La convection dans le manteau terrestre La convection dans le manteau terrestre Par Frédéric Deschamps (ETH Zürich) Résumé La convection thermique est un mode de transfert de la chaleur par advection de matière. Elle résulte de la croissance d’instabilités générées par des variations latérales de température. La croissance de telles instabilités dans un fluide est contrôlée par les propriétés du fluide, la géométrie du système, et la différence de température entre la base et le sommet du système. Le manteau terrestre est instable vis-à-vis de la convection, ce qui, à l’échelle globale, induit la formation de grands courants de convection. Ces mouvements sont responsables de la Tectonique des Plaques. Au niveau des zones de subduction, ils se manifestent par le plongement et le recyclage de croûte océanique dans le manteau profond. En première approximation, la convection du manteau terrestre est assez bien décrite par des modèles numériques et analogiques simples. Cependant, pour expliquer plus finement les observables géophysiques disponibles, il est nécessaire de développer des modèles plus complexes qui tiennent compte des variations des propriétés des roches du manteau terrestre avec la température, la pression, et la composition. Table des matières Un peu d’histoire Définitions et principes Un modèle simple et bien compris : la convection de Rayleigh-Bénard Convection dans le manteau terrestre Travaux dirigés Quelque s liens utiles Un peu d’histoire Premières hypothèses. La théorie de la tectonique des plaques ne s’est pas imposée comme une évidence parmi les géophysiciens et les géologues. Ses prémices furent posés en 1912 avec la dérive des continents d’Alfred Wegener, mais elle ne fut majoritairement acceptée qu’à la fin des années 60. L’un des arguments opposés à Wegener était l’absence d’un moteur fiable pour entretenir le mouvement des plaques. Wegener invoquait des forces dérivées de la rotation terrestre, hypothèse peut convaincante si l’on considère la masse continentale qu’il était nécessaire de déplacer. En 1945, Arthur Holmes propose une explication plus satisfaisante : c’est un mouvement de convection global du manteau terrestre (c’est-à-dire l’enveloppe située entre 50 et 2890 km de profondeur) qui permet d’entretenir le mouvement des plaques en surface (Figure 1). 1 / 15 La convection dans le manteau terrestre 25 21 22 Figure La certains cristallisation dérive subduction. convection des 1.endroits. Le plaques de dans magma (b) océaniques le proposé De manteau la issu croûte du par et terrestre manteau. 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(1974). fluide haut, les la rouge La En fonction Modèles Sotin matériaux temps, vignette de modèle plus par bas, La les laet David dense boîte. cette de les de Back Définitions et principes Le phénomène de convection est généré par le développement d'instabilités dans un milieu initialement stable, auquel on superpose à un instant donné une petite perturbation. La nature de la perturbation n'est pas unique et conduit à différents types de convection: variations de la vitesse angulaire de rotation (instabilité de Taylor-Couette), de la composition chimique, ou de la température. Dans ces deux derniers cas, le moteur de la convection est la poussée d'Archimède, c’est-à-dire des variations latérales de densité induites par les variations de composition chimique ou de température. Il existe plusieurs freins au développement des instabilités ainsi initiées, notamment la diffusion thermique, qui tend à homogénéiser la température du milieu, et la viscosité du fluide, qui augmente les forces de frottement. La capacité de la convection à surmonter ces difficultés est exprimée à l'aide de nombres sans dimensions, eux-mêmes définis à partir des propriétés physiques et géométriques du système. Convection thermique . Lorsqu’elle est chauffée, une particule de fluide devient moins dense que ses voisines, ce qui induit des variations latérales de pression et de contrainte, donc une situation instable d’un point de vu dynamique qui conduit la particule chaude à entamer une ascension. A l’inverse, lorsqu’elle est refroidie, une particule devient plus dense que ces voisines et va entamer une descente. Globalement, les variations latérales de densité (ici, dues à des variations latérales de température) induisent un mouvement d’ensemble du fluide. Dans un système chauffé à sa base et refroidi en surface, le matériau situé à la base se charge en chaleur, remonte en surface où il cède la chaleur qu’il a accumulé et se refroidi, avant de replonger vers la base du 4 / 15 La convection dans le manteau terrestre système (c’est par exemple ce qu’il se passe dans une casserole rempli d’eau que l’on met sur le feu). La convection thermique constitue donc un mode de transfert de la chaleur par advection de matière. Une étude plus complète de la convection thermique nécessite de résoudre trois équations, chacune étant associée à une loi de conservation : conservation de la quantité de mouvement (pour calculer le champ de vitesse, i.e., les trajectoires des particules de fluide), conservation de l’énergie (pour calculer la répartition de température), et conservation de la masse. L’équation qui décrit la conservation de la quantité de mouvement (et qui n’est autre que la relation fondamentale de la dynamique appliquée à un milieu continu) est parfois appelée équation de Navier-Stokes. Il est d’usage de négliger l’accélération des particules de fluide, qui est de fait très petite en comparaison des autres termes (la force de gravité, les variations de pression, et les contraintes visqueuses). Cela simplifie énormément le problème, mais pas suffisamment pour pouvoir le résoudre analytiquement. Dans certains cas simples (p.e., la convection de Rayleigh-Bénard), il est possible de définir analytiquement des critères de stabilité et des lois d’échelles pour les certaines observables (vitesse horizontale et flux de chaleur moyens en surface). Toutefois, pour calculer l’écoulement et la distribution de température, il est nécessaire de résoudre les équations de la convection numériquement à l’aide d’ordinateurs. Convection thermique vs conduction. Pour que la particule chauffée puisse continuer son ascension (et, éventuellement, atteindre la surface), elle ne doit pas échanger trop de chaleur avec ces voisines successives sur son trajet. Autrement dit, la conduction thermique (un autre mode de transfert de la chaleur) ne doit pas être trop élevée. Plus précisément, le temps caractéristique de diffusion de la chaleur doit être est très supérieur au temps caractéristique de diffusion de la quantité de mouvement (le rapport entre ces deux temps caractéristiques est mesuré par le nombre de Prandtl). Si tel est le cas la particule n’aura pas le temps d’échanger de chaleur avec ses voisines, et pourra donc conserver jusqu’en surface la chaleur qu’elle a emmagasiné. La capacité à conduire la chaleur dépend bien sûr du matériau, certain matériaux (par exemple, les métaux) conduisant bien mieux la chaleur que d’autre (par exemple le bois). Les roches composant le manteau terrestre conduisent particulièrement mal la chaleur. Epaisseur D 2891 km 2 Accélération de la gravité g 9.81 m/s 3 Densité ρ 3500 kg/m 21 Viscosité μ 5.0×10 Pa.s -5 Expansion thermique α 3.0×10 1/K Conductivité thermique k 3.0 W/m/K -6 Diffusivité thermique κ 10 m -12 Production de chaleur H interne par radioactivité 6.0×10 Contraste vertical de ΔTtempérature 2500 K Table 1. Quelques propriétés moyennes du manteau terrestre. Pour la pluparts, ces valeurs sont des ordres de grandeurs, et restent assez mal contraintes. L’épaisseur du manteau et l’accélération de la gravité sont très bien connus. En revanche, le contraste de température est lui très mal contraints, et se situe quelque part entre 2000 et 3000 K. La viscosité varie 5 / 15 W/kg La convection dans le manteau terrestre avec la profondeur, et l’on pense que le manteau inférieur (i.e., plus profond que 660 km) est globalement plus visqueux que le manteau supérieur d’un ordre de grandeur. La densité augmente régulièrement avec la profondeur, de 3380 kg/m 3 à 25 km de profondeur à 5570 kg/m 3 à la limite noyau-manteau (2891 km). Nombre de Rayleigh (Ra). Le nombre de Rayleigh est le rapport entre les forces motrices du fluide (la force d'Archimède) et les forces de frottement. Il mesure donc la vigueur de la convection. L'expression du nombre de Rayleigh dépend du type de chauffage imposé, et s'exprime en fonction des grandeurs caractéristiques du système. Pour un chauffage basal ou mixte, le nombre de Rayleigh s’écrit où ρ, α, κ, et μ, sont respectivement la densité, l’expansion thermique, la diffusivité thermique et la viscosité du fluide, D est l’épaisseur de la couche de fluide, ΔT le contraste de température à travers cette couche de fluide, et g l’accélération de la gravité. Le nombre de Rayleigh du manteau terrestre est très grand, de l’ordre de l’ordre de 10 6 -10 7 , selon les valeurs choisies pour les propriétés physiques du manteau. On peut montrer qu’il existe un nombre de Rayleigh critique en dessous duquel les instabilités induites par les perturbations thermiques s'amortissent, c’est-à-dire que la convection ne peut pas s’enclencher. La valeur du nombre de Rayleigh critique dépend des propriétés du fluide. Nombre de Prandtl (Pr). Le nombre de Prandtl est le rapport entre le temps caractéristique de diffusion de la chaleur et le temps caractéristique de diffusion de la quantité de mouvement. Il s’exprime simplement comme le rapport de la viscosité dynamique et la diffusivité thermique du matériau, La viscosité cinématique est reliée à la viscosité dynamique (μ, qui apparaît dans l’expression du nombre de Rayleigh) par μ = σ/ρ. Plus le nombre de Prandtl est élevé, plus le transfert de chaleur par convection est dominant par rapport au transfert de chaleur par conduction. Dansle 6 / 15 La convection dans le manteau terrestre cas du manteau terrestre il est très élevé, de l’ordre de 10 25 . Le mode de transfert de la chaleur dominant dans le manteau terrestre est donc la convection. Nombre de Nusselt (Nu). Dans la convection de Rayleigh-Bénard, le bilan énergétique à une profondeur donnée fait intervenir le flux de chaleur moyen à cette profondeur. En l'absence de source de chaleur interne, le flux de chaleur moyen est constant sur toute l’épaisseur du fluide. Le nombre de Nusselt est défini par le rapport entre le flux convectif moyen, et le flux de chaleur conductif (i.e., le flux qui existerait si toute la chaleur était transportée par conduction), Pour un milieu parfaitement conductif le nombre de Nusselt est égal à 1. Il augmente progressivement lorsque la convection devient plus vigoureuse. Le nombre de Nusselt mesure ainsi l'efficacité relative de la convection dans le refroidissement du milieu. Sa valeur n'est pas uniquement contrainte par l'intensité de la convection. Il dépend également de la géométrie du système et des propriétés (en particulier de la rhéologie) du fluide. Back Un modèle simple et bien compris: la convection de Rayleigh-Bénard La convection dite de Rayleigh-Bénard correspond au cas, simple en principe, d'un fluide compris entre deux surfaces parallèles portées à des températures différentes. Lorsque la différence de température entre la base et le sommet du fluide dépasse une certaine valeur, un mouvement de matière se développe. Bien sûr, comme l’indique le nombre de Rayleigh, si la couche de fluide est trop fine, ou si la viscosité est trop élevée, les instabilités ne pourront pas se développer. Un cas particulier de la convection de Rayleigh-Bénard est celui d’un fluide homogène (c’est-à-dire dont les propriétés sont indépendantes de la position), incompressible, et de géométrie cartésienne. Ce mode de convection est évidemment très simple, mais il a l’immense avantage de pouvoir être étudié analytiquement. Une analyse de stabilité linéaire permet de calculer le nombre de Rayleigh critique pour le démarrage de la 7 / 15 La convection dans le manteau terrestre convection en fonction du rapport entre la demi-longueur d’onde de l’instabilité thermique et l’épaisseur de la boîte (ce rapport est appelé rapport d’aspect, ra = λ/2b) : Pour un rapport d’aspect égal à 1, le nombre de 3 (plus Rayleigh critique est de l’ordre da 10 exactement, 779.2). Mieux, une analyse de couche limite thermique permet de des lois d’échelle pour certaine observables, en particulier pour le flux de chaleur en surface et pour la vitesse en surface. De nouveau, les valeurs numériques des coefficients de ces lois échelle dépendent (entre autre) du rapport d’aspect entre l’extension latérale de l’instabilité thermique et l’épaisseur du fluide. Pour le manteau terrestre: Si l’on suppose que le nombre de Rayleigh du manteau terrestre est d’environ 10 7 , les équations précédentes prédisent un flux de chaleur 2 et 7 moyen et une vitesse de surface d’environ 90 mW/m cm/an, respectivement. Etant donné la simplicité du modèle, ces valeurs sont étonnamment proches des valeurs observées. Le flux de chaleur terrestre en surface varie en fonction de la localisation. Ce sont les provinces océaniques qui dégagent le plus de chaleur, avec un flux de 80 2 mW/m en moyenne (au niveau des dorsales, il peut atteindre 110 mW/m 2 ). Les continents dégagent moins de chaleur en moyenne, de l’ordre de 55 mW/m 2 . De même, la vitesse des plaques varient d’une région à l’autre, avec un Atlantique Nord relativement lent (2 cm/an), et une plaque Pacifique plutôt rapide (10 cm/an). Quoiqu’il en soit, les estimations déduites des lois d’échelle pour la convection de Rayleigh-Bénard d’un fluide homogène sont du même ordre de grandeur que ces observations. Au premier ordre, la convection thermique explique donc assez bien les observables de surface. Back Convection dans le manteau terrestre Un modèle au premier ordre. Comme l’avait compris Arthur Holmes, le manteau terrestre convecte. Les propriétés physico-chimiques du manteau et des roches qui le compose indiquent que le manteau est instable vis-à-vis de la convection thermique (nombre de Rayleigh) et que la convection est de loin le mode de transfert de chaleur le plus efficace dans le manteau terrestre (nombre de Prandtl). En toute première approximation, on peut se 8 / 15 La convection dans le manteau terrestre représenter la convection du manteau terrestre de la façon suivante (Figure 4) : des courants ascendants amènent des roches des profondeurs du manteau près de la surface. Ces roches sont ensuite entraînées par un courant horizontal du manteau asthénosphèrique (c’est-à-dire mobile). Elles relâchent la chaleur qu’elles avaient emmagasinées, se refroidissent, et replongent finalement dans le manteau profond le long de courant descendants. Ce modèle explique bien la présence de dorsales océaniques (où une petite fraction des roches amenées en surface fond et créent de la nouvelle croûte océanique), ainsi que la Tectonique des Plaques (la lithosphère, c’est-à-dire la croûte et le sommet rigide du manteau, est entraînée par les courant horizontaux qui animent le manteau asthénosphérique). Figure 4. Un modèle simplifié de la convection dans le manteau terrestre. Quelques complications. Cette image des ‘rouleaux’ de convection entraînant les planchers océaniques, bien que souvent employée, est sans doute trop simpliste. Par exemple, elle n’explique pas la présence de volcanisme de points chauds. On pense aussi que la subduction de la lithosphère joue un rôle moteur important, c’est-à-dire que les plaques océaniques ne sont pas seulement entraînées par l’écoulement du manteau 9 / 15 La convection dans le manteau terrestre asthénosphèrique, mais aussi tirées par la lithosphère subduite. Enfin, des observations sismologiques suggèrent qu’il existe de variations chimiques à grande échelle dans le manteau profond. Si tel est le cas, les régions chimiquement plus denses pourraient osciller verticalement, indépendamment du reste du manteau. Le mode de convection du manteau terrestre est donc probablement la superposition de plusieurs mécanismes. Les lois d’échelles déduites des modèles de Rayleigh-Bénard en géométrie Cartésienne et à viscosité constante ont aussi leurs limites. Les propriétés du manteau différent de beaucoup des hypothèses sous-tendues par ce mode de convection. Tout d’abord, le manteau est une coquille sphérique. De plus, le manteau contient des éléments radioactifs (notamment, 40 K, 232 T h, 235 U, et 238 U) qui, en se désintégrant, libère de la chaleur et créé une source de chaleur interne. Les propriétés thermodynamique et rhéologiques du manteau dépendent de la pression et de la température. En particulier, la viscosité des roches du manteau dépend fortement de la température. Les minéraux constituant les roches du manteau sont également soumis à des transitions de phase à certaines pressions et températures, la plus importante étant la transformation de ringwoodite (une phase haute-pression de l’olivine) en pérvoskite et ferro-périclase, vers 660 km de profondeur. Ces complications modifient, parfois considérablement, la géométrie de l’écoulement et le transfert de chaleur à travers le manteau. A titre d’exemples, de fortes variations de la viscosité avec la température induisent la formation d’un couvercle rigide et thermiquement conductif au sommet du système, tandis que le taux de chauffage interne, s’il est élevé par rapport au flux de chaleur à la base du système, inhibe la formation et la progression des panaches. Les effets induits par ces complications font l’objet de nombreux programmes de recherche en géophysique depuis une vingtaine d’années. Convection et zone de subduction. Les plus puissant séismes observés à ce jour (Chili 1960, Mw = 9.5 ; Alaska 1964, Mw = 9.2 ; Sumatra 2005, Mw = 9.1) sont associés à des zones de subduction. Cela n’a rien d’étonnant, puisque ces régions correspondent au plongement dans le manteau de la lithosphère sous forme de grande plaques (on utilise parfois le terme de slab) (Figure 5). La puissance d’un séisme dépend en particulier de la 10 / 15 La convection dans le manteau terrestre longueur de la rupture le long de la faille. Comme les zones de subduction constituent des systèmes de faille très allongés parallèlement à la zone de subduction, la rupture peut se propager sur une très longue distance (de l’ordre de 1000 km dans le cas du séisme du Chili). Figure 5. Au niveau des zones de subduction, la lithosphère (composée de la croûte et du manteau lithosphérique) est défléchie par une portion de lithosphère (continentale dans cet exemple) moins dense, et s’enfonce dans le manteau asthénosphérique. Ce phénomène induit une importante activité volcanique, et le déclenchement de puissants séismes. Le phénomène de subduction lithosphérique fait partie intégrante de la convection du manteau terrestre, mais il est parfois modélisé séparément, en résolvant un ensemble d’équations sensiblement différent des équations de Navier-Stokes (en général, ces systèmes ne résolve pas l’équation de la conservation de l’énergie). A l’aide de méthodes numériques il est possible de retracer l’évolution de la lithosphère subduite, comme le montre par 11 / 15 La convection dans le manteau terrestre exemple l’animation présentée sur la Figure 6. Ces modélisations permettent de mieux décrire certains détails propres aux zones de subduction, comme la génération de poches de magma et le volcanisme associé en surface, ou encore le détachement de slabs. Figure 6. Modélisation de subduction lithosphérique, dans le cas d’une collision continent/continent. Modélisation et animation par B. Kaus et T. Gerya (ETH Zürich). Back Travaux dirigés. On se propose ici de calculer quelques modèles de convection pour des cas simples (2D-Cartésien) à l’aide d’un outil numérique disponible sur internet. Cet outil est une version du code de convection Citcom, développé notamment par L. Moresi et S. Zhong. 1. Accès au site. Aller sur l’adresse http://anquetil.colorado.edu/szhong/ . Sélectionner ‘Virtual Earth Project’, puis ‘Thermal Convection’ et ‘Modeling’. Créer un compte (lors de la première connexion), ou entrer sur un compte déjà défini. Nb. Le nombre de modèles est limité à 5, mais il est possible d’effacer les modèles les plus anciens.2. Premier calcul. Selectionner ‘Create new model’, et faire un calcul avec les paramètres suivants :Rayleigh Number: 4 1.0e Internal Heating Rate: 0 Activation Energy: 0 Total Timesteps: 500 Storage Spacing: 10 Aspect Ratio 1: 1 Grid Dimensions: 33*33 Le calcul peut prendre quelques minutes. Le lien ‘View’ renvoie vers un tableau donnant accès à une figure représentant le champ de température (code de couleur, la température moeyenne est en blanc, et la température augmente du bleu foncé au rouge vif) et le champ de vitesse (vecteurs, la longueur des vecteur est proportionnel à la vitesse), et à la distribution de surface de la vitesse horizontal, du flux de chaleur et de la topographie en surface. En fin de calcul une animation est créée, et permet de visualiser l’évolution des champs de température et de vitesse à partir de la solution 12 / 15 La convection dans le manteau terrestre initiale. 2.1. Lancer l’animation avec ‘Animate’. Décrire l’évolution du panache chaud (en rouge) et du courant froid (en bleu). A partir de quelle itération le système semble stationnaire (les champs de température et de vitesse n’évolue plus). 2.2. Copier le fichier flux de chaleur (‘Heatflux’). La première colonne représente la coordonnée horizontal adimensionnée (entre 0 et 1), la seconde le flux de chaleur adimensionné en surface (Nu top ), et la troisième le flux de chaleur adimensionné à la base (Nu bot ). Calculer le flux de chaleur adimensionné moyen en surface et à la base. 2.3. Comparer Nu top et Nu bot . Comment interpréter ce résultat ? 2.4. Refaire le calcul sur une grille 65*65 pour une meilleure précision. Cela prend bien sûr plus de temps. Faut-il plus ou moins d’itérations pour obtenir une solution convergée ? 3. Loi d’échelle. 3.1. Choisir un résolution, et déterminer le flux de chaleur adimensionné moyen en surface (ou nombre de Nusselt, Nu top ) pour des nombres de 4 et Rayleigh entre 1.0e 1.0e 6 (p.e., 1.0e 4 , 1.0e 5 , 3.2e 5 , et 1.0e 6 ). Si vous pensez que l’état stationnaire n’a pas été atteint, recommencer l’expérience avec un plus grand nombre d’itérations. Un autre critère de convergence consiste à comparer Nu 13 / 15 La convection dans le manteau terrestre top et Nu bot (lorsque l’état stationnaire est atteint, Nu top = Nu bot ). 3.2. Représenter le flux moyen en surface en fonction du nombre de Rayleigh dans un diagramme log-log. Comment se répartissent les points ? 3.3. Déduire de la question précédente que le nombre de Nusselt est une loi de puissance du nombre de Rayleigh, i.e. qu’il est bien décrit par Nu = aRa b . Déterminer les valeurs de a et b. 3.4. Pour un rapport d’aspect de 1, l’analyse de stabilité linéaire prédit Nu = 1/3 . Tracer cette fonction et la loi déduites de vos calculs sur un 0.294Ra même diagramme log-log. L’accord entre vos résultats et la théorie vous satisfait-il ? Quelles peuvent-être les sources possibles des différences entre la théorie et les calculs numériques ? 4. Rôle du chauffage interne. Choisir un nombre de Rayleigh, et faire un calcul pour un chauffage interne nul (Internal Heating Rate = h = 0), et un autre imposer un taux de chauffage interne adimensionné égal à 5 (Internal Heating Rate = h = 5). Comparer les champs de température et de vitesse. Que se passe-t-il ? Dans le cas h = 5, calculer le flux de chaleur adimensionné moyen en surface et à la base (Nu top et Nu bot ). Quelle relation existe-t-il entre Nu top et Nu b ot et h ? Comment expliquer ce résultat ? Back Quelques liens utiles: - Manteau terrestre : http://fr.wikipedia.org/wiki/Manteau_(géologie) 14 / 15 La convection dans le manteau terrestre - Volcanisme intraplaque : http://www2.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/ s1/volcans.html - Lithosphère : http://fr.wikipedia.org/wiki/Lithosph%C3%A8re - Asthénosphère : http://fr.wikipedia.org/wiki/Asth%C3%A9nosph%C3% A8re - Convection de Rayleigh-Bénard, détails et équations : http://home.iitk. ac.in/~sghorai/NOTES/benard/benard.html - Mantle convection: http://www.mantleplumes.org/Convection.html - Mantle convection simulations and movies : http://www.gps.caltech.ed u/~gurnis/Movies/movies-more.html 15 / 15