XI - MACROANGIOPATHIE La macroangiopathie est définie comme l'atteinte des artères de moyen et gros calibre. Elle regroupe les atteintes des artères coronaires, des artères à destinée cervicale et des artères des membres inférieurs. Elle représente la principale cause de mortalité dans le diabète, qu'il s'agisse du diabète de type 1 ou 2. L’athérosclérose est beaucoup plus fréquente et sévère chez le diabétique que dans la population générale. Les lésions touchent non seulement les gros troncs, mais aussi, et ceci est particulier au diabète, les artères plus distales. Ces atteintes distales et souvent diffuses rendent plus difficiles les perspectives de traitement chirurgical tant en ce qui concerne les coronaires que les membres inférieurs 1 - ANATOMIE PATHOLOGIQUE : On distingue 2 grands types de lésions : -l’athérosclérose : remaniements de l’intima et de la média des grosses et moyennes artères par l’accumulation de lipides, glucides complexes, de produits sanguins, de tissu fibreux et de calcium. -la médiacalcose : calcifications de la média et de la limitante élastique interne des artères de moyen et petit calibre. Ces lésions ne sont pas spécifiques de la maladie diabétique, mais surviennent plus tôt et avec une fréquence accrue chez les patients en hyperglycémie chronique. 2 - ÉPIDÉMIOLOGIE : Le diabète est un facteur de risque indépendant des maladies cardio-vasculaires : De nombreuses études épidémiologiques prospectives ou rétrospectives soulignent la gravité de la macroangiopathie et plus particulièrement de l'atteinte coronarienne. Les infarctus du myocarde sont plus fréquents chez les diabétiques, mais aussi plus graves. Le diabète est responsable d'une surmortalité d'origine cardio-vasculaire quelle que soit la population étudiée, aussi bien chez les hommes que chez les femmes et 65 à 80 % des patients diabétiques meurent d’une pathologie cardio-vasculaire. On estime que les maladies cardio-vasculaires sont responsables d’une diminution de l’espérance de vie de 8 ans pour les patients entre 55 et 64 ans. Le diabète fait aussi disparaître la relative protection qu'ont les femmes avant la ménopause vis à vis du risque coronarien. Il est très important de noter que si les diabétiques paient un lourd tribut aux complications cardiovasculaires, une meilleure prise en charge des différents facteurs de risque (PA, lipides, prescription d’anti-aggrégants plaquettaires..) est à l’origine d’une moindre mortalité dans les dernières études lorsqu’on compare l’incidence des complications à celle observée il y a 15 ans. Ces complications ne sont pas inéluctables et il est donc possible d’intervenir de manière efficace pour les prévenir. Il semble que, dans le diabète de type 1, l'incidence de la coronaropathie dépende de l’équilibre glycémique (étude DCCT- EDIC) et de la durée d'évolution du diabète. L'étude anglo-saxonne de la Joslin Clinic montre qu'après au moins 35 ans d'évolution du D1, 60 % des patients sont décédés, dont 25 % par infarctus. Les diabétiques de type 1 les plus à risque sont ceux atteints d'une néphropathie protéinurique (microalbuminurie > 300 mg/j) : le risque de voir un événement coronarien est 6 fois plus important que chez le DT1 normoalbuminurique. Le DT2 est un facteur de risque indépendant de maladie coronaire, d'accident vasculaire cérébral et d'artériopathie des membres inférieurs. Les complications cardio-vasculaires représentent aussi la principale cause de mortalité et de morbidité dans le diabète de type 2 : 20 % des D2 de découverte récente qui avaient accepté de participer à l'étude anglaise UKPDS (étude comparant différentes possibilités thérapeutiques) ont présenté un accident cardio-vasculaire durant les 9 premières années de l'étude. 18 % des patients inclus dans cette même étude présentaient déjà une anomalie de l'ECG au moment du diagnostic de diabète. Un travail épidémiologique a même suggéré que le risque cardiovasculaire d'un D2 en prévention primaire était au moins égal à celui d'un patient non diabétique en prévention secondaire. Des données plus récentes sont toutefois moins pessimistes. L'incidence de l'atteinte coronarienne ne dépend pas de la longueur d'évolution du D2, mais de l’équilibre glycémique, des marqueurs et des facteurs de risque qui lui sont associés. Il a été montré (Étude de Mac Léod) qu’une élévation modérée de la microalbuminurie (> 15 mg/j) est un marqueur du risque vasculaire puisque associé à une augmentation significative de la mortalité cardio-vasculaire. La microalbuminurie serait le marqueur d’une souffrance endothéliale diffuse. Ce risque cardiovasculaire accru apparaît dès le stade de l'intolérance au glucose. L'Étude Prospective Parisienne note que le risque de mortalité coronaire double dès que la glycémie à jeun est entre 1,25 g/l et 1,4 g/l et triple quand elle est > à 1,4 g/l. Le débat selon lequel la glycémie est un facteur de risque cardiovasculaire dans le diabète de type 2 reste ouvert. De nombreuses données épidémiologiques vont dans ce sens. Les résultats des dernières études d’intervention (PROACTIVE, ADVANCE, ACCORD…) sont plus discutables. Il faut retenir qu’en 2008, aucune étude n’a réussi à montrer qu’une intervention spécifique jouant seulement et exclusivement sur la glycémie améliore le risque cardiovasculaire. Il n’en est pas de même dans le DT1 où les patients randomisés dans le groupe « ttt intensifié » du DCCT présentent à long terme moins de complications cardiovasculaires que ceux du groupe standard. 3 - PHYSIOPATHOLOGIE : La physiopathologie de la macroangiopathie n’est pas encore connue avec certitude du fait de sa complexité et des multiples facteurs en cause. Même si son rôle a longtemps été sous-estimé, l’hyperglycémie par elle même est un facteur de risque de la macroangiopathie. Plusieurs études cliniques ont démontré que la glycémie et/ou l’HbA1c sont des marqueurs indépendants de mortalité cardio-vasculaire. Ainsi, dans l’étude DIGAMI 2, dans une population de DT2 suivis après un infarctus du myocarde, une augmentation de 2% de l’HbA1c conduit à une augmentation de la mortalité de 20 %. Les DT1 dont l’équilibre glycémique est satisfaisant font moins d’évènements cardiovasculaires que ceux dont l’HbA1c est chroniquement élevée. Les données épidémiologiques sont aussi en faveur de cette hypothèse. L'hyperglycémie interviendrait en : - favorisant la prolifération des cellules musculaires lisses sur la paroi artérielle, - favorisant la glycation des lipoprotéines, du collagène... - favorisant la thrombose, - en augmentant le stress oxydatif - en aggravant la dysfonction endothéliale. La question restant en suspens en 2008 est celle de savoir jusqu’où baisser la glycémie et l’HbA1c. Viser une HbA1c autour de 7 % semble être un objectif prudent, même s’il est souvent difficile à atteindre en pratique courante. Dans le DT2 la responsabilité de l’hyperinsulinisme dans la genèse de l’athérosclérose n’est pas certaine. Plusieurs études effectuées dans les années 1970-80 avaient suggéré que l’hyperinsulinisme était un facteur de risque de la macroangiopathie, mais ces études utilisaient des kits de dosage dosant en même temps l’insuline “native” et ses précurseurs (notamment la proinsuline) qui seraient athérogènes. Plusieurs études récentes ne retrouvent pas de lien entre l'insulinémie "vraie" et la mortalité cardio-vasculaire chez les diabétiques. Par ailleurs, tous les facteurs de risque classiques de la maladie coronaire sont retrouvés avec une fréquence accrue chez le diabétique et leur pouvoir pathogène est supérieur dans cette population à celui qu’ils possèdent dans la population générale. Plus de la moitié des D2 sont hypertendus et les données de l’étude MRFIT montre le pouvoir délétère de cette hypertension : la mortalité cardio-vasculaire est supérieure chez un diabétique ayant une TA systolique entre 140 et 159 mm Hg que chez un non diabétique ayant une TA systolique entre 180 et 199 mm Hg. L'étude UKPDS, a bien montré l'importance d'un contrôle strict de la pression artérielle chez les diabétiques de type 2. Dans cette étude le contrôle strict de la TA permet, après 9 années de suivi, une diminution significative de la mortalité, des AVC et des complications microvasculaires. Chaque diminution de 10 mmHg de la PA entraîne : - une diminution de 10 % des évènements liés au diabète - une diminution de 17 % de la mortalité liée au diabète - une diminution de 13 % des infarctus du myocarde - une diminution de 20 % des AVC. Ces effets sont additifs à ceux du bon équilibre glycémique. Cette étude a également montré les difficultés du traitement anti-hypertenseur puisque pour obtenir un contrôle "correct" de la pression artérielle, plus de 30 % des patients devaient prendre au moins 3 traitements anti-hypertenseurs. On comprend donc l’intérêt d’un strict contrôle de la tension artérielle et on propose, en 2008, d'essayer d'atteindre chez tout diabétique les objectifs d’une TA systolique < 130 mm Hg et d’une TA diastolique < 80 mm Hg. Les anomalies du métabolisme des lipides sont également plus fréquentes dans la population diabétique, si on excepte les diabétiques de type 1 bien équilibrés qui présentent les mêmes dyslipémies que la population générale. L’hypercholestérolémie de type IIa n’est pas plus fréquente chez le diabétique. Le HDL cholestérol a même tendance à être plus élevé chez les DT1 que dans la population générale. Le déséquilibre du DT1 s’accompagne, par contre, fréquemment d’une hypertriglycéridémie. Le diabète de type 2 s’accompagne fréquemment d’un HDL bas et d’une élévation des triglycérides. L'Étude Prospective Parisienne a montré que l'élévation des triglycérides était un facteur de risque indépendant de la maladie coronarienne dans le DT2. Dans cette étude, le pouvoir athérogène des triglycérides est supérieur à celui du cholestérol. La concentration de LDL-cholestérol est en général normale, mais la taille et la densité de ces particules est modifiée dans un sens athérogène : les LDL sont plus denses, plus petites et infiltrent plus facilement la paroi artérielle. Par ailleurs elles sont plus facilement glyquées et oxydées et sont alors reconnues par un récepteur particulier à la surface des macrophages dit “scavenger” donnant ainsi naissance à la cellule spumeuse, lésion initiale de la plaque d’athérome. Les traitements de l'HTA et des dyslipémies chez le diabétique sont abordés dans un autre chapitre. Les diabétiques présentent aussi des anomalies favorisant la thrombose : - augmentation de l’aggrégabilité plaquettaire, - augmentation du facteur Willebrand - augmentation de certains facteurs de la coagulation : facteur VII, facteur X, fibrinogène. - anomalies de la fibrinolyse : augmentation du PAI-1. On a aussi décrit dans le diabète une augmentation de la production de certains facteurs de croissance qui favoriseraient l’athérosclérose en favorisant la prolifération cellulaire au niveau de la paroi artérielle. De manière parallèle à cette macroangiopathie, il a été aussi montré des troubles de la microciculation, favorisés par la dysfonction endothéliale et les anomalies pro-thrombotiques. 4 - L'ISCHÉMIE CORONARIENNE 4-1 : -Particularités de l'ischémie coronarienne chez le diabétique : L'atteinte coronarienne peut être découverte à l'occasion d'une symptomatologie d'angor d'effort typique, mais ceci est rare. Il s'agit le plus souvent d'un angor atypique, atténué et il faut savoir interroger le patient longuement en recherchant des petits signes comme une dyspnée pour des efforts de plus en plus faibles... du fait de la neuropathie autonome cardiaque, l'ischémie est le plus souvent SILENCIEUSE ce qui impose la mise en oeuvre d'un dépistage chez les diabétiques à risque. La réalisation d'un électrocardiogramme tous les ans doit être systématique chez le diabétique. L'infarctus du myocarde n'est qu'exceptionnellement diagnostiqué à l'occasion d'une crise douloureuse hyperalgique ; les formes les plus fréquentes sont indolores. Le diagnostic sera porté ultérieurement devant une séquelle électrocardiographique. Il est encore trop souvent fréquent de découvrir le diabète lors de l'accident cardiaque, mais il faut aussi, dans ces conditions, se méfier des troubles transitoires de la glycorégulation induits par cette pathologie, susceptibles de faire porter le diagnostic de diabète par excès. Le dosage de l'HBA1C renseignera sur d'éventuels troubles de la glycorégulation antérieurs. L'ischémie coronarienne est grave : les lésions sont souvent diffuses, étagées et on note une fréquence accrue des lésions tritronculaires. On comprend donc que le pronostic après un infarctus soit plus mauvais chez les diabétiques que dans la population générale avec une augmentation de la mortalité précoce ou tardive (en général multipliée par 2). Ceci serait du à une plus grande fréquence du choc cardiogénique, des troubles du rythme, de l’insuffisance cardiaque autonome et à la neuropathie autonome cardiaque. 4-2 : Définitions de l’ischémie coronarienne silencieuse : L’IMS de type 1 se définit comme une anomalie électrographique (et/ou scintigraphique et/ou échographique), silencieuse et transitoire observée à l’occasion d’un stress chez un sujet dont l’ECG de repos est strictement normal. Elle est plus fréquente chez le diabétique que chez le non diabétique et sa prévalence est élevée quand d’autres FdR CV sont associés au diabète. Elle toucherait 10 à 30 % des DT2 selon les séries et les méthodes utilisées pour la dépister. Elle est associée au risque de survenue d’un accident CV majeur. 4-3 : Le dépistage de l'ischémie coronarienne : 4-3-1 : Moyens : L'électrocardiogramme au repos n'a aucune valeur diagnostique quand il est normal. Il doit néanmoins être réalisé systématiquement au moins une fois par an afin de déceler un infarctus passé inaperçu. Un ECG de repos anormal doit, par contre, conduire à approfondir le bilan. L'épreuve d'effort est un test de dépistage non invasif, fiable et peu onéreux ( 76.8 euros) Elle peut s'effectuer sur tapis roulant ou sur bicyclette ergométrique. Le patient doit atteindre au moins 85 % de la fréquence cardiaque maximale (soit 220 - l'âge) pour qu'elle soit interprétable. Elle doit également être "démaquillée", en l'absence de contre-indication à l'arrêt des traitements antiischémiques. Les béta-bloquants doivent être arrêtés progressivement au minimum 48 heures avant l'examen. Les inhibiteurs calciques de longue durée d'action seront également stoppés 48 heures avant l'examen. Les inhibiteurs calciques de durée d'action plus brève et les dérivés nitrés seront arrêtés la veille de l'examen. La sensibilité de l'examen serait de 75 % et sa spécificité de 77 % dans la population diabétique. La scintigraphie myocardique de perfusion au thallium ou au MIBI est beaucoup plus onéreuse (520 euros). Elle doit être couplée à un test de provocation : effort ou injection de persantine. L'examen doit être également démaquillé et les mêmes précautions que précédemment seront prises. L'asthme est une contre-indication formelle à la réalisation d'une scintigraphie myocardique à la persantine. L'interprétation de l'examen se fait en comparant les clichés obtenus après effort ou injection de persantine et ceux au repos. Une ischémie se traduira par un défect réversible, une nécrose par un défect persistant. On se méfiera des déficits dans le territoire inférieur qui sont souvent de faux positifs quand ils sont isolés, du fait d'une hypertrophie mammaire ou d'un foie de stéatose, fréquents dans le D2. Chez le diabétique, on estime la sensibilité de l'examen à 80 % et sa spécificité à 87 %. L'échographie de stress est en cours d'évaluation. Son principal intérêt tient à son coût modéré, mais l'examen est long et demande un opérateur entraîné pour être interprétable. Il s'agit d'un examen non invasif. La sensibilité de la méthode est de 81 % pour une spécificité à 85%. Le scanner coronaire est lui aussi en cours d’évaluation. Il a l’inconvénient de nécessiter une injection de produit iodé, et l’injection d’iode doit être entourée des mêmes précautions que celles de la coronarographie. L'enregistrement holter ECG des 24 heures n'a aucun intérêt chez le diabétique, du fait de sa faible sensibilité (30 %). La coronarographie reste l'examen de référence pour affirmer le diagnostic de coronaropathie. Elle permet de visualiser le nombre et le siège des sténoses, mais également d'apprécier le lit d'aval, et la fonction ventriculaire gauche (fraction d'éjection). L'examen est invasif et comporte un risque vital ou d'accident grave de 1 %. Chez le patient fragile et souvent atteint de néphropathie, l'injection d'iode doit être entourée d'un certain nombre de précautions : les biguanides doivent être arrêtés 48 heures avant l'examen, les sulfamides la veille de l'examen et ces traitements ne seront repris que 48 heures après, après avoir vérifié l'absence d'insuffisance rénale (dosage de la créatininémie à la 24 ème puis la 48 ème heure). Une insulinothérapie transitoire peut se discuter en cas d'équilibre glycémique précaire. Il est indispensable d'assurer, dans tous les cas, une hydratation correcte, per os sous forme de l'absorption d'un litre de Vichy les jours précédant l'examen, puis IV le jour même en perfusant 500 cc de BiNa sur 8 heures. 4-3-2 : Chez qui dépister une ischémie silencieuse ? En terme de Santé Publique et de coût de la santé, ce serait une erreur de dépister une ischémie silencieuse chez tous les diabétiques. Les Recommandations conjointes SFC/Alfédiam (Société française de Cardiologie / Association des Diabétologues de langue Française (ALFEDIAM) proposent depuis 2004 le dépistage chez tout diabétique asymptomatique: -de type 1 : - âge > 45 ans - et DT1 depuis au moins 15 ans - et présence d’au moins 2 autres facteurs de risque - de type 2 : - de plus de 60 ans ou atteint d’un DT2 depuis au moins 10 ans avec au moins 2 FdR associés : o dyslipémie avec CT > 2.5 g/l et/ou LDL > 1.6 g/l, HDL < 0.35 g/l, TG > 2 g/l et /ou ttt hypolipémiant o PA > 140/90 mmHg ou ttt hypotenseur o Tabagisme actif et /ou stoppé depuis moins de 3 ans. o Accident cardiovasculaire majeur avant 60 ans chez les apparentés au 1er degré - de type 1 ou 2 : avec une artériopathie des membres inférieurs et/ou un athérome carotidien - ou avec une protéinurie - de type 1 ou 2 : - quelque soit l’âge avec une microalbuminurie et 2 autres FdR - reprise d’une activité sportive par un sujet sédentaire de plus de 45 ans. 4-3-3 : Stratégie de dépistage et de suivi - Bilan annuel du diabétique asymptomatique : o examen clinique o ECG de repos o Biologie : lipides, évaluation de la fonction rénale o Patient à faible risque CV : Pas d’investigation autre Refaire le bilan à 1 an o Patient à haut risque CV : débuter le dépistage par une épreuve d'effort : - si l'examen est maximal et négatif, on traitera de manière efficace les différents facteurs de risque et on surveillera le patient en renouvelant l'examen 3 ans plus tard. - si l'examen est impossible, ininterprétable, douteux ou faiblement positif, on proposera une scintigraphie couplée à une épreuve d'effort et/ou une injection de Dipyridamole (persantine) ou une échographie de stress en fonction des possibilités techniques locales. La positivité de ces examens justifie une coronarographie. Lorsque la scintigraphie est négative, la conduite à tenir repose sur la correction des facteurs de risque. Le dépistage doit être refait 3 ans après. - si l'examen est fortement positif pour un seuil < 75 W, le bilan sera complété par une coronarographie. o ECG de repos ischémique : Onde Q de nécrose et/ou onde T négative d’ischémie sous-épicardique sur au moins 3 dérivations contiguës, en l’absence d’HVG, conduit à discuter une coronarographie. - Que faire chez un patient diabétique symptomatique ? L'Association des Diabétologues de langue Française (ALFEDIAM) proposait en 2000 ces conduites à tenir : L'apparition d'un angor stable conduit, pour certains, à la réalisation d'une épreuve d'effort puis, si elle est positive à la coronarographie qui s'impose en première intention pour d'autres. La conduite à tenir devant un angor instable ne diffère guère chez le diabétique du patient non diabétique. Une prise en charge en milieu cardiologique spécialisé s'impose ; on pensera néanmoins à arrêter les biguanides pendant la phase aiguë et une insulinothérapie transitoire se discutera si l'équilibre glycémique est précaire. 4-3-Le traitement de l'ischémie myocardique : Le traitement à visée cardiologique : - En prévention primaire : Le traitement médical de l'angor stable ou de l'ischémie silencieuse ne diffère pas chez le diabétique du non diabétique. Les béta-bloquants paraissent avoir une efficacité supérieure aux inhibiteurs calciques. Les anti aggrégants plaquettaires doivent être systématiques en dehors de leurs CI. La revascularisation myocardique peut faire appel aux pontages ou aux angioplasties. Les indications sont discutées en fonction des données de la coronarographie. Lorsque l’option angioplastie avec stent est retenue, il est préférable d’utiliser des stents actifs. Il est important de souligner la nécessité alors d’une double anti-aggrégation plaquettaire pendant au moins 1 an. - A la phase aiguë d'un infarctus du myocarde : Les anti-coagulants et les thrombolytiques peuvent être utilisés. Ces derniers sont, par contre, formellement contre-indiqués en cas de rétinopathie diabétique proliférative ou d'ATCD d'hémorragie du vitré. Dans le diabète de type 2, les résultats de l’étude finlandaise, l'étude DIGAMI, montraient qu'il est important d'assurer une normoglycémie à la phase aiguë d'un IDM en arrêtant le traitement oral pour lui substituer une insulinothérapie IV, en surveillant strictement les glycémies capillaires. 3 ans après l'IDM, la mortalité est réduite de 50 % chez les patients ayant bénéficié de ce traitement, puis au delà de la phase aigüe, d'une insulinothérapie à 3 injections. Ces résultats n’ont pas été confirmés par un autre travail de la même équipe, probablement parce que l’étude a été interrompue précocemment, faute d’un recrutement suffisant. Dans ces 2 études, L’HbA1c et la glycémie sont des marqueurs indépendants de mortalité : ainsi une augmentation de 2% de l’HbA1c conduit à une augmentation de la mortalité de 20 %. - A distance d'un accident aigu : Lorsque la diffusion et la sévérité des lésions ne permet pas un geste de revascularisation, et/ou en post-infarctus un traitement médical bien conduit doit être proposé. Un certain nombre de classes médicamenteuses ont montré, chez les diabétiques, en post-infarctus du myocarde, une efficacité égale ou même supérieure, en terme de survie ou de diminution des accidents cardiovasculaires, à ce qui est observé dans la population générale. Il s'agit : - des dérivés nitrés - des inhibiteurs de l'enzyme de conversion et des sartans - des béta-bloquants (qui ne sont plus contre-indiqués chez les diabétiques) - des anti aggrégants plaquettaires : aspirine et clopidogrel - des statines ; l'objectif est alors d'obtenir un LDL-cholestérol < 1 g/l et on introduira une statine s'il n'est pas atteint 3 mois après l'obtention d'un équilibre glycémique satisfaisant, alors que les règles diététiques sont correctement suivies. Le traitement des autres facteurs de risque (voir chapitre particulier) : Tous les facteurs de risque de la maladie coronarienne doivent être traités énergiquement dans cette population à très haut risque cardio-vasculaire. On manque encore d'études déterminant s'il est plus important de traiter un facteur plutôt qu'un autre. On se fixera comme objectifs en prévention secondaire : - des chiffres tensionnels <=130/80 mmHg - un LDL-cholestérol < 1 g/l - triglycérides < 1,5 g/l - l'arrêt du tabac - une activité physique régulière, - et bien entendu, le contrôle de la glycémie : en 2008, après les premiers résultats de l’étude ACCORD, il semble raisonnable de viser une HbA1c autour de 7%. 5 - L'INSUFFISANCE CARDIAQUE : Elle est plus fréquente chez les diabétiques : sa prévalence serait multipliée par 2 chez l'homme et par 5 chez la femme par rapport aux non-diabétiques . Elle touche surtout les DID compliqués de néphropathie et les femmes. Elle est la conséquences des anomalies coronariennes responsables de multiples infarctus passés inaperçus, du retentissement de l'HTA et on incrimine aussi un facteur myocardique autonome : la cardiomyopathie diabétique. Le diagnostic est posé sur la clinique, mais surtout sur l’échocardiographie-doppler. Son traitement diffère peu de ce qui est proposé dans la population générale : inhibiteurs du système rénine-angiotensine : inhibiteurs de l’enzyme de conversion (+++) et sartans ; digitaliques et diurétiques. 6 - L'ARTÉRIOPATHIE DES MEMBRES INFÉRIEURS : L'artériopathie des membres inférieurs est plus fréquente, plus précoce et plus grave chez le diabétique que chez le non diabétique. Une atteints vasculaire périphérique, clinique ou infraclinique, est un facteur de mauvais pronostic. La majorité des patients décèdent alors d’une cause cardiaque. L’atteinte est, là encore, égale dans les 2 sexes. Les lésions sont également plus distales et extrêmement favorisées par le tabagisme. Leur association à la neuropathie explique le caractère fréquemment indolore de l'artérite et le retard au diagnostic qui est encore trop souvent porté devant un trouble trophique. La neuropathie expliquerait également la fréquence de la médiacalcose. Il s'agit de calcifications de la média qui dessinent un liseré fin et régulier sur le trajet de l'artère sur les radiographies standard. La médiacalcose est très fréquente chez les diabétiques insuffisants rénaux, mais n’est pas spécifique du diabète. La palpation des pouls distaux, l'auscultation des axes vasculaires et l'examen minutieux des pieds doivent être systématiques chez les diabétiques. En effet, les patients sont souvent asymptomatiques : moins de 50 % des diabétiques ont une claudication intermittente. Le diagnostic d’artériopathie des membres inférieurs repose sur la perte d’au moins 2 pouls distaux dont au moins 1 tibial postérieur. Un "pied artéritique" est un pied froid, dépilé dont la peau est fine et luisante. Les pouls distaux ne sont alors, en général pas perçus. Le diagnostic repose sur l'examen clinique, mais également sur des explorations initialement non invasives : doppler artériel, mesure de la Tcpo2 (pression partielle transcutanée en O2) (cf. chapitre sur le pied diabétique). L'artériographie, exploration invasive, est réalisée en prenant les mêmes précautions que pour la coronarographie et en deuxième intention, lorsqu'on envisage un geste de revascularisation : angioplastie ou pontage, du fait du caractère multifocal, étagé et distal des lésions. 7 - NEUROPATHIE AUTONOME CARDIAQUE : Elle est définie par une atteinte de l‘innervation autonome du coeur. Elle expliquerait le caractère silencieux de la coronaropathie et les morts subites du diabétique. Elle réalise dans son tableau complet, une véritable dénervation du myocarde. Sa prévalence varie selon les populations et les méthodes utilisées pour la rechercher : elle serait très précoce dans l’histoire de la maladie et toucherait jusqu’à 30 % des diabétiques. Elle est encore mal connue du fait d’un diagnostic difficile à porter. En pratique quotidienne, on l’évoquera devant une tachycardie de repos permanente et devant une hypotension orthostatique. Un bilan complémentaire plus sophistiqué doit alors être réalisé (ECG avec manœuvre de Valsava, tilt-test…). 8 - LES ACCIDENTS VASCULAIRES CÉRÉBRAUX : Les accidents vasculaires cérébraux sont plus fréquents chez les diabétiques et favorisés par la coexistence d’une hypertension artérielle. Ils sont responsables d'une lourde mortalité puisque 20 % des diabétiques meurent des suites d'un AVC. L'étude de Framingham nous apprend que le diabète multiplie le risque d'AVC par 2 chez les hommes et par 3 chez les femmes. L’auscultation des artères à destinée céphalique doit faire partie de l’examen clinique complet du diabétique. Une surveillance par échographie-doppler est mise en place devant l’apparition d’une anomalie clinique. Comme dans le cas de l’infarctus du myocarde, un accident vasculaire cérébral peut révéler un diabète, mais il convient de se méfier des troubles de la glycorégulation transitoires induits par un accident aigu. A l’inverse, ce type d’accident peut induire une décompensation acido-cétosique chez un diabétique connu ou non. Certains accidents vasculaires sont iatrogènes, liées par exemple à une hypoglycémie. Les sulfamides hypoglycémiants doivent être prescrits avec précautions chez les personnes de plus de 70 ans (et CI en cas d’insuffisance rénale), du fait des hypoglycémies sévères et prolongées qu’ils induisent : on a montré un certain nombre d’AVC dans les suites de ces hypoglycémies. Les hypoglycémies induites par l’insuline sont, en général, plus brèves et moins délétères.