PHARE_53:Juin 10/06/10 9:49 Page 24 HUMEUR FMC, DPC, un changement d’acronyme qui passe par la case «arnaque» epuis peu, nous ne parlons plus de FMC (formation médicale continue), mais de développement professionnel continu (DPC), terme qui englobe la FMC et l’évaluation des pratiques professionnelles. Désormais, le DPC sera développé et financé par les établissements de santé : une évolution redoutable et inéluctable. D I Le SNPHAR-E s’est toujours résolument positionné en faveur d’une formation médicale continue de qualité pour les praticiens hospitaliers, afin de garantir la qualité et la sécurité des soins prodigués aux patients. Cela implique que trois critères majeurs soient remplis : - une FMC adaptée aux besoins professionnels du PH; - une indépendance entre les organismes producteurs de FMC, le financeur (l’hôpital) et le choix d’une FMC par le PH ; - un financement spécifiquement dévolu à la FMC des PH. I Notre statut, nous alloue 15 jours annuels ouvrables de FMC et la possibilité d’un financement par notre employeur. Le financement hospitalier s’établit théoriquement à la hauteur de 1,5 % de la masse salariale des PH. Dès 1999, le SNPHAR revendiquait une « enveloppe annuelle formation » de 1500 € pour chaque PH, comme cela existe dans les pays anglo-saxons. Nous sommes toujours loin du compte ! Dans la réalité, la situation varie selon les établissements : du temps, mais peu ou pas de financement dans les CHU ; du financement, mais peu ou pas de temps dans les CHG. Avec l’encadrement de la loi HPST, l’employeur et la tutelle maîtrisent désormais à la fois le financement de la formation et son contenu. Redoutable, non ? 24 I Développer la formation au sein même des établissements publics de santé (EPS) permet à l’employeur d’en maîtriser le financement et d’en encadrer le contenu. L’objectif sera désormais de répondre à des projets de pôle ou d’établissement maturés par une gouvernance bien trempée, voire à des enjeux de santé définis par de hautes autorités nationales sur des critères de santé publique, mais aussi de rationalisation des soins, dans un but plus financier que médical. Il y a là, une perte totale de l’indépendance du PH dans le choix du thème de sa FMC. I Qu’il s’agisse d’accompagner l’avènement de nouvelles technologies au lit du patient ou d’élargir nos connaissances à des données connexes à la pratique médicale, nous sommes de plus en plus «vigoureusement incités », moyennant finances, à suivre des formations proposées par des organismes publics ou privés. Le DPC obligatoire associé à une «saine émulation de la concurrence» au sein du «marché de la formation» engendre inéluctablement l’inflation des coûts d’inscription des dites formations universitaires. Certaines atteignent plusieurs centaines, voire milliers d’euros! Ces tarifs prohibitifs rendent la formation permanente inabordable pour un PH de base qui doit la financer avec ses propres deniers. D’où une inégalité de moyens et de chances! I Et quand on sait qu’un lobbying bien ciblé suffit parfois à rendre opposables des formations, comment ne pas craindre le risque de dérapage vers des conflits d’intérêt? Pourtant, cette évolution semble bien inéluctable tant est forte la volonté de la tutelle de reprendre en main le corps médical. Corps qu’il s’agit d’orienter, via le DPC, vers de «grands objectifs » ou «enjeux de santé publique». Nous sommes loin du principe d’Hippocrate, loin d’une médecine restant un art et loin d’une formation permanente reposant sur le compagnonnage. I Nos collègues soignants paramédicaux sont d’ailleurs pris dans la même tourmente avec l’avènement de la réforme LMD (pour «Licence-Master-Doctorat »). Le principe de limiter à certains l’obtention d’acquis professionnels ou de pratiques avancées leur font redouter la perte de leur spécificité d’exercice, la fermeture d’écoles publiques de formation d’IADE. Il y a désormais le risque de la disparition du principe républicain de la promotion professionnelle au sein des EPS. Dans le cadre du DPC, la convergence organisée vers le marché fait s’éloigner dangereusement l’hôpital de l’éthique républicaine avec des effets collatéraux délétères pour ceux et celles qui se sont engagés dans le service public de santé. Patrick DASSIER, Trésorier et Nicole SMOLSKI, Présidente du SNPHAR-E http://www.snphar.com - Journal du Syndicat National des Praticiens Hospitaliers Anesthésistes-Réanimateurs Élargi - n° 53 - juin 2010