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Institut de physique
Actualités scientifiques
Un test à choix retardé autour de la dualité onde/
corpuscule
Novembre 2012
Dans une approche naïve, on présente souvent un objet quantique comme étant
selon le cas, soit une particule, spatialement localisée et incapable d’interférer,
soit une onde, non localisée et susceptible de présenter des interférences. Une
expérience récente, montre sans ambiguïté qu’il est nécessaire de renoncer
à cette vision simpliste : le comportement d’un objet quantique tel le photon
n’est pas réductible à une description binaire exclusive en termes classiques
d’onde ou de particule.
Les physiciens du laboratoire de Physique de la Matière Condensée –
LPMC (CNRS/Univ. de Nice - Sophia Antipolis), du laboratoire Matériaux et
Phénomènes Quantiques – MPQ (CNRS/Univ. Paris Diderot) et de l’institut des
Sciences Moléculaires d’Orsay – ISMO (CNRS/Univ. Paris Sud) ont observé
des photons dans des états ou les aspects ondulatoires et corpusculaires sont
superposés dans des proportions contrôlables. Cette propriété est en outre
mise en évidence dans une expérience à « choix retardé ». Ce travail fait l’objet
d’une publication dans la revue Science.
Les expériences type concernant la dualité onde/corpuscule sont réalisées en
envoyant un objet quantique tel un photon unique dans un interféromètre. Le
photon rencontre une première lame séparatrice. Si l’on place un détecteur
devant chacune des deux sorties de cette lame, on détecte le photon, soit d’un
côté, soit de l’autre avec une probabilité de 50% pour chacune des possibilités.
Si l’on ne détecte pas le photon, mais que l’on recombine les deux voies à l’aide
d’une seconde lame séparatrice pour former un interféromètre, on observe des
interférences en sortie du dispositif, signes d’un comportement ondulatoire.
L’astuce des physiciens a été, d’une part, de réaliser un interféromètre ouvert
pour l’une des polarisations du photon et fermé pour l’autre et, d’autre part,
d’effectuer l’expérience avec des photons jumeaux intriqués, c’est-à-dire
présentant des corrélations quantiques non séparables. Tandis que l’un des
photons était envoyé dans le dispositif, le second, que nous dénoterons par
la suite « jumeau » était envoyé dans une fibre optique permettant, d’une
part, de le conduire dans une pièce distante de 20 mètres (pour éviter toute
interférence causale) et, d’autre part, de le retarder, afin d’assurer un retard de
20 nanosecondes sur sa détection et donc la possibilité d’un choix de base de
détection postérieur à la détection du premier photon (dans le référentiel du
laboratoire). La post-sélection d’événements correspondant à une polarisation
donnée du jumeau a alors permis aux auteurs de considérer des évènements
pour lesquels le premier photon était détecté par un interféromètre ouvert
(détection de type particule), fermé (détection de type onde) ou par une
combinaison linéaire quelconque de ces deux mesures. Dans ce dernier
cas, le photon test se trouve dans une superposition quantique d’un état de
type « onde » et d’un état de type « particule » et ceci dans des proportions
quelconques. Les mesures, conformes aux prédictions de la théorie quantique,
montrent qu’il est nécessaire de renoncer à une dualité naïve. Un photon n’est
pas soit une onde, soit une particule, mais un objet quantique irréductible.
En savoir plus
Entanglement-enabled delayed choice experiment, F. Kaiser1, T. Coudreau2,
P. Milman2,3, D. B. Ostrowsky1 et S. Tanzilli1, Science (2012).
Contact chercheur
Sébastien Tanzilli, chargé de recherche CNRS
Vue d’artiste du comportement de photons uniques soumis à un interféromètre
fermé par une lame séparatrice quantique, c’est-à-dire préparée dans une
superposition d’états d’être à la fois présente et absente. Dans l’arrière-plan du
dessin, on observe des oscillations sinusoïdales, signature d’une interférence
et donc d’un comportement de type ondulatoire. Dans l’avant-plan du dessin,
on n’observe, au contraire, aucune oscillation, ce qui représente la signature
d’un comportement de type particule. Entre ces deux extrêmes, on observe une
transition continue entre ces deux comportements, indiquant que les photons se
trouvent dans une superposition cohérente d’être à la fois ondes et particules, et
donc l’inadéquation de s’en tenir à une description binaire exclusive en termes
classiques d’onde ou de particule.
www.cnrs.fr
Informations complémentaires
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•
Laboratoire de Physique de la Matière Condensée (LPMC), Nice
CNRS - Univ. Nice - Sophia Antipolis
1
Laboratoire Matériaux et Phénomènes Quantiques (MPQ), Paris
CNRS - Univ. Paris Diderot
2
Institut de Sciences Moléculaires d’Orsay (ISMO), Orsay
CNRS - Univ. Paris Sud
3
Institut de Physique
CNRS - Campus Gérard Mégie
3 rue Michel-Ange, 75794 Paris Cedex 16
T 01 44 96 42 53
[email protected]
www.cnrs.fr/inp
Illustration du bandeau : © CNRS Photothèque/CEA - Phan Ngoc HONG
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