Partie 2 : Les psychoses aigues de l`adolescent.

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Psychopathologie de l’enfant.
Les pathologies. Partie 2 : Les psychoses aigues de l’adolescent. Cours 7.
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Partie 2 : Les psychoses aigues de l’adolescent.
Elles recouvrent en partie les BDA (Bouffées Délirantes Aigues) qui ont la particularité d’évoluer très
aléatoirement.
I. La bouffée délirante aigue (BDA).
On se souvient que l’adjectif aigu est utilisé pour souligner la durée d’une part (dure de puis moins de 6 mois
par opposition aux pathologies chroniques) et la soudaineté, la brutalité de l’entrée en psychose. Dans le cas de
la BDA le début apparaît d’autant plus brutal que rien ne pouvait le laisser prévoir : Le délire est d’emblée
constituée, il se présente dans toute son ampleur dès le départ, il n’y a pas de construction progressive.
1) Thèmes repérés.
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Le corps surtout avec des craintes de modifications, des angoisses hypocondriaques etc…
L’intégrité et l’identité sexuelle.
Les problèmes de filiation (un matin votre ado se réveille et déclare être persuadé de n’être pas votre
enfant ! Ca doit faire tout drôle au bidou pour une maman !).
2) Mécanismes principaux.
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Interprétation.
Hallucinations psychiques et sensorielles.
Altération profonde de l’humeur avec des mouvements très intenses, très violents, une angoisse
puissante. Le sujet passe de la plus grande excitation à la prostration.
Le sujet a conscience de son délire et il est absolument fasciné par lui (tout comme son entourage), il
tente de le maîtrise mais il reste quand même relativement « satisfait » de ses productions délirantes
(oui bein à l’adolescence tout ce qui sort de l’ordinaire est le bienvenu). Il a donc une conscience
impuissante.
Il n’a pas de troubles de la conscience.
3) Principaux symptômes.
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Insomnie.
Troubles alimentaires.
Délires.
Labilité thymique.
Episodes catatoniques aigus : Inhibition motrice liée à la panique que provoque une trop forte angoisse
déstructurante.
A ces épisodes peuvent se substituer des périodes d’hyperactivité, surtout au niveau du cours de la
pensée.
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Pensées confuses sur des thèmes souvent paranoïaques ou mégalomaniaques (qui révèlent le conflit du
sujet => On s’en serait pas douté !).
4) Evolution.
Les BDA évoluent très rapidement et d’eux-mêmes, sans l’intervention d’aucune médication, elles peuvent
évoluer du pire (entrée en schizophrénie) au meilleur (épisode simple sans conséquences) en passant par les
récidives. L’évolution se fait de deux semaines de temps à trois mois.
- Soit les troubles cèdent et le sujet revient à son état clinique antérieur.
- Soit les troubles inaugurent une psychose chronique de type schizophrénie.
- Soit les troubles disparaissent et réapparaîtront plus tard.
5) Critères de diagnostic.
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Le début doit être brutal.
Les symptômes doivent être particulièrement exubérants.
Le tableau clinique doit être très diversifié.
La durée de l’épisode doit être très limitée. (On a vu : environ 3 mois).
6) Critères de pronostic.
C’est la partie la plus difficile avec cette pathologie. L’appréciation du pronostic repose sur 4 points.
a) Les antécédents du sujet.
Les éléments d’anamnèse sont très importants, on y voit souvent apparaître des comportements autrefois
banalisés (ou simplement ignorés) qui prennent alors tout leur sens : Retrait, isolement, solitude, difficultés
relationnelles, surinvestissement en secteurs, comportements phobiques, obsessionnels, rituels etc…La plupart
du temps ces signes témoignent de conflits psychiques non résolus durant la préadolescence.
A l’inverse le sujet peut présenter un CV d’adolescent parfait : Il n’a jamais manifesté le moindre signe conflit
mentalisé, il a été un adolescent facile qui a surmonté tous les conflits inhérents à cette période très facilement,
trop facilement même. Cette apparente aconflictualité correspond à un trop grand conformisme à
l’environnement, à une organisation plaquée, à un « faux self » (Winnicott) où l’adolescent se comporte d’une
certain façon sans jamais se structure en fonction de cela. En apparence, il possède des défenses névrotiques
« normales » mais cette pseudo cohérence défensive ne peut pas tenir le coup face aux exigences pulsionnelles
de la puberté. On a affaire à une idéale adaptation pathologique (comme quoi tous les excès se valent).
b) Age d’apparition.
Plus le trouble apparaît tôt plus le pronostic est sombre. Avant 15 ans : La majorité des évolutions sont
dramatiques (schizophrénie), pourquoi ? Parce que 15 ans ( ou 14 ou 16 selon les cas) le Moi du sujet est trop
fragile, le narcissisme de cette période ne permet pas au sujet d’articuler des défenses et il n’a pas les moyens de
faire face à la poussée pulsionnelle de cet âge. Lorsque les épisodes se déclarent tardivement, le Moi du sujet est
structuré mais les difficultés se situent alors au niveau des indentifications et de l’identité sexuelle.
c) Sémiologie.
Plus le sujet est euphorique et exubérant plus le pronostic sera positif. Il faut se méfier absolument de la pauvreté
des affects, ils sont de mauvaise augure. Les antécédents familiaux peuvent également compliquer la chose. On
peut parier sur une bonne évolution lorsque les BDA comme des réactions à des situations particulières
(déménagement par exemple).
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d) Les débuts de la schizophrénie.
40% des schizophrénies se présent comme de BDA.
• Symptômes particuliers.
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Angoisse diffuse et envahissante.
Bizarreries.
Froideur dans les relations.
Hallucinations psychiques.
Caractère étrange du délire (comme si c’était pas étrange un délire !), particulièrement abstrait,
imprégné de dogmatisme.
Troubles de la conscience discrets.
• Critères de confirmation du diagnostic d’après le DSM III-R.
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Présence d’au moins un des symptômes de la schizophrénie : Idées délirantes, hallucinations, troubles
du cours de la pensée.
Détérioration dans les différents domaines (relations sociales, travail ou soins personnels => Pas
d’hygiène, troubles alimentaires etc.).
Présence depuis au moins 6 mois d’une phase active.
Absence d’un syndrome dépressif ou maniaque antérieur au symptôme classique.
Survenue d’une phase active avant l’âge de 45 ans.
Absence d’une cause organique ou d’un retard mental.
• Evolution.
Le problème est liée à la période : L’adolescence est une phase de fortes perturbations donc l’évolution de la
schizophrénie est très incertaine, tout est possible, par conséquent il faut analyse attentivement deux paramètres :
Les antécédents du sujet et le fonctionnement mental.
Souvent le Moi du schizophrène est faible, extrêmement fragile parce que souffrant d’une profonde
désorganisation, cela s’exprime dans la précarité de l’équilibre émotionnel et affectif avec notamment une
intense labilité thymique, une angoisse envahissante qui pousse le sujet à rompre les liens affectifs, à s’isoler et à
désinvestir son corps ainsi que les processus de pensée.
Il va également affiché des positions tranchées, caricaturales, surtout des mouvements d’opposition. Il devient
égocentrique, il se projette complètement sur le monde, il ne le voit plus qu’à travers son propre intérieur.
• Critères de distinction adolescence/schizophrénie.
On a tendance à confondre les mécanismes psychiques de l’adolescence avec ceux de la schizophrénie or ils sont
très différents.
Adolescence
Contrôle de la souffrance.
Négation de la souffrance.
Contrôle des frustrations.
Structuration de la personnalité autour de la
culpabilité.
Schizophrénie
Rigidité.
Substitution de la culpabilité « normale » par la honte.
Conflits de honte, d’infériorité, d’abandon ou encore à thème
paranoïde.
Processus régressifs affectant le Moi et le Surmoi
II. Les formes particulières.
Il y en a deux : Les psychoses aigues liées à l’utilisation de drogues et les psychoses aigues infantiles.
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A. Drogues et épisodes psychotiques aigus.
Ces épisodes ne sont pas rares, selon les drogues, il y a deux effets particuliers :
1) L’effet schizo.
Il est provoqué par l’absorption d’hallucinogènes tels que le LSD ou la mescaline (revoyez Las Vegas Parano de
Terry Gilliams pour les effets de la Mescaline !). Le sujet est plongé dans un « voyage » onirique, il peut
expérimenter un sentiment de dépersonnalisation et une puissante angoisse de morcellement.
2) L’effet parano.
Il est provoqué par l’absorption d’amphétamines ou de coupes faim. Le délire est beaucoup plus intense que dans
l’effet schizo. Comment distingue-t-on le syndrome clinique de l’effet de la drogue ? Il faut attendre 24 heures,
si les trouble persiste, il y a du souci à se faire.
3) Evolutions.
Soit le sujet « revient » de son « trip » et tout fini bien, soit il ne revient pas du tout, soit il revient et son état
psychotique se remanifeste sans qu’il ne reprenne de drogues.
Dans le dernier cas, la personnalité du sujet risque de subir de profondes modifications qui débouchent sur un
état psychotique chronique de type schizophrénie ou encore une organisation borderline (état limite, voir le film
Girl Interrupted pour comprendre ce qu’est l’astructuration beaucoup étudiée par Bergeret).
Dans ce type d’évolution les effets des drogues rentrent en interaction avec la faiblesse du Moi, la drogue
distord les perceptions, elle les exagère au point que le sujet se sent dissolu. Le sujet perd le contrôle de son Moi
au-delà de la dissipation des effets.
B. Les psychoses aigues secondaires à des psychoses infantiles.
Il est rare de voir qu’un épisode aigu survienne à la suite d’une psychose infantile.
Le tableau clinique est très particulier :
- L’expression délirant est pauvre : relativement stable.
- Troubles du comportement.
- Troubles caractériels marquant une rupture avec l’état antérieur psychotique.
Pour l’enfant psychotique, l’adolescence est un passage traumatisant indépassable. On dit souvent que les
garçons sont plus affectés que les filles par ce traumatisme surtout en ce qui concerne les problèmes d’identité
sexuelle. Les remaniements psychiques caractéristiques de l’adolescence ne vont pas permettre à l’enfant
psychotique d’accéder à un niveau réellement génitalisé dans la relation d’objet.
III. Origines de la psychose ou Mécanismes psychiques.
On ne connaît absolument pas les origines de la psychose, on peut par contre décrire les mécanismes psychiques
sur lesquels elle se base (c’est en tout cas ce que nous dit la psychanalyse qui a bien sûr toujours une hypothèse
dans sa poche).
Les différentes hypothèses portent sur :
1) Le corps.
A l’adolescence le vécu physique est intense, l’émergence pulsionnelle va avoir des conséquences sur l’image de
soi et l’unité du sujet en est profondément bouleversée. La maturation de l’appareil génital renvoi à un profond
remaniement entre le Moi et les exigences pulsionnelles. C’est une cassure dans le développement et c’est
sûrement pour ça qu’on observe le retrait des psychotiques, ils s’auto orientent, ils se centrent sur eux-mêmes, il
somatisent, nourrissent des angoisses hypocondriaques… Autant de symptôme qui témoigne de leur tentative
d’investissement du corps. Un corps dont la dimension sexuée représente une large blessure narcissique. Le
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la pratique, ça donne le fort taux de suicide des psychotiques et l’automutilation).
2) L’identité.
Ce qui est très ébranlé c’est l’image du soi mais aussi la représentation d’Autrui en raison d’une relative
indifférenciation entre Soi et non Soi. Le Moi du sujet se dissous. Le sujet est dans un état de détresse et
d’angoisse. Les troubles de l’identité peuvent toucher plusieurs domaines :
1. L’identité sexuelle et la filiation.
2. La perte de contact avec la réalité, du sens de la réalité. Le sujet ne peut plus s’identifier à quoi
que ce soit, il a le sentiment d’être submergé par son angoisse. Progressivement il perd la
cohérence de sa personnalité, la notion de limite entre soi et extérieur est affaiblie (elle ne
disparaît jamais totalement).
3. Sentiment d’infériorité : Il envahi progressivement le Moi et il le désorganise. D’où vient-il ?
De la honte. Et c’est ce manque considérable d’amour pour soi qui génère les conflits et les
comportements mégalomaniaques. Le délire mégalomaniaque sert d’écran au sentiment de
vide, à l’importante sous-estimation du sujet.
3) Investissement narcissique, investissement objectal.
On compare avec l’adolescent en bonne santé : On sait qu’à l’adolescence c’est l’investissement narcissique qui
domine l’investissement objectal, la différence entre l’adolescent en bonne santé et le psychotique tient à
l’intensité de cet investissement narcissique. L’exacerbation de l’investissement narcissique se transforme
rapidement en position de repli chez le psychotique.
4) Les mécanismes psychotiques du Moi.
Le conflit se passe entre le Moi et la réalité externe, les mécanismes psychotiques du Moi ont donc pour but
d’effacer le conflit en tant que réalité externe et par conséquent le principal mécanisme de défense sera le déni.
5) Autour de la rupture psychotique.
La difficulté principale c’est l’intégration psychique du corps sexué. Il y a trois manifestations psychotiques.
a) Episode psychotique simple.
L’adolescent préserve un lien avec ses objets œdipiens intériorisés. Il ne romps par totalement avec la réalité, il
en rejette, en déni seulement un partie à travers cet épisode.
b) Zones de fonctionnement psychotiques.
L’adolescent vit les objets œdipiens intériorisés comme des persécuteurs, son corps sexué est aussi vécu sur ce
mode. Il a alors tendance à combattre ses persécuteurs en combattant son propre corps (l’anorexie en est un
exemple : Ce n’est pas une psychose, c’est une pathologie possèdent des zones de fonctionnement psychotiques
seulement).
c) Psychose sur le plan structural.
Le sujet remplace la réalité par une néo-réalité. Il n’est plus persécuté par son corps, il ne peut pas : Il ne l’investi
même pas. Il a consciemment détruit ses parents intériorisés en rompant tout contact avec la réalité.
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