Économie industrielle et des organisations (EIO) Section 4B : Oligopole & Théorie des jeux Bertrand Quélin Email : [email protected] Poste 72.70 1 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Types de concurrence Interaction Stratégique sur les marchés oligopolistiques 1. Compétition par les prix (Bertrand) (Produits homogènes et hétérogènes) 2. Compétition par les quantités (Cournot) Leçons à retenir Importance de la différenciation Rôle des capacités de production 2 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Guerre des prix Industrie concurentielle : P = Cm = CM → Oligopole : P = Cm? Exemple 1 : Annuaires sur CD-ROM π=0 Danger de la concurrence par les prix • 1986 : Nynex décide de son prix : $10 000 par disque pour New York • ProCD and Digital Directory Assistance • Travailleurs chinois payés 3,50$ par jour • Compétition par les prix : gratuité Exemple 2 : Encyclopédie Britannica (EB) vs. Encarta 1991 : EB vendue à $1 600 1992 : Microsoft introduit Encarta, vendue à $49,95 1995 : Ventes de EB diminuent de 50% 1995 : EB offre des abonnements en ligne pour $120 ou des CD pour $200 1996 : EB baisse son abonnement à $85 1999 : EB offre un service gratuit (www.britannica.com) © Bertrand Quélin - Groupe HEC 3 1 La concurrence selon Bertrand Bertrand ou la Concurrence-prix pour des biens homogènes E-commerce : Le coût de la première unité est élevé – Coût irrécupérable (sunk cost) Economies d’échelle : – Cm faible proche de 0 Equilibre de Nash: P1 > P2 P1 = P2 > Cm P1 = P2 = Cm 4 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Dilemme du prisonnier: une illustration C’est un Dilemme du prisonnier ! Encarta P– ε P 5 P 5 Britannica P– ε 10 0 0 10 3 3 Il faut éviter ce genre de situation !!! 5 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Les réponses stratégiques possibles Comment éviter cette situation? Stratégies • Avantage en terme de coût • Fusion • Stratégies dynamiques • Limiter sa production • Différenciation © Bertrand Quélin - Groupe HEC 6 2 Concurrence duopolistique Coke vs. Pepsi Qcoke = 64 − 4 Pcoke + 2 Ppepsi Q pepsi = 50 − 5 Ppepsi + Pcoke MC coke = 5; MC pepsi = 4 • Prix et coûts en dollars de 1982 pour dix caisses de cola • Quantités en dizaines de millions de caisses par an * Source : Gasmi, F., J.J. Laffont, and Q. Vuong, “Econometric Analysis of Collusive Behavior in a Soft-Drink Market,” Journal of Economics and Management Strategy, (Summer 1992), pp. 277 - 311 7 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Le problème Concurrence par les prix Utiliser la formule Cm-Rm pour déterminer Q Trouvez les prix optimaux 8 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Coca Dérivation de la courbe de réponse optimale de Coca Si Pepsi charge Ppepsi, la demande pour Coca est : Qcoke= 64 - 4Pcoke + 2Ppepsi Si Pepsi charge Ppepsi, la courbe de demande inversée de coca est : Pcoke= 16 + 0.5Ppepsi - 0.25 Qcoke Si Pepsi charge Ppepsi, le revenu de Coca est : Rcoke= (16 + 0.5Ppepsi - 0.25 Qcoke ) Qcoke Rcoke= 16 Qcoke + 0.5Ppepsi Qcoke - 0.25 Q2coke Le revenu marginal de Coca est : Rmcoke= 16 + 0.5Ppepsi - 0.5 Qcoke La condition de maximisation des profits donne Qcoke and Pcoke Rmcoke = Cmcoke 16 + 0.5Ppepsi - 0.5 Qcoke = 5 Qcoke= 22 + Ppepsi La courbe de réponse optimale est donc : Pcoke= 16 + 0.5Ppepsi - 0.25 (22 + Ppepsi ) Pcoke= 10.5 + 0.25Ppepsi © Bertrand Quélin - Groupe HEC 9 3 Pepsi Dérivation de la courbe de réponse optimale de Pepsi Courbe de demande: Qpepsi= 50 - 5Ppepsi + Pcoke Courbe de demande inversée: Ppepsi= 10 + 0.2Pcoke - 0.2 Qpepsi Revenu marginal : Rmpepsi = 10 + 0.2Pcoke - 0.4 Qpepsi Courbe de réponse optimale: Ppepsi= 7 + 0.1Pcoke 10 © Bertrand Quélin - Groupe HEC L’équilibre Equilibre Bertrand Nash 16 P pepsi P coke = 10.5 + 0.25Ppepsi 14 Nash Equilibrium: * P coke = 12.56; 12 P 10 * P pepsi = 7 + 0.1P coke = 8.26 pepsi 8.2 8 6 6 4 2 0 0 2 4 6 8 10 12 14 12.56 16 18 20 22 24 26 Anticipant correctement le prix de l’autre, aucun n’a intérêt à changer son prix 28 30 P coke 11 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Qu’est-ce que Nash ? Equilibre de Nash Trouver des prix (P1, P2) tels que P2 est le prix optimal pour la firme étant donné P1 et que P1 est le prix optimal pour la firme 1 étant donné P2. En apprenant le prix de son concurrent, aucune firme n’a intérêt à changer son prix. © Bertrand Quélin - Groupe HEC 12 4 Qu’a-t-on appris de Bertrand ? Résumé : concurrence par les prix • Quand les produits sont différenciés, les firmes ont un certain pouvoir de marché. • Elles doivent alors prendre en compte le prix des concurrents dans leur choix de prix. • La courbe de réponse optimale décrit le prix qui maximise les profits en fonction du prix fixé par son concurrent. • L’équilibre de Nash se trouve à l’intersection de ces courbes. • Quand les produits sont homogènes, les firmes réduisent leur prix jusqu’au coût marginal. 13 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Echapper à la spirale de la guerre des prix Comment éviter cette situation? Stratégie • Avantage en terme de coût • Fusion • Stratégies dynamiques • Limiter sa production • Différenciation 14 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Cournot Concurrence en capacité (quantité) - Cournot Exemple : 2 firmes AMD et INTEL – fabricants de puces Hypothèse : Augmentation des capacités productives par INTEL → Augmentation de la production → Les prix vont baisser → Retour sur investissement plus faible pour AMD → AMD va investir moins Actions/stratégies : Choix de capacité (quantités) Si INTEL investit plus, AMD investit moins Si AMD investit plus, INTEL investit moins © Bertrand Quélin - Groupe HEC 15 5 AMD - Intel Exercice - Cournot AMD et Intel sont identiques, elles produisent des puces mémoire de 128Mbits (memory chips) dans des usines avec des contraintes de capacité. Le coût par millions de puces est de 30. La fonction de demande du marché est : P = 150 − Q Analysons le marché de type Cournot de cette industrie : a. Ecrire les profits des firmes en fonction du choix de capacité des deux firmes. b. Trouvez la fonction de réponse optimale de chaque firme. 16 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Fonctions de réaction Exercise 11. 4c Q KQ2 120 110 100 90 80 Cournot-Nash 70 60 50 40 30 20 10 0 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 K Q1 120 17 © Bertrand Quélin - Groupe HEC La démarche c. Trouver les quantités qui forment un équilibre de Nash d. Calculer les profits de chaque firme. © Bertrand Quélin - Groupe HEC 18 6 Enseignements Résumé de la concurrence en capacité (Cournot) Quand les firmes sont contraintes dans leur capacité productive, le prix reste au-dessus du Cm, même quand les produits sont homogènes. La concurrence en quantité n’est pas aussi dangereuse que la concurrence par les prix. Le prix ne descend pas au niveau du coût marginal. 19 © Bertrand Quélin - Groupe HEC De Bertrand à Cournot ? Concurrence par les prix ou en capacité? Les Firmes se font concurrence à la Bertrand (par les prix). Scénario 1 : Surcapacités de production : P = Cm. Scénario 2 : Pas de suracapacité, le prix baisse jusqu’au point où la demande est égale à la capacité totale dans l’industrie. ► Aucune firme n’a intérêt à baisser davantage ses prix puisque elle vend toute sa production. Les firmes comprennent que le prix sur le marché va être fixé de telle façon que toute la capacité sera utilisée. ► Le véritable choix de l’entreprise va donc devenir la capacité à installer, ou la quantité à produire. C’est exactement la situation de la concurrence à la Cournot. Prédiction raisonnable : les firmes vont choisir les quantités de l’équilibre de Cournot. Une alternative est que les firmes différencient leurs produits et se fassent alors concurrence par les prix. 20 © Bertrand Quélin - Groupe HEC La Collusion La collusion sur les marchés oligopolistiques Marchés oligopolistiques Action individuelle (firme i) et action collective (groupe de firmes) Actions stratégiques et externalités • Comparaison du résultat d’équilibre avec le résultat collusif Comment atteindre le résultat collusif ? • Collusion tacite dans le cadre d’un jeu répété • Autres méthodes : fusion, programme de fidélité … LEÇON Le résultat collusif conduit à des profts plus importants. Des stratégies existent pour s’en approcher. © Bertrand Quélin - Groupe HEC 21 7 Interactions stratégiques et externalités Problématique ¾ Comment réagir à une hausse de prix (quantité) ? ¾ Est-ce une bonne nouvelle ? • Définitions : • Il existe une externalité quand l’action d’un joueur affecte le profit d’un autre joueur, mais que celui-ci ne prend pas en compte cet effet quand il choisit son action. • On dit qu’il n’internalise pas l’effet de son action. • Il y a interaction stratégique quand l’action d’un joueur influence la décision des autres joueurs. 22 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Les externalités Classification des Externalités En mots… Positive En symboles… u2(A2, A1) augmente en Un niveau plus élevé des décisions A1 bénéficie aux autres Un niveau plus u2(A2, A1) diminue en Négative élevé des décisions A1 nuit aux autres 23 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Ce qu’entraînent les externalités Une conséquence des externalités Externalité Est-ce que les actions entreprises dans un équilibre de Nash sont plus hautes ou moins hautes que celles qui maximisent les profits joints ? Positive Plus faibles : EN : les joueurs ne font pas assez de la ‘bonne action’ Négative Plus fortes : EN : les joueurs font trop de la ‘mauvaise action’. © Bertrand Quélin - Groupe HEC 24 8 Les interactions entre joueurs Classification des interactions stratégiques compléments stratégiques Fonctions de réaction croissantes substituts stratégiques Fonctions de réaction décroissantes 25 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Elasticité et actions stratégiques : Coca Cola vs. Pepsi Qcoke = 64 – 4Pcoke + 2Ppepsi Qpepsi = 50 – 5 Ppepsi + Pcoke Augmenter Ppepsi augmente la demande de Coca Cola Cela diminue l’élasticité. Pcoke doit augmenter. ⇒ Prix : compléments stratégiques 26 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Collusion avec concurrence par les prix - Coke vs. Pepsi Les firmes ont-elles intérêt Πcoke = (Pcoke – CMcoke) . Qcoke Πpepsi = (Ppepsi – CMpepsi) . Qpepsi à s’entendre ? Πcoke = (Pcoke – 5) . (64 – 4 Pcoke + 2 Ppepsi ) Πpepsi = (Ppepsi – 4) . (50 – 5 Ppepsi + Pcoke) Si elles s’entendent, est-ce que les prix vont monter ? baisser ? Pourquoi ? © Bertrand Quélin - Groupe HEC 27 9 Résumé : Concurrence par les prix Biens Biens substituts : Externalités positives et compléments stratégiques Les prix montent : les cartels sont profitables et combattus par les autorités complémentaires : Externalités négatives et substituts stratégiques Les prix baissent : les cartels sont profitables, mais encouragés 28 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Résumé : Concurrence de type Cournot Exemple d’externalité négative et de substituts stratégiques Les cartels sont profitables et illégaux ! 29 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Externalités et interactions stratégiques Si les profits des joueurs augmentent avec l’action de l’autre joueur, les actions ont des externalités positives. Si la courbe de réaction des joueurs est croissante, alors les actions sont des compléments stratégiques. Si la courbe de réaction des joueurs est décroissante, alors les actions sont des substituts stratégiques. Comprendre les externalités et les interactions stratégiques permet d’analyser la profitabilité de fusions ou de cartels dans différentes configurations d’industrie Externalités et interactions stratégiques sont aussi utiles pour comparer les résultats de jeux séquentiels © Bertrand Quélin - Groupe HEC 30 10 Comment obtenir les profits collusifs ? Jeux répétés Firme 2 Collusion 10 000 Tricher 20 000 Collusion 10 000 Firme 1 1 000 1 000 2 000 Tricher 20 000 2 000 Équilibre de Nash : 2 000 Collusion : 10 000 31 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Stratégies pour obtenir les profits collusifs Commencer par coopérer Coopérer tant que le concurrent coopère Si l’autre triche, arrêter de coopérer pour une période donnée (toujours) Tit for Tat 32 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Profits VA (collusion) = 10000 + VA (triche) = 20000 + 10000 10000 10000 + + ... = 10000 + 1+ r (1 + r ) 2 r 2000 2000 2000 + + ... = 20000 + 1 + r (1 + r ) 2 r $ 20 000 10 000 collusion 2 000 triche t+1 t+2 t+3 temps Question : (Collusif,Collusif) est-il un équilibre de Nash ? © Bertrand Quélin - Groupe HEC 33 11 Collusion tacite : Coûts et bénéfices Les Gains de coopération doivent être plus importants que les gains liés à la triche puis, à la punition Collusion : VA (collusion) > VA (triche) 10 000 + 10 000/r > 20 000 + 2 000/r → r < 0.8 Points-clés : Si la détection de la triche est sûre et la punition rapide, la coopération est possible. Problème de la crédibilité des sanctions en cas de triche. 34 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Jeux répétés – Horizon fini Est-ce que les menaces et les promesses sont crédibles dans ce cadre ? Jeu répété deux fois ? Trois fois ? N fois ? 35 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Résumé : Jeu répété Les promesses et les menaces peuvent être utilisées pour coopérer Un tel système de menaces et de promesses peut permettre à un cartel d’obtenir des profits collusifs, si les firmes sont suffisament patientes et l’horizon infini. Importance de la réputation Horizon fini : de telles constructions ne fonctionnent pas (pb de la dernière période) © Bertrand Quélin - Groupe HEC 36 12 Jeu Stratégie des compagnies aériennes UA (United Airlines) Haut Bas Dilemme du prisonnier (encore une fois) 8 10 Haut 8 AA (American Airlines) 0 0 2 Bas 10 2 37 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Changer le jeu : lancer un programme de fidélité UA High Low 8 7 10 High 8 En introduisant un programme de fidélité, AA peut diminuer les incitations de UA à baisser ses prix 0 3 AA 0 2 Low 10 2 38 © Bertrand Quélin - Groupe HEC Frequent Flyer Programs (Programme de fidélité) UA Ça marche encore mieux quand la firme concurrente adopte un programme similaire. High Low 7 8 10 High Nash : Prix hauts 8 AA Les programmes Frequent flyer augmentent les switching costs ; ils changent la nature du jeu 0 3 © Bertrand Quélin - Groupe HEC 3 0 2 Low 10 7 2 39 13