Actes 2 - Euromed Heritage

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session 2
session 2
Patrimoine
bâti et
réglementation
énergétique
Comparaison européenne
entre dispositifs juridiques
Heritage and energy
regulation
Comparison between European legal frameworks
La session est présidée par Stéphane Demeter, Président d’ICOMOS Belgique.
Session chaired by Stéphane Demeter, President of ICOMOS Belgium
Session chaired by Jean-Louis Luxen, Euromed Heritage legal expert
Comment les règles et les normes
influent-elles sur les pratiques
des acteurs ? Quelles sont les
caractéristiques des différentes
transpositions nationales de la
directive européenne 2002/91/CE
qui ouvre la possibilité aux Etatsmembres de ne pas fixer d’exigences
pour certains bâtiments ? Quelles
applications en sont données selon
les contextes de chacun des pays ?
What is the influence of rules
and standards on the stakeholders’
way of dealing with heritage?
What are the characteristics of
the various national transpositions
of the 2002/91/EC European directive
regarding the ability to exclude
certain buildings? How is it applied
according to context in each country?
43
actes du colloque
session 2
Introduction
aux débats :
De la directive
européenne de 2002
à celle de 2010
Introduction
to the discussions:
From the 2002 to the 2010
European directive
Sara Byström
Juriste
Abstract
The objective of sustainable development is a
major one that cannot be ignored, be it in Europe
or around the Mediterranean Sea. The necessary
decrease in buildings energy consumption shall
however go hand in hand with the equally rightful
interest of preservation of our built heritage, even
when its heritage value is not officially protected.
Rules and energy regulation which are
strictly enacted within the European frame
can somehow be toned down or even disappear
in some cases. The first key document - the 2002
European directive on Energy Performance
of Buildings (ref: 2002/91/EC) - specifies that
exemptions can be enacted for heritage buildings.
Since May 19th, 2010, a new European directive
(’EPBD2’, ref: 2010/31/UE), confirms the possibility
of exempting. It goes however further in that
it maintains the importance of the ’energy
performance’ concept.
44
A methodology frame with further calculation
details will be drawn up by the European Union
before June 30th, 2011.
In Europe, most of the countries seem to have
exempted protected heritage, in cases where
buildings could be too severely harmed. In spite of a
few variations (namely when it comes to the extent
of official protection), what is missing regarding
the transpositions of European countries is the
’intermediary’ or imprecise heritage, for instance
because it is only protected according to ’unofficial’
or local norms and uses, but also the indeterminate
heritage which still waits to be listed.
Examples from France, Finland, Italy, Austria
and Norway can give us a hint of the different
regulation adaptations that have be chosen according
to each national context, and will let us consider
the issue in a different juridical environment.
It is anyway important to intensify our awareness
efforts to decision makers so that future national
enactments answer the needs of our built heritage,
on a building or large-scale basis.
– Le développement durable constitue
aujourd’hui un objectif inévitable,
en Europe comme autour de la
Méditerranée. Il est ainsi légitime qu’intervienne
une baisse de la consommation énergétique.
Celle-ci doit se faire de la manière la plus juste
possible, notamment pour le patrimoine car la
conservation du patrimoine apparaît tout aussi
légitime. En termes de droit, la difficulté vient
de la distance entre, d’une part, les règles,
et d’autre part, la réalité du patrimoine et
notamment la source de sa valeur matérielle
ou immatérielle. Cette appréciation de la valeur
patrimoniale, donc culturelle, peut poser
problème dans sa relation à la règle.
La première directive européenne de 2002
sur la performance énergétique des bâtiments
représente un document clé. Elle avait ouvert
à chaque pays transposant la possibilité
d’édicter des dérogations pour les bâtiments
patrimoniaux lorsque les travaux de mise
aux normes risquaient de provoquer des
modifications inacceptables des spécificités du
patrimoine bâti, qu’il soit protégé officiellement,
qu’il fasse partie d’un environnement classé
ou qu’il présente des valeurs architecturales
ou historiques particulières. Ces termes
assez larges laissaient la voie libre aux pays
transposant de respecter les bâtiments
patrimoniaux selon leur propre contexte,
notamment administratif.
Depuis le 18 juin 2010, la directive EPBD
2 est entrée en vigueur. L’application des articles
relatifs à la fixation d’exigences minimales
pour les bâtiments existants doit être effective
au 9 juillet 2013. Cette nouvelle directive,
plus pragmatique, permet une meilleure
adaptation aux contextes de chaque pays.
Elle affirme l’importance de la performance
énergétique et introduit la notion de calcul
des niveaux optimaux de performance
énergétique en fonction des coûts sur la durée
de vie des constructions. Ces termes facilitent
l’adoption d’actions plus adaptées au patrimoine
bâti, selon sa durée de vie, sa performance
et le coût des investissements. Un cadre
méthodologique sera établi par l’Union
Européenne avant le 30 juin 2011.
Chaque pays doit transposer la directive
selon ses spécificités. Elle impose le respect
d’exigences minimales lors des rénovations
majeures du patrimoine existant. Cette notion
sera définie par les Etats-membres, soit en
pourcentage de la surface, soit par la valeur
économique du bâtiment. Une attention
particulière sera aussi portée aux différents
systèmes techniques des bâtiments, par exemple
au chauffage. La possibilité d’une dérogation
pour chaque pays subsiste donc pour les
bâtiments protégés, ceux appartenant à un
environnement classé ou ceux présentant
une valeur architecturale ou historique
spécifique et dont l’apparence serait modifiée
de manière inacceptable par les rénovations.
Il faut insister sur l’importance de la
transposition par les différents pays qui
peuvent étendre ces notions et élaborer
des règles qui leur conviennent dans
le respect des exigences minimales.
Des objectifs intermédiaires par rapport aux
plans nationaux doivent être définis avant 2015.
Les associations et professionnels que
vous êtes ont un grand rôle à jouer pour
les transpositions dans vos pays selon les
spécificités de votre patrimoine et de votre
contexte administratif. La directive énonce
en effet des notions de principe peu définies
qu’il vous reste à articuler. Un questionnaire
portant sur les modalités et difficultés de
cette transposition a été élaboré et envoyé
aux branches nationales d’ICOMOS, mais
n’a recueilli que quelques réponses. J’en profite
d’ailleurs pour remercier ceux qui nous l’ont
retourné. Nous constatons aussi que le grand
perdant dans les transpositions est celui du
patrimoine «intermédiaire» comme celui
protégé uniquement selon des normes et usages
non officiels ou locaux, mais aussi celui sans
statut formel car non encore inventorié.
Cette session permettra de présenter
quelques exemples nationaux pour illustrer
les règles adoptées et les difficultés rencontrées
pour les appliquer en France, en Finlande,
en Italie, en Autriche et en Norvège. Espérons
que ce colloque permettra de stimuler
la coopération européenne et l’échange
méditerranéen. Il me paraît fondamental que
les professionnels comprennent l’importance
de leurs savoirs et de leurs savoir-faire et qu’ils
se tournent vers leurs organismes décisionnels
afin que les transpositions des textes prennent
en compte, de manière optimale, les spécificités
de leurs métiers mis au service du patrimoine
bâti ; en ensemble urbain ou isolé, protégé
officiellement ou en statut «intermédiaire».
45
actes du colloque
session 2
– La rénovation
thermique des
bâtiments existants :
le dispositif
réglementaire
en France
La directive européenne relative
à l’efficacité énergétique des bâtiments
de juin 2010 fait suite à la première
directive de 2002, et il me paraît important
d’analyser les nuances qu’elle y apporte. Elle
s’inscrit dans un objectif général d’amélioration
de la performance énergétique des bâtiments
au sein de l’Union européenne, mais prévoit
de tenir compte des conditions climatiques,
des spécificités locales, de l’usage du bâtiment
et de son âge. Elle introduit également
la possibilité d’élaborer une réglementation
distincte pour les bâtiments neufs et pour les
bâtiments anciens. Il revient aux Etats-membres
de mettre en place les différentes dispositions
législatives, réglementaires et administratives
nécessaires pour se conformer à la directive.
Existing buildings
thermal renovation:
the French regulation
Concernant les bâtiments existants, le Parlement
européen et la Commission européenne ont
souhaité introduire des critères technicoéconomiques. Les Etats devront imposer des
règles lorsque des travaux suffisamment
conséquents seront engagés. Les considérants
de la première directive de 2002 mentionnent
ce même principe de rapport coût/efficacité.
Pour la France, il s’est traduit dans la loi
d’orientation et de programmation de la
politique énergétique de 2005 qui a introduit
la possibilité de réglementer les bâtiments
existants. Une réglementation globale est
définie et fixe un objectif d’atteinte d’une
performance pour certains bâtiments.
Elle a également introduit la possibilité d’une
réglementation élément par élément avec
des exigences de moyen, par exemple pour
l’isolation d’un mur en contact avec l’extérieur.
Marie-Christine Roger
Ministère de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement
Abstract
The 2010 European directive on energy efficiency
gives new details in relation to the 2002 directive.
It offers each Member State a possibility to use
separate regulations for new and existing buildings
while technical criteria according to a costefficiency ratio appear.
In France since 2005 a law on energy policies sets
a given energy efficiency objective and specified
both a global regulation for existing buildings and
an element-based regulation. The global regulation
meets surface and cost of works criteria and aims
to an efficiency objective under 120 kWh/m²/year.
For buildings built before 1948, the global
regulation does not apply as only the elementbased regulation does.
Furthermore, the Grenelle de l’Environnement
sets a 38% energy reduction global objective for
the whole of the building stock by the year 2020.
There are incentives for heavy renovations of
existing buildings as one third of the French
building stock was built before 1948.
Moreover, as part of the directive implementation,
France agreed that protected buildings would not
46
have to comply with energy performance
requirements in the event that these regulations
would lead to a loss or deterioration of character
and appearance.
These regulations are expected to change.
For existing buildings, it involves a better
understanding of inertia, loss and dynamic
behaviour of walls phenomena, integration
of eco-materials and renewable energy.
In order to do so, several projects are underway:
BATAN project: thermal study of old buildings
in partnership with Maisons Paysannes
de France. The objective consists in establishing
a typology of rural buildings and a new
calculation pattern through a set of experiments
HYGROBA project: improving knowledge
on hydric and thermal matters, compatibility
between existing insulation solutions and old walls
ATHEBA project: awareness worksheets
on regulations and hygrothermal behaviour
of buildings towards the general public
and professionals
ENRABF project: heritage-compatible energy
saving strategies conducted by energy engineers
and the Architectes des bâtiments de France,
circulation of results among the general public
and professionals
La réglementation globale s’applique pour les
bâtiments existants d’une superficie supérieure
à 1 000 m², quand le coût des travaux dépasse
25 % du coût de la construction hors foncier,
soit environ 300 euros par mètre carré.
Les bâtiments postérieurs à 1948 se voient
appliquer la réglementation globale,
alors que pour les bâtiments antérieurs,
c’est a réglementation élément par élément
qui s’applique. Cette même règle est valable
pour les petits bâtiments, pour les mêmes
raisons technico-économiques. En matière
de réglementation globale, l’évaluation
de la performance est réalisée en définissant
un indicateur de performance homogène
à une consommation qui prend en compte
les caractéristiques du bâtiment et fait
intervenir un modèle de calcul.
La performance du bâtiment réhabilité
est évaluée et ne doit pas dépasser, après
travaux, 120 kWh/m²/an en moyenne.
Ce modèle de calcul est bâti à partir de la
connaissance acquise depuis l’après-guerre
sur les matériaux industriels. Nos connaissances
sont en effet insuffisantes pour élaborer
un modèle de calcul capable de représenter
correctement les caractéristiques thermiques
spécifiques des matériaux traditionnels.
D’autre part, selon l’article 4 de la directive,
les Etats-membres peuvent fixer ou non
des règles pour les bâtiments et monuments
officiellement protégés en raison de leur valeur
architecturale ou historique spécifique.
La France a transposé cette disposition dans le
décret du 19 mars 2007 par la non-applicabilité
des exigences de performance énergétique
aux monuments historiques classés ou inscrits
à l’inventaire et les espaces protégés en
application du code du patrimoine, lorsque
les dispositions réglementaires auraient pour
effet de modifier leur caractère ou leur apparence
de manière inacceptable. Sont ainsi exclus,
les bâtiments en secteurs sauvegardés ou situés
en zone de protection du patrimoine architectural
urbain ou paysager, les bâtiments aux abords
des monuments historiques ou en sites inscrits
et classés, ceux inscrits sur la liste du Patrimoine
Mondial de l’humanité de l’UNESCO ainsi que
les immeubles bénéficiant du label Patrimoine
du XXème siècle.
La réglementation française a volontairement
introduit des règles adaptées à la rénovation
des bâtiments anciens. C’est pourquoi l’arrêté
du 13 juin 2008 prévoit que la réglementation
globale ne s’applique pas aux bâtiments
construits antérieurement au 1er janvier
1948. En revanche, la réglementation élément
par élément s’applique à ces bâtiments.
Nous avons souhaité définir un cadre
respectant un principe de précaution
pour la savegarde des bâtiments anciens,
47
actes du colloque
car nous étions conscients de l’insuffisance
de nos connaissances et de l’inadaptation
de nos méthodes dans ce domaine.
La dynamique du Grenelle de l’environnement
a été initiée en 2007 et fixe un objectif
de diminution de 38 % des consommations
d’énergie de l’ensemble du parc à l’horizon
2020. A cet effet, il est prévu d’encourager
les rénovations lourdes de logements existants,
pour atteindre 400 000 rénovations par an
à compter de 2013. Nous n’avons pas voulu
contraindre par un outil réglementaire figé
et rigide, la spécificité de notre patrimoine.
Il faut aussi rappeler qu’un tiers du patrimoine
français est composé de bâtiments datant d’avant
1948, ce qui représente 10 millions de logements
sur 30 millions de logements. Il nous faut donc
mettre en place une réglementation nationale
tout en conservant une certaine souplesse. Nous
devons aussi intervenir par d’autres outils prenant
en compte les spécificités locales, pour progresser
en matière de performance énergétique. Il n’est
en effet pas question que le patrimoine s’exonère
de toute exigence en ce domaine.
A terme, cet impératif de rénovation impose
d’aménager la réglementation pour prendre
en compte tous les bâtiments, y compris les
bâtiments anciens. Depuis plusieurs années,
des études sont menées pour mieux appréhender
le comportement du bâti ancien, mais il reste
beaucoup à faire. L’objectif consiste à modéliser
la déperdition, l’inertie des murs et le
comportement dynamique particulier des parois
anciennes. Il s’agit également, tout en axant
la réflexion sur l’analyse et le diagnostic des
bâtiments anciens, d’évaluer la compatibilité
d’isolants, éco-matériaux ou autres, avec les
matériaux traditionnels. Enfin, nous souhaitons
étudier les différentes possibilités d’intégration
des énergies renouvelables dans le bâti ancien.
Plusieurs projets concrets ont été lancés.
Le projet BATAN porte sur l’étude des
phénomènes physiques qui caractérisent la
thermique du bâti ancien, avec la collaboration
et l’assistance de Maisons Paysannes de France
et d’autres partenaires qui connaissent bien ce
domaine. Le projet vise à réaliser une première
approche typologique de ce bâti. Nous avons
lancé une campagne d’expérimentation
approfondie in situ pour poser les bases
d’un futur modèle de calcul. Nous souhaitons
également, à travers les premiers résultats,
identifier les réels enjeux de réhabilitation
énergétique du bâti ancien. Nous disposons
48
session 2
de suffisamment de recul pour montrer que
de manière générale, les consommations
calculées surestimaient les consommations
des bâtiments par rapport à la réalité.
Il nous faut donc approfondir ce sujet. Le projet
BATAN est limité en terme de financement,
il n’a pas la prétention d’être exhaustif et
représentatif de tout le patrimoine français.
Il comprend cependant un certain nombre de
maisons rurales, de bourgs et de centres urbains.
Dans un deuxième temps, nous souhaitons
élargir ce panel à d’autres types de bâtiments.
Le projet HYGROBA vise à améliorer
la connaissance hydrique et thermique
des parois anciennes par des mesures sur
des échantillons réels et par le rassemblement
des connaissances existantes en la matière.
Il doit aussi étudier la compatibilité des solutions
d’isolation existantes avec chaque type de paroi
ancienne testée. Il comportera une phase
de modélisation. J’insiste sur la nécessité de
laisser suffisamment de temps à l’expérience
pour ne pas tirer de conclusions trop hâtives.
Le projet ATHEBA prévoit de créer des fiches
à l’intention du grand public et des professionnels
du bâtiment pour faire ressortir les spécificités de
ces bâtiments, les informer sur la réglementation
et sur le comportement hygrothermique de ces
bâtiments et les sensibiliser sur les précautions
à prendre et les méthodes à appliquer
lors de la rénovation du bâti ancien.
Enfin le projet ENRABF propose de réunir
des Architectes des bâtiments de France
et des énergéticiens, avec le concours
de Maisons Paysannes de France, pour
élaborer des stratégies d’économies d’énergies
compatibles avec le patrimoine. L’objectif de ce
projet vise à mettre en lumière les expériences
locales réussies. Il s’agit de diffuser les solutions
retenues à la fois aux Architectes des bâtiments
de France et à tous les acteurs et professionnels
du bâtiment qui ne comprennent pas toujours
que les solutions qu’ils proposent sont
inadaptées aux bâtiments patrimoniaux.
Pour conclure, l’objectif final est de réaliser
un site internet décrivant les enjeux de la
préservation du bâti ancien et proposant des
solutions pour réaliser des économies d’énergie
dans le respect de ces édifices, à la fois pour
le grand public et les professionnels. Il s’agit
d’élaborer de nouvelles solutions à partir des
directives, sans s’enfermer dans un carcan
juridique, mais en en gardant l’esprit.
Energy efficiency
and thermal comfort
standards of cultural
heritage buildings
in Finland
La performance énergétique et
les normes de confort thermique
des bâtiments anciens en Finlande
Seija Linnanmäki
Senior advisor at the National Board of Antiquities, Department of Monuments and Sites, Finland
Résumé
En règle générale, la réhabilitation énergétique
du bâti existant dans les climats nordiques
se traduit par le remplacement des fenêtres
et le renforcement de l’isolation thermique
au niveau des murs extérieurs et des sols.
Typiquement, les processus de réhabilitation
énergétique ignorent l’authenticité des
matériaux et l’architecture des bâtiments.
Cette présentation rend compte des types
d’impact les plus récurrents de la réhabilitation
énergétique sur le patrimoine culturel bâti
en Finlande. Afin d’éviter ces effets nuisibles,
trois types d’actions pourraient être appliqués.
Premièrement, nous avons besoin de
nous assurer que les bâtiments légalement
et officiellement protégés seront exclus au
niveau national du champ de la directive.
Cette option est présentée dans l’article 4,
paragraphe 2 de la Directive Performance
énergétique des bâtiments (EPBD 2010/31/EC),
et devrait être appliquée lors de la transposition
de la directive, et ce dans chaque pays.
Deuxièmement, il faut ouvrir le débat
sur les normes de confort thermique
appliquées au patrimoine culturel bâti.
Le confort thermique est assuré par l’air
conditionné qui utilise la plus grande
partie de l’énergie des bâtiments.
Les normes de confort thermique sont
basées sur un modèle statique figurant
dans le Standard 55 ASHRAE, qui ne prend
pas en compte la capacité humaine
d’adaptation comportementale, physiologique
et psychologique. L’application d’un modèle
adaptatif au lieu d’un modèle statique
offre un plus grand potentiel en matière
d’économie d’énergie.
Troisièmement, nous devons trouver
des moyens de chauffage et de climatisation
du bâti ancien dont la consommation
d’énergie primaire et les émissions
de CO2 soient aussi faibles que possible.
Convenablement contrôlé, un faible taux
d’émissions de CO2 pourrait permettre
de réduire le besoin d’isolation supplémentaire.
De ce point de vue, il n’y a aucune différence
entre des bâtiments légalement protégés
et les autres bâtiments existants.
49
actes du colloque
– Currently, the most serious threat
for the architecture and technical systems
in historic buildings is the demand to reduce
CO2 emissions and adapt to climate change.
Unfortunately energy renovations often ignore
the architectural and material authenticity
of historic buildings. This presentation briefly
reports of the most typical effects of energy
renovations on cultural heritage buildings
in Finland. To avoid the harmful effects from
the conservation point of view, three actions should
be applied. First we need to ensure that officially
protected buildings will be nationally excluded
from the scope of the directive, in each EU country.
Secondly, we should start the discussion about
the thermal comfort standards applied in cultural
heritage buildings. Thermal comfort is controlled
by air-conditioning utilizing the biggest amount
of energy in buildings. Local standards for thermal
comfort are based on the static model in ASHRAE
Standard 55, which do not take into account the
human ability of behavioural, physiological and
psychological adaptation. The application of an
adaptive model instead of a static one, has greater
potential to energy saving.
Thirdly, we need to find ways to heat and cool
our old buildings so that the primary energy
consumption and the CO2 emissions are as low as
possible. Properly verified, low CO2 emissions may
reduce the need for additional insulation. In this
aspect, there is no difference between legally
protected and other existing buildings.
National Climate Change Strategies
Finland has been a pioneer in the implementation
of adaptation policy. The first long-term climate and
energy strategies were formulated already in 2001.
However, cultural heritage sector has been concerned
about the impacts and challenges of climate change
to our built heritage and the cultural environment.
Two years ago, in 2008, the Ministry of the
Environment published a report of Climate change
50
session 2
and the Cultural Environment. It tells, of course,
about the storms and floods and other extreme
weather phenomena, however, we should not
damage our built heritage with careless energy
renovations. ’Over the short term, the cultural
environment may be affected less by climate change
as such, than by mitigation and adaptation
measures, such as... various solutions for energy
efficiency...’. The ERA17 Energy-Smart Built
Environment programme was launched in October
2010 by the Ministry of the Environment. In these
strategies, existing buildings are mentioned only
as a source of potential energy saving 1.
The implementation of EPBD in Finland
To come back to EPBD (Energy Performance
of Buildings Directive), until now, Act on the Energy
Certificate 487/2007 is the only legal procedure
actually implementing the Directive which takes
into account the possibility for an exemption given
in the Directive. Thus, Energy Certificate is not
needed for officially protected buildings in Finland.
To answer the demands assessed in the EPBD 2010,
the Ministry of the Environment launched the draft
for new requirements for energy efficiency of new
building in September 2010. This revised draft
observes both U-values for building envelope and
overall energy performance, primary energy use per
energy carrier and air-tightness. Designed energyuse has to be counted and used energy has to be able
to be metered. Also renewables are taken into
account according to EU directive 2009/28/EC «RES Promotion of the use of energy from renewable
energy resources».
What is new in National Building Code Part D2
under revision is a new parameter E-value, which
tells the maximum energy use allowed for various
building types1. The total energy consumption is
related to the building type, for example: residential
blocks - 140 kWh/m2a; offices, schools and day-care
centres - 190 kWh/m2a; hotels - 280 kWh/m2a ; shops
- 270 kWh/m2a. Single-family and detached houses
are given various E-values depending on the building
size and material. Buildings bigger than 150 m2
should be more energy efficient than smaller ones.
The Ministry of the Environment has started the
work for binding regulations addressed on
renovation of existing buildings in autumn 2010.
In case of officially protected building, conservation
plan will be taken into account.
Challenges: structural humidity
control and air-tightness
In Nordic countries mitigation and adaptation
to climate change means significant changes in
architecture, outdoors in facades as well as in
indoors. Additional thermal insulation may cover
the facades with unsuitable materials, wooden
windows are often replaced by plastic or aluminium
thermal windows, and the outer doors renewed.
Pre-study on building physical behaviour and
durability of building envelopes is going on at
Tampere University of Technology and the Technical
Research Centre, however, it seems that researches,
engineers and building physicists have difficulties
to find suitable methods for traditional structures.
Thermal comfort standards
Thermal comfort is that single factor, which
has the biggest influence on the quality of indoor air
climate and therefore also to the energy consumption
of buildings. Thermal comfort standards are
very rarely discussed among conservation
specialists; however, by changing the standards
we might be able to save both – energy as well as
buildings. It is commonly known, that buildings
account for nearly 40 % of the total primary energy
consumption and 30% of greenhouse gas emissions.
Thus, as Alice Kwok and Nicolas Rajkovich have
stated ’Since lighting, space heating, ventilation
and air-conditioning utilize the largest amount
of energy in buildings, a logical place to begin is by
addressing the standards that define the operation
of heating and cooling systems.’ 2
Today, local standards for ventilation regulations
are based on the static model originally formulated
in American ASHRAE standard 55. The standard was
developed in 1970s by experimental research of Ole
Fanger and his group at the Kansas State University.
Static-heat-balance-model was developed in a
laboratory climate chamber. According to the static
model, ’a human is a passive recipient of indoor air
provided’. People are unable to control the system.
Indoor air is wanted to be even, constant and
consistent, and the conditions are managed by the
building control system. Therefore, the comfort zone
is only +-2 degrees Celsius. This demand can only be
met with exhaustive technology and electricity
consumption.
However, the standard gives also another
option. In adaptive model, the human ability
to physiological, psychological and behavioural
adaptation is observed. People are able to extend
their comfort zone if they have an easy access
to the building controls – and that is a way to save
heating and cooling energy. People may change their
position, their activity, add or remove clothing,
open or close the window, adjust thermostats,
use fans, shading, curtains, blinds etc.
Thermal comfort is known to be based on previous
experiences of the space. Thermal expectations are
a result of the building type, local climate, the desire
for seasonal clothing and the social dress code as well
as the past experiences in the space and in home.
In consequence, expectations are also different in
mechanically and naturally ventilated buildings.
People who had acclimatized to air-conditioned
buildings had lower thermal tolerance than
others. Researchers have shown that the amount of
complains is lower in naturally ventilated buildings
than in those buildings which were ventilated
mechanically. People modify their expectation
according to the known facilities of buildings.
Mechanical intervention is not always necessary.
In relation to historic and naturally ventilated
buildings, people have a toleration of moderate
discomfort, and those buildings are ’forgiven’ their
occasionally poor abilities. 3
Energy efficiency is an important part of the usability
of heritage buildings as stated in the Venice Charter
1964. ’The conservation of a monument is always
facilitated by making use of them for some socially
useful purpose. Such use is therefore desirable but it
must not change the lay-out or decoration of the
building. It is within these limits only that
modifications demanded by a change of function should
be envisaged and may be permitted.’ I hope that we
could find ways to improve the energy-efficiency of our
cultural heritage buildings, without compromising
their architectural and historical values.
1. Ministry of the Environment of Finland (2010),
National Building Code Part D2.www.ymparisto.fi.
2. Kwok A. G., & Rajkovich N. B. (2010). Addressing climate
change in comfort standards. Building and Environment 45, 18-22.
3. Nicol F., "Thermal comfort" in Santamouris M. (ed).
Solar thermal technologies for buildings. Low Energy
Architecture Research Unit, London Metropolitan University,
2003, pp. 279-331.
p50 : 19th Century Casern in Suomenlinna Fortress,
designed by Russian Engineering Officers.
Picture Seija Linnanmäki, 2010.
Below : U-value assessed for an outer wall
in National Building Code C3 2010 is 0,14 W/m2K.
51
actes du colloque
session 2
Les lignes directrices
de la réglementation
relative au patrimoine
historique en Italie
Legal guidelines for heritage
buildings in Italy
Elvira Petroncelli
Architecte, professeur à l’Université de Naples, Italie
Abstract
The 2002/91/EC Directive is part of the efforts
aiming at fighting global warming and points at
promoting energy consumption reduction. It offers
energy efficiency calculation methods in order
to assess the buildings’ performance and to promote
this action in regard to the objectives. In the first
place, it has to be remembered that more than
40% of the final energy consumption in the Union
is used by the housing and the service sector: a
proper control of energy efficiency of new buildings
and those on which an intervention is necessary
to ensure appropriate living conditions seems to be
then the natural answer if the Kyoto Protocol is
to be respected.
Italy officially transposed the Directive
in 2005 and broadened the possibilities
of exclusion. Next to ’…buildings and monuments
officially protected as part of a designated
environment or because of their special
architectural or historic merit, where compliance
with the requirements would unacceptably
alter their character or appearance; ...’,
it added unprotected mansions, gardens
and parks which are remarkable for their rare
beauty or the buildings’ complexity,
52
which constitute a distinct feature
with aesthetic and traditional values.
A certain number of Italian Regions passed local
regulations as well. In the quite homogeneous frame
that appeared with these regulations, there are
almost no new elements except for small details.
Somehow, should we work based only on the energy
efficiency of a building? When compared for
example to the choice of a site and to spatial
organisation, the energy component has almost
always been of great importance through times.
This thought should lead us to deal in a broader
way with all that has to do with energy matters
and historical built heritage –or historical
centres- and to reread its particularities and
characteristics.
Even if a global approach on the elements that
help define energy efficiency lead to observe that
the situation is not exactly the same when we go
through the different components in a fragmented
way, buildings cannot be separated from their
urban and environmental context. This question
should therefore necessarily be tackled within a
discourse on sustainable development, precisely
for the context and historical buildings. A systemic
approach could lead to go beyond dynamics that
are too technicist and to revise policies that
encouraged an unreasonable growth of cities as
well as an inconsiderate use of spatial resources.
–
La directive européenne EPBD de 2002
s’inscrit dans le cadre d’une initiative
de lutte contre le changement climatique.
Elle s’attache à promouvoir la performance
énergétique, dont elle offre une méthode de
calcul, fixe des exigences minimales, établit la
certification de la performance énergétique des
bâtiments et prévoit une inspection régulière
des installations. Les Etats-membres peuvent
décider de ne pas appliquer ces exigences
aux monuments et bâtiments officiellement
protégés ou qui présentent une valeur historique
et architecturale particulière si ce changement
modifie de manière inacceptable leur caractère
ou leur apparence.
L’Italie a transposé cette directive en 2005
et a exclu de son application non seulement
le patrimoine classé, mais aussi les espaces
plus vastes se distinguant par leur rare beauté
ainsi que les bâtiments, centres et ensembles
historiques, parcs et jardins. Un décret législatif
de 2006 précise que l’application est également
exclue en cas de risque d’altération inacceptable.
Par la suite, la conférence Etat/Régions et
collectivités territoriales de 2009 a défini
un plan visant à favoriser l’utilisation des
énergies renouvelables et l’amélioration
de la performance énergétique dans les
interventions sur des bâtiments existants,
mais en excluant les bâtiments des centres
historiques. De fait, la réglementation
italienne ne diffère que marginalement du
contenu de la directive européenne de 2002
en ce qui concerne le patrimoine. Les Régions
en Italie ont des réglementations locales
et ont adopté pour la plupart des mesures
d’encouragement aux économies d’énergie.
Certaines Régions, comme la Toscane, ont posé
la question du patrimoine historique à l’échelle
urbaine, pour considérer de manière intégrée
le bâtiment et son contexte, naturel ou bâti.
Récemment le ministère du Patrimoine
et de l’action culturelle a élaboré des lignes
directrices d’utilisation efficace de l’énergie
pour le patrimoine culturel. De manière
générale, les lignes directrices fournissent
des orientations pour évaluer et améliorer
l’efficacité énergétique des bâtiments
protégés. Elles constituent un outil pour les
projets de rénovation thermique. En outre,
les lignes directrices procurent aux
administrations responsables de la
sauvegarde du patrimoine des orientations
pour la formulation de jugements sur
l’efficacité énergétique du bâtiment
et sur les conditions de conservation
à garantir lors des travaux. Les lignes
directrices prévoient qu’il faut non seulement
prendre en compte la performance énergétique,
mais aussi identifier l’insertion dans le paysage
et les techniques d’intervention à différentes
échelles. Deux niveaux d’intégration sont
identifiés : partiel ou total, selon que les éléments
nouveaux insérés deviennent ou non des
composants actifs du bâti. Les stratégies
d’intervention proposées doivent donc être
définies par rapport au bâtiment dans son
ensemble. Avant toute intervention, une analyse
du bâtiment à la fois historique, culturelle,
topographique et climatique doit être fournie,
comprenant également une étude des
phénomènes de détérioration. Le contexte
et l’environnement doivent être étudiés
et une analyse technique du bâtiment par
rapport au système d’isolation et à la structure
portante doit aussi être réalisée. Ensuite,
le diagnostic doit indiquer quelles modifications
peuvent être apportées. Les lignes directrices
désignent clairement comme inacceptables des
interventions n’intégrant pas l’environnement
et le paysage. Plusieurs documents doivent
être élaborés : analyse du territoire et de la
morphologie du contexte, carte de la visibilité
des installations, carte des éléments
de patrimoine, du paysage…
L’amélioration de l’efficacité énergétique
représente un élément important des mesures
nécessaires pour respecter le protocole
de Kyoto. Toutefois, il faut aussi s’interroger
sur le rôle qu’assume le patrimoine historique
dans l’amélioration de la performance
énergétique des bâtiments, sur la manière
de réaliser des économies d’énergie et sur les
actions possibles. Une partie du patrimoine
se compose d’ensembles de bâtiments qui
définissent la spécificité et la mémoire historique
d’un lieu particulier. Aussi, il est très important
de sensibiliser les maîtres d’œuvre à la
compréhension de la nature et la spécificité
d’un bâtiment, et de son inscription dans
le paysage car les centres historiques
se caractérisent par une grande fragilité
qui les rend vulnérables même à des
changements minimes.
En Italie, environ 40 % de la consommation
énergétique ainsi que des émissions de gaz
à effet de serre proviennent des édifices
résidentiels et du secteur tertiaire. Les études
montrent que les constructions réalisées
entre 1948 et 1978 sont particulièrement
53
actes du colloque
énergétivores et c’est durant cette période
que l’activité de construction a été la plus
dynamique. Environ 20 % des habitations
datent d’avant 1919 et 50 % ont été construites
entre 1946 et 1981. La localisation géographique
représente un facteur de différenciation entre
modes de chauffage, les installations centralisées
étant principalement concentrées au nord
du pays. Par contre, dans le sud et les îles, la
consommation énergétique pour la climatisation
représente un poste important qui connaît
une forte croissance. Environ 7 millions
d’édifices résidentiels, distribués de manière
homogène sur le territoire, ont des murs
portants. La transmission thermique de ces
bâtiments est en moyenne inférieure de 20 %
aux bâtiments en béton armé. La majorité
des bâtiments historiques construits avant
1919 présentent de bonnes performances
énergétiques. Les questions liées à la
performance énergétique de ce patrimoine
sont particulièrement intéressantes à l’échelle
urbaine et territoriale. Le tissu urbain,
les matériaux utilisés, l’organisation de l’espace
influent ponctuellement sur le bâtiment,
mais aussi sur le microclimat. Les choix
de l’exposition, du traitement des surfaces,
de l’articulation du tissu urbain – pour favoriser
par exemple la création de barrières aux vents
dominants ou des formes de meilleure
ventilation –, sont tous des moyens intéressants
déjà introduits dans les bâtiments historiques.
Au contraire, la substitution du pavé traditionnel
par un revêtement d’asphalte représente un
élément à reconsidérer. Aujourd’hui, le manque
d’une culture éco-durable dans le processus
d’intervention est dommageable tout comme
l’absence de main-d’œuvre suffisamment
qualifiée pour intervenir en toute sécurité.
L’homme a toujours recherché les meilleures
solutions pour s’adapter à son milieu.
Il a accordé beaucoup d’attention au choix
du lieu d’implantation et a cherché à conjuguer
données climatiques, exposition, utilisation
judicieuse des matériaux locaux. C’est pourquoi
les centres historiques anciens témoignent
d’une recherche de performance énergétique
par des moyens particulièrement adaptés.
Pour conclure, l’optimisation de la performance
énergétique des édifices résidentiels me paraît
d’une importance évidente, car 70 % de la
population européenne vit dans les villes,
qui produisent 80 % du PIB, et l’activité
résidentielle est la grande consommatrice
d’énergie. Toutefois, nous ne pourrons fournir
54
session 2
de réponse convenable à l’échelle urbaine
si nous n’œuvrons pas à une sensibilisation
du public et à une reconsidération de nos
modes de vie et des structures urbaines.
La performance énergétique ne peut être
abordée que de manière holistique.
Par ailleurs, le rôle du législateur me semble
névralgique pour définir des règles et influer
sur les comportements. De même, les actions
de sensibilisation doivent être constantes
pour conduire à une utilisation responsable
des ressources énergétiques et mieux apprécier
ce que la nature nous prodigue et que nos
prédécesseurs avaient su mettre à profit.
A challenge for
historic buildings
in Austria, between
thermal renovation
and conservation
Un défi pour les bâtiments
historiques en Autriche,
entre rénovation thermique
et conservation
Johannes Sima
Architect, engineer at the Federal Office for Historic Monuments in Vienna, Austria
Résumé
Dans le domaine de la conservation des
monuments, nous sommes face à deux défis
majeurs et en apparence incompatibles :
répondre à une obligation légale de
préservation authentique de nos monuments,
d’une part, et faire face à d’ambitieux objectifs
en termes de réduction de notre consommation
d’énergie, d’autre part. Est-il possible de
préserver le paysage monumental autrichien
de manière authentique tout en réduisant
la consommation d’énergie ? L’Office Fédéral
pour la Préservation des Monuments est
actuellement confronté à cette problématique
et, avec l’aide de partenaires issus du monde de
la science et de la politique, étudie la question
avec la plus grande attention.
Les autorités en charge de la conservation
des monuments doivent aujourd’hui faire face
à la responsabilité sociale que représente la
réduction de la consommation énergétique.
Cela signifie que des moyens doivent être
trouvés afin d’adapter de façon raisonnée les
monuments aux nouvelles obligations.
L’unique solution réside dans une amélioration
de la performance énergétique qui soit
compatible avec les caractéristiques des
monuments, amélioration dont les solutions –
et elles sont nombreuses – devront être
appliquées avec raison et discrétion
et adaptés à leurs objets respectifs.
Des mesures doivent être prises
dans le domaine de la conservation
du patrimoine bâti en lien avec la performance
énergétique, mesures qui feraient usage
des caractéristiques des structures existantes,
telle que les propriétés de transfert d’humidité,
l’isolation interne optimisée ou le chauffage
de certaines parties des bâtiments.
Les méthodes de restauration utilisées
doivent être évaluées et, si nécessaire, adaptées.
C’est uniquement de cette façon que le niveau
de connaissances et la richesse des expériences
pourront croître de manière continue et
contribuer à protéger notre patrimoine
monumental de dommages irréversibles.
Concernant l’Autriche, des recommandations
ont été émises pour que la restauration
à l’identique soit privilégiée par rapport à toute
modification ou changement. Une typologie
des mesures a été introduite selon trois
niveaux d’acceptation : vert, jaune et rouge.
55
actes du colloque
– Those involved in conserving listed buildings
and protecting the environment share the goal
of long-term sustainable progress. This means
that we have to be very careful in handling both the
available resources and historical monuments, and
we have to promote both the best energy-related
technology and the goal of authentic conservation.
Those active in the field of conservation are faced
with two opposing challenges. It is their task
to ensure authentic conservation of historical
buildings, on the one hand, and on the other,
they are required to make large reductions in energy
consumption. There may be a long tradition of
energy saving measures as applied to buildings,
but historical buildings have to be approached with
sensitive and individually designed measures.
Progress toward reconciling the two goals
is only possible with close collaboration
between the owners and the various partners.
Austria’s historical buildings range in scale from
single buildings to urban complexes, in material from
wood construction to Gothic cathedrals, and in
architecture from farmhouses to blocks of flats.
Compared with other countries, a large percentage
of secular historical buildings are in regular use in
Austria. About 40,000 of a total 80,000 are listed,
and about 20,000 are thermally treated. The passage
of the centuries saw the development of building styles
that were optimally suited to the climatic conditions
and the available materials. However, the 20th
century saw a radical transformation of behaviour
and expectations of those living in historical buildings.
The price paid for the change in lifestyle was an
explosion in energy production. Now that manmade
climate change is accepted as a reality, measures are
being taken to reduce the amount of carbon being
discharged; the most effective way to do this is to
ensure that energy for heating and cooling is
preserved within the building for as long as possible.
The most economical way to do this is to apply
insulation to the outside of the building and to
insulate the windows. However, the energy
problem cannot be solved purely by technical
measures without changing our lifestyles.
56
session 2
The core task of a body concerned with preserving
historical monuments is to preserve authenticity.
This relates not only to the exterior but to the entire
building. Despite their disagreements, all parties
agree that the building should be preserved through
use in accordance with its function and properly
maintained. Increasing energy efficiency can best be
pursued through circumspect measures that improve
the existing indoor conditions, thus resulting in
improvements for all concerned. The most
important goal for the future is to lay down
standards and guidelines calculated to protect
historic buildings from irrevocable harm.
The European directive allows for dispensations
for listed buildings. Austria has allowed the concrete
definition of measures to the provinces concerned,
meaning that there are nine different versions
of the regulation. Further, all matters concerning
buildings are in the hands of the provinces, while
the preservation of listed buildings is the
responsibility of the federal state.
must include the elimination of defects, the carrying
out of repairs and the restoration of original functions.
Rehabilitation, in other words, must be prioritised
over change and replacement. Sixth, replacements
are to be made in the same materials as the original.
Seventh, as historical buildings are generally not ideal
in construction or use, it is important to use faulttolerant methods. Finally, individual and customdesigned solutions must be prioritised over
standardised measures, but historical buildings
should not be used for testing risky measures.
Following the general principles, a checklist
is included to determine whether or not specific
measures can be approved. This will help
all parties involved to reach their decisions:
Approved or green methods involve little or no
change to the fabric of the building. These include
reduction of building usage through conscious
behavioural changes, remedying of defects in doors
and windows, improvement of insulation through
adequate drying, insulation of ceilings and the
heat distribution, and changing energy sources.
Yellow changes are changes to the fabric, meaning
approval in certain circumstances, because more
elaborate planning is involved. These include
structural and interior insulation, roof insulation,
upgrading of windows, and changeover to radiant
heat and automatic ventilation.
Red changes involve great and serious change
to the fabric, so approval can only be given
in extreme and exceptional cases, such as
external insulation, new windows and doors,
visible solar collectors, or alterations to walls.
Therefore, there is scope for restoring
historical buildings, and conservation
is not necessarily opposed to all changes.
Every historical building must be seen
as a specific case and given precise
consideration. Noticeable results and
long-term solutions are not provided
by standardised solutions, but rather
by packages of measures specifically designed
for the historical building. When done properly,
renovation serves the cause of preserving
the building in the long term; it is a complicated
process but a perfectly feasible one, given that
the buildings concerned only represent 1%
of Austria’s total. However, the concepts
can also extend to the other 99% as well.
The implementation of specific packages
of measures must be reinforced by regulations
outside the specific field of monument protection.
p56 : Graz - quartier historique/
Graz – historic district
p57 : Mauvais traitements de façades/
Wrong facade treatments
Generous grants are offered for residential buildings,
but if the Office does not agree to a certain change,
the applicant can lose the subsidy. Furthermore, the
budget only allows for isolated projects. This situation
leads to delays, misunderstandings and resentments.
Therefore, the Office is pressing for historic
monuments to be made a special category in the
area of renovation. We are engaging in a dialogue
with the provincial authorities responsible for grants
in view of this situation, and are working out a set of
guidelines for restoration. The guidelines present
the basic principles for optimising energy
consumption in historic buildings. The first goal
has to be the conservation of the original building.
Second, plans are not to be drawn up until an analysis
has been made of the condition of the building. Third,
this analysis enables a comprehensive project for the
building, as opposed to one composed of isolated
measures. Fourth, standardised goals cannot be set
for historic building renovation; goal-setting has
to be done in the light of the behaviour of those using
the building. Fifth, the first measures to be taken
57
actes du colloque
session 2
The European energy
legislation and impact
on built cultural
heritage in Norway
Les directives européennes
et leur application au patrimoine
culturel en Norvège
Terje Nypan
President of the European Heritage Legal Forum secretariat and Senior Councillor
at the Directorate for cultural heritage, Ministry of Environment, Norway
Résumé
Les bâtiments classés ne représentent qu’environ
1% des bâtiments anciens et les exigences de
performances énergétiques fixées par la Directive
européenne de 2010, selon son article 4, ne
s’appliquent pas aux bâtiments «officiellement
protégés». Cependant, un système gradué serait
plus adapté à toute la diversité du patrimoine bâti
en distinguant des édifices sans modifications
possibles, des bâtiments sujets seulement
à des modifications mineures et des bâtiments
où elles seraient permises.
Recherches et expérimentations démontrent
qu’il est possible d’améliorer considérablement
l’efficacité énergétique du patrimoine sans
dénaturer sa valeur historique, si l’on ne
considère pas uniquement les consommations
d’énergie liées à l’usage mais aussi les effets
environnementaux sur l’ensemble du cycle
de vie des constructions. Aussi, vaut-il mieux
rénover, ou démolir et reconstruire les
bâtiments anciens inefficaces en énergie,
avec des conséquences différentes en matière
d’emplois dans ce secteur ?
La nouvelle directive a permis certains
assouplissements, mais elle entraîne cependant
différents effets néfastes pour le patrimoine
comme les certificats de performance
énergétique établis d’après calculs et non
sur la base des consommations observées.
Les défis qui nous attendent, c’est de réussir
à construire demain des bâtiments neufs
bien plus économes en énergie et, préserver
et mettre en valeur les bâtiments patrimoniaux
sur lesquels repose une économie du secteur
touristique en Europe, à hauteur de 404
milliards d’euros par an, avec quelques
8 millions d’emplois à la clé.
Il existe en Norvège trois ensembles de règles :
au niveau national, la législation sur l’urbanisme
et les bâtiments ainsi que la réglementation
technique, et au niveau local, les règles relatives
à l’approbation ou au refus d’interventions
sur les bâtiments existants.
Les pays réunis dans le cadre du CEN TC
346 ont décidé de travailler à l’élaboration d’une
norme CEN relative aux méthodes de calcul des
consommations, aux certificats d’efficacité
énergétique et à des mesures spécifiques
pour les bâtiments historiques protégés.
58
for measuring and calculating energy use.
In practice the legislation refers to procedures
and targets that are not determined and the directive
text states: ’once the framework is in place’.
– Protected buildings account to only 1%
of old buildings. The exemption specified
in the 2010 directive somehow concerns
but these buildings. I think that in order
to protect all houses of historical interest
a scaled system should be favoured, with if
possible buildings that cannot undergo any changes,
others in historical areas that could undergo minor
changes, and a third category –without any legal
status– which could suffer important modifications
as long as facades are not affected.
The legal basis for national heritage policies
and exemptions to EU legislation is in art. 2, 6,
114, 36, 34 and 35 of the Treaty of the European
Union (Lisbon treaty).
In the Energy Performance for Buildings
Directive (EPBD), article 4 is an exemption
for ’officially protected buildings’ if energy efficiency
measures ’unacceptably alter the building’s
character’. Brussels cannot mandate which buildings
are protected, such decisions are for the national
governments. Who decides what an ’unacceptable
alteration of a building’s character’ is?
The first drafts of the EPBD contained a clause
forbidding public spending for buildings that did
not conform to energy requirements after 2014.
This would have made it impossible for governments
to give money to heritage buildings. The EHLF
worked to remove it. It disappeared.
The energy demands are applicable when a major
renovation is made. Major renovation is defined
in Article 2.10 as more than 25% of the value
of the building (excluding the land value) or works
affecting more than 25% of the building envelope
surface. Governments can choose which method
they wish to apply.
The EPBD is a framework directive; it refers
to the applications of existing CEN standards
Energy performance to date has been calculated
and interpreted in very disadvantageous way
for heritage buildings. The energy performance
certificate shall include the energy
performance of the building which can be
calculated theoretically, i.e. not measured.
Examples of theoretical calculations do not
reflect the empirical energy efficiency of a
historic house. This is a danger for historic houses.
Better models must be developed. In situ empirical
measurements are allowed. The calculation
and issuing of Certificates will be done by private
consultants. With the Certificate, the owner receives
a list of (advised) measures to undertake to increase
energy efficiency. A historic house owner will not be
advised to conserve and improve existing windows.
Such options are not in the guidelines. He will be
advised to change windows. The owner will easily
end up buying new plastic windows as these are
cheaper than new wooden windows.
Norwegian legislation consists of three parts:
the Planning and Building legislation (PBL),
the Technical Building regulations and the
Guidelines for approval or refusal of building
interventions at the municipal level. The PBL
demands that historical, architectural or cultural
value is preserved in external construction works.
When changes are made to existing buildings, (…)
the municipality shall ensure that the historical,
architectural or cultural value relating to external
construction works, as far as possible, are preserved.
The municipality may grant permission for change
in use of existing structures and the necessary
reconstruction and rehabilitation, even where
it is not possible to adapt the structure to energy
demands without disproportionate costs (art. 31).
Who decides? In Norway such questions will be
referred to our office. Any intervention shall be
executed so that it includes good visual qualities
in relation to the built and natural environment.
Visual appearance is a parameter by which to assess
changes to building exteriors. Where the older
preservation worthy fireplaces are ’necessary’
for interior design of cultural-historical,
antiquarian or listed building protection
worthy fireplaces may still be used.
Chapter 14 covers energy and when energy
requirements are not consistent with preserving
cultural and heritage values the energy
requirements, energy demands can be dispensed
59
actes du colloque
session 2
with. Conservation policies are given priority.
My office decides.
The responsible for maintenance is the owner.
Changes and adjustments to the building may be
granted only when they will not negatively affect
the building and features from a health and safety,
environmental or conservation point of view.
This gives the heritage authorities a wide field
of discretion and real power. What municipalities
must consider, from the conservation point
of view, is defined by the Guidelines.
Energy, research and experience show
that considerable improvement of energy
efficiency in historic houses without damage
to their historic appearance is possible.
The most efficient intervention is to install
windows with low-energy coating.
Second is installing floor insulation, and third
is installation of temperature controlled heating
systems. Insulation of roof and floor, improving
the windows and temperature management
yield 60-80% improvement in efficiency.
An improvement of up to 90% can be achieved
by moving to more environmentally efficient
energy sources.
Measure
before
kWh/ yr.
after
kWh/ yr.
%
reduction
%
accumulated
measure name
1
68 200,00
63 900,00
6,30
6,30
Closing and insulating
draught fair leakages
2
63 900,00
58 800,00
7,98
14,29
Insulation joisting between
heated space and cold loft
3
58 800,00
46 400,00
21,09
35,37
Insulation floor against
old basement
4
46 400,00
30 600,00
34,05
69,43
Installation 1 layer windows
Low Energy coating
5
30 600,00
26 800,00
12,42
In 1992 the energy efficiency legislation included
rules that would effectively forbid construction
of log buildings. We commissioned a life-cycle study
of a traditional log house compared with a modern
insulated wood-frame house to assess the energy
and environmental impacts from the two different
construction systems. The conclusion was that the
traditional building (log house) was not less energy
efficient in a life-cycle perspective including
constituent materials. The regulations were changed.
Also in the updated legislation energy demands for
log houses are different from modern buildings.
Fifteen years after the research project new log
houses are popular and the construction is an
important local economic activity and constitutes
a pool of skilled craftsmen for historic buildings.
Taking part in the public debate
and correcting disinformation
The government agency for energy efficiency
promotes and subsidises efficiency measures.
This agency stated that 40% of heat loss occurs
through windows in advertising campaign. My office
stated in newspapers that this information is a lie.
It is not true since for most historic buildings, the loss
60
81,84
Installation new temperature
control system el-heating
is lower. It was necessary for the heritage authorities
to be more aggressive in defence of historic buildings.
Subsidies for energy improvements are to change
windows, not to improve existing windows. It is
(most often) more costly to renovate old windows
than put in new ones, due to manpower costs.
To change this we refer to research from the 1990’s.
Research concluded that the smallest negative
overall environmental impact occurs if old windows
are supplied with a single-glazed inner frame.
The second best option is old windows supplied
with a double-glazed inner frame. The effects
considered environmental categories, such as global
warming, acidification, photo-oxidant formation,
euthrophication, and fossil fuel consumption, over
a period of 90 years. However if we look only at
the total operative energy consumption over
90 years it is 15% higher for windows supplied
with an inner frame with single- or double-glazing
compared to new windows with energy glass.
Is it an appropriate environmental response
to consider only operative energy use without
considering the total environment effect?
Tear it down and built new?
Tear down all the old energy inefficient
houses and build new efficient ones and the
short term energy consumption will increase.
How much energy is used to demolish, move to a
waste dump, and produce new building materials,
transport and construct compared to reuse and
improvement of existing construction? We do not
have exact figures here and propose European
cooperation to get these facts. To demolish and
build new produces 1200% more waste than
rehabilitation/reuse. The shorter life cycle of modern
materials compared to reuse should be considered.
New building materials are more energy intensive.
Modern materials are increasingly composite
materials and are a waste treatment challenge.
This approach gives a better overall environmental
development, still saves huge amounts of energy
while saving historic built environments.
Historic rehabilitation: 30% of cost materials,
70% manpower. New construction: 50% of costs
materials and 50% manpower. Manpower is the
most expensive component. It is cheaper to use
more industrial materials and fewer people.
Yet Europe’s biggest challenge, excepting
environment, is unemployment! The positive
development for employment by reuse and
improvement of historic houses is important;
many jobs can be created. This demands more
local natural materials than industrial materials,
generates local employment and reduces foreign
spending. The International Labour Organization
and the World Bank agree.
Challenges ahead
CEN TC 346 will develop a CEN standard
for energy calculation, efficiency certificates
and proposed measures for historic and protected
buildings. The Directive says that CEN standards
shall be used. Improved calculation methods take
account of historic houses based on empirical facts.
Certificates include recommendations for cost
effective improvements specific for historic buildings.
in waste and a future waste problem treating the
modern building materials. The environment effects
could strengthen the negative development.
The needed reduction in energy use in buildings
can just as effectively be achieved by conservation
and improvement of (most) existing buildings
while having a more positive impact on the
environment issue and energy use in a shorter
term perspective. Society will build new and more
energy efficient buildings, but why where there
are existing buildings and especially if these
buildings have a historic value?
Stéphane DEMETER
Nous devons en effet faire appel à nos
compétences pour que chacun se saisisse,
dans ce domaine, de cette question
et ne la laisse pas entre les mains des spécialistes
de la transposition, plutôt préoccupés
par l’aspect environnemental. Patrimoine
et environnement ne sont pas forcément
très proches au sein des différentes structures
administratives, ce qui peut poser problème
étant donné l’étendue du champ d’application
de cette directive. Je partage votre plaidoyer
à tous pour la réalisation de mesures réelles
de la performance énergétique in situ.
Par ailleurs, la question évoquée sur la pointe
de l’iceberg que représente le patrimoine
classé et protégé me paraît également
très intéressante, d’autant que les listes
de patrimoine sont appelées à être remises
à jour. Enfin, je tiens à remercier Seija
Linnanmäki de nous avoir remis en mémoire
la Charte de Venise et de revenir ainsi
aux fondamentaux. Merci à tous.
Transposing the directive into national
legislation can have unexpected consequences.
When transposed in Slovenia, article 4 disappeared.
The Ministry of Culture noticed this afterwards,
sounded the alarm and two ministries are now
trying to rectify this mistake.
In the short term we risk increasing energy use to
demolish old buildings and produce new buildings
and the new building materials. The historic
environments which attract tourists and generate
a turnover of 404 billion Euros per year and support
at least 8 million jobs are at risk. Add a huge increase
61
actes du colloque
session 2
Débat
Est-ce que cela est un moyen
d’améliorer les choses
pour le patrimoine bâti ?
Discussion
Terje NYPAN,
Conseiller culturel à la Direction
du patrimoine de Norvège,
Président du secrétariat du
European Heritage Legal Forum
Le débat est animé par Mireille Grubert, directrice de l’Ecole de Chaillot,
Cité de l’architecture et du patrimoine.
Discussion conducted by Mireille Grubert, Head of the Ecole de Chaillot, Paris
Mireille GRUBERT
Je vous remercie pour
ces interventions à la fois
riches et diverses. Je relève
certains points communs
dans la transposition de la
directive par les Etatsmembres. Les exemples
d’aujourd’hui, quoique peu
nombreux, me paraissent
représentatifs des mouvements
de fonds qui se dessinent à
l’échelle européenne. Cette
nouvelle directive doit être
mise en perspective avec
l’ensemble de la législation
communautaire et celles des
Etats-membres. Une des leçons
que je retire de cette
présentation est la nécessité
de disposer d’une expertise
professionnelle à tous les
niveaux, à même de distinguer
les éléments de qualité
du patrimoine et d’identifier
les niveaux de protection
évoqués dans les textes.
Cette nécessité d’expertise
entraîne un fort besoin de
formation. Il est urgent
d’identifier les qualités
énergétiques du bâti ancien.
Plusieurs programmes en
France s’y attellent déjà.
Ces démarches de recherche
existent aussi dans d’autres
pays. L’urgence de cette
approche est accentuée par
la disparition rapide du
patrimoine. On peut espérer
qu’à l’avenir, lorsque les
qualités techniques, sociales,
économiques, à la fois à court
62
et long terme, du bâti ancien
seront mises en lumière,
une directive européenne
pourra préconiser de
promouvoir certains
dispositifs traditionnels
dans la construction neuve.
Ce type de pratiques existe,
comme vous le savez,
mais n’est pas reconnu.
C’est à ce dialogue et à cette
reconnaissance mutuelle
qu’il nous faut œuvrer.
François-Régis BACH,
Société pour la protection
des paysages et de l’esthétique
de la France
L’intervention d’Elvira
Petroncelli m’a paru très
intéressante. En particulier,
elle porte un regard vigilant
sur les incitations et aides
de l’Etat. Quelle est la situation
en Italie en matière de
photovoltaïque ? En France,
le gouvernement peine
à définir une stratégie claire.
Il vient de promulguer
le troisième arrêté ministériel
de changement des tarifs
d’achat de l’électricité
photovoltaïque en un an,
et le rachat de l’électricité
photovoltaïque à des tarifs
différents entre le jour
et la nuit entraîne une forte
spéculation.
Elvira PETRONCELLI,
Architecte, professeur
à l’Université de Naples
L’Etat a défini plusieurs types
d’incitation en faveur de
l’électricité photovoltaïque
afin de sensibiliser
la population. Entre autres,
l’Italie a introduit des tarifs
horaires différenciés pour
rationaliser la gestion du
réseau et inciter les usagers
à des comportements durables.
Cependant, l’audience dont
bénéficie ce programme
en Italie est très limitée.
Caroline D’ASSAY,
Présidente de l’Association
PRO PATRIMONIO
En Roumanie, il est très
difficile d’imposer à la
population de conserver
un monument historique et de
respecter des réglementations
souvent mal faites, ce qui pose
de vrais problèmes.
Michael VIEHHAUSER,
Urbaniste, aménagement
régional, Stockholm
Un certain nombre
de pays ont des approches
différentes, cependant le
problème est le même partout,
celui d’économiser l’énergie.
L’efficacité est le mot-clé,
mais je pense que cela est
une mauvaise approche
car nous devrions plutôt
parler pour le patrimoine
bâti de suffisance. Signer
un contrat de performance
énergétique n’est pas acheter
de l’énergie mais acheter
un degré de température
de chauffage sans s’interroger
sur ceux qui fournissent
cette performance.
Vous devez vous rappeler
que l’objectif est de réduire
la consommation d’énergie
des bâtiments dans un temps
donné et que la conservation
du patrimoine bâti est un
objectif différent. La réduction
des émissions de gaz à effet
de serre est un tsunami
politique que nous devons
prendre en compte. Cela ne
concerne pas vraiment les
monuments historiques mais
tous les autres bâtiments. Je
ne suis pas certain que des
mesures pesant sur le marché,
seules, seraient suffisantes.
Cela pourrait se faire si les
propriétaires de bâtiment
présentant de mauvaises
performances devaient payer
plus que ceux de bâtiment
à faible consommation.
Cependant, cela n’a rien à voir
avec la façon dont on parvient
à réduire la consommation.
Les prix des énergies vont
croître et les usagers vont
venir vers nous pour demander
qu’on les aide.
Isabelle PALLOT-FROSSARD,
Directrice du Laboratoire
de recherche des monuments
historiques au ministère
de la Culture
La démarche consistant
à mesurer précisément
l’efficacité énergétique des
bâtiments anciens me paraît
aller dans le bon sens. Jusqu’à
présent, deux approches
s’opposaient. Soit le bâti ancien
était totalement discrédité, soit
il constituait une sorte d’idéal
architectural. Or les normes
de confort et de préservation
de l’environnement se sont
largement modifiées.
Le programme BATAN
me semble très important
pour réaliser un point de la
situation. Un scientifique
de l’Université de York,
Roy Newton, a démontré
dans les années 60 que le
comportement énergétique
de la cathédrale de York
n’était pas si mauvais grâce
à la captation de chaleur
durant le jour, restituée
durant la nuit. Certains
organismes de recherche
disposent déjà de
connaissances qu’il nous
faut rassembler, dans l’idée
générale qu’il vaut mieux
intégrer le patrimoine, qu’il
soit protégé ou non, plutôt
que de le classer dans les
exceptions. Une telle solution
pourrait aboutir au paradoxe
d’un traitement inégalitaire
des bâtiments. Mieux vaut bien
connaître les performances
énergétiques du patrimoine
bâti, pour ensuite, aller dans le
sens de l’adaptation acceptable
du patrimoine bâti à ces
nouvelles contraintes
énergétiques.
Olivier ECALLE,
Société Pyraine
J’ai fondé un bureau d’études
thermiques. Je suis satisfait
de l’accent mis sur la
modélisation, qui nécessite
le recours à des logiciels
sophistiqués et le passage
par des bureaux d’études,
seuls à maîtriser leur
utilisation. Toutefois, un
modèle peut fournir n’importe
quelles conclusions selon
les paramètres pris en compte.
C’est toute la difficulté
des études portant sur
les bâtiments anciens.
Avec la croissance de ce
marché, la qualité des études
risque de s’en ressentir.
Mieux vaudrait réaliser
moins d’études et disposer
de plus de gens de terrain,
pragmatiques et censés,
qui me paraissent mieux
à même d’aider le client à avoir
une vision thermique et à faire
les choix les plus adaptés.
Malory CHERY,
Architecte des bâtiments
de France
La loi Grenelle envoie un
double message. D’une part,
elle promeut l’amélioration
thermique du bâti ancien ;
d’autre part, elle remet en
cause l’avis de l’Architecte
des bâtiments de France.
En France, le système
de gestion du patrimoine
s’appuyait à la fois sur des lois
de protection et sur une
administration. Aujourd’hui,
cette administration est
malmenée. L’avis conforme
de l’Architecte des bâtiments
de France a été rétabli,
mais avec une procédure de
recours qui crée, à mon sens,
une instabilité juridique.
Terje NYPAN
Pour revenir à l’article 4
de la directive européenne,
il apparaît comme un
mécanisme de défense.
Sans cette possibilité
d’exception, nous aurions
dû nous soumettre à toutes
les fantaisies des industriels
du bâtiment comme des
technocrates, sans aucun
recours. Il faut bien
comprendre que nous
ne sommes pas opposés
à l’idée d’améliorer l’efficacité
énergétique des bâtiments.
Cependant, certains bâtiments
ne s’y prêtent pas.
Tout Paris peut être concerné
par l’article 4, mais il faut
néanmoins améliorer
l’efficacité énergétique de
nombreux bâtiments, sans
détruire l’atmosphère et la
qualité de vie de la ville.
63
actes du colloque
En revanche, il est évident
qu’aucun chantier
d’importance ne sera entrepris
dans un bâtiment historique
comme Notre-Dame de Paris.
C’est cette différence qu’il faut
souligner et clarifier dans les
textes législatifs.
Mireille GRUBERT ,
Cette clarification doit-elle
être le fruit d’une démarche
commune à l’échelle de
l’Europe, ou relève-t-elle de
la subsidiarité et doit-elle
s’effectuer plutôt au niveau
national ?
Terje NYPAN
L’un n’empêche pas l’autre.
Il faut travailler en partenariat
pour essayer de mettre en
évidence des synergies.
Cependant, en fin de compte,
chaque nation doit pouvoir
décider pour elle-même
comment elle souhaite
appliquer cette démarche.
Michèle PRATS,
Vice-présidente ICOMOS France
Je pense que le problème
principal de l’article 4, auquel
nous sommes confrontés,
est celui de la définition
du patrimoine. En effet,
les définitions divergent :
pour certains, le patrimoine
renvoie exclusivement aux
monuments historiques.
La France et l’Italie défendent
une conception plus large.
Les quelques monuments
insignes ne posent pas de
problème particulier.
En revanche, Paris dans
son ensemble est plus difficile
à traiter, car le patrimoine
parisien intègre non seulement
l’architecture des façades,
mais aussi la structure urbaine.
Ces ensembles construits
de manière homogène doivent
être respectés. Il en est de
même pour de nombreuses
autres villes, mais aussi
64
session 2
pour l’habitat rural
ou les villages perchés.
Ce patrimoine auquel nous
sommes tous attachés attire
90 millions de visiteurs
par an. Il doit à la fois faire
l’objet d’une protection et
d’une amélioration de ses
performances énergétiques,
sans le dénaturer. Cela pose
toute une série de problèmes
techniques, mais aussi de
difficultés en termes de
formation, car il faut disposer
de personnes de terrain qui
connaissent les matériaux
traditionnels, très différents
des matériaux inertes d’aprèsguerre. Nous devons élaborer
des solutions non pas globales,
mais adaptées à chaque type de
bâti. Toute la difficulté est là.
Georges ZOUAIN,
GAIA Heritage
J’appartiens à l’équipe
de gestion du programme
Euromed Heritage.
L’intervention précédente
m’a fortement interpellé
en considérant la ville comme
un monument. Je pense qu’il
y a là matière à réflexion.
Le patrimoine urbain
comprend également les
emprises publiques, très
grandes consommatrices
d’énergie. La performance
énergétique du patrimoine
urbain relève ainsi de l’Etat
lui-même, qui a un devoir
de gestion de ce domaine
public patrimonial. Or, les
méthodes et les considérations
de gestion et de réduction de
la consommation d’énergie
diffèrent totalement de
celles que peut mettre en
œuvre un particulier. Ainsi,
l’amélioration de l’efficacité
énergétique se joue à plusieurs
niveaux. Le niveau individuel
est étroitement rattaché au
niveau global. J’ignore à quel
point peut jouer la liberté de
l’individu dans un système
patrimonial aussi complexe
que celui d’une ville. Il s’agit
de questions récurrentes
auxquelles il n’existe pas
de réponse simple.
Philippe LAMOURET,
Architecte des bâtiments
de France
Je rebondis sur la question
de la définition de l’efficacité
énergétique et de son
application aux bâtiments
traditionnels. La mise
en place, en France, des
Aires de valorisation de
l’architecture et du patrimoine,
les AVAP, qui incluent une
dimension énergétique et
environnementale, va nous
obliger à codifier les types
de traitements énergétiques
dans le patrimoine ancien.
Cet exercice risque de s’avérer
assez redoutable. Il demeure
néanmoins nécessaire si nous
ne voulons pas exclure
les centres historiques
de cette problématique,
alors que les citadins fuient
déjà trop souvent les centres
pour s’installer dans les
zones pavillonnaires très
consommatrices d’énergie
et d’espace.
Samir ABDULAC,
Vice-président ICOMOS France
A la fin de ce débat, il me
semble que, autant il est facile
de modéliser l’architecture
postérieure aux années 50
et 60, caractérisée par des
constructions de logements
et de bureaux à très grande
échelle, autant il est difficile
d’établir une typologie et de
modéliser le comportement
thermique du bâti ancien.
Celui-ci, en effet, s’adaptait
à son contexte climatique
et topographique et à son
environnement construit
ou naturel. Nous étudions
des éléments individuels
dont nous vérifions
le comportement. La
réglementation prévoit
des possibilités de dérogation,
mais les aides financières
existantes jouent également
un rôle d’incitation vis-àvis des particuliers. Il faut
donc réussir à aider les
particuliers à mieux adapter
leur bâti sans passer par un
équipement technologique de
type photovoltaïque ou autre.
Cette évolution nécessite une
expertise encore à développer.
Malory CHERY,
Architecte des bâtiments
de France
Il faudrait mettre en place
une évaluation des effets
pervers des aides de l’Etat.
Par exemple, les aides à
l’installation de panneaux
photovoltaïques sont versées
sans comprendre un volet
d’isolation de la maison.
En outre, elles entraînent
aussi une augmentation de la
consommation d’électricité,
qui paraît gratuite. Enfin,
en France, le tarif d’achat de
l’électricité est plus élevé
si le photovoltaïque est intégré
à la toiture, alors qu’il peut être
plus pertinent de l’installer
en couverture d’une terrasse.
Ainsi la réglementation et les
dispositifs incitatifs peuvent
s’avérer contre-productifs.
Il faudrait que des retours
d’expérience soient pris
en compte.
Etienne BRULET,
Architecte
En tant que professionnel,
je souhaite souligner la
confusion qui règne malgré
la profusion de colloques
et de formations. Un pays
en avance sur le plan
environnemental comme
l’Allemagne abandonne
déjà des pratiques que nous
commençons tout juste
à prescrire. Les diagnostics
ne sont pas encore prêts,
non plus que les modélisations.
La situation est très
incohérente, et nous aimerions
être plus soutenus.
Marie-Laure VERROUST,
revue La Demeure Historique
L’expérience m’a montré
que les habitants des
monuments historiques
peuvent se révéler de
très bons guides, car ils
disposent d’une expérience
concrète et d’une connaissance
des aléas des climats
et des aménagements
qu’il faudrait réaliser pour
optimiser les monuments
au niveau énergétique.
Kim VANGUERS,
Responsable Energy House
Manager, EREC
Je travaille pour le Conseil
Européen des Energies
Renouvelables. J’ai coordonné
un projet visant à promouvoir
des exemples de bâtiments
anciens intégrant une mesure
de l’efficacité énergétique et
l’utilisation de technologies
à énergie renouvelable.
Nous nous sommes appuyés
sur notre propre bâtiment,
qui date du XIX ème siècle
et fonctionne exclusivement
grâce aux énergies
renouvelables. En termes
d’acceptabilité, il est plus
que toléré, puisqu’en cinq ans,
nous avons accueilli presque
20 000 visiteurs. Nous avons
réalisé quatre autres études
de concept énergétique et
développé des outils pour les
architectes et les ingénieurs.
Ces recommandations sont
disponibles sur notre site
internet *. Ce projet nous
a permis d’initier un dialogue
avec les propriétaires publics
et privés de bâtiments
historiques pour améliorer
la qualité des interventions.
* http://www.erec.org/
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