Hépatite chronique C et infection occulte par le virus de l’hépatite B Revue critique de l'actualité scientifique internationale sur le VIH et les virus des hépatites n°79 - décembre 99 VHC - VHB Hépatite chronique C et infection occulte par le virus de l’hépatite B Olivier Chazouillères Service d’hépatologie et de gastroentérologie, Hôpital Saint-Antoine (Paris) Occult hepatits B virus infection in patients with chronic hepatitis C liver disease Cacciola I., Pollicino T., Squadrito G., Cerenzia G., Orlando M.E., Raimondo G. The New England Journal of Medicine, 1999, 341, 22-26 La forte prévalence d’une infection occulte par le VHB chez les patients ayant une hépatite chronique C est confirmée par cette étude. Mais l’hypothèse d’un rôle pathogène important d’une infection virale d’une si faible activité paraît pour le moins hasardeuse. Le diagnostic d'une infection chronique par le VHB repose habituellement sur la présence de l'antigène HBs dans le sérum. Il est cependant bien établi que des particules virales B peuvent être détectées chez des patients antigène (Ag) HBs négatifs, voire sans aucun marqueur sérologique (anti-HBs et anti-HBc négatifs). La signification clinique de ces infections par le VHB dites occultes est débattue. Cacciola et coll. ont déterminé la prévalence d'une infection http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/79_1125.htm (1 sur 3) [11/04/2003 12:27:59] Hépatite chronique C et infection occulte par le virus de l’hépatite B occulte par le VHB chez 200 patients italiens Ag HBs négatifs ayant une hépatite chronique C, ont caractérisé le VHB sur le plan génomique dans une telle situation et enfin, ont étudié les possibles relations avec la gravité de la maladie hépatique et la réponse à l'interféron. La moitié des patients avaient des anticorps anti-HBc détectés dans le sang. La PCR a permis de détecter de l'ADN du VHB dans le foie de 66 patients (33%). La prévalence était significativement plus élevée chez les anti-HBc positifs (46% vs 20%). La PCR VHB dans le sérum était positive pour moins de deux tiers des patients PCR positifs dans le foie. Les patients PCR VHB positifs avaient significativement plus de cirrhose (33% vs 19%) et tendaient à moins répondre à l'interféron. Enfin, aucune mutation susceptible de modifier l'activité virale ou l'expression du gène S n'a été mise en évidence. Cette étude, menée sur un grand nombre de malades, confirme la forte prévalence (1/3) d'une infection occulte par le VHB chez les patients ayant une hépatite chronique C (significativement plus élevée que dans un groupe contrôle d'hépatopathies chroniques non dues au VHC), comme cela avait été déjà suggéré par des auteurs japonais (1). Ceci peut être expliqué par certains modes de contamination communs aux 2 virus. De même, la prévalence plus forte chez les patients anti-HBc positifs n'est guère étonnante car on sait que des particules virales peuvent persister plusieurs décennies après une hépatite aiguë B évoluant vers la guérison clinique. Cette infection occulte est caractérisée par un très faible niveau de réplication (fréquente négativité de la PCR dans le sérum) et ne semble pas être associée à une variation génomique particulière du VHB, bien que des mutations dans le gène S expliquant l'absence de synthèse de l'Ag HBs aient pu être rapportées. Dans l’hépatite chronique C, outre une réponse immunologique particulière, un rôle direct du VHC sur la réplication du VHB peut être proposé comme l'ont montré les études sur les coinfections chroniques VHC-VHB avec détection de l’Ag Hbs dans le sang. La signification clinique de l'infection occulte par le VHB est sans doute l'aspect le plus intéressant de l'étude. A l'heure actuelle, les conséquences cliniques d'une infection chronique par le VHB sans Ag HBs ne sont bien établies que dans deux circonstances : les situations d'immunosuppression et le carcinome hépato-cellulaire. En transplantation hépatique, il a été montré que les transplantés pouvaient développer une hépatite B avec Ag HBs positif apparemment de novo en rapport, soit avec une infection occulte pré-transplantation, soit avec une infection occulte chez le donneur (2). Le risque relatif d'hépatite B chez le receveur a été évalué à 170 en cas de http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/79_1125.htm (2 sur 3) [11/04/2003 12:27:59] Hépatite chronique C et infection occulte par le virus de l’hépatite B donneur anti-HBc positif versus donneur anti-HBc négatif. Des réactivations virales B après immunosuppression type chimiothérapie ou infection VIHont été décrites lors d’infection occulte par le VHB. Pour le développement d'un carcinome hépato-cellulaire, il existe de nombreux arguments chez l'animal et chez l'homme, démontrant le rôle d'une infection persistante à VHB en l'absence d'Ag HBs circulant (3). Cet effet oncogène est rapporté à l'intégration du VHB dans le génome de l'hôte. L'aspect original de l'étude est de suggérer un rôle favorisant de l'infection occulte à VHB dans l'évolution cirrhogène des hépatites chroniques C et dans la résistance à l'interféron (indépendamment de la cirrhose). Comme dans les hépatopathies chroniques dites ´ crypto-génétiques ª, il est cependant conceptuellement difficile d'attribuer un rôle pathogène important à une infection virale caractérisée par une si faible activité. il peut être fait l'hypothèse d'une activité initialement plus forte ou surtout, l'existence d'autres facteurs non encore identifiés, incluant des virus inconnus. L'infection virale B serait alors plus un marqueur qu'un agent directement pathogène. En conclusion, cette étude soulève des questions intéressantes, mais n'a pas encore de conséquences en termes de pratique clinique. Ces résultats doivent être confirmés par d'autres groupes. - Olivier Chazouillères 1 - Koike K, Kobayashi M, Gondo M et al. " Hepatitis B virus DNA is frequently found in liver biopsy samples from hepatitis C virus-infected chronic hepatitis patients " J Med Virol, 1998, 54, 249-55 2 - Chazouillères O, Mamish D, Kim M et al. ´ "Occult" hepatitis B virus as source of infection in liver transplant recipients " Lancet, 1994, 343, 142-6 3 - Paterlini P, Gerken G, Nakajima E et al. " Polymerase chain réaction to detect hepatitis B virus DNA and RNA sequences in primary liver cancers from patients negative for hepatitis B surface antigen " N Engl J Med, 1990, 323, 80-5 http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/79_1125.htm (3 sur 3) [11/04/2003 12:27:59]