a l`aube d`une ère marquée par le système de

publicité
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dossier
OPÉRATIONS MARKETING-VENTES
A L’AUBE D’UNE
ÈRE MARQUÉE
PAR LE SYSTÈME
DE SOINS
Quelles sont les nouvelles
stratégies d’organisation des
laboratoires et leurs
conséquences sur les fonctions
marketing-ventes ? Réponses,
avec force détails, dans l’étude
réalisée par le cabinet de
conseil AEC Partners pour
Pharmaceutiques et le Leem.
Quelles sont les évolutions les
plus notables ? Celle du
marketing notamment, qui se
voit attribuer un rôle
davantage tourné vers le
système de soins que vers les
produits. Les patients
occupent en effet une place de
plus en plus centrale.
L’organisation en « Business
Units » restera-t-elle le modèle
adéquat dans l’avenir ? Une
chose est sûre, sa pertinence
est aujourd’hui remise en
question.
——————
PHARMACEUTIQUES _ DÉCEMBRE 2006
’environnement, de plus en plus complexe, pousse les entreprises à remettre en
cause leur modèle économique. Les laboratoires pharmaceutiques, qui ne sont pas
en reste, se réorganisent, et se globalisent.
Du coup, les métiers s’adaptent. Nombre
de facteurs expliquent ainsi l’évolution,
notamment, des opérations marketing et ventes. Avec le
développement des produits issus des biotechnologies et
de spécialités destinées à de petites cohortes, les « blockbusters » tels qu’ils existaient laissent leur place au modèle de « blockbusters de niche ». Parmi les grandes tendances qui se dessinent, la généralisation d’un marketing
de l’innovation tourné vers les systèmes de soins influe
de manière conséquente les métiers du marketing et de
la vente. De fait, la compréhension et l’analyse des besoins et du maillage des acteurs du système de soin prennent une place centrale dans les opérations marketingventes. Les organisations ne cessent de se médicaliser. Et
les stratégies de « market access »avec les fonctions européennes ou corporate sont en plein essor. Autre facteur :
l’importance croissante de l’orientation client. Patient,
partenaires institutionnels, cliniciens, pharmaciens à
L
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© GETTYIMAGES
seaux (16 %). Ont été cités, ensuite, la réforme hospitalière, le Plan Hôpital 2007 (11 %), la taxe sur le chiffre d’affaires (9 %), le médecin traitant (8 %) et l’évolution des
circuits de distribution (8 %).
Par ailleurs, aujourd’hui, tous les acteurs de l’industrie pharmaceutique doivent prendre en compte le « risk
management », y compris ceux des opérations commerciales. De fait, le « Sarbanes Oxley Act », avec ses implications en termes d’audit et de surveillance des entreprises,
a favorisé le développement d’une culture de « compliance » (règles de conduites). Des codes d’éthique et de
déontologie professionnelle ont ainsi vu le jour : charte
et certification de la visite médicale, en France. Face à
une « judiciarisation » croissante et mondialisée de la
santé, ces politiques s’appliquent désormais à tous les
acteurs de l’entreprise. Autre facteur et non des moindres : la collaboration entre les équipes en filiale et celles européennes et corporate se renforce. Ce qui s’avère
particulièrement important dans la gestion du cycle de
vie des produits : optimisation du lancement de nouveaux produits et dynamisation des produits matures par
leur développement. Pour s’intégrer dans les équipes européennes et corporate, la France bénéficie d’un atout
non négligeable : la taille de son marché (4ème mondial).
Ce qui confère à la filiale France une place de choix. Une
opportunité qu’elle doit saisir, en sachant communiquer
selon les modalités anglo-saxonnes pour tenir un rôle de
leader en Europe.
l’hôpital, assureurs privés… Les rôles des acteurs du
système de soins évoluent et gagnent souvent en importance. Les entreprises pharmaceutiques doivent ainsi
élaborer des stratégies clients de plus en plus pointues.
En clair, elles modifient leur organisation avec l’objectif
de l’orienter vers le client et développent ainsi de nouvelles compétences (santé publique, négociation hospitalière, par exemple).
Une place de choix. Les entreprises doivent, en outre,
faire face à la pression croissante des autorités de santé :
baisses de prix, déremboursements, taxation du chiffre
d’affaires… Ce contexte de restrictions budgétaires
contraint les opérations commerciales à une évaluation
constante des résultats des efforts engagés par leurs équipes. Un seul mot d’ordre : il faut en maximiser la rentabilité et la productivité. A la question « quels facteurs d’environnement externes à l’entreprise ont le plus
d’influence sur les métiers marketing-ventes », 20 % des
personnes interrogées ont cité les restrictions budgétaires et les déremboursements. Ces facteurs sont suivis de
la montée en puissance des génériques (17 %), puis de
la charte de la visite médicale et de la certification des ré-
Le marketing, en pleine mutation. Pour les interviewés, la plupart des métiers du marketing et des ventes
prendront de l’ampleur. La nature et le nombre de postes
en marketing et vente se diversifient. L’étude met en lumière le nécessaire équilibrage entre les postes pour des
raisons économiques et stratégiques. Les personnes interrogées prévoient que les investissements nécessaires
viendront de la baisse du nombre de visiteurs médicaux.
Une chose est sure, les métiers du marketing comme
ceux de la vente doivent ainsi évoluer fortement. Pour
ce qui concerne le marketing, 21 % des interviewés citent
le renforcement de l’encadrement réglementaire comme
principale tendance d’évolution. 20 % mentionnent l’im- 444
ÉVOLUTION DE L’ENVIRONNEMENT ET IMPLICATIONS
SUR LES BESOINS DE COMPÉTENCES
Le plus fréquemment cité
> Le facteur d’évolution externe le plus cité pour entrainer des
modifications de métiers et d’organisation concerne les
restrictions budgétaires et les déremboursements
Les cinq dimensions
> La recherche du maintien de la rentabilité face à la pression
économique croissante des autorités de santé
> La prise en compte du « risk management » par tous les acteurs
de l’entreprise
> L’évolution d’un modèle économique de « blockbuster » à un
modèle d’innovation type « biotechnologie »
> L’importance croissante de l’orientation client : évolution des
organisations et développement de nouvelles compétences au
sein du marketing et des ventes
> Une collaboration accrue avec le corporate selon des modes de
fonctionnements internationaux
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444 portance croissante de la stratégie client, au-delà de la
stratégie produit. Et 14 % soulignent la participation
croissante des fonctions marketing à des groupes de
travail Europe ou corporate. Interrogés sur les tendances
d’évolution des métiers de vente, les professionnels ont
notamment mis en avant l’évaluation croissante de la
rentabilité des actions et le renforcement de la qualité
et de l’éthique de l’information médicale et scientifique
délivrée (16 %). 13 % ont également cité l’importance
croissante des qualités de management nécessaires à
l’évolution de la visite médicale et l’exigence accrue sur
la gestion sectorielle. Autre tendance : le développement des activités de reporting et l’utilisation accrue
des outils de CRM.
Quels sont les métiers dont l’évolution devrait, à l’avenir, être la plus notable ? D’après l’étude, ce sont les métiers traditionnels de la visite médicale et du marketing.
La visite médicale doit ainsi s’adapter aux besoins du médecin et aux caractéristiques de sa clientèle. Le profil
des délégués médicaux évolue vers plus de qualité pour
une véritable valeur ajoutée délivrée aux médecins. Il
requiert désormais davantage d’écoute et un savoir faire
de questionnement, une capacité d’analyse locale de
l’environnement et du secteur. Mais aussi, des connaissances médico-économiques. L’information médicale
dépasse le strict cadre de la présentation des produits. Le
visiteur médical doit désormais savoir instaurer une relation d’accompagnement thérapeutique et assurer la
promotion du bon usage des médicaments par les acteurs de santé. L’étude souligne, en outre, que la visite
médicale n’est plus un simple élément du « mix-marketing ». Elle devient le centre de gravité de la relation entre
le laboratoire et ses clients (médecins/patients). Véritable lien du laboratoire avec ses médecins, le délégué médical doit toutefois faire face à la réticence des jeunes médecins. En effet, ceux-ci, préférant s’informer par
eux-mêmes, devraient y accorder moins de temps et d’attention.
L’IMPORTANCE CROISSANTE DE L’ORIENTATION CLIENT :
ÉVOLUTION DES ORGANISATIONS ET DÉVELOPPEMENT
DE NOUVELLES COMPÉTENCES AU SEIN DU MARKETING
ET DES VENTES
Le pouvoir croissant
du patient
Les évolutions des rôles
des cliniciens et
pharmaciens à l’hôpital
La régionalisation du
système de soin
Donner à son organisation une forte orientation client
Développer des stratégies client pointues
Développer des compétences de Santé Publique
Faire évoluer le poste de négociateur hospitalier
du statut du visiteur médical devient, ainsi, cruciale.
Pourtant, les compétences et les modalités d’exercice
de la profession doivent évoluer. De nombreux programmes de formation et de gestion du changement sont en
cours pour accompagner ces mutations.
Autre tendance : la baisse du nombre de visiteurs médicaux. Celle-ci peut être induite par la stratégie produits-clients ou contrainte par les mesures réglementaires (avenant à la charte de la visite médicale,
notamment). D’après l’étude, les mouvements démographiques devraient aider à accompagner ces ajustements.
Départs à la retraites, attrition naturelle, départs individuels… entre 2002 et 2012, le nombre de délégués médicaux devrait être divisé par deux.
Quant au rôle de la division marketing en filiale sur sa
stratégie produit, il se limite désormais aux discussions
et aux négociations avec les équipes européennes et corporate. L’objectif : faire en sorte que la stratégie produit
Un chef d’orchestre. Tous les visiteurs médicaux saudéfinie au niveau mondial soit adaptée au marché franront-ils s’adapter au nouveau modèle de visite médicale ?
çais. Le marketing produit est, en effet, réalisé dans sa
Certains managers, interrogés pour l’enquête, avouent
partie stratégique et dans une partie de sa déclinaison
être préoccupés par la résistance au changement de la
opérationnelle au niveau des fonctions corporate, voire
profession dans son ensemble. La question de l’évolution
européennes. La fonction de marketing en filiale reste,
toutefois, cruciale. Elle permet d’influencer
LES MÉTIERS MARKETING COMME LES MÉTIERS VENTES
et d’orienter les stratégies produit interDOIVENT ÉVOLUER FORTEMENT.
nationales. Le rôle de chef d’orchestre enUNE TENDANCE PARTAGÉE : L’ÉVOLUTION DE L’ENCADREMENT
tre les ventes, la stratégie client et la straRÉGLEMENTAIRE
tégie produit corporate reste très
important.
Le département marketing en filiale prépare et optimise les lancements de nouveaux produits. Comme le souligne l’étude,
l’évolution permanente et la complexité
des structures et des politiques de santé
publiques nationales rendent nécessaires
la capitalisation de savoir faire de « market access » en filiale. Cette fonction est assurée soit, par une direction marketing,
soit, par une direction « nouveaux produits », soit, par la direction médicale. Elle
est fortement encadrée par une structure
européenne ou corporate. L’unité de 444
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444 gestion des produits matures, quant à elle, est localisée
en filiale. Son rôle ? La gestion du cycle de vie des produits matures, la mise en place de moyens de promotion qui lui sont propres ou encore la recherche d’accords
de « business development ». Le marketing en filiale se
voit attribuer un nouveau rôle davantage tourné vers le
système de soins que vers le
produit. Les patients occupent une place centrale. Il
Modes de
s’agit d’identifier le rôle de
décisions
chaque acteur et son mailcentralisées
lage avec les autres. L’objectif ? Les faire évoluer vers la
connaissance de l’innovation. Ainsi, le processus (diagnostic-initiation du traitement-renouvellement-achat-observance) doit être étudié afin d’identifier une stratégie pour chaque acteur clé.
Un critère de différenciation. Les entreprises pharmaceutiques ont centralisé leurs modes de décisions. Les filiales sont dépendantes de fonctions européennes ou
corporate. Si les fonctions support dépendent souvent
hiérarchiquement de l’Europe (ressources humaines, finances, achats…), celles réglementaires et médicales ont
un double « reporting » Europe et France. Quant aux
fonctions marketing et ventes, elles restent les dernières
à être sous le seul management de la direction générale
France. Le directeur général d’une filiale assure ainsi la
conduite des opérations commerciales et la coordination
des fonctions support. Mais pour la majorité des professionnels interrogés (75 %), l’influence du siège européen
ou corporate est perçue en croissance. Elle s’exerce notamment sur la stratégie produit, les processus, les règles
de conduite et les choix des organisations. Le classement
des domaines d’influence du siège européen ou corporate dépend de l’origine des groupes : les règles de
conduite arrivent en tête pour les groupes américains interrogés. Pour les groupes français, ce sont plutôt les
choix d’organisation qui prédominent. Les choix d’organisation en France et leurs modalités de fonctionne-
4Méthodologie de l’étude
Cette synthèse a été réalisée à partir des éléments suivants :
• Une étude réalisée à travers une série d’entretiens qualitatifs
approfondis auprès de 29 managers.
- Les interviewés sont des dirigeants de l’industrie
pharmaceutique - opérationnels en France et à l’international,
DRH d’entreprises de taille et d’origine différentes. Ce sont
également des dirigeants de cabinets de recrutement.
- Un guide d’entretien qualitatif a été élaboré pour explorer,
suivant la fonction de l’interviewé, les thèmes suivants :
➔ L’évolution de l’environnement et de la stratégie
produit/marché et ses implications sur les organisations et
les métiers marketing et ventes
➔ Les métiers du marketing et des ventes, leurs
compétences et leurs évolutions
➔ Le management
➔ Les carrières et filières et les carrières à l’international
➔ Le recrutement
- Une enquête quantitative menée en parallèle, à partir d’un
questionnaire adressé par Pharmaceutiques à un panel de 300
cadres des filiales France, pour approfondir les thèmes de l’étude
qualitative.
- Une analyse documentaire des grandes études réalisées par la
profession, notamment l’Étude prospective sur les métiers et
l’emploi dans les entreprises du médicament à 5 et 10 ans
(Observatoire des métiers, de l’emploi et de la formation du Leem).
- Une analyse transversale de la soixantaine de missions de
stratégie, d’organisation et de performance menées par le cabinet
AEC Partners durant ces trois dernières années.
LEUR RÉUSSITE DÉPEND DE L’ADÉQUATION DES
PROGRAMMES ENGAGÉS À LA FOIS AUX OBJECTIFS
DE SANTÉ PUBLIQUE ET À LA STRATÉGIE
DU PRODUIT
Forger l’image du laboratoire
dans son implication
dans le traitement de la
pathologie
Accroître le marché par
une meilleure prise
en compte de la maladie
Valeur ajoutée
Sécuriser le financement
de certains produits :
par exemple, en améliorant
la codification
Eviter que des payeurs
régionaux avertis tardivement
ne réagissent négativement à
des coûts supplémentaires
imprévus
ment constituent, plus que jamais, un critère de différenciation face à la concurrence. Car les fonctions du marketing se diversifient : les choix de création de postes et
d’organisation de l’entreprise font ainsi la différence. Selon l’étude, une très grande majorité des entreprises
pharmaceutiques sont organisées en « business units ».
Ce modèle comporte plusieurs avantages. Il favorise l’expertise, la focalisation sur un domaine thérapeutique, sur
un segment de clients ou sur un temps de cycle de vie des
produits. Il induit l’engagement de la responsabilité du
directeur de la « business unit » sur les résultats. Mais il
permet aussi une organisation de la filiale en miroir de
l’organisation corporate. Et encourage la solidarité entre les fonctions marketing, ventes et éventuellement
médicales. Au-delà d’un simple fonctionnement matriciel, les équipes s’articulent autour de la gestion et la réalisation d’un projet. Le management en « étoile » des
« business units » place le client au cœur de l’entreprise.
Les « business units » ont alors la charge d’articuler les expertises à son service.
L’organisation en « business units » restera-t-elle toutefois le modèle adéquat dans l’avenir ? Une chose est
sure, sa pertinence est aujourd’hui en question. En effet, l’importance croissante du système de soins fragilise ce modèle qui privilégie les clients médecins. Et ne
s’occupe pas toujours des autres acteurs du soin. Le modèle en « business units » s’intéresse à la réussite de la
relation entre le marketing et les ventes. Or, le marketing en filiale traite désormais des stratégies client avant
tout. La masse critique en chiffre d’affaires devient par- 444
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444 fois insuffisante avec la sortie de la promo-
tion de produits matures : les vraies gammes deviennent rares. La relation avec les
leaders d’opinion est rarement établie
dans la durée : les managers du marketing
et de la « business unit » évoluent rapidement vers d’autres fonctions. Face à ces faiblesses, un nouveau modèle a récemment
été mis en place : celui des « parties prenantes ». L’organisation est en symbiose
avec le système de soins au niveau de sa direction même. Les attributions entre l’Europe et les filiales sont clairement définies
en termes de stratégie produit et stratégie
client/système de soins. L’orientation
client se reflète dans son organisation.
Celle-ci étant en osmose avec le système
de soins maillé et très structuré.
MARKETING : LA FONCTION EN FILIALE EST DÉSORMAIS
À GÉOMÉTRIE VARIABLE SELON UN AXE PRODUIT-CLIENT
Influencer le corporate marketing. Outre le choix de
l’organisation, le profil et les comportements des managers sont en pleine mutation. Aujourd’hui, les entreprises recherchent des personnalités qui savent à la fois
penser hors de leur contexte culturel et agir dans le respect de leur environnement. Une part importante de
leurs activités doit ainsi être consacrée à la créativité et
à l’innovation dans le respect des contraintes réglementaires et de la politique de « compliance ». Par ailleurs, le
bon manager doit comprendre et analyser les enjeux des
marchés internationaux. Son objectif : contribuer à l’élaboration des stratégies globales tout en sécurisant les éléments indispensables à son marché. La filiale France a de
quoi exercer son influence auprès des équipes Europe
et corporate. Les stratégies globales se doivent d’intégrer
les spécificités du 4ème marché mondial. Toutefois,
comme le souligne l’étude, l’absence d’effort de collaboration de la France pourrait la marginaliser. La France
ne représente, en effet, que 5 % du marché mondial. Des
relations étroites et nourries avec l’Europe et le corporate
sont ainsi vitales pour la filiale France. Comment ne pas
subir le corporate marketing ? Et, à l’inverse, comment
l’influencer ? La filiale doit savoir nourrir les programmes
corporate pour obtenir des plans de développementmarketing utiles à son marché. Autre atout : elle doit savoir s’unir aux leaders d’autres pays et trouver des facteurs structurants communs. Et ainsi, être reconnue pour
faire partie des équipes internationales et bénéficier d’un
réseau international interne.
Par ailleurs, l’étude met en lumière l’évolution du comportement des Français dans les équipes internationales.
Certes, certains véhiculent
encore une image d’arrogance et d’égocentrisme en
Réseau
mettant en avant leurs difficultés et les spécificités prointernational
pres à leur marché. Mais, la
interne
plupart d’entre eux sont perçus comme de brillants stratèges. Et leur contribution est
très appréciée des équipes européennes et corporate. Si
les Français souffrent souvent de complexes culturels et
linguistiques, ils bénéficient d’un atout majeur : leur situation privilégiée, à la charnière entre le monde latin et
le monde anglo-saxon. D’après l’enquête, le mouvement
déjà amorcé va donc se poursuivre. Les résultats sont
déjà de très bon augure. Selon un grand cabinet de recrutement, interrogé pour
LE MANAGEMENT EN ÉTOILE : LE CLIENT EST PLACÉ AU CŒUR
l’étude, « aucun autre secteur n’a autant de
DE L’ENTREPRISE, CHARGE À LA BU D’ARTICULER
Français à des postes clés de grands grouLES EXPERTISES À SON SERVICE
pes étrangers ». Autre tendance : le management hiérarchique et directif laisse désormais place au leadership. Et l’autorité
n’est plus liée au statut. Les profils autoritaires sont inadaptés aux organisations
d’aujourd’hui. « Il faut faire rêver les collaborateurs, manager à la séduction et fédérer », indiquent même certains interviewés. Dans ces conditions, les entreprises
ont besoin de redéfinir les comportements
escomptés des managers-leaders. Ils établissent ainsi des programmes de formation et d’évaluation de ces derniers.
Gestion des talents. Le leader est donc celui qui intègre les règles et les contraintes
de l’entreprise et de l’environnement ré- 444
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444 glementaire et concurrentiel. Outre les ob-
LE NOUVEAU MODÈLE INNOVATEUR, CELUI DES « PARTIES
jectifs pertinents qu’il doit établir à court et
PRENANTES » : L’ORGANISATION EST EN SYMBIOSE AVEC LE
SYSTÈME DE SOINS AU NIVEAU DE SA DIRECTION MÊME
moyen terme, il doit être charismatique et
transmettre sa vision. Ses atouts ? Ses capa> Une clarté des attributions entre l’Europe et les filiales
cités de négociation, son influence lors de
• Europe : stratégie produit
travaux en équipe et en réseau interne et
• Filiale : stratégie client et système de soins
externe. Mais aussi sa propension à inspi> Une orientation client marquée qui se reflète dans l’organisation
rer, animer, faire émerger de nouvelles
• Une organisation en osmose avec le système de soin désormais maillé et très
idées. Le leader sait prendre des décisions,
structuré
déléguer et surtout, maîtriser les modalités
• Une sémantique orientée du nom des divisions
de communication anglo-saxonnes. Par
ailleurs, dans un contexte d’évolution rapide de l’environnement, de délégation
croissante à des expertises nombreuses et
évolutives, de faible contrôle de l’information, de multiplication des circuits d’information et de complexification accrue
des processus, le fonctionnement par projet s’impose. D’ailleurs, certains comités de
directions deviennent de véritables comités de pilotage de projets. Le leader du projet se définit alors hors du lien hiérarchique.
Dans ces conditions, le nouveau « savoir être » du manager d’aujourd’hui, c’est
tout simplement « être ». Les interviewés
estiment que le comportement du nouveau manager
sur investissement est parfois limité. Les candidats ne
doit être en parfaite adéquation avec ses valeurs. Il doit
restent pas toujours fidèles à l’entreprise. Toutefois, selon
faire preuve d’une personnalité épanouie. Comment ? En
l’étude, tous les laboratoires engagés dans ces programse connaissant lui-même pour connaître ses limites et
mes souhaitent les poursuivre.
adoucir ses défauts, en se sentant bien dans sa peau pour
le transmettre à ses collaborateurs. Et en développant le
Carrières en rupture. Un parcours professionnel stanplaisir au travail. Un directeur général interrogé pour
dard se dessine à partir de cette gestion des talents et des
l’enquête affirme ainsi : « mon premier challenge est de
hauts potentiels. Le professionnel débute sa carrière
donner le sourire à mon équipe ». Confrontés à un envicomme délégué médical, puis, dans le service marketing
ronnement souvent perçu comme hostile, les collabode la filiale France. Ensuite, il obtient un poste de direcrateurs ont donc besoin d’un manager qui les repère.
teur régional, avant de faire partie de la division markeCertaines entreprises pharmaceutiques mettent en
ting Europe ou corporate. Il peut, s’il a suffisamment
place des programme de gestion des talents et des hauts
fait ses preuves, devenir directeur général d’une petite fipotentiels (ou « talent management »). Une initiative cenliale et achever sa carrière comme directeur de « business 444
sée les attirer, les fidéliser, mais aussi
contribuer à développer les compétences
des cadres de l’entreprise et garantir la sucTALENT MANAGEMENT OU GESTION DE PARCOURS
PROFESSIONNELS : …CET ENGAGEMENT EST DAVANTAGE
cession aux postes clés. Cette démarche est
RECONNU DANS LES GROUPES AMÉRICAINS
aujourd’hui installée de manière durable
pour six grands groupes internationaux.
« Dans votre entreprise, la gestion des carrières vous semble : pertinente et
Elle dépend notamment de la structuraadaptée, réduite ou en développement ? »*
tion et de la force des processus de ressources humaines dans la durée, de l’engagement de la direction générale. Mais aussi,
de la taille et de l’origine du groupe. De fait,
d’après l’étude, cet engagement des entreprises dans la gestion des parcours professionnels de leurs cadres est davantage
mis en œuvre dans les groupes américains.
Certaines entreprises interviewées s’interrogent sur le bénéfice des programmes de
« talent management » et de fidélisation
des hauts potentiels. Car ces programmes
requièrent des investissements lourds :
coaching, MBA, plan de développement de
performance, expatriation… Et le retour
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444unit » ou directeur général France. Par ail-
LA MOBILITÉ INTERNE EST PRÉPONDÉRANTE, LES CABINETS DE
leurs, les avis des professionnels interrogés
RECRUTEMENT ONT UNE PART DE 25 À 29 % DES EMBAUCHES
sont unanimes : un parcours professionnel
dans plusieurs pays est fortement encouragé et valorisé par l’entreprise. De fait, devenu indispensable, le poste à l’international est la voie royale du candidat qui espère
un jour accéder à un poste de direction générale. Les atouts d’une telle carrière sont
évidents : compréhension de la dimension
internationale de l’activité et connaissance
des modes de fonctionnement « corporate » des groupes. Mais l’expérience procure aussi richesse et ouverture d’esprit.
Ainsi, la majorité des répondants au questionnaire de Pharmaceutiques en est
convaincue : 53 % souhaitent dans l’avenir
tenir un poste à l’international.
Pourtant, comme le souligne l’étude, un
tel poste ne peut être le fruit du calcul d’une trajectoire
plus que jamais, les trajectoires professionnelles. Quant
professionnelle déterminée à l’avance. L’international
au parcours type, il n’existe pas. Ainsi, d’après l’étude, géexige souvent de gérer des ruptures : conditions matérer sa carrière implique avant tout de savoir « gérer des
rielles et familiales, déménagements difficiles, différences
ruptures et de rebondir ». La prise d’un nouveau poste
de niveau de vie entre le pays d’expatriation et la France…
doit satisfaire deux conditions : « Le poste me fait-il plaiFaut-il pour autant s’expatrier ? Les avantages d’un tel
sir ? ». « Vais-je apprendre quelque chose ? » Les cadres
choix sont pléthores. Certes, des divisions Europe ou corl’ont bien compris. Ils acceptent les risques de ce nouporate existent en France. Elles peuvent offrir, sans expaveau modèle de carrière. Mais les entreprises, elles, montriation, l’opportunité de connaître des modes de travail
trent plus de réticences. Elles préfèrent encore recruter
internationaux et une meilleure compréhension des groudes cadres qui ont déjà fait leurs preuves dans le même
pes. Mais avoir su changer de pays et tenir un poste dans
secteur, voire le même type de produit. Et surtout, qui
une filiale à l’étranger ou dans un siège international reste
sont en poste. L’étude indique toutefois que ce mode de
très apprécié. Le candidat aura ainsi démontré sa capacité
recrutement devra évoluer. Car il sera nécessaire de réinaux échanges culturels, aux contacts humains, à la retégrer les cadres licenciés lors de fusions et autoriser les
mise en cause.
passerelles entre métiers et secteurs.
D’après l’étude, pour les postes de direction, la notion
Si la mobilité interne reste prépondérante, 25 à 29 %
de carrière linéaire s’efface au profit d’un parcours profesdes embauches se font par l’intermédiaire de cabinets de
sionnel qui se négocie étape après étape. Celui-ci se
recrutement. Leur processus de recherche des candidats
construit et s’appuie sur la richesse d’expériences. En
potentiels est bien rôdé. L’évaluation et l’adéquation
général, 3 à 5 ans par poste sont nécessaires au candidat
des candidats à l’entreprise constituent leur cœur de mépour démontrer sa valeur ajoutée. De nombreuses passerelles existent : elles sont souLES SOCIÉTÉS PHARMACEUTIQUES ONT CENTRALISÉ LEURS
vent fonction du talent et de la personnalité
MODES DE DÉCISIONS : LES FILIALES SONT DÉPENDANTES DE
des managers. Trois éléments restent priFONCTIONS EUROPÉENNES OU CORPORATE
mordiaux afin d’acquérir la polyvalence recherchée pour les postes de direction. Le
> Si les fonctions support dépendent souvent hiérarchiquement de l’Europe, par
département marketing est un passage
exemple Ressources Humaines, Finances, Achats, SI,
obligé à coupler avec un poste dans la di> Les fonctions Réglementaire et Médicale ont un double reporting Europe et France
vision des ventes pour le management, ou
> Et les fonctions Marketing et Ventes quant à elles restent les dernières fonctions
dans un autre département : médical, fisous le seul management de la Direction Générale France
nances… De même, la connaissance d’au
moins deux segments (hôpital, ville, génériques…) est valorisée. Quant à la dimension internationale, elle est incontournable.
Un nouveau modèle. Dans un contexte de
concentration de l’industrie pharmaceutique, les parcours professionnels sont
ponctués de nombreux changements et
ruptures : périodes de progression et
d’évolution rapides dans l’entreprise mais
aussi, de changement d’environnement,
voire d’entreprise. Et parfois, de chômage.
Les aléas de la conjoncture déterminent,
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tier et leur valeur ajoutée. L’échec d’un recrutement est
plus souvent dû au comportement du candidat et à son
inadéquation à l’entreprise qu’à ses compétences professionnelles. Dans ces conditions, les cabinets de recrutement doivent avoir une connaissance poussée de l’entreprise, de ses modes de fonctionnement et de ses
managers pour une bonne sélection des candidats. La relation de confiance entre les cabinets de recrutement et
les entreprises est ainsi primordiale. Cette relation se traduit souvent par des partenariats d’exclusivité pour at-
tirer les talents externes sans perdre les talents internes.
Certaines entreprises, ayant une taille critique en volume
de recrutement, sont souvent tentées de limiter l’intervention des cabinets à l’évaluation des candidats. Elles se
chargent ainsi, elles-mêmes, de la recherche des candidats en amont ou la sous-traitent à des partenaires moins
onéreux. ■
HÉLIA HAKIMI, AVEC CHRISTINE GARNIER,
AEC PARTNERS
Trois métiers porteurs d’avenir…
l’exception de la visite médicale,
les métiers de « terrain » gagnent
tous en importance, notamment
les médecins régionaux, les négociateurs hospitaliers et les responsables
institutionnels locaux. Le responsable
scientifique régional (ou médecin régional)
joue un rôle clé dans la communication
de la stratégie thérapeutique. Il doit promouvoir la valeur ajoutée du médicament
en réponse à une pathologie, face au traitement de référence et aux autres alternatives thérapeutiques. Il contribue à l’évolution des pratiques médicales en instaurant
une relation privilégiée avec les médecins.
Et communique sur les études pré-AMM
en cours auprès des cliniciens, voire des
pharmaciens et autres décideurs de prescription. Les enjeux de sa fonction résident
dans le partage d’une réelle vision transversale du métier. Il faut développer des interfaces entre le médecin régional et les autres fonctions de l’entreprise, notamment
avec les acteurs régionaux (directeur régional, délégué médical ou responsable de la
négociation hospitalière). Par ailleurs, l’action du médecin régional doit être en cohérence avec la stratégie médicale et les enjeux commerciaux de l’entreprise. Le
métier de négociateur hospitalier a tendance à s’enrichir de la relation avec les
institutionnels responsables de l’hôpital.
Etroitement lié au délégué hospitalier et au
responsable scientifique régional, il
s’adapte aux évolutions du rôle des directeurs de pôles et des pharmaciens.
Lorsqu’il est affecté en région, il peut être
responsable de la relation avec les Agences
Régionales d’Hospitalisation.
A
connaissance des enjeux de soins et des
leaders. Et instaurer un véritable débat région-siège pour éviter une myopie des politiques nationales décidées par exemple
par le marketing. Il est responsable au quotidien de l’évolution du métier des délégués médicaux. Il est garant de la responsabilité déontologique régionale et veille à la
conformité des opérations locales. Dans les
unités hospitalières, le directeur régional
anime et coordonne une équipe régionale
multidisciplinaire. Son management direct
est, certes, limité aux délégués médicaux.
Mais il doit motiver et coordonner l’ensemble des acteurs régionaux autour d’objectifs partagés.
Face à des partenaires institutionnels qui
se régionalisent, ces métiers spécialisés
sont parfois créés au niveau local pour établir ou démontrer le bien fondé de la thérapeutique. Des besoins nouveaux émergent.
Les professionnels doivent s’impliquer aujourd’hui dans des programmes de santé
publique aux côtés des acteurs de la société
civile (mairies, conseils régionaux, associations de patients…) pour la prévention ou
la prise en charge de malades ou de personnes âgées, par exemple.
Leur rôle diffère selon la stratégie produit-client. Et leur réussite dépend de
l’adéquation des programmes engagés à la
fois aux objectifs de santé publique et à la
stratégie du produit. Ils peuvent, par
exemple, être chargés de forger l’image du
laboratoire dans son implication dans le
traitement de la pathologie, d’accroître le
marché par une meilleure prise en compte
de la maladie. Ou encore, de sécuriser le
financement de certains produits et d’éviter que des payeurs régionaux avertis tardivement ne réagissent négativement à des
coûts supplémentaires imprévus. ■
SELON LES INTERVIEWÉS, LA PLUPART DES MÉTIERS
DU MARKETING ET DES VENTES EN FILIALE GAGNERONT EN
IMPORTANCE
Des besoins nouveaux. Quant au directeur
régional, il se voit affecter des responsabilités croissantes. Il doit notamment définir des approches régionales par sa
DÉCEMBRE 2006 _ PHARMACEUTIQUES
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