La neurogenèse est encore active dans l’hippocampe de cerveaux de patients atteints par la maladie d’Alzheimer La maladie d’Alzheimer est caractérisée par le dépôt de plaques séniles faites de peptides β-amyloïdes, dérivés d’une protéine précurseur (APP), et des enchevêtrements neurofibrillaires, faits de protéine tau hyperphosphorylée. Ces dépôts et enchevêtrements sont neurotoxiques et conduisent à une dégénérescence neuronale progressive. Pallier cette dégénérescence est une piste potentielle de thérapie. Dans cette perspective, on peut envisager de stimuler la capacité de certaines régions cérébrales de former de nouveaux neurones à l’état adulte : la zone sous-ventriculaire rostrale et le gyrus dentelé de l’hippocampe. Les cellules souches de la zone sous-ventriculaire migrent vers le bulbe olfactif pour s’y différencier en interneurones et celles du gyrus dentelé migrent et se différencient dans la couche granulaire de la zone CA1. Une prolifération neuronale est aussi présente en réaction à une ischémie et des cellules souches peuvent migrer dans les régions atteintes du striatum, du cortex cérébral et de la zone CA1 de l’hippocampe. Dans ces régions, elles s’intègrent aux circuits neuronaux et participent aux processus de réparation. La prolifération de cellules souches dans le cerveau adulte est tributaire de multiples facteurs : facteur de croissance épidermique (EGF), facteur de croissance fibroblastique (FGF), facteur neurotrophique cérébral (BDNF), facteur de liaison à l’héparine (HB-EGF) et facteur de croissance endothélial (VEGF). Exalter l’activité du facteur de croissance insulinique (IGF-I) stimule la neurogenèse dans le cerveau âgé. L’ensemble de ces activités suggère que la dégénérescence neuronale est tributaire, au moins en partie, de l’activité des facteurs de croissance. Chez les souris où un dépôt de peptides β-amyloïdes est induit expérimentalement pour simuler les conditions de la maladie d’Alzheimer, la neurogenèse est suspendue. Qu’en est-il chez l’homme ? C’est le but de la présente étude. Des cerveaux de patients atteints de maladie d’Alzheimer (14 cerveaux) sont comparés à des cerveaux contrôles (11 cerveaux). Les hippocampes sont prélevés et analysés par Western blots et immunohistochimie. Les données d’immunohistochimie confirment le diagnostic par la présence de peptides β-amyloïdes, d’APP et de protéine tau hyperphosphorylée dans l’hippocampe de cerveaux Alzheimer. Parallèlement, différents marqueurs mettent en évidence une augmentation du niveau de plusieurs facteurs généralement associés à la neurogenèse: • une protéine associée aux microtubules (DCX), caractéristique des neurones en prolifération et différenciation ; • une glycoprotéine membranaire (PSA-NCAM), présente dans les neurones et les astrocytes en différenciation ; • une protéine (TUC-4), exprimée durant la différenciation neuronale précoce chez le rat ; • une protéine (NeuroD), exprimée durant la phase terminale de la différenciation neuronale . Par contre, les marqueurs de neurones ayant atteints la maturité (calbindin D28k et NeuN) ne sont pas modifiés. L’analyse histologique aux sites de neurogenèse aboutit aux conclusions suivantes : • dans le gyrus dentelé, les cellules marquées témoignent de signes d’apoptose ; • dans la région CA1, les cellules marquées apparaissent intactes et donc résultent d’une invasion secondaire consécutive à une neurogenèse. Contrairement à ce qui a été observé dans le modèle souris, chez l’homme le cerveau âgé conserve sa capacité de neurogenèse, même dans des conditions pathologiques. Cependant même si cette capacité est conservée, voire augmentée dans le cas de maladie d’Alzheimer, la perte neuronale perdure. Plusieurs facteurs peuvent limiter la capacité de restauration : • la neurogenèse serait trop faible pour compenser une perte importante ; • les neurones néo-formés seraient incapables de s’intégrer dans les circuits ; • L’environnement cérébral du cerveau Alzheimer serait toxique pour ces nouveaux neurones. S’il semble donc bien établi que le processus de neurogenèse est encore actif, il reste donc à fournir aux nouveaux neurones les conditions favorables à leur différenciation et à leur ciblage. L’administration de facteurs de croissance reste une piste à explorer. Ph. van den Bosch de Aguilar Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve Jin K, Peel AL, Mao XO, Xie L, Cottrell BA, Henshall DC, Greenberg DA. Increased hippocampal neurogenesis in Alzheimer’s disease. Proc. Natl. Acad. Sci. 2004, 101: 343-347 ©2004 Successful Aging SA Af 197 - 2004