DIAGNOSTIC DE MALADIE D'ALZHEIMER Le Quotidien du Médecin - Num. Spécial du 23 avril 2008 - ANTOINE DALAT Face à un patient qui se plaint de sa mémoire, le médecin peut utiliser des tests neuropsychologiques simples qui vont orienter le diagnostic. Quel doit être le rôle du généraliste face à la maladie d'Alzheimer ? Cette question intéresse visiblement les médecins de famille puisque c'est devant une salle quasi pleine que s'est déroulée cette conférence animée par des cliniciens et des chercheurs, tous spécialistes de cette pathologie neurodégénérative. Aujourd'hui, on estime que la maladie d'Alzheimer touche environ 600 000 personnes en France, 850 000 si on compte les syndromes apparentés. «Ce chiffre, assez énorme, n'est qu'une extrapolation car nous n'avons pas de preuve réelle du nombre de personnes touchées. Un grand nombre d'entre elles, en effet, ne sont pas diagnostiquées», a précisé le Dr Luc Buée. Selon le Dr Vincent de la Sayette, environ 50 % des sujets, atteints par la maladie, ne sont pas diagnostiqués. «Pour les formes sévères, il n'y a pas de diagnostic dans un tiers des cas et, pour les formes légères, dans deux tiers des cas», a-t-il précisé. Pour permettre un diagnostic plus précoce, les généralistes ont un rôle essentiel à jouer car ce sont eux, le plus souvent, qui vont enregistrer les premières plaintes des patients concernant des problèmes de mémoire. «Il est important d'être attentif à l'expression de ces plaintes, en veillant à les corroborer avec le témoignage de la famille. Parfois, on constate une discordance entre le patient, qui ne se plaint de rien et ses proches, qui constatent des pertes de mémoire», a expliqué le Dr de la Sayette. Plainte ou déficit ? Tous les intervenants, réunis autour de la table, l'ont reconnu : ce n'est évidement pas parce qu'un patient âgé exprime une plainte de mémoire qu'il est atteint de la maladie d'Alzheimer. «Il faut distinguer la plainte banale de celle qui revêt un caractère exceptionnel. La plainte banale, c'est par exemple le patient qui, parfois, ne retrouve pas sa voiture dans un parking ou qui entre dans une pièce sans se rappeler ce qu'il est venu y faire. La plainte peut être considérée comme suspecte si le patient déclare par exemple égarer constamment des objets, s'il oublie les messages téléphoniques, s'il s'embrouille dans les prénoms de ses petits-enfants ou s'il fait répéter en permanence son entourage», a détaillé le Dr de la Sayette. De son côté, le Pr Bruno Dubois a insisté sur la nécessité de ne pas confondre «la plainte de mémoire avec le trouble de mémoire, qui est un déficit». A partir de 50 ans, a-t-il précisé, plus de la moitié des patients se plaignent de leur mémoire. «La simple plainte est donc très courante. D'ailleurs, nous voyons régulièrement des patients qui se plaignent beaucoup, mais ont des tests mémoire normaux.» Pour orienter leur diagnostic, les généralistes peuvent utiliser des tests neuropsychologiques standardisés (MMSE, IADL, test de 5 mots…). Ces tests ont une première utilité : ils permettent d'abord d'apporter une réponse à la demande du patient, exprimée par le biais de cette plainte. «Tous les généralistes ont des patients qui se plaignent de leur mémoire, mais pour lesquels ils sont certains qu'il n'y a pas de maladie d'Alzheimer. Mais ils ont beau leur dire, ce n'est pas ce qu'attendent ces patients. Ce qu'ils veulent, ce qu'on leur démontre, de façon claire, c'est qu'ils ne sont pas atteints par cette maladie», a expliqué le Pr Dubois. «Ces tests vont permettre, le plus souvent, de rassurer le patient et sa famille. Et ils vont leur montrer que le médecin prend au sérieux la plainte exprimée», a souligné le Dr Florence Pasquier. Ces tests, qui doivent être utilisés lors d'une consultation dédiée, vont donc permettre de tranquilliser le patient dans la très grande majorité des cas. S'ils font apparaître des troubles cognitifs réels, le généraliste pourra orienter le patient vers une consultation mémoire. Mais le rôle du généraliste ne se limite pas à la mise en route du diagnostic. «Il est là aussi pour aider le patient et ses proches à accepter ce diagnostic et à les accompagner, en lien avec les spécialistes, par une prise en charge et un suivi adaptés. Le généraliste a un rôle essentiel car il est au centre du dispositif de soins et d'aide, a souligné le Dr Pasquier, en ajoutant que cette prise en charge s'appuie notamment sur le traitement médicamenteux. Je sais que certains médecins ne sont pas convaincus par l'efficacité des traitements actuels. Ce que l'on peut dire, c'est que, certes, ces médicaments ne vont pas enrayer l'évolution de la maladie, mais ils peuvent stabiliser le patient pendant un moment et permettre un déclin moins rapide.» 1 sur 2 Fermer la fenêtre 2 sur 2