Le groupe socialiste ne votera donc pas ces amendements. M

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Le groupe socialiste ne votera donc
pas ces amendements.
M. LORIDANT. – Ces amendements ne nous font pas sortir du débat, ils en sont un chapitre particulier, dont le contenu est peut-être
insuffisant, mais qui doit permettre
de prendre acte de cette orientation.
Ne nous disputons pas lorsque nous
sommes d’accord sur l’ensemble. Car
la discussion n’a pas à débuter, monsieur Delfau, elle a commencé depuis longtemps entre le Gouvernement et sa majorité. Il n’y a pas
opposition entre nous sur l’objectif
mais il y aurait un inconvénient à
ce que nous mettions en place dans
la loi des instruments de définition.
Que
signifie
concrètement
par
exemple une politique de « taux
bas » ? La politique économique que
mène un gouvernement au jour le
jour, ne doit pas être fixée à l’avance par la loi. Une orientation politique est une chose ; la définition
d’axes de gestion dans une loi est
autre chose.
M. DELFAU. – Je prendrai l’exact
contrepied du rapporteur.
Non, le secteur financier privé
n’assure pas certaines exigences vitales comme le financement des très
petites entreprises ou l’accès des
couches populaires au logement.
D’autre part, pour que le pôle financier public puisse remplir ces
fonctions, il faut clarifier ses missions et aussi les conforter. Je
préférerais d’ailleurs parler d’un « secteur financier public mixte » pour
marquer les spécificités du statut juridique et pour insister sur la dualité des missions remplies, je pense en particulier à La Poste.
Il y a aussi un problème de périmètre. Faut-il, ou non, y inclure
La Poste, sachant qu’elle a évidemment des fonctions d’aménagement du territoire et de cohésion sociale ? Militant pour l’unité de cet
opérateur public, je ne veux pas ouvrir une brèche par laquelle débuterait son découpage !
À propos du rôle de la Caisse
des dépôts – aussi structure duale
– il y aurait matière à clarification : quel lien organique aura-t-elle
avec les entreprises, par le biais de
sa participation au capital ? Il faut
donc avancer, mais avec précaution,
pour que nos intentions claires ne
soient pas trahies dans la réalité.
On aurait ainsi intérêt à établir
un lien avec les articles 7 D et
90 E du traité de l’Union européenne, qui mentionnent des « services
d’intérêt économique général », afin
de conforter notre secteur public.
Mes positions sont connues, je les
ai exprimées dans la presse ; pourtant, je suis perplexe. Peut-être le
ministre pourrait-il s’engager à ce
que l’exposé des motifs ne soit que
le début d’une réflexion en ce sens ?
M. LORIDANT. – Ces amendements s’inscrivent dans la dynamique
des relations politiques entre le
Gouvernement et sa majorité plurielle : le ministre a écrit à M. Hue
pour lui dire son souhait de voir
se constituer un pôle financier public.
M. MARINI, rapporteur. – Je
comprends tout ! L’exposé des motifs, c’est la lettre à M. Hue !
(Sourires.)
Nous constatons que le secteur financier privé est très défavorable aux
exclus, aux toutes petites entreprises.
Nous attendons du Gouvernement
qu’il précise ses orientations : comment envisage-t-il la coordination
entre la banque des P.M.E., La Poste, les caisses d’épargne ? Sous la
forme d’une G.I.E. ? Nommera-t-il un
coordinateur ? Le ministre rédigerat-il une instruction ? Quelles sont ses
intentions et, surtout, son calendrier ?
Tel est l’objet de ces amendements
que les socialistes jugent nécessaires
mais inopportuns.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Tout ce qui a été
dit est public.
Je ne vois pas pourquoi il faudrait nommer un coordinateur du secteur financier public ; ce coordinateur, c’est le ministre. C’est bien
dans cette optique que tous les éléments de la sphère publique, y compris La Poste, ont été rattachés à
un seul et unique ministère.
Mais il n’y a aucune raison de
figer tout cela dans la loi. Dans le
passé, nous avons, moi le premier,
eu le tort de surestimer l’impact des
lois sur l’économie. Non, l’activité
économique ne résulte pas de la loi.
L’économie vit, elle évolue.
Sachons faire la part des choses.
Il est convenu de juger inefficace
le service public. À tort : le service public est très efficace dans certains domaines.
M. MARINI, rapporteur. – À
preuve le Crédit lyonnais sous la
direction de M. Haberer !
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Néanmoins, ne nous
mettons pas des boulets aux pieds
en nous donnant la satisfaction illusoire d’ajouter trois articles dans la
loi. Ce n’est pas en légiférant qu’on
décrète l’activité économique.
M. BOURDIN. – Faut-il rappeler
que les caisses d’épargne sont une
personne morale de droit privé, même si la Caisse des dépôts et consignations y est partie prenante –
d’ailleurs non majoritaire. Je suis
de ceux qui souhaitent que les
caisses d’épargne diversifient un peu
leurs participations, surtout dans l’action de proximité, où il semble
qu’on ait besoin d’un pôle mutualiste.
M. MARINI, rapporteur. – Absolument !
M. BOURDIN. – Mais laissons
leurs futurs dirigeants le soin de mener leur politique sans leur imposer
un carcan.
M. MARINI, rapporteur. – Très
bien !
M. LAMBERT, président de la
commission. – Cet intéressant débat
me donne l’occasion de réitérer la
question que j’ai posée, dans la discussion générale, sur le gouvernement d’entreprise. Quand j’ai demandé qui fixerait le cap, le ministre m’a répondu que, s’agissant
d’une société coopérative avec porteurs de parts, il reviendrait aux
organes normaux d’une telle société
de fixer le cap. Mais il a insisté
aussi sur l’importance de la Caisse
des dépôts et consignation dans le
capital. Monsieur le Ministre, ôtezmoi d’un doute : je vous ai demandé
avec la naïveté que vous me
connaissez (sourires.), qui allait commander.
M. MARINI, rapporteur. – Vous
voici devenu libéral !
M. CARRÈRE. – Qui préférezvous ?
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Oh, cela, on en reparlera !
M. LAMBERT, président de la
commission. – En fin de compte,
c’est public ou c’est privé ?
N° 84 – Mercredi 5 mai 99 – 4
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M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Je peux répondre à
M. le président et à sa feinte naïveté. La Caisse des dépôts et cosignation devrait avoir, nul n’en doute plus, 30 à 35 % du capital et
probablement une minorité de blocage, au moins au début. Une minorité de blocage, cela signifie
quelque chose !
de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du
projet de loi relatif au renforcement
et à la simplification de la coopération intercommunale.
nancement de projets contribuant
à la protection de l’environnement
et au développement durable du
territoire et pour celui de projets
d’économie locale et sociale.
Mais ce n’est pas tellement cela
qui fait que le réseau des caisses
d’épargne a un légitime droit de
cité dans ce pôle public qui vous
intéresse visiblement autant que nous ;
c’est que nous lui fixons dans la
loi des missions d’intérêt général et
que, à ma connaissance, c’est plus
la sphère publique que la sphère privée qui assure de telles missions.
La Caisse des dépôts, avec sa minorité de blocage, interviendra sous
l’impulsion de Gouvernement si,
d’aventure, le réseau des caisses
d’épargne s’écartait de ces missions
que nous lui assignons par la loi.
C’est l’intérêt général qui fait la
relation avec le pôle public d’intervention financière et cela se traduit par une Caisse des dépôts, non
majoritaire, je le reconnais. Les décisions seront prises selon les règles
du gouvernement d’entreprise dont
vous parliez, mais avec un partenaire public important, et aussi
d’autres partenaires, qui devront respecter la loi, laquelle définit les missions d’intérêt général.
Les amendements de la commission, que je sache, ne modifient
pas ces missions. Vous reconnaissez
donc leur utilité. Conduire des missions d’intérêt général, c’est rejoindre
l’intérêt public que le Gouvernement
est chargé de mettre en œuvre. Les
organes
dirigeants
des
caisses
d’épargne conduiront leur action dans
le cadre de la loi que vous allez
voter. Il n’y a là aucune contradiction.
L’amendement
adopté.
n° 163
n’est
pas
Les amendements n os 162, 164 et
165 deviennent sans objet.
Intercommunalité
(Commission mixte paritaire)
M. LE PRÉSIDENT. – M. le
Président a reçu de M. le Premier
ministre la lettre suivante :
« Monsieur le Président,
Conformément à l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, j’ai l’honneur de vous faire connaître que j’ai
décidé de provoquer la réunion d’une
commission mixte paritaire chargée
N° 84 – Mercredi 5 mai 99
Je
loir,
nat
sein
vous serais obligé de bien vouen conséquence, inviter le Séà désigner ses représentants au
de cette commission.
J’adresse à ce jour, à M. le Président de l’Assemblée nationale, une
demande tendant aux mêmes fins.
Veuillez agréer, monsieur le Président, l’assurance de ma haute considération.
Signé : Lionel Jospin ».
Il sera procédé à la nomination
des représentants du Sénat à cette
commission mixte paritaire selon les
modalités prévues par l’article 12 du
Règlement.
La séance est suspendue à 19 h 25.
*
**
La séance est reprise à 21 h 35.
Épargne et sécurité financière
(Urgence)
(Suite)
PRÉSIDENT.
Contrairement à l’appréciation du
rapporteur, cet article ne constitue
pas une déclaration d’intention, encore mois une illustration de l’hypocrisie du Gouvernement.
M. MARINI, rapporteur. – Nous
n’avons pas la même opinion.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN,
VICE-PRÉSIDENT
M. LE
premier.
M. ANGELS. – On ne saurait
remettre en cause les missions d’intérêt général des caisses d’épargne.
C’est pourquoi l’article premier a
une importance particulière : en les
explicitant il trace des axes de solidarité et de lutte contre l’exclusion. Une partie des résultats sera
affectée à des projets d’économie locale ou sociale, ainsi que, par un
heureux ajout de l’Assemblée nationale, à la protection de l’environnement et à l’aménagement durable.
Nos deux amendements en précisent
la rédaction et regroupent les missions d’intérêt général.
–
Article
Le réseau des caisses d’épargne
remplit des missions d’intérêt général. Il participe à la mise en
œuvre des principes de solidarité
et de lutte contre les exclusions.
Il a en particulier pour objet la
promotion
et
la
collecte
de
l’épargne ainsi que le développement de la prévoyance, pour
satisfaire notamment les besoins
collectifs et familiaux. Il contribue
à la protection de l’épargne populaire, à la collecte des fonds
destinés au financement du logement social, à l’amélioration du développement économique local et
régional et à la lutte contre
l’exclusion bancaire et financière
de tous les acteurs de la vie
économique sociale et environnementale.
Dans les conditions fixées par
l’article 6 de la présente loi, les
caisses d’épargne et de prévoyance utilisent une partie des ressources relevant de leur activité
bancaire et commerciale pour le fi-
M. ANGELS. – Il met en valeur
les missions originales des caisses
d’épargne. Tant pis pour l’idéologie
de la majorité sénatoriale, les caisses
n’ont pas vocation à devenir des
établissements coopératifs comme les
autres. Non ! La caisse d’épargne
n’est pas le Crédit agricole et ne
doit pas le devenir ! Il faut au
contraire renforcer sa mission d’intérêt général au service des ménages les moins favorisés comme des
actions de proximité. C’est pourquoi
nous soutenons cet article. (Applaudissements sur les bancs socialistes.)
M. LORIDANT. – Les élus sont
très sensibles aux missions conférées
aux caisses d’épargne. Leur forme juridique présente des singularités : statut coopératif, dividende social. Pour
la première fois, la loi affirme explicitement leurs missions d’intérêt général. Si nous nous en réjouissons,
faut-il au nom de la spécificité de
sa ressource comme de l’emploi de
celle-ci, exonérer de la lutte contre
l’exclusion les autres établissements,
soucieux d’atteindre un montant critique ou de dominer ? Les caisses
d’épargne doivent-elles être les seules
à prendre en compte ce que les
autres ne veulent pas traiter ?
Le ministre a dit tout à l’heure
leurs missions d’intérêt général et
leur statut particulier. Si je prends
la parole en cet instant, c’est pour
que l’intention du législateur soit
clairement exprimée : les caisses
d’épargne forment sinon un pôle
public du moins un pôle mixte.
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L’amendement n° 166 est retiré.
caisses d’épargne des principes de
solidarité et de lutte contre les exclusions. Cette formule fait sans doute écho à la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions
de juillet 1998, qui rappelait que
« la lutte contre les exclusions est
un impératif national fondé sur le
respect de l’égale dignité de tous
les êtres humains et une priorité de
l’ensemble des politiques publiques
de la nation ». Le sixième alinéa
de cet article fait obligation aux
caisses d’épargne, en tant qu’acteurs
de l’économie solidaire, de lutter
contre les exclusions.
Il est important de préciser que
ces missions ont bien une portée
normative, pour marquer la volonté
du législateur, qu’un jour ou l’autre,
les tribunaux seront amenés à rechercher. Soyons clairs : oui, le réseau a vocation à s’adapter à une
clientèle peu fortunée, donc peu recherchée par les banques. Il a de
plus une mission d’affectation des
ressources. Il doit distribuer un dividende social.
M. LE PRÉSIDENT.
ment n° 166, présenté
Beaudeau, MM. Loridant,
les membres du groupe
républicain et citoyen.
– Amendepar Mme
Foucaud et
communiste,
Avant le premier alinéa de cet
article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
Le réseau des caisses d’épargne
participe au service public de
l’épargne et du crédit exercé par
le « pôle financier public » au service de l’emploi et de la formation. Dans ce cadre, il assume des
missions d’intérêt général en partenariat avec la Caisse des dépôts consignations.
Mme Marie-Claude BEAUDEAU.
– Nous réaffirmons notre position de
principe : le financement du logement
social doit échapper aux contraintes
du marché. Il faut donc maintenir
l’affectation exclusive de la collecte du livret A au logement social.
Toutefois, le coût de sortie des emprunts est aujourd’hui de 4,2 %. Ne
peut-on améliorer les conditions de
financement du logement locatif social ? Certains recommandent d’adopter la rémunération du livret A aux
conditions de marché mais, outre que
l’A.F.B. invoque les taux courts, le
risque de collecte demeure.
Dès que cette loi sera promulguée et que se profilera la loi de
finances pour l’an 2000, il faudra
se pencher sur la bonification des
prêts accordés aux bailleurs sociaux.
Si la priorité du Gouvernement est
de lutter contre toutes les formes
d’exclusion, il faut trouver un instrument de bonification ou de financement des opérations qui concourent à cet objectif. Le taux des prêts
à 4,2 % est trop élevé quand la
croissance est de 2 % ou 2,5 %, avec
une inflation quasi nulle.
Qu’un gouvernement de droite ait
réussi il y a quelques années à
mettre en place un prêt à taux zéro, soit ! Mais aujourd’hui il revient
à un gouvernement de gauche de remettre les choses en place.
M. MARINI, rapporteur. – Cet
article, qui proclame l’objet social
des caisses d’épargne est de pur
affichage, sans portée concrète. On
croit utile de mettre en exergue des
missions d’intérêt général, sans portée normative, puisque ce texte n’entraîne aucune obligation en conséquence de ce principe. On reste donc
dans le domaine du verbe.
On cherche vainement la portée
pratique ou contraignante pour les
Après avoir rappelé la mission de
promotion et de collecte de l’épargne
traditionnellement allouée aux caisses
d’épargne, le texte poursuit : « [le réseau] contribue à la protection de
l’épargne populaire et au financement
du logement social ».
Une fois encore, le premier
membre de cette phrase n’apporte
rien en droit positif. Il suffit de
lire le rapport de M. Raymond
Douyère sur le présent projet de loi :
« l’ensemble de la réglementation bancaire est destinée à assurer la protection de l’épargne. Les caisses
d’épargne étant soumises à la loi
n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des
établissements de crédit, dite loi bancaire, elles doivent contribuer de facto à la protection de l’épargne ».
Tous les organismes soumis à la
loi bancaire doivent contribuer à la
protection de l’épargne, ni plus, ni
moins. Madame Marie-Claude Beaudeau, votre amendement entre dans
ce cadre, mais il introduit une redondance au sein de cet article premier. Il serait souhaitable de mettre
davantage l’accent sur l’aspect normatif et concret du dispositif. (M.
Chérioux applaudit.)
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Le Gouvernement est
favorable à l’amendement de Mme
Marie-Claude Beaudeau.
M. DELFAU. – Très bien !
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Contrairement à ce
que vient de dire le rapporteur, les
missions d’intérêt général mises en
évidence dans ce texte ont bien une
portée normative. Sinon, comment expliquer que nous ayons passé une
bonne partie de l’après-midi à écouter la majorité sénatoriale se plaindre
du dividende social ?
M. LORIDANT. – Nous entamons
là un vrai débat, sur les missions
d’intérêt général du réseau.
Soyez clair, monsieur le Rapporteur général, ou vous acceptez cette réforme, ou vous faites un contreprojet de loi. Mais vous ne pouvez
pas être pour ce projet et contre
cet amendement ! (« Très bien ! » et
applaudissements sur les bancs socialistes.)
M. LAMBERT, président de la
commission. – Ce débat commence
mal… (« Oui ! » a droite.)
M. DELFAU. – Il fallait que ces
choses-là soient dites !
M. LAMBERT, président de la
commission. – Il ne faudrait pas que
l’opposition sénatoriale fasse de ce
débat un point de cristallisation de
la majorité plurielle. Sinon, nous
sommes mal partis !
Je comprends et respecte profondément vos convictions. Mais je ne
peux, au nom de la commission des
Finances, avaliser l’introduction dans
la loi de dispositions qui ne sont
pas nécessaires à sa bonne compréhension.
Je croyais que nous pourrions engager ce débat dans un esprit de
consensus. Or l’idéologie fait son apparition dès le premier amendement.
La démocratie repose sur l’échange
des convictions mais vous semblez
choisir l’affrontement. Si vous commencez par introduire de telles mentions dans la loi, le temps consacré à ce débat ira bien au-delà de
ce que nous avions envisagé et son
esprit sera bien différent. À titre
personnel, et au nom de la commission des Finances, je le regretterais.
L’objet de ce texte est de donner aux caisses d’épargne un statut
pour l’avenir. Tenons-nous en à cet
objectif. Pour en marquer l’importance, je demande, au nom de la
commission des Finances, un scrutin public.
M. DELFAU. – J’ai été sensible
à l’argumentation du président de
la commission des Finances. Nous
ne sommes pas dans un débat idéologique, mais dans une discussion
N° 84 – Mercredi 5 mai 99
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d’amendement. Il ne s’agit pas d’une
déclaration d’intention, mais d’une
disposition on ne peut plus précise,
qui est conforme à l’objet du livret A. Il s’agit d’un fait, dont la
loi doit tenir compte. Oui, nous
avons un débat de fond. Vous vous
en expliquez très longuement dans
votre rapport, monsieur le Rapporteur général.
M. LE PRÉSIDENT. – Voici les
résultats du scrutin :
M. ANGELS. – Il s’agit, d’une
part de faire référence aux excédents
d’exploitation, et de permettre le financement de projets contribuant à
la protection de l’environnement et
au développement durable du territoire, projets qui sont utiles à la
collectivité. Je ne comprends pas que
la majorité sénatoriale, par le biais
de la commission des Finances, souhaite supprimer cet excellent ajout
de l’Assemblée nationale.
Nombre de votants ....
Suffrage exprimés .......
Majorité absolue .........
Pour ..............................
Contre ...........................
314
314
158
199
215
Le Sénat n’a pas adopté.
Puisque vous avez demandé un
scrutin public, chacun se prononcera : nos électeurs jugent, notamment
les maires qui suivent nos travaux
avec attention et apprécient beaucoup
le livret A.
M. CHÉRIOUX. – On reparlera
bientôt.
M. BOURDIN. – Je suis étonné
de la tonalité…
M. CHÉRIOUX. – De la véhémence !
M. BOURDIN.
pos !
… de vos pro-
Je suis un défenseur de la spécificité des caisses et du livret A,
caractérisé par l’affectation de la collecte.
M. LAMBERT, président de la
commission. – Bien sûr !
M. BOURDIN. – Je ne vois pas
pourquoi on en déciderait à l’occasion de ce texte. Je ne peux voter un amendement qui s’apparente
fort à un cavalier. (On le confirme
sur le banc de la commission.)
M. CARRÈRE. – Je m’étonne de
la tonalité de ce débat.
M. CHÉRIOUX. – Nous aussi !
M. CARRÈRE. – Je souscris volontiers aux propos apaisants du président de la commission, mais je
voudrais bien qu’on ne répondît pas
à côté de la question. Le groupe
socialiste
votera
l’amendement,
qui n’est certes pas de nature à
provoquer un combat idéologique
féroce.
À la demande de la commission,
l’amendement n° 167 est mis aux voix
par scrutin public.
N° 84 – Mercredi 5 mai 99
Deux amendements viennent maintenant en discussion commune.
Amendement n° 1, présenté par
M. Marini au nom de la commission des Finances.
Rédiger ainsi le second alinéa de
cet article :
Dans les conditions fixées par
l’article 6 de la présente loi, les
caisses d’épargne et de prévoyance utilisent une partie de leurs excédents d’exploitation pour le financement de projets d’économie
locale et sociale.
M. MARINI, rapporteur. – Il s’agit
de lever une ambiguïté. L’utilisation
dans le texte du projet, d’ailleurs
proche de celui de 1983, du mot
« ressources » et de la référence concomitante à l’article 6 pose un problème d’interprétation. La rédaction
actuelle laisse entendre qu’il s’agit de
toutes les ressources collectées pas
les caisses autres que les fonds
d’épargne centralisés à la Caisse des
dépôts, interprétation retenue par la
commission des Finances en 1991.
Mais l’article 6 du projet de loi
prévoit qu’une partie du résultat net
comptable des caisses – et non leurs
ressources – doit être, après constitution des réserves, affectée au financement de projets d’économie locale et sociale. L’Assemblée nationale n’a pas relevé cette différence. Il paraît difficile de faire peser
la contrainte d’emploi des fonds sur
la totalité des ressources. D’où notre
amendement, qui s’inspire de l’article 16 de la loi de 1947 sur le
statut de la coopération.
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 126, présenté par M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Rédiger ainsi le second alinéa de
cet article :
Dans les conditions fixées par
l’article 6 de la présente loi, les
caisses d’épargne et de prévoyance utilisent une partie de leurs excédents d’exploitation pour le financement de projets d’économie
locale et de projets contribuant à
la protection de l’environnement et
au développement durable du territoire.
M. MARINI, rapporteur. – Je partage les objectifs de M. Angels. Les
précisions qu’il souhaite voir apportées sont contenues, pour la première
dans l’amendement n° 1, pour la seconde dans l’amendement n° 7 à l’article 6. Il a donc satisfaction.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – La référence aux excédents d’exploitation est bienvenue
dans les deux amendements, mais celui de M. Angels mentionne la protection de l’environnement et le développement durable, qu’il faut
conserver.
M. LORIDANT. – Les caisses
d’épargne doivent assurer des missions d’intérêt général et à ce titre
être présentes dans les banlieues difficiles. Je sais d’expérience qu’il faut
parfois de rudes batailles pour les
conduire à renoncer à leurs projets
de fermeture d’agences. Il fallait que
cela fût dit. (M. Delfau approuve.)
L’amendement n° 1 est adopté.
L’amendement n° 126 devient sans
objet.
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 127, présenté par M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Compléter in fine cet article par
un alinéa ainsi rédigé :
Les missions définies au premier
alinéa, ainsi que les projets d’économie locale et sociale et les projets contribuant à la protection de
l’environnement et au développement durable du territoire, doivent
présenter à la fois un intérêt en
termes de développement social ou
de
l’emploi.
Chaque
caisse
d’épargne et de prévoyance tient
compte des orientations définies
par la Fédération nationale des
Caisses d’épargne et de prévoyance
pour le choix des projets sur son
ressort territorial et pour apporter
sa contribution aux actions régionales et nationales entreprises par
le réseau.
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M. ANGELS. – Il s’agit de transférer le dernier alinéa de l’article 6
à l’article premier, celui-ci définissant les missions d’intérêt général
des caisses d’épargne.
livret comme des comptes courants.
En outre, l’épargne des ménages disponible est relativement réduite, ce
qui posera d’indéniables problèmes
lors de la vente des parts sociales.
Enfin, le niveau de fonds propres
est particulièrement faible.
générale, j’ai indiqué pour quelles
raisons nous ne pensions pas souhaitable de créer des groupements
locaux d’épargne. Qu’il me suffise
donc de dire que cet amendement
n° 7 est un amendement de conséquence qui découle de notre volonté de simplifier l’architecture des
caisses d’épargne.
M. MARINI, rapporteur. – Nous
n’avons pas de désaccord sur
le fond, mais sur la place que ces
dispositions doivent occuper dans le
texte.
L’article premier exprime de manière générale, très qualitative et très
peu normative, les missions des
caisses d’épargne. L’article 6 précise de façon plus technique et opérationnelle les conditions d’affectation des résultats des caisses. C’est
à cet article que l’on trouve la définition concrète des projets susceptibles d’être financés par les caisses
d’épargne au titre de ce que l’on
appelle, d’ailleurs improprement, le
dividende social.
Cet amendement est donc conforme à la logique du texte mais il
serait préférable de le rattacher à
l’article 6. Je souhaiterais donc que
M. Angels se rallie à l’amendement
n° 7 de la commission qui est sensiblement identique au sien et qui
porte sur l’article 6.
L’amendement n° 127, accepté par
le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article premier, modifié, est adopté.
M. LE PRÉSIDENT. – Article 2.
Le réseau des caisses d’épargne
comprend les caisses d’épargne et
de prévoyance, les groupements locaux d’épargne, la Caisse nationale
des caisses d’épargne et de prévoyance et la Fédération nationale des caisses d’épargne et de prévoyance.
M. LISE. – Je souhaite attirer
votre attention, monsieur le Ministre,
sur la situation très particulière des
caisses d’épargne des D.O.-M. ou,
plus exactement, des caisses des Antilles, puisque comme vous le savez celle de Guyane n’existe plus
et que celle de la Réunion a été
rattachée à la caisse de ProvenceAlpes-Côtes d’Azur.
On peut craindre que l’actuelle réforme ne leur crée de sérieuses difficultés compte tenu des handicaps
structurels qu’elles connaissent et qui
sont de trois ordres : les coûts de
structures y sont en effet beaucoup
plus élevés qu’en métropole du fait
de charges de fonctionnement spécifiques et du fait qu’un grand nombre
d’épargnants utilisent leur compte sur
Ainsi la caisse métropolitaine ayant
le plus bas niveau de capitaux
propres dispose d’une réserve correspondant à huit fois celle de la
caisse de Martinique qui se monte
à 68 millions de francs, la caisse
de Guadeloupe en dispose de moitié moins avec 35 millions, soit
exactement le niveau requis dans le
cadre de la dotation statutaire minimum des établissements bancaires.
De toute évidence, ce projet de
loi a été conçu pour des caisses
disposant d’une surface financière
beaucoup plus importante, conséquence des regroupements opérés en
métropole au cours de cette dernière décennie. On ne peut donc se
contenter de l’appliquer aux Antilles
sans prendre des précautions toutes
particulières. Il en va de la survie
même des deux petites caisses qui
s’y trouvent et dont personne ne
peut sous-estimer l’intérêt sur le plan
local.
J’ai renoncé à déposer des amendements qui auraient semblé aller à
contre-courant de cette réforme dont
je comprends bien l’inspiration. Mais
je souhaite vraiment obtenir des assurances quant à la volonté du Gouvernement de prendre toutes les dispositions nécessaires, autres que législatives, pour que les deux caisses
de Martinique et de Guadeloupe puissent poursuivre, voire renforcer, les
missions indispensables d’intérêt général au service des populations
concernées.
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 2, présenté par M. Marini
au nom de la commission des
Finances.
Dans cet article, supprimer les
mots :
« les groupements locaux d’épargne, ».
M. MARINI, rapporteur. – Il
s’agit d’un amendement de simple
conséquence de la position de principe que votre commission vous demandera de prendre à l’article 4
sur la suppression des groupements
locaux d’épargne et que nous souhaitons voir remplacer par des sections locales d’épargne, subdivisions
de l’assemblée générale des sociétaires. Je préférerais donc attendre
cet article pour me lancer dans une
explication de fond puisque nous proposerons de le modifier substantiellement. Au cours de la discussion
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Je voudrais tout
d’abord dire à M. Lise qu'il a eu
raison de faire remarquer que la
situation des caisses d’épargne en
Martinique et en Guadeloupe était
spécifique : avec respectivement 68 et
35 millions, leurs fonds propres sont
faibles, même si elles collectent 75 %
de l’épargne de ces îles alors que
ce pourcentage est de 50 % pour
l’ensemble du réseau. Cela démontre
bien l’importance de ces caisses dans
les D.O.-M. Je vous donne l’assurance que le Gouvernement tiendra
compte de la spécificité de la situation afin que le retour sur investissement soit assurée, notamment
aux Antilles. Certes, il faudra prévoir des procédures particulières mais
nous y veillerons.
J’en viens à l’amendement n° 72
et aux groupements locaux d’épargne
dont nous avons déjà parlé cette
après-midi. Le Gouvernement considère que ces groupements sont nécessaires et votre rapporteur est à
tel point d’accord avec moi, qu’il
propose de créer une structure semblable mais privée de la personnalité morale. C’est une différence mineure au regard des avantages que
l’on peut en retirer.
En outre, je n’ai pas évoqué cet
après-midi un autre avantage qui tient
à ces groupements : nous souhaitons
que le sociétariat soit uniformément
réparti sur le territoire ; or si de
telles structures n’existent pas, nous
risquons de le voir se concentrer
dans les chefs-lieux ou les villes.
Si l’on veut vraiment toucher tout
le pays, il faut un intermédiaire et
le groupement local d’épargne répond
à cette exigence.
Je ne vois donc pas bien pourquoi
vous souhaitez tellement compliquer
le débat en lui refusant la personnalité morale. Je ne comprends pas
cet acharnement. Je ne suis donc
pas favorable à cet amendement.
M. CARRÈRE. – Je suis vraiment très étonné que vous mainteniez cet amendement, monsieur le
Rapporteur, d’autant plus que vous
proposez de substituer aux groupements une autre structure mais dénuée de personnalité morale. Quand
on connaît la difficulté qu’il y a à
regrouper sur un seul site les
N° 84 – Mercredi 5 mai 99
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conseillers consultatifs et à assurer
l’animation, on ne peut qu’être choqué de cette destination.
peut aujourd’hui définir sous la nouvelle forme d’un réseau des caisses
d’épargne.
Si vous aviez proposé de supprimer purement et simplement en groupements, j’aurais pu comprendre votre
logique mais cette substitution, qui
s’accompagne de la perte de la personnalité morale et qui fera donc
perdre à ces structures une partie
de leur prestige me laisse sans voix.
C’est un pis-aller qui empêcherait
les petits épargnants de devenir sociétaires. Je vous supplie de retirer
cet amendement.
Nous voulons, comme les salariés
du réseau, préserver la spécificité des
caisses d’épargne et notamment leur
caractère non lucratif.
projets sociaux. Nous voulons plus
de résultats pour plus de solidarité.
S’il n’y avait ni but lucratif ni recherche de résultats, on irait à l’encontre du but que ce texte doit
servir.
L’amendement n° 2 est adopté.
L’article 2, modifié, est adopté.
M. LE PRÉSIDENT. – Article 3.
Les caisses d’épargne et de prévoyance sont soumises, sous réserve des dispositions de la présente loi, aux dispositions de la
loi n° 47-1775 du 10 septembre
1947 portant statut de la coopération et aux dispositions de la loi
n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur
les sociétés commerciales.
Elles sont des établissements de
crédit et peuvent, nonobstant les
dispositions de l’article 3 de la
loi n° 47-1775 du 10 septembre
1947 précitée, exercer toutes les
opérations de banque dans le cadre
prévu par la loi n° 84-46 du
24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit.
Amendement n° 168, présenté par
Mme Marie-Claude Beaudeau et les
membres du groupe communiste, républicain et citoyen.
Au début du second alinéa de
cet article, après les mots :
« Elles sont des établissements de
crédit »,
insérer les mots :
« à but non lucratif ».
Mme Marie-Claude BEAUDEAU.
– Si elle peut être considérée comme nécessaire, la réforme du statut
des caisses d’épargne ne doit pas
oublier les principes fondamentaux de
leur statut actuel. Dans ce cadre, le
caractère non lucratif de leur activité doit être clairement réaffirmé.
La contradiction entre les principes
qui président à la rédaction de l’article 6 et ceux relatifs aux sociétariat peut être résolue si l’on part
de l’idée qui a inspiré la rédaction
actuelle du texte : la constitution juridique d’une catégorie spécifique
d’établissements financiers que l’on
N° 84 – Mercredi 5 mai 99
Il s’agit clairement d’affirmer que
les nouvelles caisses d’épargne ne
seront pas totalement soumises aux
mécanismes du marché, puisque les
règles d’affectation de leurs excédents de gestion, la nature des fonds
collectés comme l’usage social qui
en est fait constituent autant d’éléments qui échappent à la banalité
des activités bancaires.
On peut s’en offusquer ou le regretter, mais aussi le relever à nouveau.
L’utilisation des fonds d’épargne
présente une assez sensible différence
avec celle qu’en font les établissements de crédit traditionnel et l’on
peut regretter que l’épargne salariale à vue collectée par ces établissements ne serve pas plus souvent
à financer la création d’emplois ou
la formation des salariés.
Le caractère non lucratif des
caisses d’épargne doit donc être
maintenu, ne serait-ce que par rapport aux modes de collecte et d’utilisation de ces fonds.
M. MARINI, rapporteur. – La
commission n’est pas en accord avec
cet amendement : les caisses d’épargne
sont appelées à devenir des établissements de crédit coopératif de
droit commun, qui ne différeront pas
des caisses régionales du Crédit agricole, du Crédit mutuel ou des
Banques populaires. On ne peut donc
les qualifier d’établissements « à but
non lucratif ».
Elles devront, en outre, faire la
preuve de leur efficacité économique,
de leur rentabilité, bref, si vous me
permettez ce mot grossier : faire des
profits. (Sourires.) Car il leur faudra bien financer l’accroissement de
leurs fonds propres et ainsi contribuer au financement de projets d’intérêt général.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Je ne crois pas que
les caisses d’épargne deviendront
exactement comparables au Crédit
agricole ou au Crédit mutuel, puisque
nous avons tenu à leur assigner une
mission d’intérêt général.
Qu’appelle-t-on un but « lucratif » ?
Les coopérateurs sont rémunérés ; on
ne peut parler pour autant de leur
esprit de « lucre ». Il y aura un dividende, qui sera utilisé dans des
Je ne vois pas à quoi d’autre
pourrait renvoyer la notion de « but
non lucratif » ; mais, en tout état
de cause, le texte définit clairement
des missions d’intérêt général.
Je préfère donc que le texte du
projet de loi reste en l’état.
M. DENEUX. – Le ministre a
parlé de « résultats » ; j’attire son attention sur le fait que des résultats
peuvent être négatifs.
Mme Marie-Claude BEAUDEAU.
– Je vois une contradiction entre
l’article premier qui décrit des missions d’intérêt général et la nécessité de rémunérer les détenteurs de
parts sociales. Quand nous avons auditionné l’intersyndicale, les salariés
nous ont dit que l’un des aspects
fondamentaux de la loi antérieure
était la mention du but non lucratif. Nous souhaitons qu’elle soit
conservée.
M. GAILLARD. – Le ministre
pourrait-il nous dire s’il est bien défavorable à cet amendement. Je n’ai
entendu que des considérations sur
le registre « cachez ce sein que je
ne saurais voir » ! (Sourires.)
M. LE PRÉSIDENT. – Le ministre m’a paru très clair.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Il m’avait semblé que
dire « je préfère que le texte reste
en l’état » était strictement équivalent à « je ne souhaite pas qu’il soit
modifié par cet amendement »…
L’amendement
adopté.
n° 168
n’est
pas
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 169, présenté par Mme Marie-Claude Beaudeau et les membres
du groupe communiste, républicain et
citoyen.
Au début du second alinéa de
cet article, après les mots :
« Elles sont des établissements de
crédit »,
insérer les mots :
« à utilité économique et sociale
spécifique ».
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Mme Marie-Claude BEAUDEAU.
– Nous venons de souligner le caractère particulier de la collecte des
fonds d’épargne comme celui de son
utilisation. Il apparaît donc que les
caisses d’épargne ont une utilité économique et sociale spécifique dont
nous souhaitons qu’elle soit inscrite
dans la loi.
Amendement n° 210, présenté par
M. Badré et les membres du groupe de l’Union centriste.
M. MARINI, rapporteur. – Les
auteurs de ces amendements cherchent à préciser que les opérations
connexes et extra-bancaires sont bien
dans le champ des compétences des
caisses d’épargne. Je serais tenté
d’être favorable à l’amendement n°
210. Mais je voudrais l’avis du Gouvernement : cette précision est-elle nécessaire ?
C’est le sens de cet amendement
de repli.
M. MARINI, rapporteur. – Voilà
une catégorie juridique nouvelle et
bien curieuse ! Faut-il comprendre que
certains établissements de crédit sont
dénués d’« utilité économique et
sociale spécifique » ?
En vérité, les amendements de
Mme Marie-Claude Beaudeau sont révélateurs d’un malaise que ne peut
manquer de susciter cette contradiction entre un article premier qui
énonce de grandes idées généreuses
et le reste de la loi dans laquelle
le Gouvernement, de manière avisée, crée un cadre de droit commun, avec quelques dispositions spécifiques relatives à l’utilisation des
fonds.
J’ai déjà constaté ce malaise en
auditionnant les syndicats. (M. Carrère dit qu’il n’y a pas de malaise.)
Nous vivons dans un monde difficile. Le ministre a dit à juste
titre qu’il fallait naviguer entre des
contradictions et des obstacles.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Convaincu par le rapporteur qui a dit et répété que les
caisses
d’épargne
avaient
des
contraintes spécifiques, le Gouvernement est favorable à l’amendement.
Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots :
« de banque dans le cadre prévu »,
par le mot :
« prévues ».
M. DENEUX. – La réforme du
réseau des caisses d’épargne doit placer les caisses dans le droit commun quant au périmètre de leur activité. Elles n’auront plus de restrictions légales et pourront exercer
toutes les opérations de banque. Bien
que cela soit implicite, il serait utile, pour lever toute ambiguïté, de
préciser qu’elles peuvent également
effectuer les opérations connexes à
leur activité au sens de l’article 5
de la loi bancaire ainsi que les opérations extra-bancaires au sens de
l’article 7 de la même loi.
La limitation aux seules opérations de banques pourrait laisser penser que le champ de compétence actuel des caisses d’épargne est réduit
alors que précisément la loi a pour
objet de l’élargir.
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 221, présenté par MM. Ostermann et Fournier.
Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots :
« de banque dans le cadre prévu »,
par le mot :
« prévues ».
M. OSTERMANN. – Cet amendement est identique à l’amendement précédent, auquel je me rallie.
M. CARRÈRE. – Quand le rapporteur a reçu les syndicats, il aurait pu les interroger plus avant : il
aurait entendu leurs réponses, qui
étaient opposées aux siennes.
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 215, présenté par M. Bourdin et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants.
Cette manière de ne présenter les
choses qu’à moitié a peut-être un
intérêt dialectique. Politiquement, elle trouve vite ses limites !
Dans le second alinéa de cet article, après les mots :
« toutes les opérations »
supprimer les mots :
« de banque ».
Quant à l’amendement, il peut être
retenu plus facilement que le précédent sur lequel nous nous étions
abstenus ; nous le voterons.
L’amendement
adopté.
n° 169
n’est
pas
M. LE PRÉSIDENT. – Trois
amendements peuvent faire l’objet
d’une discussion commune.
M. BOURDIN. – Avec une rédaction différente, cet amendement
a le même objectif que le précédent. La restriction aux seules opérations de banque pourrait laisser
penser que le champ de compétence actuel des caisses d’épargne, qui
de fait réalisent aujourd’hui des opérations connexes et extra-bancaires,
est réduit alors que la loi a pour
objet d’élargir celui-ci.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Le souci des auteurs
de ces amendements est légitime,
mais ces derniers sont inutiles : les
opérations de banque intègrent bien
l’ensemble des opérations annexes. Je
précise que toutes les opérations
connexes visées par la loi bancaire
sont possibles. Ces amendements
pourraient donc être retirés.
M. MARINI, rapporteur. – Je
pense que ces explications, conformes
à la loi bancaire, donnent des assurances suffisantes aux auteurs des
amendements.
Les amendements n os 210, 221 et
215 sont retirés.
M. LAMBERT, président de la
commission. – La loi n’en aura que
moins d’embonpoint !
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 170, présenté par M. Loridant et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen.
Compléter in fine cet article par
un alinéa ainsi rédigé :
Les établissements de crédit
soumis aux dispositions de la loi
n° 47-1775 du 10 septembre 1947
portant statut de la coopération
s’engagent à respecter les principes d’organisation et de fonctionnement démocratique inhérents
au statut coopératif.
M. LORIDANT. – Nous mettons
en évidence la nécessité d’appliquer
les principes de la démocratie dans
le fonctionnement des instances délibératrices des groupements locaux
d’épargne
comme
des
caisses
d’épargne. Il s’agit de réaffirmer le
principe « un homme, une voix »
propre au sociétariat dans les structures coopératives, ainsi que la nécessité d’un fonctionnement démocratique des assemblées générales, en
particulier en matière de convocation et de fourniture des documents.
Nous déposerons ultérieurement un
amendement tendant à ce que la première action ait un tarif préférentiel, afin que les sociétaires disposent au moins d’une part sociale.
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Dans un tel système, chaque sociétaire doit avoir son mot à dire, quel
que soit son nombre de parts.
Rédiger comme suit cet article :
Les parts sociales des caisses
d’épargne et de prévoyance sont
détenues par des sociétaires. Peuvent être sociétaires des caisses
d’épargne et de prévoyance les
personnes physiques ou morales
ayant effectué avec la caisse
d’épargne et de prévoyance une
des opérations prévues aux articles
premier, 5, 6 et 7 de la loi
n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, les salariés de cette caisse
d’épargne et de prévoyance, les
collectivités territoriales et, dans les
conditions définies par l’article
3 bis de la loi n° 47-1775 du
10 septembre 1947 précitée, les
autres personnes physiques ou morales mentionnées à cet article. Les
collectivités territoriales ne peuvent
toutefois pas détenir ensemble plus
de 10 % du capital de chacune
des caisses d’épargne et de prévoyance.
« La mise en place des caisses
locales serait une organisation lourde. En effet, celles-ci doivent être
dotées de la personnalité morale. Cela suppose que le sociétariat soit organisé au niveau de la caisse locale pour dévolution d’une part des
fonds propres de la caisse régionale. Si cette attribution de pouvoirs
effectifs à un niveau proche et
concret a le mérite d’être valorisante
et mobilisatrice pour les sociétaires,
elle impose un schéma complexe
dont il n’est pas certain qu’il soit
le mieux à même de garantir le
dynamisme et le développement de
la caisse régionale. Au demeurant,
il présente l’inconvénient de démultiplier le problème de la constitution du sociétariat de départ par le
nombre de caisses locales, puisque
les sociétaires seraient propriétaires
des caisses locales qui, elles-mêmes,
détiendraient les caisses régionales ».
M.
MARINI,
rapporteur.
–
L’amendement énonce que les établissements soumis à la loi sur les
coopératives doivent respecter les dispositions de cette loi ! C’est intéressant, mais il est un peu inutile
d’encombrer ce texte déjà complexe.
Avis défavorable.
M. STRAUSS-KAHN, ministre de
l’Économie. – Avoir le souci que
les établissements de crédit assujettis à la loi de 1947 respectent cette loi est une chose, le répéter dans
la loi en est une autre, qui ne
nuit pas – sinon à l’embonpoint du
texte – mais ne lui ajoute rien.
Sagesse.
M. LORIDANT. – Je vais retirer cet amendement mais je tiens à
rappeler qu’à une époque où le rapporteur ne siégeait pas encore dans
cet hémicycle, dans un projet de
loi sur la mutualisation du Crédit
agricole, le législateur, en dépit de
mes appels à la prudence et de ceux
de feu le président Dailly, avait admis qu’au sein du statut coopératif
du Crédit agricole, tous les sociétaires n’étaient pas égaux, les agriculteurs étant avantagés. Je fus, pour
la première fois, rédacteur d’un recours au Conseil constitutionnel et
je m’honore d’avoir mis en défaut
le Crédit agricole pour non-respect
du statut coopératif. Ce n’est donc
pas un hasard si le sénateur Loridant a déposé cet amendement.
L’amendement n° 170 est retiré.
L’article 3 est adopté.
M. LE PRÉSIDENT. – Article 4.
Les parts sociales des caisses
d’épargne et de prévoyance ne
peuvent être détenues que par les
groupements locaux d’épargne.
Les statuts des caisses d’épargne
et de prévoyance peuvent prévoir
que le nombre de voix dont dispose chaque groupement est fonction du nombre de parts dont il
est titulaire. Lorsque la part de
capital que détient un groupement
local d’épargne dans la caisse
d’épargne et de prévoyance à laquelle il est affilié excède 30 %
du total des droits de vote, le
nombre de voix qu’il lui est attribué est réduit à due concurrence.
Amendement n° 3, présenté par
M. Marini au nom de la commission des Finances.
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M. MARINI, rapporteur. – Cet
amendement de principe supprime
l’échelon intermédiaire que constituent
les groupements locaux d’épargne. La
solution
des
sections
locales
d’épargne, subdivisions de l’assemblée générale des sociétaires avait
initialement la faveur de M. Douyère avant que celui-ci ne se laisse
convaincre de la nécessité de créer
une structure à capital variable entre
les caisses d’épargne et les sociétaires pour permettre aux caisses qui
le souhaiteraient de demeurer à capital fixe en vue d’émettre des certificats coopératifs d’investissement.
Il écrit ainsi dans son rapport au
Premier ministre :
« La section locale, circonscription
électorale et lieu de débat, si elle
pâtit de l’inconvénient d’une plus
grande abstraction quant à l’exercice des pouvoirs du sociétariat, présente en contrepartie l’avantage de
sa souplesse et de sa simplicité de
mise en œuvre. Elle correspond en
outre davantage au souhait de renforcer la dimension régionale des
caisses en mettant en évidence la
solidarité des sociétaires au sein de
la caisse régionale.
Les assemblées locales, dont le rôle pourra être plus ou moins fort
selon la volonté de décentralisation
exprimée par le réseau, contribueraient à préparer les assemblées générales qui se tiendraient au niveau
de la caisse régionale, ce qui permettrait d’éviter les assemblées générales trop nombreuses, donc ingouvernables, ou trop restreintes, donc
peu représentatives ».
Sur les caisses locales – prémices
des G.L.E. – dont il avait envisagé la création pour les caisses
d’épargne, le député écrit :
Tout à l’heure, le ministre a évoqué la difficulté qu’aurait un établissement coopératif à capital variable à émettre des C.C.I. Les groupements locaux d’épargne sont des
sociétés à capital variable, tandis que
les caisses d’épargne sont des sociétés coopératives à capital fixe. Juridiquement, rien ne s’oppose à ce
que de telles sociétés à capital variable émettent des certificats coopératifs d’investissement : 18 caisses
régionales du Crédit agricole l’ont
fait pour un montant de 23 millions et demi de francs ; mais elles
se sont engagées à éviter toute dilution dans le capital social.
Il est possible d’envisager que les
futures caisses d’épargne émettent des
C.C.I. sans pour autant adopter les
mêmes structures juridiques que les
caisses du Crédit agricole et sans
faire intervenir des G.L.E. Il faut
cependant que le capital social ne
fluctue pas excessivement. C’est possible en créant des sortes de comptes
de créances pour gérer les variations du sociétariat.
Bref, si la question posée est bien
la vraie question, des solutions techniques existent et les spécialistes peuvent le vérifier. Puisque le désaccord entre le Gouvernement et la
commission est, selon les propres
termes du ministre, « relativement mineur », nous avons, je crois, levé
toutes les objections à notre formule.
M. LE PRÉSIDENT. – Sous-amendement n° 117 à l’amendement n° 3
de la commission des Finances, présenté par M. Bourdin et les membres
du groupe des Républicains et Indépendants.
Après les mots :
« dans les conditions définies par
l’article 3 bis de la loi n° 47-1775
du 10 septembre 1947 précitée »,
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