un bâtiment!; • le calcul des pertes de chaleur d’une canalisation!; • etc. Les relations qui vont être mises en évidence sont basées sur l’analogie entre la résistance électrique de circuits de type série ou parallèle et la résistance thermique d’un objet. 3.1. Plaques planes 3.1.1. Plaque multicouche!de type série Le cas typique de cette situation est le mur d’un bâtiment composé d’une couche de brique, d’une couche de plâtre et le cas échéant d’une couche d’isolant thermique. Ce mur de Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 73 surface A est au contact d’un fluide sur ses faces intérieure et extérieure. La situation générale est représentée figure 9.9. Le flux de chaleur doit traverser plusieurs résistances thermiques en série!: 1 • la résistance thermique de convection côté intérieur!: R iTh = ; a iA • la résistance thermique de conduction de chaque couche solide!numérotée e k!: R kTh = k où ek est l’épaisseur de la couche k et lk sa conductivité thermique ; lkA † 1 • la résistance thermique de convection côté extérieur R eTh = . a eA † 1 Ti 2 …. † Tpi Fx Tpe Te x Fx Figure 9.9!: Plaque multicouche de type série. Exprimons la différence des températures intérieure Ti et extérieure Te vis à vis des températures intermédiaires!: • Tpi et Tpe!: les températures des parois intérieure et extérieure!; • Tpk!: les températures de contact entre la couche k-1 et la couche k. ( ) ( ) ( ) ( Ti - Te = Ti - Tpi + Tpi - Tp1 + Tp1 - Tp2 + ... + Tpe - Te ) Compte tenu des relations (9.12) et (9.22), on peut remplacer toutes les différences de température par leur relation en fonction du flux Fx qui est commun à toutes les résistances!: e 1 2 i F xR Tot Th = F xR Th + FxR Th + F xR Th + ... + F xR Th et ainsi définir une résistance thermique totale R Tot comme la somme des résistances comme Th dans tout montage en série!: Ï ( Ti - Te ) (W) ÔFx = Ô R Tot Th Ì ÔR Tot = R e + R1 + R 2 + ...+ R i = 1 + e1 + e 2 + .....+ 1 (K.W -1 ) Th Th Th Th ÔÓ Th a e A l1A l 2 A a iA (9.23) Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I † 74 3.1.2. Plaque multicouche de type parallèle La situation typique est celle d’un mur comportant une fenêtre (cf. figure 9.10). Le flux de chaleur total Fx se partage entre le flux traversant la fenêtre et le flux traversant le mur luimême. Les températures extérieure et intérieure étant de plus communes aux deux parties de la paroi, on se trouve dans la situation de résistances en parallèle. Dans le cas de deux couches 1 et 2 telles que représentées figure 9.10 ci-dessous par exemple, on calcule d’abord la résistance de chaque couche, respectivement R1Th et R 2Th . Ti Tpi1 Fx 1 1 Tpe Te 2 Fx x Figure 9.10!: Plaque multicouche de type parallèle Chacune de ces résistances est constituée par une association en série convection intérieure – conduction - convection extérieure selon la relation (9.22)!: Ï 1 1 e1 1 -1 ÔÔR Th = a A + l A + a A (K.W ) e 1 1 1 i 1 Ì ÔR 2 = 1 + e 2 + 1 (K.W -1 ) ÔÓ Th a e A2 l 2 A2 a i A2 † † (9.24) où A1 et A2 sont les surfaces des parois 1 et 2, e1, e2 leurs épaisseurs et l 1, l2 leurs conductivités thermiques. † La résistance totale est ensuite obtenue en exprimant que le flux se partage entre les deux branches!: Fx = Ti - Te Ti - Te + (W) R1Th R 2Th soit la relation classique d’addition des inverses des résistances dans un montage en parallèle!: † Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 75 Ï Ti - Te ÔÔFx = R Tot (W) Th Ì 1 1 1 Ô = 1 + 2 (K.W -1 ) Tot ÔÓ R Th R Th R Th (9.25) 3.1.3. Généralisation † Pour une paroi plus complexe constituée de plusieurs plaques en parallèles elle-mêmes constituées de plusieurs couches, il n’y a aucune difficulté à généraliser la démarche en construisant le schéma électrique équivalent et en calculant la résistance totale par application des formules de combinaison des résistances des circuits série ou parallèle. 3.2. Paroi cylindrique multicouche de type série La démarche est rigoureusement la même que précédemment : le seul cas intéressant à traiter est celui d'un tube fait de N couches concentriques de matériaux différents (typiquement un métal et un isolant thermique). Chaque couche oppose sa résistance thermique de conduction à la propagation de la chaleur et on inclut les résistances thermiques associées à la convection interne et externe (cf. figure 9.11). r Figure 9.11 : Paroi cylindrique multicouche de type série La température du fluide situé à l'intérieur du tube est Ti et celle à l'extérieur du tube Te. Le rayon intérieur est Ri et le rayon extérieur est Re. Les résistances thermiques associées à la 1 1 i e convection interne et externe sont respectivement R Th = et R Th = . 2PR i La i 2PR e La e Une couche solide numérotée k comprise entre les rayons Rk-1 et Rk et de conductivité Ê R ˆ 1 thermique lk présente une résistance thermique de conduction R kTh = Ln Á k ˜ (cf. 2Pl k L Ë Rk -1 ¯ relation (9.21)). Ces résistances sont associées en série et le flux Fr est donné par la relation suivante : Fr (W) (9.26) = Ti - Te ÊR ˆ ÊR ˆ Ê R ˆ 1 1 1 1 1 + LnÁ 1 ˜ + LnÁ 2 ˜ + ...+ LnÁ e ˜ + 2PR iLa i 2Pl1L Ë R i ¯ 2Pl 2L Ë R1 ¯ 2Pl NL Ë R N-1 ¯ 2PR eLa e † Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I 76 Conclusion Ce chapitre n'est qu'une introduction aux Transferts Thermiques. Les situations étudiées sont cependant très représentatives des applications dans le domaine industriel. Ce qu'il faut surtout retenir est la démarche d'établissement des équations basée sur l'écriture d'un bilan associée à la relation de Fourier. Si cette démarche est bien comprise, on peut aborder d'autres situations plus complexes, en particulier l’étude des régimes transitoires non traitée ici. Cours rédigé par Christian Jallut, Professeur de Génie des Procédés à l’Université Lyon I