La Chine et le monde après le XVIIIe congrès du PCC

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La Chine et le monde
après le XVIIIe congrès du Parti communiste chinois
Extrait d’un document de préparation d’un colloque qui se tiendra après le XVIIIème congrès du PCC.
Voir http://calenda.revues.org/nouvelle23482.html.
2012 est une année cruciale pour la Chine. C'est à cette occasion que le XVIIIe
Congrès du Parti Communiste Chinois (PCC) se réunira, et désignera officiellement la
nouvelle équipe dirigeante. Différents prétendants devront se positionner en vue de
leur élection, et de cette dernière dépendra l'avenir de la Chine. Neuf membres du
Politburo présideront sur le continent, et pour les années à venir, les destinées d'un
milliard trois cent millions de leurs compatriotes. Par ailleurs, du fait des importantes
décisions adoptées lors des précédents congrès, comme celui de 2007 qui officialisa la
stratégie de soft power de la Chine, cette échéance politique soulève de multiples
interrogations sur les grandes orientations qui seront prises, tant en matière de
politique intérieure que sur le terrain de la politique étrangère.
Si les indicateurs sont dans l'ensemble au vert, l'avenir de la Chine – et par extension
du monde entier – reste soumis à de multiples incertitudes qui sont autant de facteurs
potentiels de rupture. Des facteurs endogènes (problèmes des mingong, inflation,
bulle spéculative immobilière, pollution, tarissement des nappes phréatiques, etc.) et
exogènes peuvent, ainsi, provoquer un véritable séisme politique et géopolitique.
Cette situation impose bien entendu une attention toute particulière portée sur l'état de
l'économie chinoise. Hier désireux de la voir s'effondrer, les États-Unis ont
aujourd'hui pris la mesure de l'importance de maintenir la croissance chinoise, en
raison des interdépendances de plus en plus fortes. Un peu à la manière de
l'américanisation qui fut en son temps assimilée à la mondialisation, l'économie
mondiale est désormais intimement liée à l'économie chinoise, et cette dernière ne
peut par conséquent manquer à ses obligations. Malgré des efforts qui méritent d'être
mentionnés, la Chine n'est cependant pas à l'abri de révoltes dans les immenses
territoires qui tardent à voir la croissance économique se traduire en développement,
ou encore dans les zones urbaines où les écarts de richesses créent des frustrations
inédites dans le régime communiste, malgré la montée en puissance progressive des
classes moyennes. Mentionnons aussi les revendications sociales de plus en plus
fermes, l'explosion d'Internet avec une difficulté accrue de le contrôler entièrement,
ou encore les problèmes liés à l'eau (que ce soit l'irrigation, ou le phénomène de
désertification dans certaines provinces). On peut également imaginer le scénario de
revendications autonomistes plus vives, ou encore d'une difficulté plus grande pour la
Chine à exporter ses biens de consommation en raison de la crise qui frappe les
principales économies de la planète. Les défis sont non seulement multiples, mais la
liste semble s'allonger jour après jour, rançon de la gloire pour un pays qui s'est
progressivement invité dans le cercle des puissances, au point de devenir un véritable
pôle de l'activité économique internationale. Le moindre signe de rupture de cette
harmonie si chère aux dirigeants pourrait conduire le pays tout entier à la catastrophe.
Et comme la Chine est en passe de devenir la première puissance mondiale, c'est le
monde qui tremble à l'idée de voir l'empire du Milieu entrer en crise.
C'est cependant surtout l'impact des relations sino-américaines qui va déterminer à la
fois l'avenir de la société chinoise et celui du monde en général. Toutefois, ce qui
change dans la nature même de ces relations, c'est que la Chine, ses élites semblent
tourner le dos aux humiliations passées avec la conscience aiguë que le centre de
gravité de l'économie mondiale a basculé vers l'Est.
Reste une interrogation majeure, pour laquelle 2012 pourrait apporter quelques
éléments de réponse : à quoi ressemblera la puissance chinoise dans les prochaines
années ? Officialisé à l'occasion du XVIIe congrès du PCC de 2007 (mais déjà
fortement suggéré dès 2002), le soft power chinois est une stratégie politique, mais
s'agit-il d'une réalité sur le long terme ? Tandis que 2012 pourrait voir éclore de
nouvelles orientations de politique étrangère et de stratégie d'influence, cette question
prend tout son sens, et tous les regards seront tournés vers la nouvelle équipe
dirigeante, et sur son attitude sur la scène internationale. Derrière le discours officiel,
la Chine se montre en effet de plus en plus active, voire parfois arrogante, sur la scène
diplomatique. De même, la montée en puissance militaire et les implications
politiques soutenues, propres à un régime autoritaire qui n'accepte pas qu'on le
critique, nous conduisent à penser que le soft power chinois est une stratégie louable
et qui fut marquée par des victoires éclatantes au cours des dernières années, mais qui
n'éclipse pas les réalités d'une Chine qui joue sur plusieurs tableaux à la fois pour
accélérer sa montée en puissance. Enfin, l'autre question majeure concerne la mise en
place d'un véritable modèle que Pékin chercherait à proposer à d'autres nations, les
pays en développement en tête. Pour l'heure, on voit que la tentation de la Chine de
proposer un « consensus de Pékin » qui se substituerait au « consensus de Washington
» reste peu présente dans la stratégie du soft power. Mais les choses pourraient
évoluer rapidement. Avec l'arrivée d'une nouvelle génération de dirigeants en 2012, et
forte d'une puissance économique et désormais culturelle qu'elle n'a jamais connu, la
Chine pourrait chercher à prendre la tête des pays en développement. Les positions de
Pékin exprimées lors du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique en
décembre 2009, et le soutien que la Chine a alors reçu de pays comme l'Inde, le Brésil
ou l'Afrique du Sud, sont des indicateurs qui vont dans ce sens.
L'avenir de la Chine pourrait ainsi s'écrire en grande partie en 2012, et s'affiner dans
les cinq années suivantes, jusqu'au XIXe Congrès du PCC de 2017, à l'occasion
duquel les changements amorcés dès à présent seront examinés et, dans l'hypothèse de
succès, érigés au rang de stratégie officielle. Ainsi s'opère la montée en puissance de
la Chine, tant en ce qui concerne la consolidation et les mutations de sa société que
l'affirmation de sa puissance sur la scène internationale. Un pragmatisme parfois
cynique, des réformes plutôt qu'une révolution, et des objectifs qui chaque jour
s'affirment un peu plus, et dessinent les contours d'un monde dans lequel Pékin jouera,
qu'elle le veuille ou non, le premier rôle.
L'objectif de ce colloque est de proposer des débats bilingues (français et anglais) sur
les orientations de la Chine, en faisant intervenir les meilleurs experts du sujet, et en
mettant l'accent sur trois angles :
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Les défis intérieurs
La politique de voisinage de la Chine et les enjeux politico-stratégiques
La politique internationale de la Chine, dans ses aspects politiques,
stratégiques et économiques.
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