Entretiens Enseignants-Entreprises 2014 Publié le 03/09/2014 Les EEE pour Entretiens Enseignant-Entreprises réunissent chaque année depuis plus d’une décade, le monde de l’enseignement représenté par des enseignants du secondaire et du supérieur, des chercheurs, des hauts fonctionnaires de l’Éducation nationale ainsi que des représentants du monde de l’entreprise parmi lesquels des patrons d’industrie, des directeurs de ressources humaines et des syndicalistes. Ce rendez-vous dirigé par Madame Béatrice Couairon professeur agrégé de science économique et sociales, s’étale sur deux jours et permet chaque année d’aborder une thématique socioéconomique ou sociétale bien précise et dans l’air du temps. Les échanges favorisent l’interaction entre deux mondes qui souhaitent mieux se connaître, mieux dialoguer pour mieux s’entendre. Le thème de cette année 2014 portait sur la question brûlante de la croissance économique, son avenir et les politiques économiques qu’il convient d’envisager pour sortir d’une croissance atone, qui menace de se muer en stag-déflation, vers une croissance soutenable et durable. Le débat est organisé sous forme de conférences plénières, ateliers et tables rondes thématiques animés par des spécialistes d’horizons variés. Une conférence introductive intitulée « histoire de croissance: quel état des lieux» a permis de croiser l’analyse à Philippe Aghion économiste à Harvard avec celle de Laurent Burelle PDG de plastic omnium et celle de Pierre Dockès professeur à l’université Lyon 2. L’idée sous-jacente est celle de la nécessité impérieuse de stimuler l’innovation grâce à une politique volontariste et des réformes structurelles. La seconde conférence soulevait la question de la viabilité de la croissance à long terme en s’interrogeant simplement sur l’éventualité d’un arrêt pur et simple de la croissance, et d’une fin possible du progrès technique. La démonstration de Patrick Artus chef économiste chez Natexis a rejoint celle d’Éric Dubois Directeur des études économiques à l’INSEE et celle de Pierre Gattz Président du MEDEF. La menace d’une fin de la croissance était brandie et faisant écho aux controverses qui agitent le microcosme politique et économique pour ne pas dire l’hexagone autour de l’alternative entre l’opportunité de s’affranchir de l’étau du pacte de stabilité et de croissance pour relancer la croissance, ou alors la nécessité d’accélérer les réformes structurelles, d’infléchir la politique de la concurrence et la politique fiscale en faveur du marché et de la création de valeur. Les ateliers ont été l’occasion d’approfondir le débat, en scrutant d’autres méandres de la question complexe de la croissance. Le rôle du capital humain dans la croissance de demain était réaffirmé par Fabrice Martin économiste à l’OCDE et Alain Pons PDG de Deloite France. La place de l’immatériel, de l’économie du savoir présente un espoir pour une croissance en devenir. L’auditoire s’accorde sur la nécessité d’investir en capital humain, de promouvoir l’éducation comme levier et moteur de croissance. L’éducation initiale doit être épaulée par une formation continue permettant aux individus d’entretenir les compétences intellectuelles, la savoir et le savoir-faire nécessaires au développement non seulement d’employabilité mais également de la créativité et de l’épanouissement personnel et professionnel. Il faut soutenir l’enduction au-delà de tout clivage idéologique stérile pour rendre au système éducatif ses lettres de noblesse et sa primauté réelle et symbolique. L’atelier sur le chômage des jeunes montre à quel point la question de l’éducation est prioritaire pour éviter de sacrifier 20% des jeunes de ce pays et regarder passivement 100 000 jeunes quitter le système sans qualification pour venir alourdir les rangs des inégalités, de la précarité, voire de l’exclusion. Un autre atelier s’est interrogé sur le vieillissement démographique. Faut-il y voir un frein à la croissance notamment à cause de son impact sur les régimes sociaux, ou l’envisager plus positivement comme un gisement considérable de croissance. Ces questions ont été soulevées par Yanne Coléou Directeur général du groupe Korian et Didier Blanchet chef du département des études de L’INSEE. La filière du «Bien vieillir» montre les perspectives économiques en matière d’innovation, de compétitivité et de créations d’emplois qui s’offrent dans le domaine de la «silver économie» ou «or gris». D’autres ateliers aussi passionnants qu’instructifs ont jalonné les deux journées, des questions sur la manière d’encourager l’investissement productif, le rôle de la confiance dans la croissance, la nécessité de reformer le droit social, le rôle de financement des firmes ou encore l’efficacité de la politique de concurrence, autant de thématiques qui ont stimulé la curiosité intellectuelle des convives et leur participation active. J’attire par exemple l’attention sur l’atelier à propos des «atouts des entreprises françaises pour relancer la croissance» animé par Jean-Marc Daniel, économiste professeur à l’ESCP Europe et Monsieur François Abrial directeur des ressources humaines et membre du comité executif chez Air liquide. Le premier conférencier montre que les entreprises françaises étaient à la pointe de la technique à travers l’histoire en citant des exemples d’innovation pour lesquelles la France était initiatrice et pionnière tels que le TGV, l’aviation civile etc. Il n’exclut pas que des «google» à la française puissent voir le jour. Cette vision rétrospective fut complétée par une vision prospective par Monsieur Abrial qui a démontré de façon concrète comment son groupe Air liquide a pu conquérir le monde et être à la pointe du progrès et de l’innovation en respectant la spécificité et la culture des pays où l’entreprise s’est implantée. Il a montré l’éthique professionnelle engagée par le groupe dans sa politique de recrutement et d’intégration. Il a enfin dévoilé le rôle souvent occulté de la diversité comme levier d’innovation et atout de la croissance de demain.