Professeur Isabelle Fourasté Faculté des Sciences Pharmaceutiques de Toulouse LA MANGUE ▲ Mangifera indica L. Fondation d’Entreprise pour la Protection et la Bonne Utilisation du Patrimoine Végétal - LA MANGUE Mangifera indica L. (Anacardiaceae) a Mangue est une drupe produite par le Manguier, arbre tropical pouvant atteindre 15 m de hauteur. Les feuilles, très fournies, sont pétiolées, lancéolées, elliptiques. L Les fleurs, d'un blanc jaunâtre, sont polygames, dioïques et regroupées en panicules terminaux. Elles sont composées de 5 sépales, 5 pétales et de 5 étamines (dont une seule est fertile) ou d'un ovaire oblique à une loge. La drupe, présente en grande quantité, peut posséder de nombreuses formes. En effet, une centaine de variétés sont décrites dans le monde, dont les quatre plus répandues sont : - La Mulgoba (ovoïde, de couleur jaune rouge), - L'Alphose (longue, jaune, moins fibreuse que les autres, localisée en Inde), - La Sanderska (jaune, longue avec un recourbement terminal en forme de bec, au goût acide), - La Cambodiana (jaune, de forme pointue, au goût acide, localisée en Indochine). La graine est réniforme, plate et protégée par une coque fibreuse. Cet arbre existe en Asie depuis près de 4 000 ans. Les Hindoues s'en servaient comme source de nourriture (la Mangue était appelée « am » qui veut dire « victuailles » ce qui laisse préjuger de son abondance) mais aussi comme médicament. En effet, l'Ayurveda (science hindoue de la médecine) préconisait des cures de ce fruit pour guérir les infections dentaires (8). Il faut attendre le XVIe siècle pour que les portugais implantent cet arbre sur d'autres continents tels que l'Amérique du Sud et l'Afrique (où il est nommé « Arbre des sages » car il est un des lieux privilégiés pour la discussion). Enfin, le Manguier inspira également bon nombre de poètes voyageurs tel que Lecomte de Lisle qui, dans « le sommeil de Leïla », nous laisse de ce fruit une impression chaude et savoureuse : « Et de son bec furtif, le bengali siffleur boit, comme un sang doré, le jus des Mangues mûres ». Historiquement, l'usage de la graine en médecine populaire n'a jamais était très répandu. Mangifera indica L. Sommité Fleurie - COMPOSITION CHIMIQUE - ■ PRINCIPAUX CONSTITUANTS CHIMIQUES DU FRUIT ET DE LA GRAINE Le fruit (9) : - Vitamines : Dérivés du β-carotène (dont la vitamine A) Vitamines B1, B2, B3 (PP) et B9 Vitamine C Vitamine E - Glucose : 10 à 20 % - Principaux minéraux : Potassium, magnésium, sodium, calcium, phosphore. - Acides organiques : Acides gras (acides palmitique, palmitoléique, linoléique, oléique…) Autres acides (acides citrique, tartrique, malique, succinique…) - Eau : 82 % La graine : - Composition globale de la graine : 44,4 % d'eau, 32,8 % de sucres, 12,8 % de matières grasses (dont des acides gras comme les acides stéarique, oléique, palmitique et arachidonique), 6 % de protéines, 2 % de bois et 2 % de fibre. D'autres composés, plus minoritaires, sont en grande partie responsables des activités thérapeutiques de la graine. - Les triterpènes : Ce sont des composés à 30 atomes carbones issus de la cyclisation de l'époxysqualène (ou du squalène) ayant ainsi la même structure de base que les stéroïdes (ex. : le mangdésistérol). Souvent ces composés possèdent un groupement acide comme dans l'acide isomangiférolique (3). COOH CH3 CH3 CH3 CH3 H OH CH3 Acide isomangiférolique CH3 - L'huile essentielle : 57 mg/kg de matière fraîche. Elle est composée à 90 % de mono et sesquiterpènes dont l'ocimène (Z) est le plus répandu. La 2,5 diméthyl-4-hydroxy 3(2H)-furanone est également présente. Ocimène (Z) - La mangiférine : Il s'agit d'un dérivé de la C-glucosylxanthone présent dans l'ensemble de la plante et responsable de nombreuses propriétés pharmacologiques (4). O HO OH OH Glucose OH O Mangiférine - Les flavonoïdes et les tanins : Ce sont des composés peu spécifiques de la plante mais qui lui confèrent également quelques unes de ses propriétés pharmacologiques. - DONNÉES PHARMACOLOGIQUES ■ PROPRIETE ANTI-DYSENTERIQUE (7) Les extraits aqueux et méthanoliques réalisés à partir de la graine possèdent différentes propriétés complémentaires permettant de lutter contre les diarrhées d'origine infectieuse. L'extrait aqueux exerce une activité bactéricide sur certains bacilles tels que Streptococcus aureus, certains Clostridium, Listeria monocytogenes et Proteus vulgaris. L'extrait méthanolique diminue la motilité intestinale réduisant ainsi la fréquence des diarrhées. ■ PROPRIETE HYPOGLYCEMIANTE (1) L'extrait éthanolique des feuilles, de l'écorce ou de la graine, inhibe des enzymes responsables de l'assimilation du glucose par l'organisme (inhibition de l'α-amylase et de l' α-glucosidase). ■ PROPRIETE HYPOLIPEMIANTE (2) Les flavonoïdes contenus dans la graine de Mangue ont été testés in vivo sur des rats. Il a alors été observé une diminution des substances lipidiques tels que le cholestérol, les triglycérides, les acides gras et les phospholipides, ainsi qu'une diminution de lipoprotéines (LDL, VLDL). Ces observations permettent de justifier l'emploi de la Mangue pour limiter les hyperlipidémies et l'athérosclérose. ■ PROPRIETES VITAMINIQUES La drupe étant très riche en vitamines (hydro ou liposolubles), ce fruit peut être utilisé comme complément vitaminique ou pour lutter contre le scorbut, la pellagre et d'autres maladies liées à des carences vitaminiques. ■ PROPRIETES IMMUNITAIRES DE LA MANGIFERINE Des essais in vitro chez le rat ont montré que la mangiférine stimule l'immunité humorale, mais inhibe l'activation des macrophages. Il a également été démontré in vitro que cette xanthone possède des propriétés anti-tumorales et anti-virales notamment contre le V.I.H (6). ■ AUTRES PROPRIETES La présence de flavonoïdes dans le noyau de Mangue lui confère des propriétés veinotropes, anti-oxydantes… - USAGES TRADITIONNELS ET COURANTS ■ EN EUROPE ET EN FRANCE La Mangue est peu utilisée en thérapeutique en Europe et ne figure pas dans les Pharmacopées. Cependant quelques phytothérapeutes préconisent des cures du fruit pour ses apports vitaminiques, mais la graine n'y est pas mentionnée. ■ EN INDE Les indiens utilisent la Mangue depuis l'antiquité (dans l'Ayurveda) essentiellement pour ses apports vitaminiques et nutritifs, mais aussi contre les infections dentaires. La graine est également utilisée, après broyage, contre les vomissements et les douleurs cardiaques (7). ■ AU GABON L'utilisation du fruit est très répandue, mais le tronc et les feuilles de l'arbre sont également exploités. En effet, l'oléorésine est utilisée par application cutanée comme anti-syphilitique et sudorifique. La décoction des feuilles permet de lutter contre les maux de tête et les angines. ■ AU CONGO Les parties les plus utilisées sont la graine et l'écorce de l'arbre dont les décoctions sont administrées aux malades souffrant de gingivite ou de diarrhée dysentérique. ■ AU MALI La Pharmacopée malienne reprend les indications vues précédemment en ajoutant des propriétés antihelminthiques dues à la présence de tanins. ■ AU BRÉSIL Le Manguier y est souvent planté prés des routes ou dans les agglomérations car il fixe les polluants atmosphériques, ainsi que des métaux lourds contenus dans les eaux d'irrigation. Les principales applications thérapeutiques de la Mangue et du Manguier sont donc localisées en territoires africains (où cette drogue figure dans de nombreuses Pharmacopées) et en Inde. Mangifera indica L. Fruit - ID ENTIFI CATI O N - a graine de Mangue possède une forme particulière d'embryon recroquevillé. Les deux cotylédons sont enroulés en spirale l'un sur l'autre, formant ainsi une masse réniforme verdâtre protégée par une enveloppe, l'endocarpe, rigide et fibreuse (5). L Mangifera indica L. Graine Mangifera indica L. Fruit - B I B LI O G R A P H I E - 1 - ABERIBIGBE A.O., EMUDIANUGHE T.S., LAVAL B.A. Evaluation of the antidiabetic action of Mangifera indica in mice. Phytother, res., 15, 456-458 (2001). 2 - ANILA L., VIJAYALAKSHMI N.R. Flavonoids from Emblica officinalis and Mangifera indica effectiveness for dyslipidemia. J. of ethnopharmacol., 79, 81-87 (1989). 3 - ANJAEYULU V., RAVI K., HARISCHANDRA P. Triterpenoids from Mangifera indica. Phytother, 28, 1471-1477 (1989). 4 - BRUNETON J. Pharmacognosie - Phytochimie Plantes médicinales. Ed. Lavoisier; Paris, 3e édition, 228, 489 (1999). 5 - COURCHET L. Traité de botanique. Ed. Baillière, Paris, 890 (1898). 6 - KABUKI T., HADJIME N., MEGUMI A. Characterization of novel antimicrobial compounds from Mango kernel seeds. Food. Chem., 71, 61-66 (2000). 7 - SAIRAM K., HEMALATHA S., KUMAR A. Evaluation of anti-diarrhoeal activity in seed extracts of Mangifera indica. J. of ethnopharmacol., 84, 11-15 (2003). 8 - SCARTEZZINI P., SPERONI P. Review of some plants of indian traditional medicine with antioxydant activity. J. of ethnopharmacol., 74, 23-43 (2000). 9 - SOUCI, FACHMANN, KRAUT. Food composition and nutrition tables. Ed. Medpharm, Stuttgaed, 1994 (911-912). ▲ Fondation d’Entreprise pour la Protection et la Bonne Utilisation du Patrimoine Végétal 455 471 - 05/2004 - SIA Lavaur 15, Rue Théron-Périé - 81106 CASTRES CEDEX