Première partie : modèle de l’atome et tableau périodique des éléments Introduction A. Analyse élémentaire B. Modèle de l’atome : électrons, nucléons, isotopie ; mole, nombre d’Avogadro ; édifices moléculaires, formule brute, formule moléculaire, masses molaires Grandes étapes de la construction du modèle quantique C. Découverte de l’électron et du noyau : l’atome a une structure D. Introduction de la quantification : spectroscopie et modèle de Bohr E. Mesure de la masse des atomes et découverte de la structure du noyau : isotopie F. Le modèle actuel de l’atome, issu des postulats de la mécanique quantique Le tableau périodique des éléments chimiques G. Le tableau périodique des éléments chimiques H. Modèle de Slater : notion d’effet d’écran I. Formules de Lewis des atomes et des ions monoatomiques Ce chapitre traite de découvertes reconnues par l’attribution du Prix Nobel de physique ou de chimie dans le premier quart du XXème siècle 1 • Tous les Nobel de Chimie, B. Wojtkowiak, Ouest Editions, 1990 • www.nobelprize.org (premiers lauréats : en 1901) 4. Etude du spectre atomique d’émission de H Séries de raies Johann Jakob Balmer (1825-1898) a établi empiriquement (1885) une formule de récurrence reliant les longueurs d’onde des quatre raies alors connues du spectre atomique d’émission de l’hydrogène : 656 nm, 486 nm, 434 nm, 410 nm (dans le domaine du visible). Cette « série » de raies est nommée série de Balmer. 1 = Constante. m2 - 4 m entier, m > 2 m2 La formule de Balmer a servi de modèle pour l’expression des lois donnant les raies spectrales d’autres séries du spectre, dans les domaines situés de part et d’autre du visible : série de Paschen (dans l’infrarouge) et série de Lyman (dans l’ultraviolet). 1 =R( 1 1 ) Lyman, ultraviolet, m > 1 12 m2 1 =R( 1 1 ) m2 Balmer, visible, m > 2 22 1 =R( 1 1 ) Paschen, infrarouge, m >2 3 32 m2 Constante de Rydberg d’un élément La symétrie algébrique de ces formules a confirmé une intuition de Walter Ritz, exprimée dans un principe de combinaison : la formule de Balmer se présente comme une différence entre deux termes qui sont de même nature (principe de Ritz). D’où une formule générale, permettant de retrouver toutes les raies de toutes les séries du spectre : 1 n,m = R ( 1 1 n2 m2 ) n et m entiers, m > n Johannes Robert Rydberg (1854-1919), en étudiant les spectres de divers éléments chimiques, a mis en évidence l’importance de la constante qui intervient dans cette loi et dont la valeur peut être obtenue avec une grande précision par la position des raies spectrales. Cette constante, notée R, est appelée la constante de Rydberg de l’élément. La valeur de la constante de Rydberg est caractéristique de l’élément. Sa valeur pour l’hydrogène est : RH = 10979708,014 ± 0,013 m-1. 3 Raie limite d’une série Dans une série, par exemple la série de Balmer (les raies étudiées par Balmer sont notées aujourd’hui : Ha à 656 nm, Hb à 486 nm, Hg à 434 nm, Hd à 410 nm ; les raies de la série de Lyman sont notées L) : • les raies sont de plus en plus proches les unes des autres lorsque l’énergie augmente, jusqu’à devenir presque indiscernables • on appelle « raie limite » de la série (située pour la série de Balmer vers 364,6 nm), la raie correspondant à l’énergie la plus grande dans la série 4 Caractérisation d’un élément par son spectre Spectroscopie d’absorption et Energie d’ionisation Le spectre d’émission atomique d’un élément est : • constitué de raies, • et les raies sont organisées en séries. Le spectre d’émission atomique d’un élément est toujours constitué des mêmes raies : il est ainsi caractéristique de cet élément. Lorsque l’on étudie l’absorption d’énergie par une collection d’atomes d’un élément, le repérage des énergies pouvant être absorbées conduit à des raies observées aussi dans le spectre d’émission. Au-delà d’une valeur de l’énergie caractérisant la « raie limite » d’une série d’absorption, on atteint un continuum où toutes les énergies peuvent être absorbées car l’électron n’est plus lié. L’énergie de la raie limite correspond à l’énergie nécessaire pour ioniser l’atome : l’« énergie d’ionisation », définie pour un état initial donné de l’atome 5 5. Modèle de Bohr pour H et les Hydrogénoïdes Niels Bohr (1885-1962) établit une synthèse entre deux résultats : • l’existence d’un quantum d’action (issue de la théorie du rayonnement thermique de Planck et de l’interprétation de l’effet photoélectrique par Einstein) • le noyau atomique de Rutherford. Il propose un modèle quantifié de l’atome d’hydrogène (1913) vu comme un système de deux particules : un électron de charge (-e) et de masse m décrivant une trajectoire circulaire plane de rayon r autour d’un noyau fixe de charge (+e), qui résout certaines contradictions du modèle de Rutherford (selon lequel l’atome ne pourrait pas être un édifice stable) et permet l’interprétation d’une part des données spectroscopiques expérimentales. Bohr reçoit le prix Nobel de physique en 1922. 6 Le modèle de Bohr repose sur les postulats suivants : • il existe des orbites stationnaires, où l’émission de rayonnement est interdite, issues d’un équilibre dynamique entre la force d’attraction électrostatique entre noyau et électron donnée par la loi de Coulomb et l’effet centrifuge du mouvement orbitalaire • dans un tel état stationnaire, le moment cinétique orbital de l’électron est un multiple entier de h/2p : r.m.v = nh/2p (les vecteurs position r et vitesse v sont orthogonaux), avec n entier (condition équivalente à une condition sur l’énergie : le rapport de l’énergie totale de l’électron à sa fréquence orbitalaire est un multiple entier de h/2) : un état stationnaire est ainsi caractérisé par un nombre entier n • une émission d’énergie est la manifestation d’une transition électronique entre deux orbites stationnaires • et l’énergie de la radiation émise est égale à la différence entre les énergies qui caractérisent les deux orbites L’application du principe fondamental de la dynamique conduit à une expression de l’énergie totale En de l’électron dans l’état stationnaire caractérisé par le nombre n et du rayon de l’orbite que décrit l’électron dans cet état stationnaire. Une grandeur qui intervient dans plusieurs expressions : le rayon de la première orbite de Bohr (n = 1), noté a0. Valeur de a0 : a0 = 52,92 pm. 7 E 0 - me.e4 Em états excités E1 En = = 80 2.h2.n2 Em vers n = E1 En état fondamental E E état non lié ( E1 1 1 n2 Em Em n2 m2 absorption ) En transition vers un état moins lié: excitation émission En transition vers un état plus lié: stabilisation Les trajectoires stables de l’électron autour du noyau sont des cercles de rayons rn = a0.n2 avec n entier, r1 = a0 L’énergie de l’atome dans l’état caractérisé par le nombre entier n est : En = E1 / n2; elle ne dépend que de n. 8 raie « limite » E max min « première » raie E min max 9 Les énergies sont comptées négativement. La valeur n = 1 définit l’état le plus stable de l’atome, état fondamental, état le plus fortement lié. Les valeurs obtenues pour n = 1 sont : E1 = -13,60 eV et a0 = 0,529.10-10 m. Une valeur de n > 1 définit un état où l’électron est moins fortement lié au noyau, appelé état excité, qui est un état lié (état lié moins stable que l’état fondamental). Lorsque n tend vers l’infini, l’électron n’est plus lié au noyau: l‘atome est dans l’état ionisé, qui est donc un état non lié. L’énergie d’ionisation, énergie minimale nécessaire à ce processus, est donc égale à -E1. Une série de raies du spectre traduit ainsi un ensemble de transitions électroniques vers un niveau final donné. Les raies sont de plus en plus rapprochées et de moins en moins intenses vers les grandes énergies (faibles longueurs d’onde), puisque les niveaux deviennent alors euxmêmes de plus en plus rapprochés et les états correspondants (de moins en moins liés) deviennent de moins en moins peuplés. 10 Transitions énergétiques et séries de raies – Modèle de Bohr 11 Modèle de Bohr : transitions Données expérimentales : séries du spectre états initiaux état final nom de la série domaine de radiations m≥2 n=1 Lyman ultraviolet lointain m≥3 n=2 Balmer visible et ultraviolet m≥4 n=3 Paschen infrarouge proche m≥5 n=4 Brackett infrarouge m≥6 n=5 Pfund infrarouge Les valeurs calculées selon le modèle de Bohr pour les fréquences caractérisant les raies du spectre sont en parfait accord avec les données expérimentales. Accord entre valeurs calculées selon Bohr et résultats expérimentaux 12 Application du modèle de Bohr aux systèmes hydrogénoïdes Les systèmes hydrogénoïdes (systèmes qui « ressemblent à l’atome H ») sont des systèmes constitués • de 1 noyau • et 1 unique électron Donc : systèmes issus d’atomes de numéro atomique Z par perte de (Z-1) électrons ; ce sont donc des ions positifs constitués par un noyau de charge Ze et un unique électron ; exemples : les ions He+ (Z = 2), Li2+ (Z = 3), Be3+ (Z = 4), B4+ (Z = 5) et U91+ (Z = 92) Le modèle de Bohr est applicable aux systèmes « hydrogénoïdes » : les expressions obtenues pour l’énergie et le rayon d’une orbite traduisent une stabilisation de l’unique électron du système par rapport à l’hydrogène (pour une même valeur de n, l’énergie En et le rayon rn ont des valeurs inférieures à celles obtenues pour l’hydrogène). 13 Insuffisance du modèle de Bohr Le modèle de Bohr : • introduit une condition de quantification • mais reste un traitement classique des trajectoires des électrons dans l’atome, des variations de position et de vitesse au cours du temps, de l’expression des énergies. Il laisse des phénomènes expérimentaux non expliqués, en particulier : • le spectre des espèces non hydrogénoïdes, • la structure fine du spectre de l’hydrogène, • le comportement d’un atome dans un champ magnétique. Il devra laisser la place à un modèle dans lequel l’état (et en particulier l’énergie) d’un électron n’est pas caractérisé par 1 seul nombre quantique, mais par un jeu de 4 nombres quantiques. 14 E. Mesure de la masse des atomes et découverte de la structure du noyau ; isotopie 1. Francis William Aston (1877-1945, Angleterre) met au point le premier « spectrographe de masse » (1919) : les atomes sont transformés en ions, à leur tour accélérés et soumis à l’action d’un champ électrique et d’un champ magnétique, induisant une déviation de leur point d’impact sur une plaque photographique qui varie comme le rapport masse/charge. Il établit l’existence de deux « isotopes » du néon, de masses atomiques 20 et 22 et dans des proportions 90% et 10%, faisant concorder les résultats de Thomson (proposant deux masses pour le néon, 20 ou 22) et de Ramsay (observant une masse moyenne de 20,2). Prix Nobel de chimie en 1922 : Francis William Aston, « pour sa découverte, grâce au spectrographe de masse, d’un grand nombre d’isotopes élémentaires non radioactifs ainsi que pour l’énoncé de la règle des entiers pour les masses atomiques ». 15 Prix Nobel de chimie en 1904 : sir William Ramsay (1852-1916, Angleterre), « pour la découverte des gaz rares dans l’air, leur détermination et leur placement dans la classification périodique des éléments » (découverte et baptême successifs de l’argon, de l’hélium, du krypton, du néon et du xénon, constituant une nouvelle famille du tableau périodique). Le terme « isotopes » avait été proposé par Soddy (1914) pour désigner les éléments radioactifs « de même numéro atomique et de masses différentes », qui avait posé la question de l’existence d’isotopes d’éléments non radioactifs. Prix Nobel de chimie en 1921 : Frederick Soddy (1877-1956, Angleterre), « pour ses contributions à la chimie des substances radioactives et ses recherches sur les origines et la nature des isotopes ». James Chadwick (1891-1974, Angleterre), découvrant le neutron (1932), permet de préciser la structure du noyau et d’interpréter l’existence d’isotopes. Prix Nobel de physique en 1935 : James Chadwick. 16 Principe de combinaison de Ritz et spectre d’émission atomique de H - Exercice Le principe de combinaison permet l’interprétation de la totalité du spectre atomique d’émission de l’hydrogène ; dans la formule suivante, donnant les longueurs d’onde des raies du spectre, la constante RH peut être mesurée avec une grande précision : Rappeler la signification de l’expression : « série de raies ». Rappeler le nom de la constante RH. Rappeler quelles valeurs peuvent prendre les nombres p et q. On considère la série de raies associée à tous les retours possibles d’un électron vers le niveau caractérisé par le nombre n = 2. Calculer pour la « première » raie de cette série (associée à la transition de plus basse énergie). Calculer pour la raie « limite » de cette série (associée à la transition de plus grande énergie). Conclure en précisant dans quel domaine se situe cette série de raies, dans l’infrarouge ( > 800 nm), l’ultraviolet ( < 400 nm) ou le visible. 17 Niveaux d’énergie de l’unique électron de l’atome H - Exercice Identifier les différents états : « fondamental », « excité » (« excité et lié ») ou « ionisé » (« excité et non lié ») dans le schéma suivant. Identifier les processus : « excitation » ou une « stabilisation ». Proposer des valeurs possibles pour p et q. 18