D O S S I E R S er v i c es t e c h n i q u es Implantation d’un programme de sécurité électrique Cet article porte sur l’intégration d’un pro- Pa sc a l Po is s o n I n ter ven tio n P r é ven tio n in c . gramme de sécurité électrique (PSE) et les exigen­ces de la norme CSA Z462 Sécurité en matière d’élec­tri­ cité au travail (2009, version révisée à venir en 2012). Cette norme s’applique aux bâtiments jusqu’au point de raccordement du fournisseur en électricité. Le travail sous tension : une exception A n g é l iq u e M etra a s s ts as Les travaux hors tension sont à privilégier et de­ vraient être considérés comme la situation normale. La norme présente quelques cas qui peuvent justifier le recours au travail sous tension, comme la détection d’anomalies de fonctionnement, les dépannages et les situations pouvant mettre en péril la vie d’autrui. Cet énoncé permet-il de conclure qu’un établisse­ ment du secteur de la santé n’est en rien concerné par cette norme et que son personnel peut allègrement travailler sous tension ? Certainement pas ! Pour que la mise en danger de la vie d’autrui soit invoquée afin de justifier le travail sous tension, il faut comprendre qu’une ou plusieurs vies doivent être directement me­ nacées par la coupure électrique. Des tâches telles que le changement de ballast et l’instal­la­tion de disjonc­ teur, sous tension, devraient êtres interdites dans un établissement. Par contre, trouver une anomalie de fonctionne­ ment d’un équipement est plus difficile hors tension. La réparation doit alors s’effectuer en suivant une procédure de cadenassage. Les tâches plus complexes qui sont reliées à la vie d’autrui devraient éga­ lement se faire hors ten­ Les travaux hors tension sont à sion, et ce, malgré que privilégier et devraient être consila norme les permette. dérés comme la situation normale. En effet, si une erreur survient, en plus de la vie de l’électricien qui est mise en danger, il y a celle du patient. Tous les travaux sur le circuit d’urgence de l’établissement devraient donc être planifiés et réalisés hors tension. Les cas d’exception où le travail sous tension de­ meure obligatoire doivent être minimisés. Ces situations doivent faire l’objet d’une autorisation écrite de la di­ rection qui précisera les raisons qui motivent les travaux sous tension. Un exemple de ce permis est illus­ tré dans la norme CSA Z462-08. Lors de travaux sous tension, différents moyens s’imposent pour réduire les risques : > planification minutieuse des travaux ; > port des équipements de protec­ tion individuels (ÉPI) appropriés (yeux, tête, pieds, etc.) ; > utilisation des outils isolés, des instruments adéquats et des multi­ mètres avec sondes protégées par fusible. De plus, les projets doivent prio­ riser une conception ou une modifi­ cation des installations électriques qui tient compte de l’entretien et de la détection d’anomalies. OBJECTIF PRÉVENTION – VOL. 34, NO 5, 2011 – 9 D O S S I E R S er v i c es t e c h n i q u es La préparation : une étape essentielle vers un PSE L’implantation d’un PSE est un changement de culture important chez les techniciens, électriciens et, aussi, au sein de la direction. Tous doivent comprendre que les travaux sous tension sont dangereux et que les cou­ pures électriques (avec cadenassage) sont primordiales afin de diminuer les risques de brûlure (arc électrique) ou d’électrocution (choc électrique) pour le personnel. Obtenir l’appui de la direction et former une équipe d’implantation paritaire afin de trouver les meilleures solutions favorisent ce changement organisationnel. Des séances d’information doivent également être don­ nées afin de communiquer les nouvelles règles à tous les employés et aux électriciens. Les employés doivent savoir que la direction appuie ces mesures et que la santé et la sécurité des travailleurs sont primordiales. Des documents de référence permettent à l’équipe d’implantation du PSE de s’assurer que les décisions prises sont conformes aux lois, règle­ ments et normes en vigueur1. Le programme de cadenassage devrait également être abordé à l’aide de la norme CSA Z460-05, car il est inter­ L’implantation d’un PSE est un relié au PSE ou en est changement de culture important. un préalable. L’implantation du PSE Plusieurs éléments sont nécessaires à l’implantation du programme, comme l’analyse et la catégorisation du risque, l’achat d’équipements, d’outils et de vêtements, la formation des employés, etc. Catégorisation du risque Trois méthodes de catégorisation du risque existent, de la plus conser­ vatrice (protège normalement plus le travailleur) à la plus précise (néces­ site des calculs de la distribution électrique). Elles permettent aussi d’iden­ tifier les ÉPI requis. > La méthode simplifiée est une catégorie de risques conservatrice qui est fixe pour la majorité des travaux. Des équipements à risque plus élevé né­ cessitent plus de protection. > La méthode par tableaux classifie le niveau de risque en fonction de la tâche à accomplir. On sélectionne dans un tableau l’équipement, la tâche et l’ÉPI. Notons que le tableau tient compte des énergies incidentes moyennes de ces équipements jumelées avec une analyse de risques. Certains calculs peuvent être nécessaires pour l’utilisation du tableau, par exemple lorsque le marquage à pied d’œuvre n’est pas effectué sur les équipements. > La méthode de l’énergie incidente consiste en calculs (par une firme d’ingénierie) qui donnent une quantité de chaleur sur une surface (cal/ cm2), à une certaine distance de la partie sous tension. Ces données pro­ viennent du calcul de court-circuit avec le temps d’ouverture des compo­ santes électriques. Des étiquettes affichées sur les équipements (panneau, interrupteur à fusible, appareil de commutation, etc.) permettent au tra­ vailleur de savoir le type d’ÉPI nécessaire à sa tâche. Cette méthode est donc 10 – OBJECTIF PRÉVENTION – VOL. 34, NO 5, 2011 Gants anti-arcs. plus complexe techniquement, mais plus simple pour le travailleur. Men­ tionnons aussi que le marquage à pied d’œuvre est maintenant deman­ dé par le Code du bâtiment (chapi­ tre V, électricité, article 2-306 Protec­ tion contre les chocs et les arcs élec­ triques). Il est essentiel de procéder à une analyse de risques, bien qu’elle nécessite des délais importants. Vêtements de travail Ils doivent être achetés et étique­ tés adéquatement et utilisés pour couvrir chaque partie du corps po­ tentiellement exposée au danger. Le choix se fait en fonction de l’ana­ly­ se de risques. Les vêtements ignifuges sont classés en deux familles : traités et intrinsèques. La différence majeure entre les deux types tient à la dura­ bilité aux lavages (traités : jusqu’à 70 lavages ; intrinsèques : jusqu’à 150 lavages). Évidemment, il est important de suivre les directives du manufacturier. Les vêtements ignifuges sont plus chauds que les standards. Les travailleurs les trouvent inconforta­ bles au début. Il faut essayer dif­ férents types avant de procéder au choix définitif. Ce choix peut rele­ ver du comité d’implantation. Ajoutons que l’intégrité, la non- D O S S I E R S er v i c es t e c h n i q u es contamination (ex. : taches de graisse), l’entretien et l’entreposage sont importants pour une bonne protection. Formation du personnel Une formation théorique permet d’abord de mieux comprendre les ris­ ques, de connaître les éléments à vérifier sur les équipements, les bons outils, les vêtements, etc. Par la suite, une formation pratique sur l’utilisa­ tion du matériel facilite beaucoup l’intégration. Conditions gagnantes Lors de la mise en place du PSE, il est primordial d’utiliser les res­ sources internes. Il ne faut pas essayer de trouver des nouvelles façons de faire, surtout s’il existe déjà des processus d’amélioration continue et des logiciels pour effectuer le travail. Les permis de travail, les analyses de risques et les calculs peuvent être intégrés directement aux logiciels avec les exigences d’entretien ou de suivi des travaux. Cette façon évite d’apprendre un nouveau logiciel. Un proces­ sus d’amélioration continue est idéal pour bien maîtriser les équipements de sécurité. L’implica­tion des travailleurs constitue aussi un atout afin de Lors de la mise en place du PSE, faciliter le changement il est primordial d’utiliser les et augmenter l’efficacité ressources internes. de l’implantation du PSE. Certains éléments du PSE doivent être abordés : transmission des spécifications au département des achats afin d’avoir toujours le matériel conforme ; mise en place d’une méthode d’inspection des équipements, des procédures de cadenassage, etc. ; information aux entrepreneurs afin Habit anti-arc. qu’ils respectent les mêmes règles ; élaboration d’un audit sur le pro­ gramme. Un programme rentable Un PSE peut paraître compliqué et exiger beaucoup de travail. Tou­ tefois, une bonne planification du projet facilitera grandement son implantation. Soulignons aussi qu’un tel programme est rentable sur plusieurs plans : investissement pour la santé et la sécurité des tra­ vailleurs, rétention de la maind’œuvre, réduction des pertes de temps potentielles à la suite d’un incident, minimisation des coûts de remplacement d’équipements ou de locaux endommagés, etc. • R é f é re n c es 1. Les références et autres documents utiles sont disponibles avec la version Internet de cet article (www. asstsas.qc.ca/op/345009.html). Étiquette de marquage à pied d’œuvre. Pascal Poisson : www.interventionprevention.com [email protected] OBJECTIF PRÉVENTION – VOL. 34, NO 5, 2011 – 11