Dépistage: faire ce que l’on sait QUADRIMED 2016 [email protected] Unité d’Epidémiologie Populationnelle et Unité d’Hypertension Service de médecine de premier recours, Hôpitaux Universitaires de Genève IUMSP, Institut Universitaire de Médecine Sociale et Préventive, CHUV, Lausanne Emory University, Atlanta, USA stratégie smpr Cornuz J et al. Rev Med Suisse. 2014 Jan 22;10(414):177-8, 180-5. Cornuz J et al. Rev Med Suisse. 2014 Jan 22;10(414):177-8, 180-5. Dépistage: faire ce que l’on sait Dépistage: faire ce que l’on sait Dépistage cancer colorectal en Suisse Dépistage cancer colorectal en Suisse 30.0% 25.0% 22.2% 18.9% 20.0% 15.0% 15.0% 13.0% 9.8% 10.0% 2007 2012 8.2% 5.0% 0.0% Hemoccult in past 2 Endoscopy in past Any CRC screening years 10 years (p-value=0.002) (p-value<0.001) (p-value=0.036) Dépistage cancer colorectal par niveau de revenu et d’éducation en Suisse 35 30 35 Revenu 30 25 25 % 20 15 10 5 0 Education % 20 15 2007 10 2007 2012 5 2012 0 Dépistage cancer de la prostate en Suisse Dépistage cancer de la prostate en Suisse Age 50-59 60-69 70+ 1992 N=1,371 1997 N=1,353 2002 N=2,846 2007 N=2,764 2012 N=3,700 42.9 63.0 70.4 49.1 65.4 71.7 48.0 71.9 73.3 54.4 74.1 83.7 56.1 79.3 78.8 Dépistage cancer de la prostate en Suisse Dépistage “l’examen d’individus asymptomatiques pour déterminer leur probabilité d’avoir la condition qui fait l’objet du dépistage. Les individus dont la probabilité d’être atteints est suffisamment élevée sont ensuite soumis à des investigations diagnostiques complètes. Les individus avec la condition sont alors traités.” Alan S. Morrison IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 12 Dépistage “l’examen d’individus asymptomatiques pour déterminer leur probabilité d’avoir la condition qui fait l’objet du dépistage. Les individus dont la probabilité d’être atteints est suffisamment élevée sont ensuite soumis à des investigations diagnostiques complètes. Les individus avec la condition sont alors traités.” Alan S. Morrison IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 13 Prise en charge de la santé Facteurs de risque Maladie préclinique Prévention primaire Prévention primordiale Promotion de la santé Maladie clinique Conséquences de la maladie Prévention secondaire Prise en charge clinique IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 14 Histoire naturelle des maladies • Le but des soins médicaux est de modifier l’histoire naturelle des maladies • Comprendre cette histoire naturelle est essentiel pour prendre en charge une maladie, en particulier pour mettre au point une stratégie préventive (dépistage) IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 15 Connaissances sur la maladie Facteurs de risque Maladie préclinique Maladie clinique Conséquences de la maladie Prise en charge clinique La maladie préclinique non traitée évolue-t-elle vers la maladie clinique (pas de régression spontanée)? IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 16 Connaissances sur la maladie • Les cas de maladies diagnostiqués dans le cadre d’un dépistage ne sont pas identiques aux cas diagnostiqués durant la phase symptomatique • Les différences portent autant sur l’histoire naturelle que la réponse aux traitements • Une conséquence importante en clinique est que les connaissances disponibles pour un type de cas ne sont pas forcément applicables à l’autre type IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 17 Sélection pronostique (y inclus des sujets) dépistage dépistage dépistage IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 18 Dépistage....plus qu’un test Intervention/ Treatment Screening test Positive Diagnostic test Disease No disease Negative IUMSP Guessous I , Paccaud F, Cornuz J . Lung Cancer Screening: Rationale, level of evidence, fundamental principles for interpretation, and ethical considerations. Smoking and Lung Cancer. NovaInstitut Publishers (New York), 2009 sociale et préventive, Lausanne universitaire de médecine 19 Définitions • Test de dépistage technique spécifique (questionnaire d’enquête, examen ou mesure physique, test de laboratoire, examen radiologique, etc.) utilisé pour aider à identifier des personnes avec une maladie ou un facteur de risque non apparent • Programme de dépistage ensemble des activités de contrôle d’une maladie basée sur l’identification et le traitement de personnes souffrant d’une maladie non apparente ou d’un facteur de risque de cette maladie IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 20 Définitions • Le dépistage systématique est une activité impliquant des personnes asymptomatiques et saines dans la population générale • Le dépistage opportuniste correspond à la pratique médicale qui cherche des maladies chez des personnes consultant un professionnel pour une autre raison que celle du dépistage IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 21 Définitions Détection clinique précoce ≠ Dépistage de population IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 22 Détection clinique précoce Dépistage de population Au sein du système de soin existant Nécessite le développement de nouvelles structures au niveau populationnel Le demandeur est l’individu Le système de santé est demandeur Signes et symptômes éventuellement présents Signes et symptômes absents Fondée sur le niveau habituel de preuves (tolérance d’une “zone grise”) Fondé sur un niveau élevé de preuves d’efficacité et de sécurité IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 23 Principes de l’OMS Wilson JMG, Jungner G. Principles and Practice of Screening for Disease. WHO Public Health Papers 1968, no. 34 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. La condition doit être un problème substantiel de santé publique Il existe un traitement acceptable L’équipement diagnostique et thérapqutique impliqué par le programme existe Il existe une période d’incubation suffisamment longue Il existe un test de dépistage Le test de dépistage est acceptable par la population L’histoire naturelle de la maladie est bien connue Il existe une stratégie de prise en charge des malades IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 24 Dépistage des maladies • Conditions : •Maladie fréquente •Signe préclinique identifiable •Traitement précoce plus efficace que traitement tardif IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 25 Efficacité du dépistage Le dépistage améliore le pronostic par un traitement précoce par rapport au traitement tardif IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 26 Temps de devancement Temps de devancement du CT à faible dose dans le dépistage du cancer du poumon ~ 4.5y IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 27 Temps de devancement • Le temps de devancement est un effet recherché du dépistage • Cela implique aussi que l’amélioration du pronostic (ie, l’augmentation de la durée de survie) est due à un effet factice du devancement IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 28 Temps de devancement et biais du temps de devancement • Si le temps de devancement est une condition nécessaire de l’efficacité d’un dépistage, il ne peut être utilisé comme critère de réussite d’un programme car il n’entraîne pas nécessairement une réduction de la mortalité • De fait, tous les dépistages, même inefficaces en termes de réduction de la mortalité, entraînent un temps de devancement IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 29 Transition de stade • Si, grâce à un dépistage, la maladie est diagnostiquée tôt dans son histoire naturelle, le processus pathologique sera diagnostiqué à un stade précoce • Exemples: La proportion de stade I TNM de cancers, la proportion de petits anévrismes de l’aorte abdominale IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 30 Transition de stade • Cette transition de stade (stage-shift) est un effet attendu du dépistage et du temps de devancement diagnostique qu’il crée • Le stage-shift est un indicateur de l’impact du dépistage sur l’histoire naturelle d’une maladie • En revanche, le stage-shift n’est pas un indicateur de l’impact du dépistage sur le pronostic de la condition dépistée: ce dernier dépend aussi, et surtout, du gain pronostique lié au traitement précoce IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 31 Transition de stade Pas de dépistage; stade I ~ 16%, Dépistage CT faible dose; stade I ~ 60-100% Lung cancer screening: current situation and perspective. Guessous I, Cornuz J, Paccaud F. Swiss Med Wkly. 2007;137(21-22):304-11. IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 32 Dépistage du cancer du poumon ECRs efficacité de Rx thorax + cytologie des expectorations IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 33 Biais IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 34 Biais IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 35 Biais de la sélection pronostique • Ce biais se rapporte au fait que le dépistage détecte préférentiellement les lésions présentant une longue phase préclinique, c’est-à-dire évoluant lentement, moins agressives et avec un meilleur pronostic. • La randomisation, qui équilibre la variabilité des vitesses d’évolution des lésions dans les groupes comparés, permet de diminuer le biais de sélection pronostique IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 36 Biais du temps de devancement et de la sélection pronostique • Les effets de ces deux biais sont difficiles à distinguer des effets du traitement • C’est pourquoi les essais comparent l’impact chez les personnes exposées au dépistage à l’impact chez les personnes non exposées au dépistage IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 37 Les risques du dépistage • Notion pas intuitive «Tous les programmes de dépistage font du mal. Certains font aussi du bien. Parmi ceux-là, certains font plus de bien que de mal à un raisonnable coût» J. A. Muir Gray et A. E. Raffle: IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 38 Risque Bénéfice Test, bénéfice et risque Fréquence du test Fréquence du test IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne Gray 39 M & Austoker J. British Medical Bulletin 1998;54:983-992 Risques du dépistage • Performances du test (inévitablement FP, FN) • Surdiagnostic/surtraitement • Popularity paradox (lié au surdiagnostic) • Ne pas pouvoir le modifier/l’arrêter IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 40 PSA (%) PSA («Normal» < 4 ng/ml) Sensitivity 21 Specificity 91 Positive predictive value 30 American Cancer Society Guideline for the Early Detection of Prostate Cancer: Update 2010. Wolf AM, et al. CA Cancer J Clin. 2010 Mar 3. IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 41 FOBT • Sensitivity • Specificity • PPV 53.6% 98% 10% Hardcastle et al. RCT of faecal-occult blood screening for colorectal cancer. Lancet 1996;348:1472 IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 42 Biais du surdiagnostic • Le surdiagnostic est l’identification d’une maladie qui, en l’absence d’une découverte fortuite (par exemple lors d’un dépistage), n’aurait conduit à aucun symptôme durant la vie du patient • Toutes les personnes positives au dépistage sont en fait diagnostiquées comme malades et habituellement traitées en conséquence • Leur pronostic est de toute façon meilleur, ce qui augmente fallacieusement l’efficacité du programme IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 43 Biais du surdiagnostic • Le biais de surdiagnostic est un cas extrême du biais de sélection pronostique • Toutes les maladies chroniques dégénératives présentent une certaine proportion de lésions dormantes • Dans la plupart des dépistages, il n’existe actuellement pas de méthodes permettant de différencier les lésions dormantes de celles qui se manifesteront cliniquement • Là encore, la randomisation des groupes dans les études d’évaluation permet de diminuer le biais de surdiagnostic IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 44 Risque lié au dépistage • Les biais de sélection pronostique et de surdiagnostic expliquent en partie la popularité de certains dépistages inutiles (popularity paradox) • Les individus surdiagnostiqués ont un pronostic vital nécessairement favorable. Mais c’est le traitement précoce et le programme de dépistage qui l’ont permis qui seront mis au bénéfice de cette bonne évolution IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 45 Popularity paradox Scenario 1: surdiagnostique= 1% Docteur, you saved our lives! IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 46 Popularity paradox Scenario 2: surdiagnostique= 10% Docteur, you saved our lives! IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 47 Popularity paradox Scenario 3: surdiagnostique= 50% Docteur, you saved our lives! IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 48 Surdiagnostic IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 49 Ne pas pouvoir modifier, arrêter un Surdiagnostique/traitement programme de dépistage IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 50 Risque: Ne pas nepouvoir pas pouvoir modifier, modifier, arrêter arrêter un unprogramme programmede dedépistage dépistage • Recentes modifications des critères de dépistage du cancer du sein par USPSTF • Recommandation pour les femmes de 40 à 49 ans IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 51 Risque: ne pas pouvoir modifier, arrêter un programme de dépistage 40-49y 50-69y IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 52 Kerlikowske K. J Natl Cancer Inst Monogr. 1997;(22):79-86. Risque: ne pas pouvoir modifier, arrêter un programme de dépistage IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 53 “The task force has presented some new evidence for consideration,” she added, “but our policies remain unchanged. Indeed, I would be very surprised if any private insurance company changed its mammography coverage decisions as a result of this action.” Kathleen Sebelius, the secretary of health and human services IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 54 Dépistage quand on ne sait pas: faire ce que l’on sait http://www.pmu-lausanne.ch/pmu_home/pmu-professionnels-sante IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 56 IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 57 IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 58 IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 59 IUMSP Institut universitaire de médecine sociale et préventive, Lausanne 60 Dépistage: MOOC https://www.coursera.org/learn/screening Dépistage: faire ce que l’on sait QUADRIMED 2016 [email protected] Merci