Première partie: Introduction aux convertisseurs et aux

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Première partie:
Introduction aux convertisseurs
et aux transformateurs de puissance
I-6
I. Introduction aux convertisseurs
et aux transformateurs de puissance
Cette première partie comporte un seul chapitre, divisé en quatre points comme indiqué dans le
plan ci-dessous. Elle vise à détailler le contexte de la recherche.
Le premier point expose un bref historique de l'évolution des convertisseurs, en mettant l'accent
sur l'augmentation des performances obtenue par l'élévation des fréquences de découpage.
Le deuxième point présente les caractéristiques essentielles des pièces magnétiques qu'il est
nécessaire de connaître pour la bonne compréhension du texte, dans une approche essentiellement
descriptive.
Le troisième point illustre les idées précédentes par un exemple pratique de dimensionnement d'un
transformateur. Le lecteur peut ainsi percevoir, dans un cas simple, les variables principales dont le
concepteur doit tenir compte ainsi que les limitations des outils de calcul dont il dispose et sur
lesquelles nous nous pencherons ensuite.
Ces éléments ayant été clairement mis en place, le dernier point expose de manière détaillée les
objectifs de notre recherche.
Plan du chapitre
I.1 De l'alimentation série au découpage haute fréquence.......................................... 8
I.2 Transformateurs et inductances de puissance ........................................................ 15
I.3 Exemple de dimensionnement ................................................................................. 25
I.4 Objectifs de la thèse ................................................................................................... 33
I - Introduction aux convertisseurs et aux transformateurs de puissance
I-7
I.1 De l'alimentation série au découpage haute fréquence
Pour répondre aux besoins multiples des utilisateurs, le domaine des convertisseurs de puissance a
subi comme d'autres d'importantes évolutions technologiques ces trente dernières années. Le bref
historique retracé ici rappelle comment l'introduction du principe du découpage et l'augmentation
des fréquences qui a suivi ont permis d'augmenter sensiblement les densités de puissance, suivant
une des demandes les plus insistantes du marché.
I.1.1 Exigences de l'utilisateur
Comme on l'a expliqué en introduction, la fonction essentielle d'un convertisseur de puissance est
double: d'une part adapter la "forme" de l'énergie aux besoins d'une charge (typiquement en
transformant une tension alternative en tension continue et/ou en modifiant le niveau de la
tension) et d'autre part stabiliser ce flux d'énergie en filtrant autant que possible les fluctuations de
la source.
Dans le principe, assurer ces deux fonctions n'est pas excessivement complexe: fabriquer une
alimentation élémentaire demande un nombre de composants relativement réduit. Mais l'utilisateur
privé ou professionnel a beaucoup d'autres exigences. Idéalement, un convertisseur doit en effet:
- délivrer une ou souvent plusieurs tensions parfaitement continues, éventuellement
ajustables et stables quel que soit le courant demandé;
- posséder un rendement élevé;
- présenter un niveau de sécurité élevé, notamment en répondant aux normes d'isolation
galvanique entre l'utilisateur et le réseau;
- posséder une fiabilité élevée relativement à la durée de vie de l'application, en ce
compris la résistance aux contraintes de l'environnement (vibrations, température,
humidité, etc);
- ne pas être une source de perturbations pour le réseau électrique amont ou les
équipements environnants ni être trop sensible aux perturbations émanant de ceux-ci
(compatibilité électromagnétique);
- être la plus petite et la plus légère possible;
- et bien entendu être de préférence peu coûteuse…
A ces exigences de base, il faut parfois ajouter des demandes supplémentaires liées à une
application particulière: une sécurité accrue pour les équipements médicaux, un coût
particulièrement bas pour les applications grand public, une fiabilité particulièrement élevée pour
les applications professionnelles, des contraintes précises de taille en tant que sous-ensemble d'un
autre équipement, des fonctions supplémentaires permettant par exemple le dialogue entre
alimentations ou la maintenance de l'équipement à distance, etc.
Satisfaire cet ensemble de contraintes est la gageure quotidienne des concepteurs d'alimentations.
On comprend donc que d'importantes recherches soient menées dans ce domaine, d'abord pour
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I-8
apporter des solutions aux défis techniques ainsi posés, ensuite pour améliorer sans cesse la qualité
des convertisseurs dans un contexte commercial très concurrentiel.
L'histoire technologique récente des alimentations illustre très bien cette idée d'une évolution
dictée d'abord par les exigences de l'utilisateur. Nous l'évoquons brièvement ci-dessous, en partant
du principe de la conversion série, aujourd'hui dépassé, jusqu'aux alimentations à découpage haute
fréquence actuelles.
Ce chapitre étant essentiellement destiné au lecteur peu familier du domaine, nous n'entrerons pas
dans le détail des technologies les plus avancées. Signalons simplement que l'électronique de
puissance subit actuellement une évolution très rapide, moins connue mais comparable en ampleur
à celle qui a lieu dans le monde de l'électronique numérique et des télécommunications, et à
laquelle elle participe d'ailleurs activement.
I.1.2 Alimentation série
Jusqu'il y a une vingtaine d'années, la conversion de puissance AC/DC était réalisée au moyen
d'alimentations série.
Vballast
VC
+
source
tfo 50Hz
redressement
filtrage
régulation série
Vout
Vref
charge
Figure I-1: Schéma de principe d'une alimentation série (partie supérieure de la figure:
allure de la tension en fonction du temps en différents points du convertisseur)
Dans une telle alimentation, la tension alternative du réseau est d'abord abaissée au moyen d’un
transformateur. Un redressement suivi d'un filtrage permettent ensuite d'obtenir une tension
continue mais lentement variable à cause des fluctuations du réseau (VC). Enfin un transistor série
(appelé transistor "ballast") reprend à tout instant la différence entre cette tension variable et la
tension continue souhaitée à la charge (Vout). La partie supérieure de la Figure I-1 montre de
manière schématique l'allure de la tension en fonction du temps en différents points du
convertisseur.
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I-9
Le principe de la régulation dans une telle alimentation consiste à demander plus de puissance que
nécessaire à la source pour faire face à ses éventuelles variations, et à dissiper à tout instant la
puissance excédentaire (Figure I-2). De ce fait, le transistor est constamment en zone linéaire et le
rendement vaut typiquement 40% à 50%, ce qui est très faible.
V
VC
Vballast
Vout
t
Figure I-2: Régulation de la tension
par le transistor ballast dans une alimentation série
Le transformateur voit une onde de tension sinusoïdale à la fréquence du réseau (50Hz). En
conséquence, son noyau est constitué d’un empilement de tôles laminées en acier, ce qui le rend
lourd et volumineux.
I.1.3 Alimentation à découpage
La technique du découpage, apparue environ dans les années soixante, a apporté une solution au
problème du mauvais rendement et de l'encombrement des alimentations série.
Dans une alimentation à découpage (Figure I-3), la tension du réseau est redressée et filtrée
comme précédemment, puis "découpée" à une fréquence nettement supérieure à celle du réseau
par un transistor alternativement passant et bloqué. Il en résulte une onde carrée de tension qu'il
suffit de lisser pour obtenir finalement une tension continue1. Comme dans l'alimentation série, un
transformateur assure à la fois l'isolation galvanique et l'adaptation grossière du niveau de tension à
celui demandé par la charge.
En toute rigueur, cette tension n'est pas parfaitement continue mais comporte toujours une petite composante
périodique appelée "ripple".
1
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I - 10
transfo HF
Vout
charge
redressement et filtrage
secondaires
+
Vref
découpage
source redressement
filtrage
régulation
Figure I-3: Schéma de principe d'une alimentation à découpage (partie supérieure de la figure:
allure de la tension en fonction du temps en différents points du convertisseur)
La régulation de la tension de sortie à un niveau constant est réalisée par une action sur le "rapport
cyclique" ("duty cycle"), défini comme la fraction de la période de découpage où le semi-conducteur
est passant (Figure I-4). La chaîne de régulation doit obligatoirement comporter un organe
d'isolation (transformateur ou optocoupleur) puisque le semi-conducteur est cette fois placé au
primaire du transformateur principal.
V
δ= tON/T
t
tON
T
Figure I-4: Définition du rapport cyclique δ dans la commande en tension d'un transistor
(tON: temps de conduction du transistor; T: période de découpage)
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I - 11
L'avantage du découpage est double:
- d'une part, le semi-conducteur n'est utilisé qu'en commutation: soit il est bloqué, soit il est
saturé. Il génère donc par principe beaucoup moins de pertes que dans une alimentation
série et le rendement s’en trouve nettement amélioré (de 60% pour les premières
alimentations à découpage jusqu'à typiquement 85% à 95% aujourd'hui),
- d'autre part, la fréquence de base vue par les éléments réactifs (pièces magnétiques et
capacités) est comprise entre quelques dizaines de kilohertz et quelques mégahertz suivant
le type d'alimentation. Pour une même impédance, ces éléments peuvent donc en vertu des
équations ci-dessous se contenter d'une capacité ou d'une inductance plus faibles et donc
être beaucoup plus petits que dans une alimentation série fonctionnant à 50Hz. La taille et
le poids du convertisseur s'en trouvent considérablement réduits.
Z L = jω L
(I.1-1)
1
j ωC
(I.1-2)
ZC =
I.1.4 Evolution des alimentations à découpage
Conformément au principe expliqué ci-dessus, on n'a cessé, depuis l'apparition des premières
alimentations à découpage, d'augmenter la fréquence de travail en vue de réduire l'encombrement
des convertisseurs. On se heurte cependant rapidement à une limite. Il subsiste en effet encore
deux types de pertes, qui augmentent toutes deux avec la fréquence:
- dans les pièces magnétiques, sous forme de pertes fer (dans le noyau) et de pertes cuivre
(dans les enroulements),
- dans les semi-conducteurs, en raison de l'énergie dissipée au sein du silicium à chaque
commutation.
Supposons en effet qu'on augmente la fréquence de découpage: d'une part, on peut réduire la taille
des éléments réactifs comme expliqué dans le paragraphe précédent, mais d'autre part il faut
augmenter la taille des refroidisseurs en raison des pertes supplémentaires dues à la fréquence plus
élevée. Le gain espéré en volume et en poids est donc partiellement ou totalement annulé. D'autre
part, le rendement se dégrade puisque les pertes augmentent.
En conséquence, la fréquence choisie résulte toujours d'un compromis entre la réduction du
volume des composants réactifs d'une part et le maintien d'un niveau de pertes acceptable d'autre
part. Le but des concepteurs est précisément de repousser autant que possible ce compromis pour
augmenter les performances. C'est directement dans ce contexte que s'inscrit notre travail lorsqu'il
recherche des moyens de maîtriser plus finement le calcul des pertes cuivre et les modèles de
pièces magnétiques.
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I - 12
Comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous (Figure I-5), la fréquence de découpage a
effectivement nettement augmenté depuis les premières alimentations utilisant ce principe: de
20kHz, on est progressivement passé à plusieurs centaines de kilohertz, voire plusieurs mégahertz
aujourd'hui dans les applications de plus faible puissance.
400
fréquence (kHz)
350
300
250
200
150
100
50
5
8
19
9
19
8
3
19
8
0
19
8
8
19
6
19
6
0
0
Figure I-5: Evolution typique de la fréquence
de découpage (données I.T.S. Mitra)
L'utilisation d'une fréquence de découpage de plus en plus élevée associée à l'amélioration du
rendement a finalement permis d'augmenter la densité de puissance (c'est-à-dire le rapport
puissance/poids ou puissance/volume) des alimentations, répondant ainsi à une des requêtes les
plus insistantes des utilisateurs. Le graphique ci-dessous (Figure I-6) montre qu’en une quinzaine
d’années, une même alimentation a vu son volume diminué de moitié et son poids divisé par trois.
Densité de puissance
140
120
100
80
60
40
20
0
1975
1980
volumique (W/L)
1983
1987
1991
massique (W/kg)
Figure I-6: Evolution typique de la densité
de puissance (données I.T.S. Mitra)
Cette progression n'a évidemment été possible qu'au prix d'avancées technologiques importants.
C'est ainsi qu'on a vu apparaître de nouveaux matériaux magnétiques ou de nouveaux types de
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I - 13
noyaux (noyaux planaires par exemple), des semi-conducteurs plus performants, des techniques de
commutation de plus en plus shopistiquées (parmi lesquelles les commutations résonantes), etc.
Aujourd'hui, les fréquences semblent s'être quelque peu stabilisées. Pour les puissances les plus
faibles (moins de 50W), on trouve typiquement des alimentations travaillant aux environs du
mégahertz. Pour les puissances moyennes (quelques centaines de watts), on se contente
généralement d'une fréquence entre 100kHz et 250kHz. Enfin les alimentations dépassant le
kilowatt recourent à des fréquences légèrement plus faibles (50 à 100kHz).
Le secteur des convertisseurs de puissance se caractérise actuellement, pour les applications en
électronique digitale par exemple, par une tendance très nette à utiliser des convertisseurs de plus
en plus distribués (plus petits, plus nombreux et de plus faible puissance) et délivrant des tensions
de plus en plus basses (aux environs du volt), conformément à la tendance observée pour les
microprocesseurs. Une autre tendance, plus spécialement dans les installations de
télécommunications, consiste à accroître "l'intelligence" des systèmes par l'intermédiaire par
exemple de fonctions de diagnostic ou de communication.
I.1.5 Conclusion
Depuis la fin des années soixante, les évolutions technologiques du secteur des convertisseurs de
puissance témoignent de la demande des utilisateurs pour des densités de puissance toujours
accrues. L'apparition des alimentations à découpage puis l'augmentation progressive des
fréquences, accompagnées de nombreuses innovations quant aux techniques et aux matériaux, ont
permis de répondre à cette demande.
Les pièces magnétiques présentes au sein des convertisseurs sont concernées au premier chef par
cette évolution pour au moins trois raisons:
- l'augmentation de la fréquence de découpage est précisément destinée à réduire leur
volume et leur poids, qui constituent une part importante de ceux du convertisseur;
- ce sont les pièces magnétiques elles-mêmes, par l'intermédiaire des pertes qu'elles génèrent,
qui contribuent à limiter cette évolution;
- enfin, comme nous le développerons dans le point suivant, les pièces magnétiques
interviennent à de nombreux titres dans le fonctionnement du convertisseur: leur étude
présente donc un intérêt primordial pour qui désire en augmenter les performances.
Notre travail s'inscrit logiquement dans ce contexte puisqu'il vise d'une part à augmenter la fiabilité
et la précision des outils de calcul des pertes cuivre dans les pièces magnétiques et d'autre part à
mieux modéliser leur comportement au sein du convertisseur.
I.1 – Introduction aux convertisseurs...: De l'alimentation série au découpage haute fréquence
I - 14
I.2 Transformateurs et inductances de puissance
Les pièces magnétiques sont des composants essentiels dans les alimentations à découpage. Pour
poursuivre cette introduction, nous proposons un rapide tour d'horizon de leurs principaux
aspects constructifs et des rôles multiples qu'elles assurent au sein des convertisseurs. La plupart
des notions de base exposées ici seront utiles à la compréhension dans la suite du texte.
I.2.1 Noyau magnétique
Ferrites
Le rôle du noyau est de canaliser les lignes de champ magnétique en vue de transférer ou
d'emmagasiner de l'énergie. Il faut pour cela utiliser un matériau qui possède une perméabilité
élevée, supporte un champ d'induction important sans entrer en saturation et ne génère pas trop
de pertes aux fréquences utilisées.
Pour les alimentations, les ferrites sont les matériaux qui réalisent le mieux ce compromis: elles
possèdent typiquement une perméabilité valant plusieurs milliers de fois celle de l'air ainsi que des
pertes fer acceptables, pour une induction à saturation malheureusement limitée à 0,2 à 0,3 tesla.
Elles sont constituées d'un oxyde de fer Fe2O3 auquel on adjoint un ou plusieurs métaux. Les deux
associations les plus courantes sont les ferrites manganèse-zinc (Ma-Zn) et nickel-zinc (Ni-Zn). La
poudre ainsi obtenue est frittée et passée au four pour obtenir des noyaux de formes diverses.
L'obtention de pertes faibles dans le noyau vient du fait que la ferrite est constituée de petits grains
conducteurs isolés les uns des autres par un liant, ce qui empêche la circulation de courants induits
trop importants.
Le nombre de constructeurs de noyaux magnétiques en ferrite dans le monde est très réduit. Les
noyaux utilisés en milieu industriel possèdent des formes et des tailles standardisées, bien qu'il soit
possible de réaliser des noyaux plus particuliers si l'application justifie ce surcoût. Deux types de
géométries peuvent être distinguées: les transformateurs classiques et les transformateurs planaires.
Géométrie classique et géométrie planaire
La Figure I-7 montre un noyau "E" classique comme on en utilise très couramment dans les
convertisseurs. Les enroulements sont bobinés successivement et de manière concentrique sur une
carcasse (au centre de la figure) au travers de laquelle les deux demi-noyaux sont ensuite assemblés.
La Figure I-8 montre le résultat final obtenu, ici pour un des transformateurs de test qui sera utilisé
dans la deuxième partie.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 15
demi-noyau E
carcasse de
bobinage
Figure I-7: Noyau E classique et sa carcasse de bobinage (d'après [221])
Figure I-8: Transformateur de test assemblé sur base
d'un noyau E classique (largeur totale: 50mm)
Par opposition à ces noyaux "classiques", on peut définir les noyaux planaires, apparus il y a
quelques années, comme des noyaux extrêmement plats, c'est-à-dire dont une dimension est
beaucoup plus petite que les deux autres. Nous préférons cependant utiliser une autre définition,
plus précise et non équivalente: les transformateurs planaires sont ceux dans lesquels les
enroulements sont superposés au lieu d'être concentriques (ce qui permet effectivement une
hauteur réduite), comme montré aux Figures I-9 et I-10. Le caractère "planaire" du transformateur
tient donc plus à la disposition des enroulements selon des plans superposés qu'à la géométrie du
noyau.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 16
Les enroulements des pièces magnétiques planaires sont réalisés soit en circuit imprimé (un ou
plusieurs circuits multicouches) soit dans des feuilles de métal découpées, soit plus rarement en fil
rond. Plusieurs possibilités existent pour connecter le transformateur ou l'inductance dans le
convertisseur, depuis la pièce totalement indépendante jusqu'à l'intégration complète des
enroulements dans le circuit imprimé principal de l'alimentation.
Figure I-9: Géométrie typique d'un transformateur planaire (d'après [218])
Transformateur planaire:
enroulements superposés
Transformateur classique:
enroulements concentriques
Figure I-10: Comparaison de la disposition des enroulements
dans un transformateur classique et dans un transformateur planaire
Parmi les avantages des noyaux planaires, on peut citer: un volume réduit par rapport aux noyaux
classiques magnétiquement équivalents (et donc des pertes fer significativement plus faibles), une
meilleure reproductibilité des bobinages lorsqu'ils sont réalisés en circuit imprimé, de meilleures
performances thermiques et évidemment une épaisseur très réduite qui permet leur utilisation sur
des cartes placées côte-à-côte dans des armoires industrielles par exemple. Leurs inconvénients
sont leur coût plus élevé et la surface occupée, généralement plus grande que pour un noyau
classique équivalent. De ce fait, ces noyaux ne se justifient que dans certaines applications où un de
leurs avantages est décisif.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 17
Noyaux à entrefer
Dans certains noyaux, on ménage un entrefer, c'est-à-dire un espace où le chemin magnétique est
interrompu par un matériau de plus faible perméabilité (air ou isolant). Dans l'entrefer, le champ
magnétique (H) est beaucoup plus élevé que dans le matériau magnétique. De ce fait, une énergie
plus grande peut être emmagasinée dans la pièce. L'essentiel de cette énergie étant localisé dans
l'entrefer lui-même, les dimensions de celui-ci permettent de fixer avec une meilleure précision la
valeur de l'inductance par rapport à un noyau sans entrefer (la perméabilité du matériau
magnétique subissant une dispersion relativement importante). En pratique, on utilise des noyaux à
entrefer pour les inductances ainsi que pour les transformateurs "flyback" (voir §I.2.4), c'est-à-dire
chaque fois qu'on utilise une pièce magnétique en tant que réserve d'énergie.
B
entrefer
Figure I-11: Epanouissement des lignes de champ
(en trait interrompu) au voisinage d'un entrefer
L'existence d'un entrefer implique par contre que les lignes de champ ne sont plus aussi bien
canalisées à son voisinage. Ceci provoque l'apparition de pertes cuivre supplémentaires parfois très
importantes dans les conducteurs placés à proximité. La solution à ce problème consiste à utiliser
soit plusieurs entrefers plus petits soit un entrefer réparti, c'est-à-dire un noyau en matériau
magnétique de perméabilité intermédiaire entre la ferrite et l'air (voir §III.4.4).
I.2.2 Enroulements
Types d'enroulements
Les enroulements sont classiquement en cuivre. Le primaire, véhiculant un courant faible sous une
tension élevée, est généralement en fil rond ou en fil de Litz tandis que le ou les secondaire(s),
portant un courant élevé sous une tension faible, sont en ruban ou en pistes de circuit imprimé,
parfois sur support souple [172][173].
L'isolation des enroulements revêt une grande importance puisqu'elle conditionne l'isolation
galvanique du transformateur, liée à la sécurité d'utilisation du convertisseur. Là aussi, une
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 18
évolution est perceptible et se traduit par l'apparition de matériaux diélectriques toujours plus
performants et plus compacts. On verra dans la seconde partie de cette thèse que les contraintes
d'isolation jouent un rôle significatif et malheureusement défavorable du point de vue des pertes
cuivre.
Alimentations et transformateurs multisorties
Beaucoup d'appareillages électroniques demandent de disposer simultanément de plusieurs
tensions continues différentes, par exemple cinq et douze volts. Il est évidemment beaucoup plus
économique dans ce cas de réaliser une alimentation multisorties, plutôt que d'utiliser plusieurs
alimentations séparées. La plupart des alimentations répondent à cette exigence en comportant
généralement une sortie principale, délivrant l'essentiel de la puissance, accompagnée de plusieurs
sorties auxiliaires fournissant d'autres tensions.
Le transformateur comporte dans ce cas plusieurs secondaires correspondant à des puissances
nominales assez différentes. La construction s'en trouve considérablement compliquée, d'autant
plus que des enroulements auxiliaires sont souvent ajoutés à des fins de mesure ou d'alimentation
interne.
De plus, le rapport cyclique du ou des transistors n'est déterminé qu'en fonction de la tension de la
sortie principale. Des techniques complémentaires (inductance saturable, redécoupage secondaire)
doivent être utilisées pour régler les sorties auxiliaires. Le problème est d'autant plus délicat que les
différentes sorties sont inévitablement couplées par l'intermédiaire du transformateur lui-même, ce
qui répercute toute variation d'une seule charge sur l'ensemble des sorties ("cross-effect"). C'est un
des effets dont il faudra tenir compte dans la troisième partie consacrée à la modélisation.
Contenu harmonique
Suite au découpage, l'onde de tension vue par le transformateur est en première approximation
carrée. Le courant est lui de type triangulaire ou trapézoïdal. Les formes d'ondes vues par le
transformateur sont donc fortement chargées en harmoniques.
Il convient de prendre en compte ces harmoniques lors du dimensionnement des différents
éléments de l'alimentation et en particulier des pièces magnétiques. On doit notamment considérer
les harmoniques dans le calcul des pertes fer et dans celui des pertes cuivre, où elles n'ont d'ailleurs
pas du tout le même effet (voir §I.2.3 ci-dessous).
I.2.3 Pertes
Les pertes dans les pièces magnétiques ont deux origines: les pertes fer, qui naissent dans le noyau,
et les pertes cuivre, générées dans les enroulements. Ces pertes doivent bien entendu être évacuées
par des moyens adéquats (refroidisseurs, ventilateurs, etc). On distingue de ce point de vue les
alimentations à convection forcée ou naturelle suivant la présence ou l'absence de ventilateur.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 19
Le calcul des pertes, aussi bien dans les semi-conducteurs que dans les pièces magnétiques,
constitue une étape cruciale dans la conception. La puissance maximale d'un convertisseur dépend
en effet directement de l'élévation de température admissible dans les transistors et dans les pièces
magnétiques, qui peuvent typiquement atteindre une centaine de degrés en fonctionnement
nominal. Il faut donc disposer d'outils de calcul des pertes très précis, ce qui explique les
recherches constantes dans ce but.
Pertes fer
Les matériaux magnétiques ont des propriétés très complexes puisque la relation entre les champs
B et H n'est ni linéaire ni univoque comme on le constate sur le cycle d'hystérèse. La présence
d'harmoniques, qui peuvent sensiblement modifier dans un sens ou dans l'autre la valeur des pertes
par rapport à une onde sinusoïdale, complique encore le calcul [29][153][183].
Classiquement, on distingue trois composantes dans les pertes fer: les pertes par hystérèse, les
pertes par courants de Foucault et les pertes supplémentaires. Cette modélisation est cependant
considérée comme dépassée par les recherches actuelles. Malgré des efforts importants,
notamment de la part des fabricants de matériaux magnétiques, on ne dispose en fait pas encore de
modèles permettant de comprendre et de caractériser complètement les phénomènes propres aux
ferrites [225].
Le fait qu'on ne dispose encore que d'outils très partiels concernant la modélisation des matériaux
magnétiques apparaît également au niveau des simulations par éléments finis, que nous utiliserons
abondamment dans la seconde partie. Les premiers logiciels permettant de tenir compte de la
forme du cycle d'hystérèse ne sont apparus qu'au milieu de notre travail, c'est-à-dire vers 1997.
Les pertes fer n'étant pas notre objet d'étude, nous n'approfondirons pas davantage le sujet. Nous
nous contenterons de signaler qu'elles constituent généralement la moitié des pertes d'un
transformateur classique lorsqu'il est bien dimensionné, sauf dans les noyaux planaires, où les
pertes fer sont généralement plus faibles. Lors du dimensionnement, ces pertes sont généralement
calculées à l'aide de formules empiriques fournies par les fabricants de ferrites. Un exemple d'un tel
calcul est donné dans le point suivant (§I.3.3).
Le lecteur désireux d'en savoir davantage sur les pertes fer trouvera des exemples de travaux
récents aux références [18], [19], [20], [52], [53], [54], [84], [129] et [195].
Pertes cuivre
Les pertes cuivre, qui sont le sujet principal de cette thèse, naissent par effet Joule dans les
enroulements. La difficulté de les calculer dans les convertisseurs de puissance vient du fait qu'aux
fréquences atteintes actuellement, le courant ne peut plus être considéré comme uniforme sur la
section du conducteur, ce qui s'explique par l'apparition de courants induits se superposant au
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 20
courant initial. Dans le cas d'un conducteur seul, ce phénomène n'est autre que "l'effet pelliculaire"
bien connu. Lorsque plusieurs conducteurs sont présents, on parle en plus "d'effet de proximité".
La non-uniformité du courant peut augmenter considérablement les pertes, jusqu'à les multiplier
par cinq, dix ou davantage par rapport à un calcul "basse fréquence" considérant un courant
uniforme. Evaluer avec précision l'effet pelliculaire et l'effet de proximité est donc tout-à-fait
crucial puisque, compte tenu de ces ordres de grandeur, on risque tout simplement la destruction
du transformateur.
Deux problèmes doivent d'ailleurs être distingués à ce sujet:
- d'une part le calcul de la puissance totale dissipée par effet Joule dans un enroulement, de
manière à maîtriser la température atteinte par la pièce en fonctionnement,
- d'autre part la recherche d'éventuels points chauds, non mis en évidence par le calcul
précédent, et correspondant à des concentrations locales de densité de courant. Ces points
chauds, qu'il est très difficile de détecter a priori, sont susceptibles de réduire la durée de
vie du transformateur.
Dans ce domaine également, la présence d'harmoniques peut modifier significativement le résultat
du calcul des pertes.
Pour calculer les pertes cuivre, les concepteurs de pièces magnétiques sont confrontés à un choix
fort insatisfaisant. Soit ils utilisent une méthode classique (formule de Dowell ou apparentées, qui
seront détaillées au chapitre III), très rapide mais basée sur un modèle unidimensionnel donc
approximatif, soit ils utilisent des simulations électromagnétiques par éléments finis, beaucoup plus
précises mais dont la lourdeur est souvent jugée prohibitive dans un contexte industriel.
En pratique, les formules classiques ont montré leurs limites: plusieurs auteurs citent en effet des
cas où elles ont mené à des dimensionnements erronés (voir §III.4). Une expérience de ce type a
d'ailleurs également été vécue chez I.T.S. Mitra. La difficulté est précisément que les limites de
validité de ces formules sont très mal connues. On en est donc réduit à utiliser des règles de
conception dont la fiabilité n'est pas totalement assurée, ce qui est une situation pour le moins
inconfortable.
Comme on le verra, de nombreuses recherches tentent d'apporter une solution à ce problème, par
exemple en précisant les limites d'utilisation des formules classiques, ce qui est un premier pas.
Nous tenterons d'aller plus loin dans la seconde partie en proposant notamment une méthode de
calcul alternative.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 21
I.2.4 Influence de la topologie
Topologies classiques
Pour mettre en œuvre le principe du découpage, il existe plusieurs variantes ou "topologies"
possibles, qui se distinguent essentiellement par le nombre de transistors utilisés et la manière
d'exploiter le transformateur [32][64].
Pour les plus petites puissances (quelques dizaines de watts), on emploie typiquement la topologie
"flyback", qui demande un seul transistor. Son nom vient du fait qu'à chaque période, l'énergie
venant de la source est momentanément emmagasinée dans le transformateur avant d'être
renvoyée vers la charge. Le transformateur assure alors typiquement le rôle d'une inductance
(réserve d'énergie) et comporte d'ailleurs dans ce but un entrefer. Cette topologie, parce qu'elle
demande très peu de composants, est particulièrement avantageuse dans le cas des convertisseurs
multisorties.
Pour des puissances plus élevées (plusieurs centaines de watts), on préfère utiliser la topologie
"forward" (Figure I-12), qui est la plus proche du schéma de principe donné précédemment (Figure
I-3, p.11). Le rôle du transformateur est dans ce cas-ci plus classique puisqu'il sert simplement à
transférer l'énergie tout en assurant une isolation. Un troisième enroulement ("L3" sur la figure)
est nécessaire pour assurer la démagnétisation du noyau.
D1
L
L3
L1
L2
D2
C2
C1
D3
T
Figure I-12: Schéma typique d'un convertisseur forward
Dans ces deux topologies, on impose au noyau un champ unipolaire, c'est-à-dire variant entre zéro
et une valeur maximale. On peut mieux exploiter le noyau en utilisant un champ bipolaire (variant
entre deux valeurs identiques de signes opposés), ce qui est fait dans les topologies "push-pull",
"demi-pont" et "pont complet" utilisant de deux à quatre transistors. Cette plus grande complexité
se justifie uniquement pour les puissances les plus élevées (500W et plus).
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 22
Comme on le voit, la topologie choisie influence directement la manière d'utiliser les pièces
magnétiques et donc leur dimensionnement. Ceci est également vrai pour les topologies
résonantes, apparues plus récemment dans le but d'augmenter le rendement des convertisseurs.
Topologies résonantes
Constatant qu'une fréquence de découpage plus élevée –souhaitée pour réduire la taille du
convertisseur– augmente les pertes en commutation du transistor et donc dégrade le rendement,
on a développé des topologies dites "résonantes", notamment connues sous les abréviations QRC,
MRC, ZVS, ZCS, ZVT, etc. Le principe de celles-ci consiste, au cours de chaque période, à
provoquer une résonance de manière à annuler soit le courant soit la tension vus par le transistor
au moment où celui-ci commute: la commutation a alors lieu sans pertes.
La résonance est liée à un échange d'énergie plus ou moins bien contrôlé entres certaines
inductances et capacités du convertisseur. Parmi celles-ci, on retrouve généralement les
inductances du transformateur (fuite et/ou magnétisation), dont le dimensionnement doit alors
tenir compte de contraintes supplémentaires dues aux résonances qu'on désire produire
[67][119][148][201].
Sans entrer plus avant dans les détails, cet exemple illustre le fait que les pièces magnétiques sont
liées à de très nombreux aspects du convertisseur, ce qui s'explique par le rôle central qu'elles
occupent dans celui-ci.
La difficulté de la conception réside précisément dans le fait que beaucoup de variables sont liées
et qu'il est difficile d'améliorer les performances selon un critère sans en dégrader quelque peu un
autre. Cet aspect apparaît très clairement dans l'exemple de dimensionnement donné au point
suivant (§I.3). Les progrès réalisés dans les matériaux ou dans les techniques donnent
heureusement des armes au concepteur pour répondre aux exigences toujours plus nombreuses
qu'il a à satisfaire.
I.2.5 Conclusion
Trois idées peuvent être dégagées du rapide tour d'horizon que nous venons d'effectuer.
La première est que les pièces magnétiques –et plus spécifiquement les transformateurs– sont
soumises à de très nombreuses exigences. Celles-ci découlent d'abord des rôles multiples assurés
par ces pièces au sein des convertisseurs: outre les fonctions élémentaires de transfert d'énergie et
d'isolation galvanique, on constate par exemple que le transformateur peut parfois jouer le rôle
d'une inductance (stockage et restitution d'énergie dans le convertisseur flyback) ou être mis à
contribution dans une technique de commutation résonante.
En plus des contraintes liées à chacune de ces fonctions, les pièces magnétiques doivent encore
satisfaire des exigences de forme, de taille, de limitation des capacités parasites, etc. Répondre à cet
ensemble de contraintes s'annonce donc dès le départ comme un exercice ardu.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 23
La seconde idée est que les outils dont on dispose pour dimensionner ces pièces sont encore
approximatifs. Nous avons ainsi cité le fait que la compréhension fondamentale des phénomènes
magnétiques au sein du noyau est encore fort incomplète, ou qu'il est reconnu que les méthodes
classiques de calcul des pertes cuivre donnent occasionnellement, dans des cas de surcroît mal
identifiés, des résultats erronés. Les simulations par éléments finis, outil extrêmement puissant,
montrent elles-mêmes certaines limites, soit inhérentes aux techniques de simulations soit
simplement parce qu'elles se révèlent extrêment lourdes à utiliser.
La troisième idée est que des possibilités relativement variées existent heureusement quant à la
conception des pièces elles-mêmes. Si la construction générale reste toujours identique, les
différentes possibilités de matériaux, de formes de noyaux ou de disposition des enroulements
permettent quand même de choisir de nombreuses options parmi une palette assez vaste. C'est
dans cette variété que le concepteur trouve une certaine liberté lui permettant d'obtenir des
performances élevées tout en respectant l'ensemble des contraintes de dimensionnement.
La tâche du concepteur de pièces magnétiques n'est donc pas aisée puisque d'une part il est soumis
à un grand nombre de contraintes et que d'autres part il dispose d'outils limités ou approximatifs.
Pour illustrer ces idées de manière plus concrète, le chapitre suivant propose un exemple de
dimensionnement qui montre quelles approximations et quels outils sont utilisés en pratique.
I.2 – Introduction aux convertisseurs…: Transformateurs et inductances de puissance
I - 24
I.3 Exemple de dimensionnement
Pour illustrer le grand nombre de variables à considérer lors du calcul d'une pièce magnétique,
nous donnons ici l'exemple du dimensionnement d'un transformateur pour une alimentation à
sortie unique délivrant soixante ampères sous cinq volts. Seules les grands principes du
dimensionnement sont détaillés, des variantes existant d'un cas pratique à l'autre.
I.3.1 Grandeurs électriques
Calcul des puissances
Partant des valeurs nominales souhaitées à la charge, soit 60A sous 5V, on calcule la puissance de
sortie du convertisseur:
Pout = Vout .I out = 5V .60 A = 300W
(I.3-1)
Pour une alimentation 5V, un rendement typique de 85% amène à une puissance d'entrée de:
Pin =
Pout
η
=
300W
= 353W
85%
(I.3-2)
Calcul des courants
On suppose que le convertisseur, de type forward, est pourvu d'un "préconditionneur", c'est-à-dire
d'un premier étage de découpage qui évite que l'alimentation ne soutire trop d'harmoniques au
réseau. Sachant qu'un tel préconditionneur, en fonctionnement normal, délivre une tension
d'entrée typique de 385V au convertisseur proprement dit, le courant moyen dans celui-ci vaut:
I moy =
Pin 353W
=
= 0,92 A
Vin 385V
(I.3-3)
Il ne s'agit cependant que d'une valeur moyenne. En réalité, le courant au primaire n'est pas
sinusoïdal mais a plutôt l'allure représentée à la Figure I-13: il croît linéairement pendant la durée
tON où le transistor est passant et s'annule pendant le reste de la période.
A puissance constante, la valeur moyenne du courant pendant tON, que nous notons ION, dépend
du rapport cyclique. Une valeur typique de 0,4 est choisie comme rapport cyclique maximal
admissible compte tenu de la topologie forward. Cette valeur ne doit cependant être atteinte que
dans le cas le plus défavorable, identifié comme le moment où la tension d'entrée est la plus basse,
par exemple 300V(2). A tension d'entrée nominale (385V), le rapport cyclique peut être plus faible:
Ce cas correspond à la perte du réseau. Le préconditionneur a alors cessé de fonctionner et l'énergie est délivrée,
pour très peu de temps, par les capacitées présentes en tête du convertisseur.
2
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
I - 25
δ nom = δ max
Vin ,min
Vin ,nom
= 0,4
300V
= 0,31
385V
(I.3-4)
Pour cette valeur nominale, le courant ION vaut:
I ON =
I moy
δ nom
=
0,92 A
= 2,97 A
0,31
(I.3-5)
I
ION
Imoy
t
tON
T
Figure I-13: Forme d'onde du courant dans le transistor
En négligeant la pente du courant pendant tON, on peut facilement en calculer la valeur efficace:
I RMS =
2
i 2 (t ) = I ON
.δ = I ON δ
(I.3-6)
soit
I RMS = 2,97 A. 0,31 = 1,65 ARMS
(I.3-7)
I.3.2 Rapport de transformation et nombre de spires
Le rapport de transformation N peut être trouvé par le quotient de la tension d'entrée (multipliée
par le rapport cyclique puisque cette tension n'existe que pendant une fraction de la période) à la
tension de sortie, dans les conditions les plus défavorables. On considère donc le rapport cyclique
maximal (0,4), correspondant à la tension d'entrée minimale (300V), et on majore la tension de
sortie de toutes les chutes de tension internes (inductance de fuite, diode de redressement
secondaire, résistance passante du transistor, etc) et externes (câbles de l'utilisateur), que nous
estimons ici arbitrairement à
3V:
δ maxVin ,min 0,4.300V
N≈
=
= 15
Vout + ddp 5V + 3V
(I.3-8)
Une même alimentation est généralement disponible en plusieurs versions, correspondant à
plusieurs tensions de sortie différentes. Pour simplifier la conception du transformateur, on réalise
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
I - 26
généralement le dimensionnement en choisissant le rapport de transformation le plus grand, donc
la tension la plus basse (5V), correspondant à un secondaire d'une seule spire. Les autres tensions
sont ensuite obtenues en gardant le primaire intact et en augmentant le nombre de spires
secondaires (par exemple 3 spires pour une tension de 12V).
En pratique, le rapport de transformation donné par (I.3-8) est souvent fractionnaire. Comme la
valeur de tension apparaissant au dénominateur représente le minimum admissible à la sortie du
convertisseur, la valeur doit être arrondie par défaut pour garantir une tension minimale de 5V à la
charge. Pour un secondaire formé d'une seule spire, le primaire doit donc comporter dans ce cas-ci
quinze spires.
I.3.3 Choix du noyau
Induction maximale et section effective
Un noyau standard est caractérisé par sa forme (identique pour toute une famille de noyaux), sa
taille et le matériau qui le compose. Les ferrites utilisées dans les convertisseurs usuels supportent
typiquement des champs d'induction maxima de 300mT, valeur au-dessus de laquelle la ferrite
entre en saturation. La valeur atteinte en pratique dans le noyau dépend d'une part du produit
"volts.secondes", noté E.t et caratérisant le niveau et la durée de la sollicitation en tension, et
d'autre part de la section effective Ae du noyau donnée par le constructeur (et valant à peu de
choses près sa section géométrique).
En supposant une fréquence de 250kHz, typique compte tenu de la puissance nominale de
l'alimentation, le produit "volts.secondes" vaut ici:
E.t =
385V .0,31
= 477 µVs
250kHz
(I.3-9)
En vertu de la formule
Bmax =
E.t
N 1 . Ae
(I.3-10)
où Bmax représente le champ maximal (choisi à une valeur de 150mT par sécurité) et N1 le nombre
de spires primaire, le noyau doit donc avoir une section effective supérieure ou égale à:
Ae =
477 µVs
E.t
=
= 212mm 2
N 1 .Bmax 15.150mT
(I.3-11)
Un ensemble formé de deux demi-noyaux E42/21/20, offrant une section effective de 233mm2
[221], convient donc fort bien de ce point de vue. Il fait même chuter l'induction maximale à
136mT. On ne peut cependant considérer ce choix de noyau comme définitif car d'autres
contraintes doivent encore être vérifiées.
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
I - 27
Pertes fer
Les pertes fer, relevant de phénomènes magnétiques complexes, sont calculées en pratique par des
formules empiriques comme celle ci-dessous:
PV (T ) = C m . f x .B y .(ct − ct1 .T + ct 2 .T 2 )
(I.3-12)
où f désigne la fréquence, B le champ d'induction maximal (à diviser par deux pour le cas
unipolaire), T la température en degrés Celsius et les autres notations des coefficients empiriques
dépendant de la gamme de fréquence et du matériau magnétique.
En supposant qu'on utilise le matériau 3F3 (typique pour une fréquence de 250kHz) et que la
température maximale de fonctionnement vaut 90°C, on obtient sur base des valeurs des
coefficients données dans [135] les pertes volumiques:
PV = 0,25.(250.10 3 )1, 6 .(0,5.136.10 −3 ) 2,5 .
(1,26 − 1,05.10 − 2.90 + 0,79.10 − 4.90 2 ) = 125.10 3 W / m 3
(I.3-13)
soit pour le noyau considéré, qui offre un volume effectif (Ve) de 45400mm3 [221]:
PFe = PV .Ve = (125.10 3 ).(45400.10 −9 ) = 5,68W
(I.3-14)
c'est-à-dire environ 2% de la puissance de sortie du convertisseur, ce qui est très faible et donc ne
remet pas en cause le choix précédent.
I.3.4 Pertes cuivre
Enroulement secondaire
Pour limiter l'échauffement, il convient également de réduire autant que possible les pertes cuivre.
Tout d'abord, le noyau offre une largeur de fenêtre de 29,6mm, de laquelle on doit retirer de
chaque côté de l'enroulement 4mm pour respecter l'isolation galvanique entre primaire et
secondaire. On dispose donc d'une largeur maximale de 21,6mm pour disposer les enroulements.
Calculons d'abord les pertes dans le secondaire, en supposant pour la simplicité une fréquence
unique, c'est-à-dire une forme d'onde sinusoïdale. Cet enroulement est formé d'un seul tour de
ruban, de largeur 28,8mm comme on vient de le calculer et d'une épaisseur h à déterminer.
En basse fréquence, les pertes dans cet enroulement peuvent s'évaluer à partir de la formule
classique:
2
PCu = RDC .I RMS
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
(I.3-15)
I - 28
Néanmoins, comme on l'a signalé, on ne peut supposer ici que le courant est uniforme sur la
section du conducteur en raison d'effets haute fréquence de même origine que l'effet pelliculaire.
De ce fait, la section conductrice effective est plus petite et les pertes doivent être multipliées par
un facteur FR plus grand ou égal à l'unité:
2
PCu = FR .RDC .I RMS
(I.3-16)
Tout le problème du calcul des pertes cuivre réside précisément dans l'évaluation de ce facteur FR
qui sera l'objet de la seconde partie du travail. Pour notre exemple, utilisons ici la formule classique
de Dowell (§III.1) supposant que le transformateur répond à un modèle unidimensionnel:
FR = X
sinh 2 X + sin 2 X
m 2 − 1 sinh X − sin X
+ 2X
cosh 2 X − cos 2 X
3 cosh X + cos X
(I.3-17)
où m vaut le nombre de couches de l'enroulement (ici 1) et X le rapport de l'épaisseur h à
l'épaisseur de peau δ bien connue.
Pour un calcul rapide, il est intéressant de retenir que l'épaisseur de peau vaut environ 100µm à
400kHz et varie en raison inverse de la racine carrée de la fréquence. A 250kHz, elle vaut donc ici,
suivant une assez bonne approximation:
δ 250 kHz =
400
.100 µm = 126 µm
250
(I.3-18)
Compte tenu du fait, dans (I.3-16), que l'épaisseur h intervient à la fois dans l'expression de FR (par
l'intermédiaire de X) et au dénominateur de RDC, on trouve l'épaisseur optimale en minimisant le
produit de ces deux valeurs ou encore un facteur KR défini comme suit:
KR =
FR
X
(I.3-19)
Lorsque l'enroulement comporte une seule couche, comme c'est le cas pour notre ruban, cette
fonction, que nous avons étudié sur tableur pour la facilité, possède un minimum très plat situé ici
aux alentours de 200µm. Cette valeur est plausible puisqu'elle vaut entre une fois et demie et deux
fois l'épaisseur de peau: l'augmentation des pertes correspondante reste alors limitée (FR vaut
effectivement 1,4).
Sur base d'une épaisseur standardisée de 210µm et d'une longueur de l'enroulement lT plausible de
10cm, on peut finalement calculer la résistance en continu et ensuite les pertes de l'enroulement
secondaire:
R DC 2 =
lT
σ .h.b
=
0,1
= 3,75.10 − 4 Ω
5,88.10 7.210.10 −6.21,6.10 −3
2
PCu 2 = FR .R DC .I RMS
= 1,4.3,75.10 −4.(15.2) 2 = 0,47W
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
(I.3-20)
(I.3-21)
I - 29
Enroulement primaire
Pour les conducteurs ronds, le calcul est similaire. Il faut simplement, d'après la théorie classique,
introduire un "facteur de remplissage" correctif tenant compte de l'espacement des fils (voir
§III.1.3). Par rapport au cas précédent, le minimum se déplace relativement peu, de sorte qu'on
peut choisir par exemple un diamètre typique de 0,25mm au primaire. L'augmentation des pertes
correspondante vaut alors 1,03 d'après (I.3-17).
On peut s'étonner, alors que l'épaisseur de peau est la même, d'obtenir une augmentation de
résistance FR si différente de celle du ruban (qui valait 1,4). La formule classique montre ici
précisément une de ses faiblesses: lorsqu'on les conducteurs s'écartent trop du modèle
unidimensionnel supposé, les résultats deviennent peu fiables. C'est le cas pour le primaire car les
conducteurs sont fort écartés: le pas de bobinage vaut plus de huit fois le diamètre. D'autre part,
nous montrerons au chapitre III que le facteur de remplissage est théoriquement discutable.
En attendant une discussion plus approfondie, utilisons la valeur calculée classiquement. On
obtient alors successivement:
R DC1 =
N 1 .lT
⎛ πd 2
σ ⎜⎜
⎝ 4
⎞
⎟⎟
⎠
=
15.0,1
= 0,520Ω
−3 2
7 π .(0,25.10 )
5,88.10 .
4
2
PCu1 = FR .R DC .I RMS
= 1,03.0,52.2 2 = 2,14W
(I.3-22)
(I.3-23)
Dans l'exemple donné ci-dessus, les enroulements comportent chacun une seule couche, de sorte
que le minimum de la fonction KR est très plat. En présence de plusieurs couches, ce minimum est
plus prononcé: les pertes sont alors beaucoup plus sensibles à l'épaisseur des conducteurs, comme
le montre un autre exemple qui sera donné au §VI.7.1.
I.3.5 Vérification finale
Pertes totales
Au total, on obtient donc pour la somme des pertes fer (I.3-14) et des pertes cuivre (I.3-21) et
(I.3-23):
PTot = 5,68 + 0,47 + 2,14 = 8,29W
(I.3-24)
soit 2,7% de la puissance de sortie, ce qui est très raisonnable. On peut remarquer que les pertes
fer et les pertes cuivre sont du même ordre dans ce total, ce qui indique un bon dimensionnement.
Compte tenu de ce faible niveau de pertes, le noyau choisi précédemment peut être conservé à ce
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
I - 30
stade du calcul. A l'inverse, lorsqu'on constate des pertes cuivre trop élevées, il faut passer à un
noyau de taille supérieure ou réarranger les enroulements.
Echauffement du transformateur
Compte tenu des faibles niveaux de pertes obtenus, on peut supposer que l'échauffement du
transformateur reste limité. On le vérifiera en pratique en utilisant pour les pertes cuivre des
abaques donnant l'élévation de température en fonction du courant et de la section des
conducteurs. Ces abaques font cependant référence à des situations standardisées qui ne reflètent
pas les conditions thermiques réelles des enroulements. Il est encore plus délicat de donner un
critère thermique précis concernant les pertes fer. En pratique, on utilise invariablement des
formules empiriques pour évaluer l'augmentation de température de la pièce magnétique.
On constate donc que le dimensionnement est particulièrement imprécis de ce point de vue: c'est
essentiellement l'expérience du concepteur qui jugera si les pertes restent à un niveau raisonnable
ou non. D'autre part, sauf à réaliser des simulations par éléments finis, le concepteur ne dispose
pas de moyens de localiser les points chauds éventuels. Là aussi, c'est la pratique et la réalisation de
prototypes qui permettront de valider un design.
Encombrement de la fenêtre de bobinage
Enfin le dernier facteur à vérifier est l'encombrement de la fenêtre de bobinage. Il est possible en
effet que les critères précédents soient satisfaits mais que les enroulements soient trop volumineux
pour le noyau choisi, auquel cas on doit évidemment revoir le dimensionnement. Notre
transformateur étant particulièrement élémentaire, il n'y a pas ici de problème de ce point de vue.
I.3.6 Conclusion
Le calcul effectué ci-dessus confirme, dans le cas d'un transformateur simple, les remarques faites
précédemment. On constate en effet que de nombreuses contraintes de nature fort différentes
doivent être prises en compte: le champ maximal dans la ferrite, la température admissible dans le
noyau et dans les enroulements, la place disponible dans la fenêtre de bobinage ou pour implanter
la pièce magnétique, etc.
D'autre part, modifier une seule variable entraîne souvent de revoir complètement le
dimensionnement. On peut par exemple être amené à remettre en cause le choix du noyau parce
que les pertes fer sont trop élevées: on modifie alors simultanément le champ maximal dans la
ferrite, la taille des enroulements et donc les pertes cuivre et l'encombrement du transformateur.
Enfin les limites et approximations dejà évoquées à propos de certaines méthodes de calcul
apparaissent également. Le calcul des pertes fer se base sur des formules empiriques alors que celui
des pertes cuivre utilise un modèle unidimensionnel dont la fiabilité est mal connue. Quant à
l'échauffement du transformateur, on ne peut l'évaluer que de manière très grossière.
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
I - 31
Le problème relativement simple traité ci-dessus se complique encore lorsqu'on ajoute, comme
c'est souvent le cas, des contraintes sur certaines valeurs électriques intervenant dans le
fonctionnement du convertisseur (inductance de fuite, capacités parasites, etc), sur les connexions
des enroulements par rapport au circuit extérieur, sur l'absence de points chauds, sur les isolants à
utiliser, etc.
En conséquence, le dimensionnement est souvent un processus itératif amenant à trouver par
essais et erreurs une solution de compromis entre les différentes contraintes. C'est ce qui explique
que l'expérience joue un rôle important dans ce processus et que la conception des pièces
magnétiques est toujours laissée au soin d'un spécialiste. Si de nombreux auteurs proposent des
algorithmes –d'ailleurs itératifs– pour arriver à un design supposé optimal, la plupart des
concepteurs préfèrent utiliser des méthodes et des outils de calcul personnalisés.
Tous ces facteurs expliquent donc que d'importants efforts de recherche soient consacrés aux
pièces magnétiques et à leur dimensionnement. Nous espérons y contribuer par cette thèse, dont
nous allons maintenant exposer de manière plus détaillée les objectifs.
I.3 - Introduction aux convertisseurs…: Exemple de dimensionnement
I - 32
I.4 Objectifs de la thèse
Après avoir précisé le contexte de notre étude dans les trois points précédents, nous pouvons
maintenant en présenter pleinement tous les enjeux et objectifs.
I.4.1 Une thèse pour "voir" dans les transformateurs
Depuis de nombreuses années, la société I.T.S. Mitra développe des convertisseurs de puissance de
quelques dizaines de watts à quelques kilowatts, principalement pour des applications
professionnelles comme les télécommunications ou l'électronique médicale par exemple. Compte
tenu des marchés visés, il s'agit de convertisseurs d'une qualité supérieure à ceux qu'on peut
rencontrer dans les produits "grand public" (électroménager, ordinateurs personnels, etc) et
possédant notamment une durée de vie nettement plus élevée.
Une collaboration fructueuse s'est établie depuis de nombreuses années entre I.T.S. Mitra et le
service d'Electronique, Micro-électronique et Télécommunications de l'Université Libre de
Bruxelles, notamment dans le cadre de l'étude des convertisseurs à résonance [17][82][201][202][165].
C'est dans ce contexte qu'est née l'idée d'initier une recherche approfondie sur les pièces
magnétiques dans les convertisseurs, sujet encore peu traité à l'Université et à la fois complexe et
crucial comme on a pu s'en rendre compte dans les pages précédentes.
L'idée d'une thèse est venue elle-même de l'apparition de logiciels de simulation de champs
électromagnétiques de plus en plus performants, rendant possible l'étude des transformateurs de
puissance en deux voire en trois dimensions. Le but était simple: exploiter un tel outil pour "voir"
dans les pièces magnétiques, étudier ainsi la répartition spatiale des champs et des courants, et
déterminer quels sont les moyens d'action qu'on peut avoir pour les maîtriser. Les logiciels de
simulation évoluant très rapidement, une telle étude n'aurait pas été possible il y a une dizaine
d'années seulement.
Cet objectif, tout en étant fascinant, répond à des besoins bien concrets. Comme on l'a expliqué,
dimensionner une pièce magnétique est une opération délicate et partiellement empirique compte
tenu du grand nombre de variables à considérer et des limitations des outils de calcul actuels. A
l'inverse, les simulations permettent d'obtenir des résultats plus précis mais s'avèrent trop lourdes à
utiliser pour un usage industriel systématique.
D'autre part, on a associé à cette première idée la recherche d'un schéma équivalent multisorties
valable en haute fréquence. L'idée est ici de disposer d'un modèle adéquat du transformateur
lorsqu'on réalise des simulations électriques du convertisseur.
I.4 - Introduction aux convertisseurs…: Objectifs de la thèse
I - 33
I.4.2 Objectifs de la deuxième partie (simulations)
Les simulations électromagnétiques, parce qu'elles permettent donc de "voir" à l'intérieur des
transformateurs de puissance, seront utilisées comme outil d'analyse principal dans la seconde
partie de cette thèse.
Ignorant volontairement le problème du calcul des pertes fer, qui constitue à lui seul un autre
thème de recherche, le propos est essentiellement centré sur l'étude de la densité de courant dans
les enroulements, répartie non uniformément suite aux effets haute fréquence (effet pelliculaire et
effet de proximité) comme on l'analysera en détail.
On sait que les méthodes classiques de calcul des pertes cuivre (formules de Dowell et
apparentées) prennent en compte ces effets mais uniquement dans des modèles unidimensionnels. Or
de nombreux auteurs émettent des réserves quant à cette limitation. On a en particulier constaté
chez I.T.S. Mitra un cas où des transformateurs, dimensionnés selon ces méthodes classiques, ont
brûlé. Si l'origine de la défaillance n'a pas été clairement élucidée, on soupçonne néanmoins les
modèles unidimensionnels de manquer occasionnellement de fiabilité, ce qui est le point de départ
de la présente étude.
Une première étape sera donc de vérifier la précision des méthodes unidimensionnelles
lorsqu'on les applique aux transformateurs de puissance réels, tridimensionnels par nature. Sachant
que ces méthodes sont très largement utilisées et donnent globalement de bons résultats, il ne faut
pas s'attendre ici à mettre en évidence des discordances flagrantes. L'idée est plutôt de quantifier
les approximations réalisées et de déterminer si celles-ci peuvent effectivement devenir
dommageables dans certains cas à identifier.
Apparaît ici une difficulté particulière: le très grand nombre de variables à prendre en compte dès
qu'on considère un modèle ne se limitant plus à une seule dimension. Les types d'enroulements et
leur disposition dans la fenêtre de bobinage peuvent en effet varier fortement d'un transformateur
à l'autre, même si on se limite à une description à deux dimensions. Cette difficulté explique
d'ailleurs que les travaux déjà réalisés sur ce sujet se bornent généralement à des études de cas,
comparant les résultats des méthodes classiques à ceux obtenus en simulation pour des
transformateurs particuliers. Nous essayerons au contraire d'obtenir des conclusions plus
générales, en commençant néanmoins par des modèles simples à deux dimensions que nous
compliquerons progressivement.
Supposons qu'on arrive à quantifier l'erreur des méthodes unidimensionnelles, on n'aura alors
réalisé qu'un premier pas permettant de constater s'il faut effectivement les mettre en cause. Si c'est
le cas, il sera alors intéressant de rechercher dans une deuxième étape des outils de calcul
alternatifs possédant une meilleure précision. Il faut néanmoins garder à l'esprit que ces nouveaux
outils doivent rester accessibles au concepteur industriel. Par comparaison aux simulations par
éléments finis, ils doivent en particulier se limiter à des temps de calcul beaucoup plus courts.
I.4 - Introduction aux convertisseurs…: Objectifs de la thèse
I - 34
Enfin on peut imaginer une troisième étape qui consisterait à comprendre les phénomènes et à
maîtriser les variables qui régissent les effets haute fréquence dans des géométries bi- et
tridimensionnelles. Le but est ici de donner au concepteur des règles de dimensionnement,
c'est-à-dire des conseils pour orienter son design davantage que de simples outils de calcul.
L'allure des champs dans un modèle unidimensionnel est bien connue grâce à la maîtrise des
modèles classiques. Dans un modèle à deux dimensions, l'analyse est déjà plus incertaine, et peu de
gens ont une idée assurée de la configuration des champs dans et autour d'un transformateur réel.
Un objectif supplémentaire est donc d'analyser les champs dans les modèles à trois dimensions,
d'une part pour en avoir simplement une bonne idée qualitative, d'autre part pour déterminer s'il
existe des effets tridimensionnels spécifiques susceptibles d'influencer significativement les
pertes. Ici aussi, on peut songer à des outils de calcul alternatifs et à des règles de
dimensionnement spécifiques s'il existe un besoin en ce sens, mais l'introduction d'une dimension
supplémentaire complique encore l'étude.
Enfin, outre le calcul précis des pertes cuivre d'un enroulement en deux ou en trois dimensions,
l'étude porte aussi sur la mise en évidence de points chauds éventuels (dus à des concentrations
locales de la densité de courant), à l'évaluation de leur dangerosité et le cas échéant à leur
élimination. Les simulations par éléments finis représentent un des seuls moyens d'analyser ce type
de problème.
Le but global de cette seconde partie est donc d'aider le concepteur industriel à mieux maîtriser,
qualitativement et quantitativement, les effets bi- et tridimensionnels dans les transformateurs de
puissance de manière à minimiser les pertes cuivre et à réduire le risque de points chauds.
Bien entendu, puisque nous utiliserons abondamment les simulations comme outil d'analyse, la
validité de celles-ci devra être confirmée expérimentalement. Des mesures sur transformateurs
réels seront donc réalisées parallèlement aux simulations.
I.4.3 Objectifs de la troisième partie (modélisation)
Le second objectif de ce travail, traité dans la troisième partie du texte, est de rechercher un
schéma équivalent de transformateur adéquat. L'idée est ici de pouvoir modéliser l'ensemble des
aspetcs du transformateur intervenant dans le fonctionnement du convertisseur. Or ceux-ci sont
nombreux comme on l'a expliqué dans les points précédents.
Il s'agit en particulier de modéliser les effets propres à la présence de plus de deux enroulements
d'une part (puisque la majorité des convertisseurs possèdent des sorties multiples) et à l'utilisation
des techniques de commutation résonantes d'autre part, ce qui implique en particulier une
modélisation correcte et suffisamment poussée des différentes inductances. Les capacités
parasites, intervenant de plus en plus souvent compte tenu des fréquences atteintes, doivent
également être un sujet de préoccupation.
I.4 - Introduction aux convertisseurs…: Objectifs de la thèse
I - 35
Enfin, malgré toutes ces exigences, le schéma équivalent doit rester aussi simple que possible pour
être exploitable une fois encore dans un contexte industriel. Le but est notamment de l'utiliser aux
étapes de conception, lors de simulations préalables à la réalisation physique du convertisseur.
Dans cette troisième partie également, les confirmations expérimentales seront indispensables pour
valider les simulations électriques.
I.4 - Introduction aux convertisseurs…: Objectifs de la thèse
I - 36
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