DÉCEMBRE 2004 Volume 2, numéro 10 Ophtalmologie MC Conférences scientifiques COMPTE RENDU DES CONFÉRENCES SCIENTIFIQUES DU DÉPARTEMENT D’OPHTALMOLOGIE ET DES SCIENCES DE LA VISION, FACULTÉ DE MÉDECINE, UNIVERSITÉ DE TORONTO Le diagnostic et le traitement de l’épiphora lorsque les voies lacrymales de drainage sont perméables FACU LT Y O F M E D I C I N E P A R J E F F R E Y J AY H U R W I T Z , M . D . , F R C P C Lorsqu’un patient présente des symptômes de larmoiement, le diagnostic qui vient habituellement à l’esprit est l’obstruction d’un conduit lacrymal. Cependant, la plupart des patients manifestant des symptômes de larmoiement ne présentent pas d’obstruction des conduits lacrymaux et l’étiologie est autre. Les patients qui présentent des symptômes de larmoiement et dont les voies lacrymales sont perméables souffrent d’une « obstruction fonctionnelle » et le traitement peut être assez controversé et varié1,2. Cependant, sur la base d’une anamnèse détaillée et d’un examen physique minutieux et occasionnellement à titre complémentaire, d’un examen radiologique de l’appareil lacrymal, on peut établir le diagnostic et entreprendre le traitement approprié. Ce numéro d’Ophtalmologie – Conférences scientifiques, fournit un aperçu complet des différentes causes de l’épiphora, incluant l’hypersécrétion et l’élimination réduite des larmes, en particulier les anomalies de la paupière, et les options thérapeutiques chez les patients dont le système lacrymal est perméable. Les patients présentant des symptômes de larmoiement peuvent être divisés en deux groupes : • ceux présentant une hypersécrétion lacrymale (larmoiement) et • ceux dont le drainage des larmes est insuffisant, en raison d’une anomalie de la paupière ou d’une anomalie des voies lacrymales de drainage. Les patients présentant des symptômes de larmoiement et dont les voies lacrymales sont perméables peuvent néanmoins présenter une sténose anatomique au niveau de l’appareil lacrymal suffisamment importante pour causer des symptômes de larmoiement. Normalement, il devrait y avoir un état d’équilibre dans lequel la quantité de larmes produite devrait être égale à la quantité de larmes éliminée. S’il y a une hypersécrétion de larmes, sans changement dans leur élimination, le patient présentera des symptômes de larmoiement. De même, si le drainage des larmes est réduit et que la sécrétion est normale, le larmoiement sera également un symptôme prédominant. Une sécheresse oculaire réelle peut apparaître lorsque la sécrétion des larmes est réduite et/ou que l’élimination des larmes est accrue (figure 1). Hypersécrétion lacrymale (larmoiement) L’hypersécrétion lacrymale peut être due à un phénomène local ou central. Les phénomènes locaux causant un larmoiement peuvent être l’asthénopie, liée à la fatigue oculaire ou à des problèmes de réfraction, toute maladie externe (conjonctivite, kératite, corps étranger, etc., figure 2), des anomalies de la paupière (blépharite) ou des anomalies de la paupière causant l’exposition accrue de celle-ci (ectropion) ou l’ophtalmopathie de la maladie de Graves avec rétraction de la paupière. De plus, une malposition des cils dans les cas de trichiasis (figure 3) ou d’entropion (figure 4) peut causer une irritation avec une sécrétion accrue de larmes. Ce qui est caractéristique dans la symptomatologie de ces patients, c’est qu’ils présentent d’autres symptômes conjointement au larmoiement (figure 5). En présence de démangeaisons, il est possible que le patient souffre d’une allergie oculaire. La sensation de grains de sable dans l’oeil peut être due à un problème d’étalement des larmes lié à la rétraction de la paupière chez un patient souffrant d’une affection thyroïdienne ou à une anomalie du film lacrymal chez un patient souffrant de kératite sèche. En présence d’un écoulement ainsi que d’un larmoiement, il faut rechercher activement une maladie conjonctivale. Les causes centrales du larmoiement peuvent être un phénomène d’irritation le long des voies neurophysiologiques intervenant dans la sécrétion lacrymale. De plus, les larmoiements peuvent avoir des causes psychogènes : le lien avec le phénomène des « pleurs » n’est pas totalement compris. « Les yeux mouillés dus aux yeux secs » sont une cause précise de larmoiement résultant d’une hypersécrétion lacrymale. Ce phénomène est souvent mal interprété, ce qui amène certains médecins à prescrire des larmes artificielles aux patients qui présentent des symptômes de larmoiement. En présence d’une anomalie du film lacrymal, plus précisément de la mucine produite par les cellules caliciformes conjonctivales, l’étalement des larmes sur la cornée peut ne pas être Disponible sur Internet à : www.ophtalmologieconferences.ca Un i v e r s i t y o f To r o n t o Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Jeffrey Jay Hurwitz, M.D., Rédacteur Professeur et président Martin Steinbach, Ph.D. Directeur de la recherche The Hospital for Sick Children Elise Heon, M.D. Ophtalmologiste en chef Mount Sinai Hospital Jeffrey J. Hurwitz, M.D. Ophtalmologiste en chef Princess Margaret Hospital (Clinique des tumeurs oculaires) E. Rand Simpson, M.D. Directeur, Service d’oncologie oculaire St. Michael’s Hospital Alan Berger, M.D. Ophtalmologiste en chef Sunnybrook and Women’s College Health Sciences Centre William S. Dixon, M.D. Ophtalmologiste en chef The Toronto Hospital (Toronto Western Division and Toronto General Division) Robert G. Devenyi, M.D. Ophtalmologiste en chef Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Faculté de médecine Université de Toronto 60 Murray St. Bureau 1-003 Toronto (Ontario) M5G 1X5 Le contenu rédactionnel d’Ophtalmologie – Conférences scientifiques est déterminé exclusivement par le Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médicine, Université de Toronto. Figure 1 : Équilibre normal entre la quantité de larmes sécrétée et la quantité de larmes éliminée Figure 3 : Distichiasis causant une irritation et la sécrétion accrue de larmes Film lacrymal Mécanisme de sécrétion • Glande lacrymale • Glandes lacrymales accessoires • Glandes sébacées • Cellules caliciformes Drainage ou élimination • Clignement • Points lacrymaux • Canal d’union • Sac lacrimal • Canal lacrymo-nasal uniforme. De plus, une déficience ou une anomalie de la sécrétion de meibum par les glandes de Meibomius peut entraîner l’évaporation excessive des larmes, ce qui cause également un problème au niveau de l’étalement des larmes. Cette situation où le patient a les « yeux secs » peut causer, par le biais d’un arc réflexe qui retransmet l’information à la glande lacrymale, la stimulation d’augmenter la sécrétion des larmes, afin d’humidifier la cornée. Étant donné que cette sécrétion accrue n’augmente pas la mucine ou les composants huileux du film lacrymal, les larmes coulent sur les joues, produisant paradoxalement un « œil humide » dans une situation où le patient souffre d’ « œil sec ». Le traitement dans cette situation est un substitut de larmes artificielles qui peut effectivement augmenter la mucine et/ou les composants huileux du film lacrymal, réduisant ainsi la stimulation de la sécrétion des larmes par l’arc réflexe. Traitement de l’hypersécrétion lacrymale Un examen ophtalmologique complet, y compris un examen de la réfraction, permet souvent d’identifier la pathologie ou l’anomalie causant une sécrétion lacrymale accrue. La correction des erreurs de réfraction est utile dans le traitement du larmoiement associé à l’asthénopie. L’éversion de la paupière supérieure est essentielle pour exclure toute pathologie (p. ex. follicules ou papilles géants) pouvant causer une irritation continue (figure 2). L’utilisation de collyres lubrifiants est souvent utile pour traiter l’exposition, qui peut être liée à un ectropion chronique, à la rétraction de la paupière due à une maladie thyroïdienne, à des anomalies du film lacrymal, etc. Des corps étrangers inclus dans la face interne de la paupière supérieure peuvent également causer une sécrétion lacrymale accrue associée à une irritation. La malposition des cils (figure 3) qui cause une irritation cornéenne et conjonctivale peut être traitée par épilation, électro-chirurgie (électrolyse) ou cryothérapie. En présence Figure 2 : Catarrhe vernal causant une irritation et un larmoiement d’un entropion franc, on peut appliquer une bande adhésive sur la paupière vers le bas aidant à son occlusion (traitement à court terme) ou plus souvent, on effectue une intervention chirurgicale en vue de repositionner la paupière sur le globe oculaire (figure 4). On notera que la cicatrisation conjonctivale observée dans les maladies inflammatoires chroniques (p. ex. la pemphigoïde oculaire, le syndrome de StevensJohnson ou la kératoconjonctivite chronique) – toutes ces maladies pouvant modifier le film lacrymal et causer une sécrétion lacrymale accrue – peut également se situer au niveau du point lacrymal et/ou du canal d’union, aggravant encore davantage les symptômes du patient. Élimination réduite des larmes Si aucune anomalie ne cause le larmoiement, le clinicien doit déterminer s’il existe une anomalie au niveau du mécanisme de pompage lacrymal grâce auquel les larmes s’écoulent dans les voies lacrymo-nasales de drainage. On doit procéder à l’irrigation des voies lacrymales de drainage, afin d’exclure une obstruction. Cependant, il faut se rappeler que même si les voies lacrymales sont totalement perméables lors de l’irrigation, le patient peut présenter une sténose au niveau de l’appareil lacrymal détectable par un examen radiologique. Anomalies de la paupière L’action de pompage normale du muscle orbiculaire joue un rôle important dans le déplacement des larmes du canthus externe vers le canthus interne, puis vers les points lacrymaux et les voies lacrymales de drainage. Lorsque l’on Figure 4 : Entropion causant une irritation de la cornée par les cils et une sécrétion accrue de larmes Figure 5 : Lorsque le larmoiement est associé à d’autres symptômes, on devrait penser à une hypersécrétion de larmes Figure 7 : Ectropion sur toute la paupière dû à un problème cutané Larmoiement plus – démangeaisons - allergie – sensation de sable - film lacrymal (« sec ») – écoulement (exclure une maladie conjonctivale) – rétraction de la paupière - affection thyroïdienne ferme les paupières, les points lacrymaux supérieur et inférieur touchent les paupières adjacentes et lorsqu’on ouvre les paupières, les larmes sont aspirées dans les canaux d’union. S’il existe une anomalie de la position du point lacrymal contre la paupière opposée, les larmes ne seront pas collectées dans l’un ou l’autre des points lacrymaux et le patient pourra souffrir d’épiphora (figure 6). La présence d’une éversion du point lacrymal inférieur peut être due à la laxité des tissus du canthus interne ou à un processus de cicatrisation sur la peau (suite à des lésions dues au soleil, des tumeurs, une réaction inflammatoire à des agents irritants tels que les produits cosmétiques, ou après une blépharoplastie inférieure). Si ce processus s’étend sur toute la paupière, un ectropion franc peut se développer, inhibant plus profondément le passage des larmes par le point lacrymal (figure 7). En présence d’un ectropion de longue date, la conjonctive est souvent karatinisée, ce qui peut aggraver la déficience de l’écoulement des larmes dans le point lacrymal et causer des problèmes au niveau de l’étalement des larmes (figure 8). Dans les cas où la paupière est bien positionnée contre la surface du globe et en l’absence d’éversion du point lacrymal (le clinicien ne devrait normalement pas pouvoir voir la paroi arrière d’un point lacrymal normalement placé), le patient peut néanmoins présenter des symptômes de larmoiement en raison d’une « dysfonction de la pompe lacrymale », dans laquelle les larmes ne sont pas pompées par une action appropriée du muscle orbiculaire pour leur drainage dans les voies lacrymales3. Le clinicien doit tester le muscle orbiculaire, afin de vérifier s’il existe une dysfonction de la pompe lacrymale. Le patient doit regarder vers le haut et le clinicien tire alors manuellement la paupière inférieure vers le bas. Lorsqu’il relâche la paupière, celle-ci doit reprendre sa position normale contre le globe. Si elle ne se remet pas tout à fait en position normale, cela peut indiquer une dysfonction de la pompe lacrymale. Le clinicien peut ensuite tirer la paupière Figure 6 : Éversion du point lacrymal avec sténose secondaire Figure 8 : Ectropion chronique avec kératinisation de la conjonctive latéralement, afin de vérifier la tension du tendon du canthus interne, puis la tirer médialement, afin de vérifier le tendon du canthus externe. Il saisit ensuite la paupière et la tire loin du globe (test de distension). Une distension accrue indique une laxité de la paupière et des problèmes de pompage potentiels4. Les paupières doivent être examinées, afin de rechercher des problèmes cicatriciels. Il est important que le patient regarde vers le haut, puis ouvre la bouche, afin d’observer si ses paupières s’écartent du globe. Si c’est le cas, il y a une composante cicatricielle dans la paupière qui peut causer un problème de larmoiement et ce problème peut être traité. La paupière supérieure peut également être touchée et le clinicien doit vérifier si elle est flasque en la Figure 9 : Paupière supérieure flasque Figure 10a et 10b : Paralysie du nerf facial avec régénération aberrante Figure 12 : Scintigraphie des voies lacrymales montrant un flux normal sur la droite avec un flux légèrement réduit sur la gauche soulevant vers le haut, afin de déterminer s’il y a inversion du tarse (figure 9). Une paralysie faciale occulte peut indiquer un problème du muscle orbiculaire neurogène. La régénération aberrante du nerf facial est le signe révélateur de cette anomalie (figures 10a et 10b). À l’examen de la conjonctive, on peut déceler une hypertrophie de la conjonctive et/ou un repli et/ou une caroncule qui déplace le point lacrymal loin du lac lacrymal ou empêche les larmes d’entrer dans le point lacrymal. On peut tenter de raccourcir les tissus hypertrophiques avec un décongestionnant topique ou par une cautérisation bipolaire ou par l’excision du tissu hypertrophique. tion radiologique plus poussée, telle qu’un dacryocystogramme 5. Cet examen peut révéler une anomalie anatomique (sténose) de l’appareil lacrymal. Une scintigraphie de l’appareil lacrymal 6 peut également être utile pour l’interprétation physiologique de l’examen anatomique (irrigation et/ou dacryocystographie). Lorsque la perméabilité est totale lors de l’irrigation, un dacryocystogramme peut indiquer une sténose et/ou une dilatation présténotique (figure 11). Une scintigraphie des voies lacrymales, avec ou sans analyse quantitative (détermination par ordinateur des valeurs du flux T1/2), peut démontrer une diminution de l’écoulement des larmes de l’ouverture palpébrale jusqu’à l’intérieur du nez (figure 12). Des voies lacrymales non obstruées – Est-ce que cela est normal ? Traitement des patients présentant un larmoiement dû à une diminution du drainage Malgré la perméabilité des voies lacrymales lors de leur irrigation, une anomalie nasale peut être présente et peut causer une obstruction partielle empêchant les larmes de s’écouler du canal lacrymo-nasal jusqu’à l’intérieur du nez. Une inflammation au niveau du nez peut causer une obstruction partielle du canal lacrymal ou une sécrétion accrue de larmes par un arc réflexe qui renvoie un signal de stimulation à la glande lacrymale. Par conséquent, l’examen nasal est un élément très important de l’investigation des voies lacrymales. Si le conduit lacrymal est totalement perméable lors de l’irrigation, une sténose occulte peut être présente dans l’appareil lacrymal empêchant le drainage des larmes. Dans ce cas, il est nécessaire d’effectuer une investiga- Ectropion L’ectropion du point lacrymal doit être traité initialement par le massage de la paupière supérieure et en informant le patient qu’il doit toujours frotter ses yeux en effectuant un mouvement vers le HAUT afin de repositionner le point lacrymal contre le globe. Chez de nombreux patients, cette simple mesure conservatrice entraîne une amélioration. Si cela n’est pas le cas, on peut effectuer l’inversion du point lacrymal par cautérisation en arrière du point lacrymal ou par une excision triangulaire de la conjonctive sur la face Figure 13 : Pince Emporte-pièces de Holth utilisée pour la perforation de la partie postérieure du point lacrymal (petite incision) Figure 11 : Dacryocystogramme de voies lacrymales totalement perméables montrant une sténose avec dilatation présténotique Perméabilité partielle lors de l’irrigation – côté droit Dilatation marquée du sac lacrymal Ophtalmologie Conférences scientifiques Figure 14 : Diagramme d’un lambeau de peau prélevé sur la paupière supérieure et appliqué sur la paupière inférieure pour traiter un ectropion cicatriciel de la paupière inférieure interne de la paupière, sous-jacente au point lacrymal, des points de suture étant effectués sur la paupière de façon à inverser le point lacrymal. Si toute la paupière est ectropique, un traitement conservateur doit être administré, mais en lubrifiant la cornée également. Si ce type de traitement n’est pas efficace, la paupière peut être repositionnée chirurgicalement, soit par l’intervention de Bick modifiée7 soit à l’aide d’une bande tarsale8. Si le point lacrymal présente une sténose secondaire en raison d’une éversion, en particulier en présence de kératinisation, une simple dilatation peut être suffisante. Si la sténose est primitive, une « petite incision » peut être réalisée au moyen de ciseaux ou d’un emporte-pièces (figure 13). Si l’ectropion est lié à une paralysie faciale, il peut être traité chirurgicalement. Cependant, jusqu’à présent on n’est pas parvenu a un soulagement total du larmoiement (lorsqu’il est lié à un problème au niveau du nerf facial et quelle que soit la chirurgie de la paupière réalisée). Même la régénération du nerf et les greffes de nerf ne sont pas totalement efficaces (selon notre expérience) pour éliminer les larmes. En présence du syndrome des larmes de crocodile associé à la paralysie du nerf facial, celui-ci peut être traité par des injections de toxine botulinique dans le ganglion sphéno-palatin ou en réalisant une neurotomie de Vidian. Si une composante cicatricielle entraîne l’éversion de la paupière ou son écartement du globe, des mesures conservatrices, telles que le massage ou le frottement de la paupière, peuvent être extrêmement utiles. À défaut de ces mesures, une greffe de peau prélevée de la région rétro-auriculaire ou un lambeau prélevé de la paupière supérieure et appliqué sur la paupière inférieure peut aider à repositionner la paupière (figure14). Dans certains cas, l’ectropion peut être associé à une laxité du canthus interne, avec ou sans composante cicatricielle. Dans ces cas plus complexes, la chirurgie de l’ectropion Figure 15 : Mise en place de pinces hémostatiques montrant la partie de la paupière à exciser dans l’intervention de Bick modifiée associée à une remise en tension du tendon et à l’application d’un lambeau ou une greffe de peau peuvent être réalisées au cours de la même intervention. Dysfonction de la pompe lacrymale En l’absence d’ectropion de l’un ou l’autre des points lacrymaux ou de la paupière (la paupière est bien positionnée contre le globe oculaire), mais si les résultats du test de distension et/ou de résilience sont anormaux, la dysfonction de la pompe lacrymale peut être la cause du larmoiement. Des mesures conservatrices, telles que frotter la paupière et faire un massage vers le haut, entraînent une amélioration chez certains patients. Cependant, si ces techniques n’améliorent pas la situation, le resserrement du « squelette » des paupières qui est constitué du tarse et des ligaments et le raccourcissement du muscle orbiculaire peuvent souvent améliorer le mécanisme de pompage des larmes et leur écoulement dans les voies lacrymales de drainage. Notre technique préférée est l’intervention de Bick modifiée, dans laquelle un triangle sur toute son épaisseur est excisé latéralement et la paupière est resserrée contre le globe oculaire (figure 15). Il s’agit de la même intervention qui peut être réalisée sur la paupière supérieure pour traiter le syndrome de la paupière flasque9. En cas de laxité du tendon du canthus interne, une canthoplastie médiale ou un resserrement du tendon du canthus interne peuvent être réalisés (figures 16a-16c)10. Considérations importantes dans la chirurgie de l’ectropion : • Étant donné que la sécrétion des larmes diminue avec l’âge, une personne âgée atteinte d’ectropion peut ne pas souffrir d’épiphora (figure 17). Figure 16 : Canthoplastie médiale. A) Incision cutanée. B) Resserrement du tendon du canthus. C) Résultat final. Ophtalmologie Conférences scientifiques traiter ces deux affections chirurgicalement au cours de la même intervention. Figure 17 : Diagramme montrant la sécrétion réduite de larmes avec l’âge Mécanisme de la sécrétion 225 Conclusion Test de Shirmer #1 en mm 70 60 50 40 30 Sécrétion réflexe a. Composante conjonctivale Femme 20 b. Composante rétinienne normale Homme 10 Sécrétion de base 6-10 10-19 20-29 30-39 40-49 50-59 60-69 70-79 Test moyen pour chaque groupe – années 80+ • Avant d’opérer un patient atteint d’ectropion, l’appareil lacrymal doit être irrigué afin d’exclure une obstruction des voies lacrymales coexistante qui peut jouer un rôle dans la pathogenèse de l’ectropion. Larmoiement lorsque les voies lacrymales sont perméables (« obstruction fonctionnelle ») La dacryocystographie est utile pour déterminer s’il y a une anomalie au niveau des voies lacrymales de drainage. Chez un jeune patient, une sténose au niveau de l’appareil lacrymal peut être suffisamment importante pour causer un larmoiement en raison de la sécrétion importante de larmes chez le sujet jeune. À l’inverse, un patient âgé peut présenter une obstruction totale du canal lacrymal, mais du fait de la sécrétion réduite de larmes avec l’âge, il ne souffrira pas d’épiphora. Si la présence d’une sténose peut être démontrée par un dacryocystogramme, on peut corroborer physiologiquement cette observation par une scintigraphie des voies lacrymales (figures 18a et 18b). Le traitement consiste en un drainage lacrymal standard par voie chirurgicale, selon le site de la sténose 11. En présence à la fois d’une sténose de l’appareil lacrymal et d’un ectropion, on peut Figure 18a et b : Scintillographie lacrymale quantitative avant et après l’intervention de Bick modifiée pour traiter un patient souffrant de larmoiement en raison d’une dysfonction de la pompe lacrymale Courbe T 1/2 (écoulement) à partir Augmentation du flux (quantité restante de traceur réduite) à de l’ouverture palpébrale partir de l’ouverture palpébrale après l’intervention La plupart des patients souffrant de symptômes de larmoiement ne présentent pas d’obstruction des voies lacrymales. Les patients qui présentent un larmoiement associé à une hypersécrétion des larmes manifestent habituellement d’autres symptômes tels qu’une sensation de grains de sable, des démangeaisons, etc. La cause de l’hypersécrétion peut habituellement être identifiée par un examen clinique et être traitée de façon appropriée. Même si les voies lacrymales sont totalement perméables, l’élimination réduite des larmes peut être due à des anomalies de la paupière (p. ex. ectropion et/ou laxité de la paupière) ou à une sténose au niveau de l’appareil lacrymal. Le diagnostic dans ce cas peut être habituellement établi cliniquement, mais occasionnellement, des examens radiologiques plus sophistiqués sont utiles. Chez les patients dont l’épiphora n’ést pas d’origine obstructive, on peut envisager des modalités conservatrices ou chirurgicales. Références 1. Rosenstock D., Hurwitz JJ. Functional obstruction of lacrimal drainage passages. Can J Ophthalmology 1982;17:249. 2. 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Poste-publications #40032303 La version française a été révisée par le professeur Pierre Lachapelle, Montréal. L’élaboration de cette publication a bénéficié d’une subvention à l’éducation de Novartis Ophthalmics © 2004 Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médecine, Université de Toronto, seul responsable du contenu de cette publication. Édition : SNELL Communication Médicale Inc. avec la collaboration du Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médecine, Université de Toronto. MDOphtalmologie – Conférences scientifiques est une marque de commerce de SNELL Communication Médicale Inc. Tous droits réservés. L’administration d’un traitement thérapeutique décrit ou mentionné dans Ophtalmologie – Conférences scientifiques doit toujours être conforme aux renseignements d’ordonnance approuvés au Canada. SNELL Communication Médicale se consacre à l’avancement de l’éducation médicale continue de niveau supérieur. SNELL 130-013F