Les précurseurs de la narcose à l`éther

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L’actualité en médecine dentaire
Controverses médicales au cours du 19e siècle
Les précurseurs de la narcose à l’éther
Marcel Hänggi (traduction de Jean-Jacques Gindrat, source: NZZ)
On considère que le 16 octobre 1846 est le jour qui a vu la naissance de l’anesthésie (NZZ du
5 mai 2004). Ce jour-là, pour la première fois, un patient aurait été opéré à Boston sans douleur
grâce à une narcose à l’éther. L’auteur de l’article qui suit a consacré son mémoire de licence
aux débuts de l’anesthésie en Suisse. Il a été amené à une appréciation quelque peu différente
de ces événements.
«And there shall be no more pain», cette
dédicace émouvante peut être lue, à Boston, sur le socle du monument célébrant
l’éther. Il rappelle le souvenir du médecindentiste Thomas Green Morton, à l’initiative duquel, le 16 octobre 1846, pour la
première fois, grâce à une anesthésie à
l’éther sulfurique, un patient fut opéré
sans douleur devant un public de spécialistes. Ce jour est considéré comme la date
de naissance de l’anesthésie. Certains
faits toutefois font entrevoir les choses
sous un angle un peu différent. Tout
d’abord, avant l’«Ether Day» déjà, on avait
procédé à plusieurs reprises à des opérations sans douleur. En avril 1846, l’ «Augsburger Allgemeine Zeitung» avait décrit
avec beaucoup de détails des opérations
sans douleur, couronnées de succès. L’histoire traditionnelle de la médecine rapporte de tels succès, elle les considère
cependant comme peu vraisemblables.
Deuxièmement, selon des récits de témoins oculaires, le patient, ce fameux
16 octobre, n’a pas crié comme à l’accoutumée, mais il a gémi et déclaré, au réveil
de l’état d’euphorie dû à l’éther, qu’il avait
eu mal. On prit bien soin d’ignorer cette
déclaration. Troisièmement enfin, c’est en
1800 déjà, que dans un article fort remarqué, Humphrey Davy avait proposé
l’anesthésie par inhalation d’un gaz (il
suggérait l’utilisation de gaz hilarant).
Davy devint plus tard président de la
Royal Society – et c’est précisément cette
société qui, à réitérées reprises, refusa de
vérifier des communications de ses membres dans lesquelles ceux-ci affirmaient
avoir découvert une méthode leur per-
mettant d’opérer sans douleur. La société
sœur en France agissait de même.
Le mesmérisme controversé
En 1842 déjà, à Londres, là aussi en présence d’un public de spécialistes, William
Topham amputait la cuisse d’un patient qu’il
avait préalablement «mesmérisé», c’est-àdire mis en état de transe par l’intermédiaire
d’une technique ressemblant à l’hypnose. Si
l’on excepte un discret grognement, le patient ne fit entendre aucun son. Cela n’empêcha pas la majorité des spécialistes de
l’assistance de considérer l’intervention
comme un échec: on soupçonnait le patient
de s’être comporté de façon à faire croire
qu’il n’aurait pas eu mal!
Comment interpréter, dans un intervalle
d’à peine quatre ans, des réactions si fort
différentes aux deux opérations? Au cours
de la première moitié du 19e siècle, on
pouvait assister, dans le domaine de la
médecine, à des luttes acharnées pour la
définition de ce qu’il y avait lieu de considérer comme relevant de la science. A la
fin du 18e siècle, Franz Anton Mesmer
avait suscité l’intérêt avec sa théorie du
«magnétisme animal». Selon celle-ci, de
même que les métaux magnétiques, les
organismes disposeraient d’un certain
«magnétisme». S’il est altéré, il peut être,
à en croire les mesméristes, rétabli par des
interventions manuelles. Les effets de telles manipulations pouvaient être comparés à ceux de l’hypnose, qui apparaîtra
ultérieurement. Après la mort de Mesmer,
la théorie a connu à Londres un grand
nombre d’adeptes. Au début de 1838, le
médecin londonien John Elliotson, entre-
prit un certain nombre de séances de
mesmérisation sur une patiente épileptique. Le milieu spécialisé, et notamment la
revue médicale «The Lancet», qui était
son organe de communication le plus
puissant, se montrèrent fort impressionnés. Mais, lentement, Elliotson perdit tout
contrôle de sa patiente, jusqu’au moment
où, en présence de spectateurs appartenant à la noblesse, elle se mit, dans son
état d’euphorie, à les railler et à proférer
des paroles obscènes. Elliotson perdit la
faveur dont il jouissait auprès du public et,
en juillet, le «Lancet» se détourna de lui.
Dès lors, la revue adopta une furieuse
attitude antimesmériste.
Les «pneumaticiens», ceux qui dans les
années 1800 faisaient des expériences
avec les gaz – le jeune Davy était l’un
d’entre eux – jouissaient de la même réputation de manque de sérieux. Les gaz
provoquaient un état d’ivresse semblable
à la transe mesmérienne. Cet effet s’opposait diamétralement à la tendance des
médecins qui visaient un contrôle toujours plus grand du corps du patient.
Le rôle de la revue «The Lancet»
On peut voir une preuve de l’association
des essais d’opérer sans douleur à la charlatanerie dans l’exclamation de John C.
Warren, le 16 octobre 1946:
«Messieurs, ceci n’est pas un canular!». La
NZZ du 20 janvier 1847 réagissait de manière identique lorsqu’elle écrivait: «Il ne
s’agit en aucun cas d’une narcose par
magnétisation». Si la percée s’est produite
aux Etats-Unis, ce n’est certainement pas
dû au hasard. La professionnalisation de
la médecine y avait moins progressé qu’en
Angleterre, en France ou en Allemagne,
pays dans lesquels un universitaire aurait
compromis sa réputation en pratiquant
une telle opération.
L’establishment médical s’était opposé
aux publications de Davy de 1800, qui
préconisaient l’utilisation de l’anesthésie
– maintenant, elle les célébrait comme
une victoire. Il était temps, les annonces
selon lesquelles les mesmériens étaient en
mesure d’opérer avec succès sans douleur
allaient en s’accumulant. Le mesmérisme
gagnait de nouveau du terrain. Certains
historiens de la médecine attirent toutefois l’attention sur le fait que le mesmérisme était une technique manquant de
fiabilité. Joseph Liston, qui utilisa l’anesthésie par inhalation pour la première fois
en décembre 1846, fêta cette dernière
comme une victoire sur le mesmérisme:
«Cette idée géniale des Yankees (…)
dépasse sans conteste le mesmérisme.
Quelle chance!».
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L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
La rapide dissémination de l’idée nouvelle
n’aurait pas été possible sans l’aide du
«Lancet». La revue spécialisée consacra
112 articles à ce sujet au cours du premier
semestre de 1847. Les médecins, qui quelques mois auparavant repoussaient toute
idée d’anesthésie, se trouvaient dès maintenant prêts à accepter des échecs et
même à considérer des décès comme
quelque chose d’accessoire. Les journaux,
eux aussi, rapportaient en long et en large.
Le médecin glaronnais Johann Jakob Jenni
publiait des articles enthousiastes dans la
NZZ. Les patients se mirent bientôt à
réclamer des narcoses – alors que les chirurgien, plus prudents, préféraient encore
opérer selon les méthodes traditionnelles
– c’est-à-dire des patients parfaitement
conscients. Q
Hugo Spicher pose des jalons: «Dentalakzente»
Anna-Christina Zysset (traduction Jean-Jacques Gindrat)
Le technicien dentiste Hugo Spicher, par le développement de sa fraise en matériel synthétique,
a posé des jalons importants dans les domaines de l’adaptation et du façonnage des appareils
d’orthodontie. Pour lancer sur les marchés européens la distribution de la fraise Spicher,
récemment brevetée, une nouvelle firme a été créée. Cette firme, dont le siège se trouve à
St. Antoni, porte le nom de «Dentalakzente».
Hugo Spicher
«Dentalakzente» a été créée spécialement
en 2004 pour assurer la distribution de la
fraise Spicher, en Suisse et sur les marchés
européens. Les fraises Spicher sont de
nouvelles fraises en matériel synthétique,
brevetées universellement, qui facilitent
significativement le façonnage des appareils d’orthodontie. A l’heure actuelle,
«Dentalakzente» étend son réseau de distribution à la Suisse romande, ainsi qu’à
la France et à l’Italie.
Le directeur de «Dentalakzente» s’appelle
Jens Moecke. C’est un directeur de vente
diplômé, né en 1962, de nationalité allemande, il habite la Suisse depuis 1996.
Avant de choisir une activité indépendante, il était directeur des ventes, au niveau mondial, dans une importante maison de commerce de biens d’investissement de haute valeur. «La famille Moecke
a une lourde hérédité dentaire», c’est ce
que nous déclare l’entrepreneur. «Mon
beau-frère est médecin-dentiste, mes
deux frères et ma mère sont techniciens
dentistes et ma sœur assistante dentaire».
Jens Moecke est convaincu d’être en me-
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sure, grâce à la fraise en matériel synthétique – swiss made – de conception nouvelle et brevetée universellement, de développer une entreprise aux reins solides.
Un produit de qualité et un marketing
intelligent devraient garantir le succès.
Moecke nous informe que la mise sur le
marché des fraises Spicher, dans les différents marchés, est toujours planifiée de
telle sorte qu’elle coïncide avec une présentation en collaboration avec des cliniques universitaires. Le lancement aura
effectivement lieu dans le cadre des cliniques de médecine dentaire de l’Université
de Berne, là où l’inventeur, le technicien
dentiste Hugo Spicher, exerce son activité
depuis 1991, dans le cadre de la division
d’orthopédie maxillo-faciale. Ce qui a
mené Moecke à changer de domaine
d’activité et ce qui a déterminé l’Université de Berne à déposer un brevet, vous
sont racontés dans ce qui suit.
Les cliniques de médecine dentaire
déposent un brevet
Fribourgeois de langue allemande Hugo
Spicher a consacré d’innombrables heures
de travail au perfectionnement des fraises
en matériel synthétique destinées à la fabrication d’appareils d’orthodontie. En
2003, il a atteint son objectif et a pu pré-
Les fraises Spicher
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
senter son invention au Professeur Urs
Brägger, à l’époque directeur administratif.
Grâce à la composition spéciale des différents éléments constitutifs et au procédé
de fabrication (le matériau est d’abord
trempé, puis recuit), Hugo Spicher a été en
mesure de développer des fraises qui façonnent le matériel synthétique de façon
aussi efficace que les fraises en métal dur
habituelles, sans toutefois laisser les habituelles traces au niveau fil/métal. Urs Brägger entra en contact avec Unitectra, l’unité
des universités de Berne et de Zurich chargée du transfert des connaissances et de la
technologie. Unitectra, par ses prestations,
fournit une aide aux chercheurs dans tous
les domaines du transfert des connaissances et de la technologie, en les mettant par
exemple en contact avec des partenaires
industriels, en les aidant dans le domaine
des brevets ou lors de la négociation de
contrats, etc.
Par la suite, des contacts ont été pris avec
l’office européen des brevets, la description du brevet a été rédigée et adressée à
l’office le 19 juin 2003. Le brevet a été
accordé le 29 septembre 2003.
Des essais durent encore avoir lieu avec
différentes maisons de fabrication, avant
que les fraises dont on dispose actuellement ne puissent être définitivement
montées.
Le processus, dans son ensemble, a duré
quelque deux ans. A ce sujet, l’inventeur
s’exprime ainsi: «Les dépôts de brevet sont
une chose très coûteuse, puisqu’il faut tout
d’abord démontrer qu’aucun produit identique n’existe dans le monde.» Selon Unitectra, une invention ne peut bénéficier
d’un brevet que lorsqu’elle est nouvelle,
qu’elle constitue un développement significatif, réalisé de façon autonome et qu’elle
est techniquement applicable.
C’est précisément ce dernier point, la possibilité technique de l’application, qui a
menacé le projet pendant un certain
temps. Après les premiers essais couronnés de succès des premières fraises produites en série, des problèmes sont apparus de façon inattendue. La deuxième
série de fraises était trop dure, de telle
sorte qu’apparaissaient de nouveau des
traces de détérioration. Après qu’il fut
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
Ancien fil
tuels autres projets, mais rien n’est encore
définitif.»
A la fin du mois de septembre ou au début
du mois d’octobre, après le coup de départ
à l’Université de Berne, Moecke va personnellement se rendre chez les médecinsdentistes et leur présenter les avantages des
fraises en matière synthétique. Pour l’instant, la palette des produits de «Dentalakzente» se limite aux fraises Spicher, puisqu’il s’agit de lancer ces fraises avec compétence et professionnalisme sur les différents marchés. Peut-être que, entre-temps,
Hugo Spicher aura eu la possibilité de développer avec succès un nouveau produit.
«Dentalakzente» envisage de mettre à son
catalogue d’autres produits innovants, de
même que du matériel standard.
Pour celui qui s’intéresse aux fraises en
matériel synthétique:
«Dentalakzente» Jens Moecke
Niedermonten
CH-1713 St. Antoni/Switzerland
Tél. +41 (0)26 495 04 45
Fax +41 (0)26 495 04 26
www.dentalakzente.ch Q
Taxe anticipée de recyclage (TAR)
Dr U. Wanner
La législation suisse au sujet de la protection de l’environnement est sans conteste très avancée
en comparaison de celle des pays qui nous entourent.
Nouveau fil
possible de démontrer que les fraises ne
satisfaisaient pas à la «recette» prescrite,
Hugo Spicher prit un nouveau départ avec
un autre partenaire pour la production.
Sans l’aide de sa famille cette invention
n’aurait jamais abouti. Un des frères
d’Hugo Spicher, qui a des connaissances
techniques dans le domaine de la métallurgie, sa femme, qui s’est consacrée aux
innombrables travaux administratifs, n’ont
pas cessé de le soutenir. Il faut maintenant
souhaiter que cette invention, qui sera
peut-être suivie d’autres encore, va rapporter quelque chose à son inventeur et à
sa famille. Ce dernier, technicien inventif,
qui a perdu tôt ses parents et a eu ainsi un
début de vie professionnelle difficile, mériterait de profiter de son invention au
plan matériel également. S’il devait
aujourd’hui faire le choix d’une profession, il ne choisirait plus celle de technicien dentiste. L’absence de possibilités de
promotion, à moins de se décider pour la
maîtrise fédérale de technicien dentiste, a
déjà souvent préoccupé Hugo Spicher.
Cela ne l’empêche pas d’aimer son métier.
C’est le sentiment d’être en mesure
d’améliorer quelque chose qui le motive.
La palette des différentes fraises en matière synthétique va considérablement
faciliter le travail des futures générations
de techniciens dentistes et de médecinsdentistes. Lorsqu’on lui demande si lui,
l’inventeur, est déjà sur le chemin d’un
nouveau projet, Hugo Spicher répond:
«Oui, il y en a un, en théorie il y a déjà des
idées, mais pas encore au niveau pratique
(le matériel de départ n’est pas satisfaisant). J’ai déjà pris des notes sur d’éven-
En ce qui concerne le recyclage respectant
l’environnement, le législateur a fort heureusement laissé l’initiative aux associations professionnelles et, s’en tenant une
fois pour toutes au principe bien établi de
subsidiarité, n’intervient au moyen de
normes que lorsque l’industrie privée ne
prend aucune mesure ou des mesures
insuffisantes.
Tenant compte de ces éléments, l’Association suisse de l’industrie et du commerce
dentaire (ASICD) a pris la décision d’établir un concept d’élimination du matériel
électrique et électronique dentaire et de
laboratoire, qui assure une réutilisation
aussi grande que possible du matériel et
des constituants, ainsi qu’une élimination
professionnelle des parties non réutilisables de telles installations de médecine
dentaire. En décidant de collaborer avec
SWICO, l’Association économique suisse
de bureautique, qui a déjà une très grande
expérience dans le domaine de l’élimination des ordinateurs, des écrans, des appareils téléphoniques et de photocopie,
etc., il a été possible de trouver un partenaire en mesure de réaliser les objectifs du
commerce dentaire.
A dater du 1er octobre 2004, les dépôts
dentaires de l’ASICD vont prélever une
taxe anticipée de recyclage sur les appareils
électriques et électroniques. Elle permettra
de couvrir les frais d’élimination, ou de
réutilisation. Les coûts de démontage,
ainsi que le transport du cabinet vers le lieu
de collecte pour élimination, ne sont toutefois pas inclus. Pour ces derniers, le dépôt
dentaire établira au médecin-dentiste une
facture en fonction des frais réels. Il est
vivement conseillé au médecin-dentiste de
faire établir par le dépôt dentaire une at-
testation confirmant que l’élimination de
ses appareils, y compris leur transport, ont
eu lieu conformément aux règles, ceci pour
éviter tout problème en cas de contrôle de
la part des autorités chargées de la protection de l’environnement.
La taxe anticipée de recyclage, sous la
forme d’un «système de répartition», va
permettre, à partir du 1er octobre, le financement de l’élimination des anciens
appareils pour lesquels aucune taxe de
recyclage n’avait été prélevée à ce jour.
L’Association suisse du commerce dentaire déclare formellement qu’elle ne réalisera aucun profit par l’intermédiaire de
la TAR. La SSO aura par conséquent la
possibilité de consulter les comptes annuels de la TAR.
L’élimination proprement dite des anciennes installations sera confiée à des entreprises de réutilisation et de recyclage certifiées par l’EMPA. L’élimination se fera
ainsi «lege artis».
L’Association suisse du commerce dentaire, ainsi que les dépôts dentaires qui lui
sont associés, espèrent que les médecinsdentistes feront preuve de responsabilité
pour la cause de l’environnement et le
manifesteront en acceptant de payer la
TAR. Un certificat sera remis aux médecins-dentistes qui doivent payer pour la
première fois pour des installations; il atteste, de la part de l’ASICD et de la SSO,
que le cabinet dentaire participe aux efforts
en vue d’une élimination respectueuse de
l’environnement des installations électriques et électroniques dentaires.
Pour d’éventuelles questions en relation
avec la TAR, le secrétariat de l’Association
suisse du commerce dentaire se tient volontiers à disposition (tél. 031/952 76 75). Q
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CLIN D’ŒIL DU PASSÉ
Psychologie dentaire
Roger Joris, Genève
Transcription, rédaction et illustrations de Thomas Vauthier
Le dentiste, dans l’exercice de son art, «bénéficie», si l’on ose dire, d’une réputation plutôt défavorable. Il ne peut pas ignorer cette situation sans prendre le risque de commettre des impairs
qui ne manqueront pas de compliquer sa tâche. Il ne faut pas oublier qu’il y a peut-être
150 ans, le dentiste était encore un arracheur de dents – et très souvent aussi un charlatan. Et
le proverbe «menteur [ou mentir] comme un arracheur de dents» nous collera sans doute à la
peau pendant longtemps encore.
appartient de tout faire pour éliminer ces
éléments. Nous en avons les moyens. Il ne
nous reste qu’à les utiliser judicieusement;
il convient tout d’abord d’examiner calmement la réalité telle qu’elle se présente
à nous tous les jours.
Je suis bien certain que la plus grande
partie des éléments qui font notre réputation sont erronés, mais ils n’en existent
pas moins pour autant et c’est à nous qu’il
Pour tous ceux qui se seraient quelque
peu lassés des «barbus» qui ont marqué l’histoire de notre profession, votre
fidèle chroniqueur a décidé d’intercaler dans cette rubrique une mini-série
de quelques observations plus personnelles de notre confrère Roger Joris,
ancien président de la Société suisse
de l’histoire de la médecine et de la
Société européenne de l’histoire de la
médecine. En effet, plusieurs textes
provenant de ses archives, et gracieusement mis à disposition de nos lecteurs, concernent les aspects psychologiques des relations entre le praticien
et ses patients. Si ces réflexions ne
nous emportent pas en arrière de plusieurs siècles, elles ne sont pourtant
nullement désuètes ou poussiéreuses,
comme vous allez voir. Il est rafraîchissant de constater que certaines idées
formulées par un praticien ayant exercé
il n’y a que quelques décennies sont
toujours d’actualité.
Thomas Vauthier
Entreprendre le traitement
en psychologue
Le traitement que vous devez effectuer ne
peut pas laisser indifférent le patient et vous
devez agir avec délicatesse et prudence.
Nous ne pouvons pas oublier que notre
intervention s’effectue dans une matière
particulièrement sensible et que nos patients non plus ne peuvent l’oublier. Les
sentiments qui les animent face à leur
dentiste peuvent être très pénibles même
s’ils sont soigneusement cachés. Et un
sentiment, quel qu’il soit, ne peut rester
intérieur que pour autant qu’une force
plus grande en empêche l’extériorisation.
Cette force inhibitrice peut être aussi bien
la peur que le courage, la sociabilité, la
courtoisie, la vanité, ou encore un facteur
pathologique, somatique ou psychique.
Il est bien évident que le monde sensible
ne peut être séparé arbitrairement du
monde psychique, et il est impossible
d’agir sur l’un des deux sans provoquer
une réaction de l’autre. Mais cette réaction
peut aussi bien être une réaction de sympathie qu’une réaction de défense. Il faut
savoir qu’on ne peut pas soigner un corps
et oublier que le corps est animé par une
âme. On ne peut pas être neutre avec son
patient; il a besoin de nous, par conséquent, on doit lui apporter plus qu’une
thérapeutique somatique, mais encore, et
c’est aussi important, une thérapeutique
psychologique, ou, plus exactement, entreprendre le traitement en psychologue.
Conseils pratiques
Quelques conseils pratiques vous aideront, je l’espère. Ils entrent, à mon avis,
dans ce que j’appelle la psychologie dentaire.
Ainsi, je pense que le praticien doit absolument voir son patient avant que ce dernier ne soit assis dans le fauteuil. Il faut
donc que le dentiste aille lui-même chercher le patient à la salle d’attente, ou, à
tout le moins de le recevoir dans son cabinet de consultation. Il pourra, de cette
façon, juger aisément de la taille de son
patient, de sa morphologie, de son comportement; il pourra lui parler.
Car si votre patient (nouveau) est installé
par la demoiselle de réception avant l’arrivée du dentiste, il se trouve en état
d’infériorité et d’inconfort, si j’ose dire,
vis-à-vis de vous. En effet, se trouver enfoncé ou couché dans un fauteuil avec une
serviette autour du cou, un linge sur les
genoux, peut être extrêmement désagréable. Et cela ne crée pas un climat de confiance et de détente, ni de relâchement
musculaire ou nerveux.
S’il ne s’agit pas d’un nouveau patient, le
problème est différent, bien entendu, car
il ne s’agit alors plus de faire connaissance.
Maintenant je vais vous dire ce que je
pense d’un cabinet dentaire, c’est-à-dire,
de l’endroit où nous passons la moitié de
notre vie. Il vaut tout de même la peine de
s’en occuper, pour nous et pour nos patients.
Le cabinet de consultation
Le cabinet de consultation doit être clair
et spacieux. Par clair, je ne veux pas dire
blanc, car c’est trop brillant et fatigant
pour les yeux. Et je vous recommande de
ne laisser aucun instrument rébarbatif
trop en vue, ni d’instruments tranchants
ou piquants sous les yeux du patient qui
n’en demande pas tant. Il sait bien, ce
patient, que vous avez toute l’instrumentation nécessaire et même plus; cela ne
présente pour lui qu’un intérêt fort limité.
S’il est venu chez vous, c’est qu’il vous fait
confiance, ce n’est pas pour vérifier la
beauté de votre panoplie instrumentale.
Sachez bien, de plus, que vous n’augmenterez pas votre autorité ni votre importance auprès de vos patients en ayant
posé ostensiblement un crâne humain sur
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L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
votre bureau, même si vous l’utilisez avec
désinvolture comme cendrier … Il est bien
préférable d’y avoir un bouquet de fleurs
ou même une fleur seule.
Les planches anatomiques accrochées aux
murs sont absolument à proscrire. Elles
n’apportent rien à vos patients et si elles
vous sont utiles, vous pouvez alors les
fixer contre le panneau intérieur de la
porte d’un buffet ou d’une armoire. Il y a
mieux à mettre contre un mur.
Mettez-y des tableaux ou des gravures de
qualité et de bon goût; vous pouvez également y mettre des photos; mais abstenez-vous d’y mettre votre photo avec un
fusil, les pieds sur la tête d’un lion ou d’un
éléphant. Les photos de votre famille
n’intéressent personne non plus.
D’autre part, je ne saurais assez vous
mettre en garde contre l’aimable et humoristique habitude, qui me semble
d’ailleurs, fort heureusement en perte de
vitesse actuellement, d’épingler au mur
des caricatures représentant des dentistes;
elles ne peuvent pas égayer un patient qui
souffre, ou simplement un patient peureux. De plus, il faut reconnaître que c’est
d’assez mauvais goût. Ces caricatures
peuvent très bien orner les murs du laboratoire, où le technicien n’en sera pas le
moins du monde incommodé, et vous
pourrez en jouir vous-même chaque fois
que la nécessité d’une sédation de vos
nerfs se fera sentir …
La salle d’attente
La salle d’attente doit être avenante et ne
pas être encombrée de meubles trop disparates. Ce n’est en tout cas pas l’endroit
pour achever la vie d’un vieux salon défoncé qui ne trouve plus de place ailleurs.
Et il n’est pas recommandable de faire
voisiner pour la fin de leur carrière de faux
sièges Louis XV avec de vrais tabourets,
même recouverts de velours délavés et
sans couleur.
Il y faut de bons sièges confortables; une
table ou deux et, si la place ne manque
pas, une bibliothèque ou une armoire.
Quant à la désastreuse habitude d’empiler
n’importe quelle revue à moitié déchirée sur
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la table, elle est à proscrire. Et toute publication à laquelle il manque des pages doit être
éliminée pour éviter que votre salle d’attente ne devienne un marché aux puces. Il
y a assez de revues très intéressantes qui
peuvent y prendre place et résister aux
nombreuses sollicitations des lecteurs.
D’après les expériences que j’ai faites, je
puis vous dire que les revues historiques
ou géographiques, ou encore certaines
revues de voyage ont la faveur des patients. Au mur aussi, il ne doit y avoir que
des choses plaisantes; tout doit aider au
confort et à la sédation.
Psychologie et plan de traitement
Il est une question que je ne puis qu’effleurer au passage, mais qui a son importance; c’est celle du traitement à entreprendre en tenant compte d’un certain
nombre de facteurs parmi lesquels il faut
noter:
– le facteur esthétique,
– le facteur fonctionnel,
– le facteur financier.
Je sais qu’il est extrêmement satisfaisant
au point de vue professionnel de réussir
un travail exceptionnel par sa beauté et sa
qualité; mais cela peut être une grave erreur psychologique de l’entreprendre sur
un patient dont les moyens financiers
sont limités. Car on s’expose alors à de
longues discussions, à des complications
de tous ordres qui ne peuvent que vous
fatiguer bien inutilement.
On me rétorquera qu’il ne devrait pas y
avoir une thérapeutique pour riches et
une thérapeutique pour pauvres. J’admets
bien volontiers l’objection, mais il n’en
reste pas moins que c’est une réalité et
qu’il faut tout de même s’en accommoder,
même si elle n’est pas très satisfaisante,
pour éviter des mécomptes et des déboires. D’ailleurs, le phénomène n’est pas
nouveau; en effet, un illustre médecin de
l’Ecole de Salerne, Cophon, enseigne déjà
à son époque la thérapeutique pour pauvres et pour riches. Il est inutile de faire du
romantisme dépassé, il faut être réaliste et
surtout psychologue. Q
CONGRÈS / JOURNÉES SCIENTIFIQUES
«Médecine dentaire sociale: économique et ciblée» – Rétrospective du Congrès SSO du 10 au
12 juin 2004 à Interlaken
Tout ce qui serait subjectivement souhaitable
n’est pas toujours objectivement nécessaire
Thomas Vauthier, Rheinfelden
«Une médecine dentaire sociale, raisonnable et ciblée». Voilà un sujet qui ne peut que convaincre même les plus réfractaires. En effet, qui n’est pas confronté quotidiennement à cette médecine dentaire qui est peut-être la plus difficile à mettre en valeur ou à pratiquer? S’adapter à
la situation sociale et financière du patient, ainsi qu’à ses désirs, tout en pratiquant une médecine dentaire de qualité est souvent une véritable gageure. Le thème principal du Congrès
SSO 2004 à Interlaken, dont les multiples facettes ont été traitées avec panache par des spécialistes de renom, aura sans doute permis aux quelque 1300 congressistes d’aiguiser leur sens
pour les aspects essentiels et les responsabilités sociales de notre profession. A noter, en passant,
que ce fut la 20e fois que le Congrès de la SSO a eu le plaisir de se dérouler à Interlaken.
La responsabilité que notre profession
doit assumer pour garantir à l’ensemble
de la population un accès complet aux
soins dentaires gagne en importance, non
seulement du point de vue médical, mais
aussi politiquement parlant. Aujourd’hui,
le médecin-dentiste ne peut plus se concentrer sur le seul aspect médico-dentaire
des soins qu’il prodigue a ses patients.
Lorsqu’il recherche la solution optimale
pour chacun d’entre eux, il doit également
tenir compte de l’environnement social et
économique dans lequel nous vivons. A
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
cet égard, le véritable défi ne réside pas
avant tout dans la réalisation à tout prix
du nec plus ultra. Au contraire, le médecindentiste doit au contraire le plus souvent
se limiter au nécessaire, tout en garantissant une exécution irréprochable. Ce problème est souvent bien difficile à résoudre.
Le congrès SSO de cette année a été consacré précisément à ces aspects de notre
profession. Le fil rouge des présentations
peut être résumé sous le constat: l’objectif
premier de la médecine dentaire sociale
est de garantir à chaque patient, quel que
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
soit son statut social, un traitement individuel optimal et adapté à ses besoins, en
tenant compte de sa situation personnelle.
Pratiquer la médecine dentaire signifie
viser des objectifs variés. En quoi s’appliquent-ils au statut socio-économique
d’une collectivité ou à celui d’un individu?
Dans notre société en pleine évolution
particulièrement marquée par d’énormes
variations économiques, environnementales, sociales et culturelles, le paradigme de
l’uniformité clinique est un non-sens, parce
qu’impraticable. C’est aux enseignants et
aux formateurs d’induire tant au stade de
formation prégraduée, postgraduée que
continue cette quête incessante de l’identification des responsabilités éthiques et
sociales à laquelle les praticiens seront
confrontés en tant que professionnels de la
santé. La biologie et bien souvent l’obsession cosmétique ne sont pas les seuls déterminants des critères de la santé buccodentaire et de la compétence professionnelle. Comprendre et intégrer le rôle des
facteurs sociaux, économiques, environnementaux, culturels et personnels reste aussi
essentiel dans les enjeux et dans l’accomplissement d’une prise en charge que dicte
le respect de l’individu.
Les devoirs du médecin-dentiste et des
sociétés professionnelles face au problème
des besoins en soins bucco-dentaires chez
les populations indigentes de notre pays
comprennent les points suivants: intensification et ciblage des programmes de
prophylaxie des affections bucco-dentaires, intégration des démarches de prévention en matière de tabagisme, chez les
jeunes en particulier, une meilleure information des patients en difficulté sur leurs
droits en matière de prise en charge des
soins bucco-dentaires par les services sociaux, établissement d’un dialogue constructif avec le patient et, dans certains cas
particuliers, assorti d’une concertation
avec le médecin-dentiste conseil et, finalement, un sens du discernement capable
d’identifier aussi les nombreux patients
souffrant d’une situation socio-économique précaire sans pour autant bénéficier
d’une aide sociale.
Quel traitement pour quel patient?
Dr Michel Perrier, ancien directeur de la
Policlinique de médecine dentaire, Lausanne
La notion de dénuement, d’indigence, de
pauvreté, de misère et de besoins est difficile à définir de manière univoque du fait
qu’il s’agit d’un phénomène pluridimensionnel qui se réfère à divers aspects économiques, sociaux, psychologiques, éducatifs et culturels.
974
Dr Michel Perrier
La pauvreté se réfère au niveau de vie
moyen de la population et aux styles de
vie approuvés par la société. Elle exprime
un point de retrait par rapport aux modes
de vie jugés normaux.
Ce niveau de vie moyen est déterminé par
des ressources économiques, mais aussi
par ce que l’on considère comme des
ressources non économiques, telles que
les pratiques de la santé, l’éducation et la
formation, la situation familiale, le logement, l’alimentation, les loisirs, le prestige
social, les réseaux sociaux.
Aujourd’hui, la pauvreté ne se limite plus
à de petites minorités ou à des zones
géographiques bien délimitées. Elle peut
menacer des personnes jouissant d’une
situation apparemment stable, dans des
régions aussi urbaines que rurales. Aussi,
bien que la pauvreté se définisse toujours
en fin de compte en termes de manque de
ressources, d’isolement voire d’exclusion
sociale, elle est à considérer comme une
menace pour une portion non infime de
la population.
La pauvreté est difficile à mesurer et à
quantifier, car non seulement elle a de
multiples visages, mais elle comprend une
bonne partie d’invisibilité. Par exemple,
selon les mesures statistiques habituellement utilisées, on dénombre entre 10 et
15% de personnes et ménages pauvres
dans la société suisse, selon les seuils de
pauvreté considérés. Ces chiffres atteignent 13% en Autriche, 16% en France et
en Allemagne et 19% en Italie. Les taux
les plus élevés concernent les pays méridionaux et le Royaume-Uni.
En Suisse, la définition du seuil de pauvreté s’appuie sur les directives de la Conférence suisse des institutions d’action
sociale (CSIAS). Le seuil de pauvreté en
2002 était de 2200 fr. pour un ménage
d’une personne et de 4300 fr. pour une
famille avec deux enfants. Est considéré
comme pauvre tout ménage dont le re-
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
venu, après déduction des cotisations sociales et des impôts, est inférieur au seuil
de pauvreté.
Mais la pauvreté est aussi cachée: on sait
qu’une part importante des personnes qui
auraient droit à une aide (du fait qu’elles
n’atteignent pas le minimum vital) ne la
demandent pas, et de ce fait, ne sont la
plupart du temps pas connues et très difficiles à approcher. Ainsi, un tiers de rentiers AVS et 40% des rentiers AI auraient
droit à des prestations complémentaires
pour compléter leur revenu, mais ne les
demandent pas et la moitié des personnes
qui auraient droit à l’aide sociale ne font
pas valoir ce droit.
Les groupes les plus souvent concernés
comprennent:
Les travailleurs pauvres ou «working poor»:
leur revenu est insuffisant pour couvrir
leur charge. Ils ont souvent un faible niveau de formation et de qualification professionnelle qui les empêche d’améliorer
leurs conditions de travail. Ils sont ainsi
particulièrement dépendants de leur employeur. La faiblesse du revenu peut aussi
avoir comme conséquence le recours au
crédit à la consommation et au leasing,
donc à des dettes. En 2002, la Suisse
comptait 220 000 «working poor» entre 20
et 59 ans, qui vivaient dans 140 000 ménages qui comptaient au total 505 000 personnes.
Les familles monoparentales ont la plupart
du temps des femmes comme cheffes de
famille qui cumulent plusieurs désavantages: de faibles qualifications professionnelles, l’absence ou l’insuffisance de soutien familial et un faible pouvoir d’achat.
Prises dans un cercle vicieux, elles ne
peuvent occuper un emploi à plein temps
car elles ont charge d’enfants et le salaire
qu’elles obtiendraient à plein temps ne
leur permettrait pas de payer les frais de
garderie.
Les personnes migrantes ou immigrées occupent souvent des emplois peu qualifiés
dans des branches à faible rémunération.
Les migrants en situation précaire, soit les
requérants d’asile et les personnes admises provisoirement ne sont en général pas
représentés dans les études sur la pauvreté. Leur standard de vie est souvent
très bas et leurs emplois souvent très
disqualifiants.
Le nombre de personnes ayant eu recours
à l’aide sociale a doublé au cours des années 90. Elles sont actuellement estimées
à 300 000 avec une forte part de jeunes
réduits à vivre de l’aide sociale (22,5% de
plus dans le seul canton de Zurich). La
réduction de la durée d’indemnisation des
chômeurs a des conséquences concrètes,
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
Flambées de rougeoles et médecine
dentaire – faut-il s’inquiéter?
Dr Serge Roh, président de la CHPE
L’étude des chiffres récents publiés par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) montre
dans certaines régions de notre pays des flambées récurrentes de rougeole suffisamment
importante pour que l’on puisse parler d’épidémie. Cette affection virale qui se transmet
par contact avec des gouttelettes provenant du tractus respiratoire est particulièrement
contagieuse pour les personnes non immunes. Il semble donc intéressant de prendre le temps
d’évoquer ici les mesures nécessaires pour protéger le personnel et les patients de nos cabinets d’une transmission indésirable.
L’application des mesures d’hygiène préconisées dans les diverses publications de
la Commission d’hygiène de la SSO (CHPE) est certainement la façon la plus fiable
pour enrayer la transmission des particules infectieuses dans le cadre d’un cabinet
dentaire. Toutefois, en accord avec les recommandations de l’OFSP, il convient d’encourager la totalité du personnel médical pouvant entrer en contact avec des porteurs
potentiels de l’infection à être immunisé contre la rougeole. Bien que cet état de fait
soit acquis pour la plupart de nos collaboratrices et collaborateurs (vaccination durant
l’enfance), il semble opportun, en raison de la situation, d’encourager les personnes
concernées à vérifier leur statut vaccinal et, pour celles qui ne seraient pas encore
prémunies, de les informer des risques encourus et des mesures de protection à leur
disposition. Une vaccination manquante peut être rattrapée à tout âge, le vaccin étant
considéré par les spécialistes comme efficace et sûr.
Bibliographie
Bulletin de l’OFSP no 27, juin 2004
Guide méthodologique des maladies transmissibles, OFSP, édition 2000
puisqu’on compte quelque 2700 personnes qui arrivent en fin de droit chaque
mois.
Dans une étude réalisée par Michel Perrier
et ses collaborateurs, les dossiers de 2000
patients examinés et traités à la Policlinique dentaire de Lausanne entre 2001 et
2003 ont été revus et analysés pour mieux
connaître les besoins et les soins dispensés dans le cadre d’«un traitement simple,
adéquat et économique» adapté à l’état
bucco-dentaire et à l’hygiène du patient.
Les besoins en soins conservateurs chez
les patients assistés s’élevaient à 68%
contre 73% chez les patients privés. Les
besoins en prothèse amovible s’élevaient
à 56,7% chez les patients assistés et à
31,2% chez les patients privés. Ces données s’expliquent par l’application de mesures plus radicales répondant aux recommandations des services sociaux et à la
haute fréquence de caries particulièrement avancées que l’on rencontre chez les
patients assistés.
Les traitements en prothèse fixe chez les
patients assistés relèvent du caractère
d’exception. Ils doivent répondre à un
impératif esthétique dans un contexte
d’hygiène de haut niveau. La décision
d’un tel traitement se fait d’entente avec
le médecin-dentiste conseil de l’institu-
tion qui prend le traitement en charge. Le
traitement implantaire chez les patients
assistés relève aussi d’une mesure exceptionnelle. Après concertation avec le médecin-dentiste conseil, il est parfois admis
dans des cas de rétention prothétique
mandibulaire chez des patients édentés
présentant une crête alvéolaire particulièrement défavorable. 0,9% des patients
assistés répartis dans les groupes d’âge
des années 50 et au-delà ont bénéficié
d’un traitement implantaire visant à stabiliser une prothèse totale inférieure.
Il est bien connu et documenté que l’assainissement parodontal s’inscrit dans
toute prise en charge thérapeutique
bucco-dentaire. Assez systématiquement,
les médecins-dentistes conseils des services sociaux refusent un assainissement
parodontal qui dépasse le cadre des compétences de base d’une hygiéniste dentaire. Dans des cas très exceptionnels où
les conditions d’hygiène domestique sont
particulièrement accomplies, il peut être
possible d’espérer un accord de prise en
charge sur la base d’une négociation avec
le médecin-dentiste conseil.
Le traitement parodontal des cas assistés
se limite la plupart du temps aux extractions des dents perdues et douteuses et à
leur remplacement par une solution amo-
vible ou non, considérant notamment
qu’une occlusion prémolaire suffit à une
fonction masticatoire efficace sans gêne
esthétique visible.
Médecine dentaire sociale:
les attentes du patient et celles
du praticien
Dr Peter Wiehl, Directeur des Cliniques
dentaires scolaires et des Policliniques
de la Ville de Bâle
En Suisse, la prise en charge des frais
dentaires dépend de dispositifs légaux des
organismes suivants: LAMal, AI, les prestations complémentaires de l’assurance
vieillesse, survivants et invalidité (LPC),
LAA, AM (assurance militaire) et la loi sur
l’asile.
Les deux premières se basent sur une liste
d’affections qui intéressent le système de
mastication, la troisième est couverte par
des subventions fédérales octroyées aux
cantons qui fixent et versent la prestation
complémentaire dans le cadre d’«un traitement simple, adéquat et économique»
adapté à l’état bucco-dentaire et à l’hygiène du patient.
Lapidairement dit, la mise en œuvre de
l’aide sociale appartient aux cantons qui
ont chacun élaboré leur propre loi et fixé
les montants de l’aide financière, avec
comme principe celui du traitement économique, simple et adéquat que doit approuver un médecin-dentiste conseil désigné par les autorités.
Pour ces raisons, à l’âge adulte, les soins
dentaires ne sont pas accessibles à tous de
manière identique, puisqu’ils ne font pas
partie du catalogue des prestations de
base de la LAMal. Les populations les plus
pauvres de Suisse, notamment celles qui
dépendent d’une aide financière de la
Confédération, des cantons ou des communes, ont un accès différencié aux soins
dentaires, suivant qu’ils reçoivent des
Dr Peter Wiehl
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
975
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
prestations complémentaires AVS/AI (la
norme la plus généreuse), qu’ils sont suivis par l’aide sociale cantonale ou qu’ils
relèvent du domaine de l’asile (le parent
pauvre des régimes d’aide sociale).
Les soins dentaires ne semblent guère
être une priorité dans le domaine social.
Il n’y a pas d’assurance obligatoire, ni de
politique sociale claire. Ni la Confédération, ni les cantons, ni la SSO, ni les sections cantonales de la SSO n’ont réussi à
garantir une pratique identique dans le
domaine de la médecine dentaire sociale.
Un deuxième avis médical, une concertation élargie, une formation organisée des
médecins-dentistes conseil, des procédures de recours clairement établies, seraient
nécessaires pour permettre une harmonisation des pratiques et une meilleure égalité de traitement.
Le manque de transparence dans ce domaine est frappant et empêche, en l’état,
une harmonisation des systèmes cantonaux. L’opacité du système, souvent relevée, son extrême hétérogénéité et l’absence totale d’informations quant à la
satisfaction des bénéficiaires sur les soins
donnés, empêchent aujourd’hui de réaliser une stratégie nationale dans le domaine des soins dentaires aux personnes
nécessiteuses. Pour améliorer l’état actuel
inadéquat, le spécialiste bâlois a plaidé en
faveur de la mise en place de réseaux et
d’interconnexions de toutes les ressources
et associant tous les acteurs impliqués –
non seulement en Suisse, mais jusqu’au
niveau de l’espace européen.
Les restaurations dentaires
atraumatiques
Prof. Jo Frencken, Université de Nijmengen,
Pays-Bas
La méthode ART (atraumatic restorative
treatment) pourrait contribuer à réaliser
même des assainissements complexes
non pas sous narcose, mais en ambulatoire, ce qui permettrait de réduire les
coûts et contribuerait à créer une médecine dentaire socialement supportable
pour les enfants également. La méthode
ART (également connue sous le terme de
MID = minimal intervention dentistry) est
d’une géniale simplicité. Elle se fonde sur
l’état le plus récent des connaissances en
matière de pathogenèse de la carie. Après
l’ouverture de la cavité d’accès dans la
couche de l’émail, soit avec une fraise
tournant à bas régime, soit avec un instrument manuel (ciseau à émail de type
ART2 enamel cutter) – qui est par conséquent indolore – la seule couche de la
dentine ramollie, donc infectée, est éliminée à l’aide d’excavateurs manuels. Le
976
En dépit de l’engouement pour les médias électroniques, les ouvrages classiques rencontrent toujours un intérêt
manifeste parmi les congressistes.
débridement des tissus cariés peut encore
être amélioré par le nettoyage de la cavité
à l’aide d’un appareil à jet de poudre. En
principe, on peut donc renoncer à l’anesthésie locale, un avantage qui est particulièrement intéressant pour les traitements
des enfants ou des personnes anxieuses.
L’obturation subséquente est réalisée par
un matériau à base de verre ionomère de
type II. Ces matériaux ont une durée de
vie comparable à celle des composites,
sans en présenter les inconvénients
comme la sensibilité à l’humidité ou à des
facteurs de manipulation technique. De ce
fait, la pose de la digue n’est pas nécessaire, ce qui représente une simplification
supplémentaire du traitement. Il est très
important de veiller à étendre l’obturation
par le «scellement préventif» de sorte à
couvrir tous les bords de la cavité ainsi que
les puits et fissures adjacents. Le principe
obsolète de Black «extension for prevention» a fait place au précepte «extend the
prevention».
Jusqu’à présent, Jo Frencken et d’autres
collaborateurs ont évalué avec succès la
méthode ART dans différents pays du
Tiers-Monde. En raison de sa simplicité et
de son économicité, elle répondrait parfaitement aux exigences d’une «médecine
dentaire sociale raisonnable et ciblée»
chez nous aussi.
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
Le traitement radiculaire: ses coûts,
son utilité et son pronostic
Prof. Roland Weiger, Directeur de la Clinique
de parodontologie, d’endodontologie et
de cariologie du Centre universitaire de
médecine dentaire, Bâle
Parmi les arguments théoriques en faveur
du traitement endodontique en un seul
temps, il y a lieu d’évoquer le désir, tant
du praticien que du patient, de réduire le
temps de traitement, la simplification sur
le plan pratique (nécessité d’une seule
mise sous digue et d’un seul set d’instruments), ainsi que – facteur important du
point de vue des soins dentaires sociaux
– la réduction des coûts. Parmi les arguments s’opposant en principe à la procédure en un temps opératoire, il convient
de tenir compte des aspects microbiologiques, notamment en cas de complications
périapicales, le risque de symptômes postopératoires («flare-ups»), ainsi que la
question du pronostic à long terme.
Alors que la littérature ne fait pas état de
différences significatives entre les résultats obtenus par l’instrumentation manuelle conventionnelle et les traitements
réalisés par des méthodes mécanisées, la
simplification du traitement et le gain de
temps font de ces dernières une alternative fort attrayante.
Concernant les pansements médicamenteux, en particulier ceux par de l’hydroxyde
de calcium, considéré par d’aucuns
comme véritable «remède miracle», plusieurs études ont permis d’observer, après
des pansements de Ca(OH)2 durant une
à deux semaines un taux d’échantillons
microbiologiquement négatifs de 65 à
74%. Dans ce contexte, il est plus intéressant de tenter de répondre à la question
du devenir des micro-organismes non
éliminés par le traitement endodontique.
Le nombre restreint de données à ce sujet
semble indiquer que l’hydroxyde de calcium permet d’obtenir les résultats les
plus favorables, démontrés par un taux
élevé de cultures avec absence d’unités
formant des colonies.
L’objectif primordial du traitement endodontique est d’éliminer le substrat nécessaire à la prolifération des bactéries, respectivement d’obturer de la façon la plus
étanche possible les zones leur servant
d’habitat. Les moyens à cet effet sont la
préparation mécanique optimale des canaux radiculaires, la désinfection chimique par des solutions d’irrigation efficaces
et l’obturation la plus étanche possible de
l’ensemble du système canalaire. En guise
de conclusion à ce remarquable exposé
concernant la question de savoir s’il est
préférable de réaliser des traitements ra-
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
diculaires en un seul temps ou en plusieurs séances, le spécialiste bâlois a précisé qu’en l’état actuel des connaissances,
il n’est pas possible de préconiser de préférence, au niveau du pronostic, ni l’une
ni l’autre des deux méthodes alternatives.
Besoin et indications de traitements
en orthodontie
Dr Jean-Paul Schatz, PD, Chargé d’enseignement, Division d’orthodontie, Section
de médecine dentaire, Genève
S’il y a un domaine de la médecine dentaire qui est souvent mis en question,
voire considéré comme accessoire, superflu ou même un luxe, c’est bien l’orthodontie dont certains critiques ne voient
pas l’utilité dans le contexte de soins
dentaires à vocation sociale. Dans son
exposé, le spécialiste genevois a brillamment su mettre les pendules à l’heure en
passant en revue de manière très nuancée
les besoins et indications de l’orthodontie.
La question première à laquelle il faut
répondre est celle de savoir si la malocclusion doit être considérée comme une maladie ou un risque pour la santé bucco-
Dr Jean-Paul Schatz
dentaire. Vue sous l’angle de l’impératif
d’une hygiène bucco-dentaire correcte, la
correction des encombrements et autres
chevauchements semble être une indication qui va de soi. De même que les traitements orthodontiques à visée préprothétique, qui peuvent parfois être un passage obligé pour la réalisation d’un traitement prothétique raisonnable. En revanche, le problème de la prévention des
troubles de l’ATM (ou plus généralement
des cranio-mandibular disorders = CMD)
par les traitements orthodontiques fait
l’objet de controverses dans la littérature.
Finalement, la demande d’un traitement
orthodontique peut être liée à des considérations purement esthétiques; dans de
telles situations, c’est le patient lui-même
qui doit décider si la correction est raisonnable.
Revenant sur le point controversé de la
nécessité des traitements orthodontiques
pour des raisons fonctionnelles, le conférencier a précisé que les indices de malocclusion représentent une tentative de
quantification d’un écart par rapport à
une norme. Leur classification doit donc
se faire en fonction de la sévérité de cet
écart dans le cas individuel. L’indication à
un traitement sera posée après évaluation
des risques avérés et réels pour le système
stomato-gnathique. La notion de confort
n’entre pas en ligne de compte et sera à
charge du patient.
Tout en admettant qu’il y a peu de données fiables basées sur des études avec un
recul suffisant, le spécialiste a néanmoins
défini un certain nombre de critères à
prendre en considération lors de la défi-
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
nition des besoins et indications pour un
traitement orthodontique. Sur le plan du
pronostic des tissus dentaires durs et du
parodonte, l’alignement correct des arcades dentaires et des relations intermaxillaires peut tout d’abord influencer de
manière favorable le risque de carie et de
maladies parodontales. Un traitement
peut également être indiqué pour corriger
des troubles de la mastication ou du développement de l’élocution. L’amélioration des rapports intermaxillaires, par
exemple dans les cas de deep bite et/ou
de Classe II/2 selon Angle, contribuera à
réduire les traumatismes occlusaux, de
l’usure et de l’abrasion, voire le risque de
résorption radiculaire. Un traitement interceptif pour corriger à un stade précoce
les situations de Classe III chez les patients jeunes peut être judicieux tant du
point de vue fonctionnel qu’esthétique. A
ce propos, il ne faut pas sous-estimer les
effets favorables des traitements orthodontiques sur le plan psychique, en particulier en ce qui concerne l’image de soi
(«self esteem») des patients – qui sont
souvent à l’âge de l’adolescence et de la
puberté lorsqu’ils demandent un traitement.
Remarques importantes en guise
de conclusion
Comme il fallait s’y attendre, l’ampleur
des sujets présentés lors du Congrès SSO
2004 était telle qu’il serait illusoire de
tenter d’en relater tous les détails dans ces
quelques lignes. Pour cette raison, la présente deuxième partie de ce compte rendu
s’est limitée à évoquer un certain nombre
de sujets particulièrement représentatifs.
Ce faisant, l’accent a été mis en premier
lieu sur les deux présentations en français
(oui, hélas, seulement deux!), complété
par deux exposés illustrant la complexité
du thème de ce congrès. La responsabilité
de ce choix, forcément subjectif, incombe
entièrement à l’auteur qui, une fois de
plus, compte sur la compréhension et
l’indulgence de tous les intervenants qui
ne sont pas mentionnés dans ce compte
rendu synoptique. A noter que les exposés
complets, ainsi que les graphiques et illustrations y relatives, seront publiés par la
SSO sous forme d’un CD-Rom à paraître
dans un avenir très proche.
Ultime remarque à titre de préavis: l’année prochaine, le Congrès de la SSO se
déroulera – comme en 1999 déjà – sous
forme d’une semaine de formations interdisciplinaire, du 31 mai au 3 juin 2005 à
Bâle. Cette réunion sera placée sous le
titre «Médecine dentaire factuelle – possibilités et limites» et comprendra quatre
978
Au revoir début juin 2005 à Bâle pour la Semaine de formations interdisciplinaire
placée sous le titre «Médecine dentaire factuelle – possibilités et limites».
réunions consacrées aux thèmes suivants:
«Esthétique et fonction»; «Diagnostic et
pronostic»; «Prévention – intervention» et
«Dent naturelle et/ou implant en tant que
pilier». Une affiche prometteuse avec un
programme fort attrayant donc, que je
vous conseille de noter dès à présent dans
votre agenda. Q
REVUE
Lichen plan
Ramage G et al.:
Denture stomatitis: a role for
Candida biofilms
Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral
Radiol Endod 98: 53–59, 2004
Le Candida est un agent potentiel de la
stomatite sous-prothétique décrite pour
la première fois par Cahn en 1936. Les
cellules fongiques colonisent la surface de
la cavité buccale et celle des prothèses
acryliques. La stomatite sous-prothétique
est une affection récidivante répandue
chez 11% à 67% des porteurs de prothèses. Son étiologie est multifactorielle:
traumatisme prothétique, port continu,
ancienneté, matériau de la prothèse, flux
salivaire, hygiène, tabagisme, habitudes
alimentaires et pH de la plaque prothétique. L’affection se caractérise par une inflammation de la muqueuse, en particulier
au niveau maxillaire. Les patients peuvent
se plaindre de sensations de brûlures,
d’inconfort, de goût désagréable, bien que
beaucoup ne remarquent pas du tout le
problème. Les colonies microbiennes sont
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
structurées de manière complexe, souvent
encapsulées dans une matrice exopolymérique et ainsi constituées en biofilms
capables de résister à des agressions antimicrobiennes immunologiques. Cette
situation donne lieu à des maladies réfractaires.
Le rôle des biofilms de Candida dans les
stomatites sous-prothétiques n’a pas encore été clairement évalué. Les auteurs de
cet article admettent qu’ils interviennent
L’ a c t u a l i t é e n m é d e c i n e d e n t a i r e
dans le caractère récalcitrant de l’affection.
L’objectif de leur étude réalisée in vitro est
de décrire les biofilms candidosiques associés à une stomatite sous-prothétique
et d’évaluer les caractéristiques de la formation de ces biofilms.
Des échantillons de prothèses acryliques
de patients atteints de stomatite sousprothétique furent soumis à une analyse
au microscope à balayage. Des frottis furent prélevés chez ces mêmes patients et
le développement cinétique des biofilms
de C. albicans fut examiné. Ces biofilms
étaient constitués d’une trame de levures
cellulaires et d’hyphes logées au fond des
irrégularités et des crevasses des matériaux prothétiques. En surface, ces éléments étaient associés à des résidus exo-
plymériques. L’activité des biofilms restait
intense dans sa complexité et son développement.
L’action in vitro d’antifongiques montrait
une résistance accrue des biofilms arrivés
à maturation par rapport aux formes planctoniques de Candida (formes libres).
Le processus infectieux d’une candidose
sous-prothétique commence par l’adhésion cellulaire aux prothèses et, par la
suite, aux lésions des muqueuses.
Les études sur les biofilms ont montré que
ces derniers sont constitués de communautés bactériennes structurées attachées
à une surface par une matrice. Dans le cas
du C. albicans, le micro-organisme se divise après s’être fixé, en formant des microcolonies qui vont résulter en un biofilm
tridimensionnel. L’adhésion des biofilms
aux irrégularités de prothèses insuffisamment polies les protège du nettoyage mécanique. L’hétérogénéicité phénotypique
de la population candidosique au sein
d’un même milieu buccal vient encore
s’ajouter à la complexité des biofilms. Ces
derniers peuvent se montrer particulièrement résistants aux traitements, qu’il
s’agisse de fluconazole ou d’amphotéricine B. De plus, les biofilms résistent aussi
à l’action d’antiseptiques. Ces données
expliquent les taux élevés de récidive de
ce type d’infection et encouragent le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques.
Michel Perrier, Lausanne
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Angabe in Literaturverzeichnissen: Schweiz Monatsschr Zahnmed
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Autoren-Richtlinien / Instructions aux auteurs
Die Richtlinien für Autoren sind in der SMfZ 1/2004, S. 48 (Forschung · Wissenschaft
S. 19–24) und auf der SSO-Webseite aufgeführt.
Les instructions pour les auteurs de la RMSO se trouvent dans le Nº 1/2004, p. 50
et sur la hompage de la SSO.
Instructions to authors see SMfZ 1/2004, p. 53.
Herausgeber / Editeur
Schweizerische Zahnärzte-Gesellschaft SSO
Präsident / Président: Dr. med. dent. Ulrich Rohrbach, Niederscherli
Sekretär: Dr. iur. Alexander Weber, Münzgraben 2, 3000 Bern 7
Telefon 031 311 76 28 / Telefax 031 311 74 70
Inseratenverwaltung
Service de la publicité et des annonces
Schweizer Monatsschrift für Zahnmedizin
Förrlibuckstrasse 70, Postfach 3374, CH-8021 Zürich
Telefon 043 444 51 04, Telefax 043 444 51 01
Inseratenschluss: etwa Mitte des Vormonats.
Insertionstarife / Probenummern: können bei der Inseratenverwaltung angefordert
werden.
Délai pour la publication des annonces: le 15 du mois précédant la parution.
Tarifs des annonces / Exemplaires de la Revue: sur demande au Service de la publicité
et des annonces.
Die Herausgeberin lehnt eine Gewähr für den Inhalt der in den Inseraten
enthaltenen Angaben ab.
L’éditeur décline toute responsabilité quant aux informations dans les annonces
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Gesamtherstellung / Production
Stämpfli AG, Wölflistrasse 1, Postfach 8326, 3001 Bern
Abonnementsverwaltung / Service des abonnements
Stämpfli AG, Postfach 8326, 3001 Bern, Tel. 031 300 63 44
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Fr. 284.80*
Studentenabonnement / Abonnement pour étudiants
Fr. 65.40*
Einzelnummer / Numéro isolé
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* inkl. 2,4% MWSt / 2,4% TVA incluse
Europa / Europe: pro Jahr (12 Ausgaben) / par année (12 numéros)
Fr. 298.–
Einzelnummer / Numéro isolé
Fr. 33.–
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Ausserhalb Europa / Outre-mer:
pro Jahr (12 Ausgaben) / par année (12 numéros)
Fr. 319.–
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sans le consentement écrit de la rédaction et de l’auteur.
Auflage / Tirage: 5250 Exemplare
ISSN 0256-2855
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 9/2004
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