PES 2012-2013 Chap 5 Processus Déviance 1 Chapitre 5 : Quels sont les processus qui mènent à la déviance ? Introduction 1er chapitre vision unique de la déviance = non respect des normes = il faut aller plus loin c’est ce que nous allons faire !! 1/ La déviance comme produit de l’anomie ATTENTION : Anomie peut avoir des sens différents… 1. Selon Durkheim. 2. Selon Merton. 11- Anomie et déviance chez Durkheim Document 1 « [Selon Durkheim], l’homme ne peut vivre en harmonie avec lui-même et avec autrui, que si ses besoins sont suffisamment en rapport, avec ses moyens. Mais comment fixer une limite à ses besoins ? /…/ Dans nos sociétés de consommation, l’homme veut toujours plus ! Il faut donc qu’une puissance régulatrice assure l’équilibre indispensable entre besoins et moyens, et marque une borne aux désirs de chacun. Ce rôle modérateur est généralement assuré par ls normes, les règles, en un mot les valeurs collectives, qui sont inculquées à travers l’éducation et les divers processus de socialisation, et qui délimitent les statuts et les rôles de chacun. Sous cette pression, chacun, dans sa sphère, se end vaguement compte des limites jusqu’où oeuvent aller ses ambitions./…/ Mais il peut arriver que cet équilibre se trouve compromis /…/. Ainsi, certains comportements qualifiés de déviants (suicide, crime, folie…) seraient-ils favorisés par un état de dérèglement moral de la société retentissant sur les consciences individuelles. La perte de sens des valeurs collectivement partagée, engendre cette « maladie de l’infini », l’anomie, qui défait les solidarités collectives, et marque l’affaiblissement de la cohésion sociale. » Jean-Michel Bessette, « Sociologie criminelle », dans : J-P. Durand, R. Weil (sous la direction de) Sociologie contemporaine, Vigot, 1997, p. 605-606. Document 2 « La division du travail sociale* s’accompagne, pour Durkheim, d’une progression de l’individualisme puisque la conscience collective qui unissait les membres des sociétés laisse progressivement la place à la diversité des consciences individuelles. Le défaut de régulation sociale qui caractérise les sociétés en mutation (comme, par exemple, la société française de la fin du XIXè siècle) a pour principal effet d’altérer sa cohésion ; c’est ce que Durkheim met en évidence à travers le concept d’anomie. Absence de lois au sens étymologique, l’anomie signifie chez Durkheim l’affaiblissement des normes sociales sur les conduites individuelles. /…/ avec la disparition des régulations traditionnelles, les individus se trouvent dans une situation où leurs désirs ne sont plus limités par la société. Ils perdent alors leurs repères sociaux, d’où le développement de comportements témoignant de la désorganisation sociales tels que le suicide, le crime… » Philippe Riutort, Premières leçons de sociologie, PUF, 2000, in Manuel de SES, Bordas, 2011, p 244. *Chez Durkheim la division du travail ne concerne pas seulement la sphère de la production, mais touche l’ensemble des activités sociales (administration, justice, science…). PES 2012-2013 Chap 5 Processus Déviance 2 A quelle situation correspond une vie harmonieuse selon Durkheim ? L’harmonie est-elle garantie ? Pourquoi ? D’où vient alors la déviance ? Quelles formes peut elle prendre ? Donnez des exemples dans notre société. = émeute, casseur, violence, suicide d’ados… 12- Anomie et déviance chez Merton Merton # Durkheim Chez Merton anomie …. « discordance entre buts proposés par la société et moyens légitimes d’y parvenir ». = limitation des moyens pour réaliser ses désirs => anomie. D’où grille pour étudier comportements des individus… Document 3 les modes d'adaptation individuelles « Considérons ici cinq genres d'adaptation que nous présenterons dans le tableau suivant où le signe + signifie "acceptation", le signe – "refus" et le signe ± "refus des principales valeurs et introduction de valeurs nouvelles" : Typologie des modes d’adaptation individuelle Modes d’adaptation Buts Moyens I. Conformisme + + II. Innovation + III. Ritualisme + IV. Evasion V. Rébellion + + /…/ I. Conformisme Dans la mesure où une société est stable, ce premier type d'adaptation (conformité à la fois aux buts et aux moyens) est la plus répandu. S'il n'en était pas ainsi, la stabilité et la continuité de la société ne pourrait être maintenues /…/ II.Innovation La grande importance que la civilisation accorde au succès invite les individus à utiliser des moyens interdits mais souvent efficaces pour arriver ne serait-ce qu'à un simulacre de réussite : richesse et pouvoir /…/ III. Ritualisme Le mode d'adaptation ritualiste suppose que l'on abandonne le sublime idéal de la réussite financière et de l'ascension rapide, et qu'on le rabaisse au point où les aspirations peuvent être satisfaites. Mais tout en refusant de "chercher à dominer le monde" on continue cependant à obéir sans le vouloir aux normes sociales /…/ IV. Evasion Ce mode d'adaptation est probablement le plus rare. A proprement parler, les personnes qui l'emploient sont dans mais pas de la société : sociologiquement ce sont de véritables étrangers./…/ V. Rébellion Ce type d'adaptation rejette les individus hors de la structure sociale et les pousse à tenter d'en faire une nouvelle. Cela suppose que les individus soient étrangers aux buts et aux moyens de la société où ils vivent, qui leur paraissent purement arbitraires, sans autorité ni légitimité. PES 2012-2013 Chap 5 Processus Déviance 3 Dans notre société, des mouvements organisés pour la rébellion visent à introduire une structure sociale dans laquelle il y aurait une correspondance plus étroite entre le mérite, l'effort et la récompense sociale. » R. K. Merton, Eléments de théorie et de méthodes sociologiques, Plon, 1965, p 176-177, 184, 186, 188. Quelle est la situation normale ? Quelles sont les situations déviantes ou anomiques ? A quel modèle appartient Al Capone ? Un sportif dopé ? Un élève qui triche lors d’un DT ? Où classer les mouvements de protestations du « printemps arabe » ? Le mouvement hippy ? Karl Marx ? Un employé appliquant « à la lettre un règlement » ? 2/ La théorie interactionniste : étiquetage et entrepreneur de moral 21- Une critique de la définition du chapitre 4 Document 4 « La déviance est définie comme la transgression d’une norme sociale. Toutefois, les sociologues ont rapidement perçu que le phénomène de déviance était bien plus compliqué que cette définition ne peut le laisser penser. Edwin Lemert (1951) a distingué une déviance primaire (transgression d’une norme) et une déviance secondaire (reconnaissance de cette transgression par une instance). Autrement dit, il n’y a véritablement déviance qu’en fonction de la réponse de la société à un comportement. Mais la déviance primaire aussi doit être interrogée. Pour qu’il y ait transgression d’une norme, il faut que cette norme soit reconnue comme telle, ce qui n’est pas certain ». Arnaud Parienty, « Déviance et délinquance », Manuel de SES, Hatier, 2011, p 266. Peut-on commettre une infraction, voire un crime sans être jugées déviant ? Comment appelle-t-on ici la définition de la déviance vue au chapitre 4 ? Quelles critiques peut-on faire à la définition vue au chapitre précédent ? 22- La déviance comme processus d’étiquetage 221- La théorie d’Howard Becker Document 5 « C'est en ce sens que H. S. Becker /…/ définit la déviance, non pas comme une propriété du comportement lui-même, mais comme la résultante de l'interaction entre la personne qui commet un acte et ceux qui réagissent à et acte : "On peut considérer la déviance et les déviants /…/ comme le résultat d'un processus d'interaction entre des individus ou des groupes : les uns, en poursuivant la satisfaction de leurs intérêts propres, élaborent et font appliquer (par le biais de divers appareils idéologiques, et de divers agents : entrepreneurs de morales et "grands stigmatiseurs") des normes que transgressent les autres qui, poursuivant également de leur côté la satisfaction de leurs propres intérêts (qui sont divergents), commettent des actes qui seront qualifiés de déviants par les premiers." [H. Becker]. /…/ En fin de compte, le déviant est un individu qu'un autre individu ou qu'un groupe, ayant pouvoir de le faire, aura été stigmatisé et étiqueté comme tel. Un exemple pratique illustrant la réalité de ce phénomène de stigmatisation, et l'imposition de rôle qu'il est susceptible d'induire (le stigmatisé ayant tendance à conforter, en s'y conformant, l'image qu'on lui tend, et que l'on attend de lui), nous est fourni à travers les cas d'erreurs judiciaires » PES 2012-2013 Chap 5 Processus Déviance 4 Jean-Michel Bessette, « Sociologie criminelle », dans : J-P. Durand, R. Weil (sous la direction de) Sociologie contemporaine, Vigot, 1997, p. 613. Document 6 « Il serait absurde de suggérer que les voleurs à main armée attaquent les gens simplement parce que quelqu'un les a étiquetés comme voleurs à main armée, ou que tout ce que fait un homosexuel découle de ce que quelqu'un l'a étiqueté comme tel. Néanmoins, /…/ les conséquences qu'impliquent pour un individu, le fait d'être étiqueté comme déviant : il lui devient plus difficile de poursuivre les activités ordinaires de sa vie quotidienne, et ces difficultés même l'incitent à des actions "anormales" (il est ainsi plus difficile de gagner sa vie dans un métier ordinaire quand on a un casier judiciaire, et celui qui se trouve dans cette situation est poussé à prendre un métier illégal. /…/ On peut suggérer que la définition d'un individu comme déviant peut, dans certaines circonstances, l'inciter à adopter certaines lignes de conduite sans affirmer pour autant que les hôpitaux psychiatriques rendent nécessairement fou ou que la prison transforme toujours ceux qui y passent en criminels invétérés ». H. Becker, Outsiders : études de sociologie de la déviance, Métailié, 1985, p 43 Comment Howard Becker définit-il la déviance ? Donnez des exemples d'entrepreneurs de moral. = policier, journaliste, magistrat, enseignant… Peut-on devenir déviant sans transgresser de norme ? Quelles peuvent être les conséquences de l'étiquetage pour un individu ? 222- Le rôle des entrepreneurs de moral : l’exemple de Maurice Papon Document 7 1er février 1942 : Maurice Papon est nommé secrétaire général de la préfecture de la Gironde, à Bordeaux, en zone occupée. Il est sous les ordres du préfet, chapeaute cinq divisions de la préfecture et un service des questions juives. 6 décembre 1944 : Contestée par le Comité de Libération de Bordeaux, sa nomination à un haut poste est confirmée par le Comité d’épuration du corps préfectoral. 3 avril 1978 : Il est nommé ministre du budget. 6 mai 1981 : Le Canard enchaîné révèle son rôle dans la déportation des juifs bordelais. 8 décembre 1981 : Des familles de déportés portrent plainte contre lui. 19 janvier 1983 : Il est inculpé de crime contre l’humanité. 2 avril 1998 : Il est condamné à dix ans d’emprisonnement par la cour d’assises de Bordeaux. » Arnaud Parienty, « Maurice Papon : de la préfecture à la cour d’assisses », Manuel de SES, Hatier, 2011, p 269. Quelle déviance a commis Papon ? Jusqu’en 1981 quelle est l’appréciation dominante sur la carrière de Maurice Papon ? Pourquoi cette appréciation a-t-elle changé ? Qui est l’entrepreneur de morale ? Notions Anomie selon Durkheim, anomie selon Merton, déviance primaire, déviance secondaire, étiquetage, entrepreneur de morale