Quel est le cadre légal et réglementaire du remplacement d`un

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Quel est le cadre légal et réglementaire
du remplacement d’un infirmier libéral par un autre infirmier ?
Quelles sont les procédures à suivre ?
En droit, on considère qu’il y a remplacement lorsqu’un infirmier suspendant provisoirement
son activité professionnelle, confie à un confrère ou une consoeur régulièrement autorisé(e)
la mission d’agir en ses lieux et place.
Le remplacement doit prendre la forme d’un contrat conclu entre professionnels de santé. A
cet égard, la loi prévoit qu’un contrat doit impérativement être établi pour tout remplacement
d’une durée supérieure de 24 heures. Il en va de même si le remplacement est d’une durée
inférieure à 24 heures mais répété1.
Les infirmiers peuvent soumettre au conseil de l'ordre les projets des contrats et avenants
ayant pour objet l'exercice de leur profession à l’Ordre. Le conseil de l'ordre doit faire
connaître ses observations dans le délai d'un mois. Tout infirmier demandant son inscription à l’Ordre doit en vertu de l’article L.4113-9 du code
de la santé publique transmettre ses contrats. Le défaut de communication constitue une faute disciplinaire susceptible d’entrainer une
sanction ou de motiver le refus d’inscription au tableau de l’ordre. 1. Dans quelles situations y a-t-il remplacement ? Le remplacement se définit comme l’acte par lequel un infirmier d’exercice libéral (le
remplacé) décide pour des raisons qui lui sont propres (congés, maladie, maternité,
formation professionnelle, autres, etc.) de faire gérer, à titre temporaire, le fonds libéral qu’il
exploite par l’un de ses confrères (le remplaçant) qu’il choisit librement.
Il ressort de cette définition que le contrat de remplacement n’est ni un contrat de travail, ni
un contrat de collaboration.
Différence entre contrat de remplacement et contrat de travail A la différence du contrat de travail, il n’existe pas de lien de subordination juridique dans le
contrat de remplacement.
Le remplaçant conserve sa pleine indépendance professionnelle dans l’exercice de son art.
La jurisprudence constante en la matière rappelle que le remplaçant n’accomplit pas son
remplacement sous le contrôle du remplacé mais qu’il agit bel et bien en lieu et place de
celui-ci.
L’article R. 4312-48 du code de la santé publique interdit aux infirmiers d’employer comme
salarié une autre infirmier, un aide soignant, une auxiliaire de puériculture ou un étudiant
infirmier.
Différence entre contrat de remplacement et contrat de collaboration. Le collaborateur libéral est celui qui dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale
exerce auprès d’un autre professionnel, personne physique ou morale, la même profession.
De fait, les collaborateurs peuvent avoir une clientèle propre (ce que le remplaçant ne peut
pas). De plus, le contrat de collaboration peut être un contrat à durée indéterminée, ce qui
n’est pas envisageable pour le contrat de remplacement.
1 Conformément à l’article R. 4312- 43 du Code de la santé publique et à l’article 5.2.3 de la Convention Nationale entre
l’Assurance Maladie et la profession infirmière.
1 Le contrat de remplacement est conclu pour une durée déterminée liée à l’indisponibilité
de l’infirmier remplacé : maternité, paternité, maladie, congés, formations, etc... Le
remplacement est donc par essence temporaire. La clause de fixation de la durée est une
clause essentielle du contrat. Cette clause doit préciser la date d’effet et la date de fin du
remplacement.
2. Qui remplace qui ? Sous quelles conditions ? Une infirmière interdite de délivrer des soins aux assurés sociaux ne peut pas être
remplacée et ne peut remplacer une autre infirmière en tant que remplaçante pendant la
durée de la sanction (article R4312-43 CSP).
Le remplaçant - qui peut être un infirmier exerçant déjà en libéral ou bien un infirmier n’ayant
pas de lieu de résidence professionnelle – doit, pour pouvoir exercer le remplacement,
justifier d’un certain nombre de conditions fixées par la convention nationale :
- justifier d’une expérience professionnelle de 18 mois, soit 2 400 heures de
travail effectif, dans les six années précédant la demande de remplacement
- être titulaire, s’il na pas de lieu de résidence professionnelle, d’une autorisation de
remplacement accordée par l’ARS de son lieu d’exercice, dont la durée maximale
est d’un an renouvelable2.
Pour obtenir l’autorisation en question l’intéressé doit adresser une demande manuscrite
ainsi que l’attestation fournie par la CPAM indiquant que l’intéressé remplit les conditions
d’expérience professionnelle. Le fait d’assurer un remplacement sans pouvoir produire
l’autorisation accordée par l’ARS est susceptible d’entraîner des poursuites judiciaires pour
exercice illégal de la profession d’infirmier.
3. A quoi s’obligent les parties ? a) Les obligations du remplacé Suspension provisoire :
Le remplacé s’engage, pendant toute la période du remplacement, à ne pas exercer
d’activité professionnelle infirmière à l’exception de son obligation de porter secours aux
malades ou blessés en péril (article R.4123-6 CSP) et de collaborer au dispositif de secours
mis en place en cas de sinistre ou de calamité (article R.4312-22 CSP).
Obligations d’information :
S’il exerce sous la forme d’une société civile professionnelle ou d’une société d’exercice
libéral, il doit en outre informer les membres de cette société.
Il doit également informer les organismes de sécurité sociale du nom de son remplaçant, de
la durée et des dates de remplacement. Si le remplaçant n’a pas de lieu de résidence
professionnelle, le remplacé doit également transmettre le numéro et la date de délivrance
de l’autorisation de remplacement accordé par l’ARS.
b) Les obligations du remplaçant Le remplaçant ne peut remplacer plus de deux infirmiers à la fois, y compris en cas de
remplacement au sein d’une association d’infirmiers ou d’un cabinet de groupe.
2 Article R4312‐44 du Code de la Santé publique 2 Avant le remplacement
L’inscription au tableau de l’Ordre :
Le remplaçant est tenu, comme tout professionnel habilité à exercer la profession
d’infirmière, d’être inscrit au tableau de l’Ordre des infirmiers et de faire connaître son
numéro d’inscription à la caisse d’assurance maladie. Compte tenu du caractère temporaire
et variant dans le temps des remplacements qui ne confèrent pas de résidence
professionnelle, l’inscription au tableau se fera auprès du Conseil départemental du lieu de
domicile.
L’attestation de l’assurance maladie :
Le remplaçant non titulaire d’une résidence professionnelle devra fournir à la CPAM des
pièces justificatives. En effet la CPAM doit disposer d’éléments afin d’autoriser l’usage de
feuilles de soins du remplacé par le remplaçant. Au vu de ces justificatifs, la CPAM délivrera
une attestation.
L’autorisation de l’ARS :
Sur la base de l’attestation fournie par la CPAM, et lorsque le remplaçant n’a pas de lieu
résidence professionnelle, il doit avoir sollicité auprès du Directeur de l’ARS de son domicile
une autorisation de remplacement dont la durée est d’un an, renouvelable.
Pendant le remplacement
Le lieu d’exercice :
Si le remplaçant n’a pas de lieu de résidence professionnelle, il effectue le remplacement au
lieu d’exercice professionnel de l’infirmier remplacé.
Si le remplaçant est un infirmier d’exercice libéral disposant d’un cabinet, les parties peuvent
convenir que le remplacement s’effectuera au sein du cabinet de ce dernier.
L’utilisation des feuilles de soins :
Au cours du remplacement, le remplaçant doit utiliser les feuilles de soins papier préidentifiées de l’infirmier remplacé en y ajoutant visiblement ses noms, prénoms, qualité
d’infirmier remplaçant et éventuellement son numéro d’autorisation de l’ARS.
En cas de tiers payant ou de télétransmission de feuilles de soins, l’infirmier remplaçant ne
doit pas utiliser sa propre carte de professionnel de santé (CPS) : il devra donc
télétransmettre en mode B2 (ou mode dégradé) et signera les feuilles de soins papiers.
La rétrocession d’honoraires :
L’une des principales clauses du contrat de remplacement a trait à la rétrocession des
honoraires : elle doit donc être rédigée avec soin.
En effet, au cours du remplacement, le remplaçant perçoit les honoraires pour le compte du
remplacé et les lui remet intégralement.
Ce dernier procède alors à une rétrocession d’honoraires au remplaçant et peut conserver
une somme forfaitaire correspondant aux frais de fonctionnement du cabinet (le loyer,
l’électricité, le téléphone, les locations, l’assurance des locaux et du matériel, le coût du
personnel, les produits d’entretien, les produits pharmaceutiques, les matériels à usage
unique, etc.).
Le montant ou le mode de calcul de la rétrocession des honoraires est fixé librement au
terme du contrat. En pratique, le calcul de la rétrocession oscille entre 5 et 10% du chiffre
d’affaires réalisé durant le remplacement.
2 Article R4312‐44 du Code de la Santé publique 3 4. Quelles responsabilités peuvent découler du remplacement ? a) La responsabilité du remplaçant
Conservant son indépendance professionnelle dans l’exercice de son art, l’infirmier
remplaçant encourt une responsabilité personnelle à raison par exemple de fautes commises
au cours du remplacement (maladresse, absence de contrôle du matériel mis à disposition,
etc.) Cette mise en cause de la responsabilité sera exercée par le patient s’estimant
insatisfait. Le remplaçant doit par conséquent être assuré personnellement en matière de
responsabilité civile professionnelle et doit fournir l’attestation d’assurance au remplacé dès
le début de la période de remplacement.
A l’égard du remplacé, le remplaçant peut également engager sa responsabilité dans la
mesure où il ne respecterait pas les engagements pris au regard du contrat de
remplacement.
b) La responsabilité du remplacé :
Le remplacé est responsable :
o au regard de ses patients quant au choix de son remplaçant, dans la mesure où il
doit confier ses patients à un professionnel à même de leur fournir des soins de
qualité,
o au regard du remplaçant dans la mesure où il doit lui remettre les clefs d’un
cabinet en bon état. Ainsi un remplacé a pu voir sa responsabilité mise en cause pour
avoir mis à disposition de son remplaçant un matériel professionnel défectueux.
o au regard du remplaçant en cas d’insuffisance d’information sur les soins
préalablement reçus par le patient (dans le souci de respect de l’obligation de
continuité des soins).
Il est à noter qu’un partage de responsabilité est envisageable dans la mesure où la faute de
l’un ne saurait être considérée comme exonératoire de la responsabilité de l’autre (ex :
légèreté du remplacé dans le choix du remplaçant et maladresse de ce dernier).
5. Que se passe-t-il à la fin du remplacement ? A l’issue de la période de remplacement, l'infirmier remplaçant abandonne l'ensemble de ses
activités de remplacement auprès de la clientèle de l'infirmier ou de l'infirmière remplacé.
Cela étant précisé, la fin du contrat amène deux questions principales : celle des honoraires
d’une part et celle de la clause de non concurrence d’autre part.
a) La clause de non concurrence
L’article R.4312-47 du code de la santé publique dispose qu’ « un infirmier ou une infirmière
qui a remplacé un autre infirmier ou une autre infirmière pendant une période totale
supérieure à trois mois ne doit pas, pendant une période de deux ans, s'installer dans un
cabinet où il pourrait entrer en concurrence directe avec l'infirmier ou l'infirmière remplacé, et
éventuellement avec les infirmiers ou les infirmières exerçant en association avec celui-ci, à
moins que le contrat de remplacement n'en dispose autrement ».
La clause de non concurrence peut faire l’objet d’aménagements contractuellement
consentis qui doivent, comme avenants au contrat initial, être transmis au conseil de l’Ordre.
Quelques recommandations doivent être apportées au regard de la jurisprudence : elles
tiennent principalement au fait que la clause de non-concurrence doit être limitée dans le
temps et dans l’espace.
2 Article R4312‐44 du Code de la Santé publique 4 Cette réglementation professionnelle autorisera le prononcé de sanctions disciplinaires en
cas de non respect des termes de cette clause pour manquement aux devoirs de la
confraternité, indépendamment des éventuels dommages-intérêts qui seraient dus en
réparation du préjudice subi par l’infirmier remplacé.
b) Restitution des locaux après utilisation
Pendant la durée du contrat de remplacement et pour les besoins de son exécution, le
remplaçant aura l'usage des locaux professionnels, installations et appareils que le remplacé
met à sa disposition. Il devra en faire usage « en bon père de famille ».
Compte tenu du caractère par nature provisoire de l'activité du remplaçant, celui-ci s'interdit
toute modification des lieux ou de leur destination.
Au terme du contrat, le remplaçant doit restituer les locaux, le matériel et le mobilier dans
l’état où il les aura trouvés lors du début du remplacement (une telle clause est à intégrer
dans le contrat et, dans un souci de sécurité, un état des lieux contradictoire avec inventaire
peut être réalisé en début et en fin de remplacement).
2 Article R4312‐44 du Code de la Santé publique 5 
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