Cédric Eyssette Cours de philosophie (2011-2012)

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Cédric Eyssette
Cours de philosophie (2011-2012) - TSTG
http://eyssette.net
INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE
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Thalès qui regarde les étoiles et tombe dans un puits.
Problématiser : être un taon qui pique un cheval un peu mou (Socrate). Argumenter : mettre les idées sur une
balance (Epictète). Analyser : regarder ses propres lunettes, être un ingénieur conceptuel (Blackburn).
Il ne faut pas vomir ce qu’on a appris, mais le digérer (Epictète)
SÉQUENCE 1 : ÉTHIQUE ET PHILOSOPHIE MORALE
CHAPITRE I : LE BONHEUR
Question 1 – Le bonheur est-il possible ?
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Le bonheur comme satisfaction globale, durable, qui provient d’un jugement sur sa vie
I - Le bonheur comme idéal impossible
1/ Le bonheur : idéal, non de la raison, mais de l’imagination (Kant)
● Un modèle de bonheur n’est pas : universel, valable pour tous les individus, objectif, nécessairement adapté
à la réalité, un concept parfaitement défini, logique et cohérent, une garantie d’un bonheur réel. Un modèle
de bonheur est toujours : particulier, relatif à l’individu, subjectif, fondé sur des représentations mentales qui
débordent la réalité, une représentation vague et confuse, une image que l’on se fait du bonheur.
2/ Bonheur et hasard
● L’étymologie. L’image de la roue de la fortune. “Nul ne peut être dit heureux avant sa mort” (Solon). “Le temps
est un enfant qui joue” (Héraclite). Le hasard de la naissance.
3/ Le pessimisme philosophique
● Les plaisirs de l’existence ne sont que temporaires, nous retombons vite dans l’insatisfaction. Le tonneau
percé (Platon). La société de consommation, la publicité et la télévision (texte de Beigbeder sur la publicité,
analyse de la publicité Dior, Le Lay : « ce que nous vendons à Coca-cola, c’est du temps de cerveau
disponible »).
II - Les sagesses antiques
1/ Points communs
● But : le bonheur et la liberté. Moyen : Réfléchir à soi / Vivre en accord avec la nature.
2/ L’épicurisme
● Le bonheur et la liberté comme ataraxie (“être un épicurien” ; le plaisir selon Epicure : plaisirs mobiles et
plaisirs statiques ; le tetrapharmakon contre la crainte des dieux, de la mort, de la souffrance et de l’avenir).
● Réfléchir à soi = réfléchir à ses désirs (la prudence, le calcul des plaisirs, la recherche du plaisir dans la
mesure plutôt que dans l’excès).
● Vivre en accord avec la nature = se focaliser sur ses réels besoins (besoins ≠ envies ; les trois types de
désirs).
● La référence à l’épicurisme dans les mouvements de la simplicité volontaire, de la décroissance.
3/ Le stoïcisme
● Le bonheur et la liberté comme apathie (“Être stoïque” ; l'image du roc, l'image de la citadelle intérieure ; faire,
en toute circonstance, ce qu'un être rationnel ferait ; la vertu comme tension morale).
● Réfléchir à soi = réfléchir à ses représentations (“Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses ellesmêmes, mais les jugements qu'ils font sur ces choses”).
● Vivre en accord avec la nature = accepter le réel (La distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui ne
dépend pas de nous ; « décide de vouloir ce qui arrive et tu seras heureux »).
● La référence au stoïcisme dans les thérapies cognitives.
Question 2 – Le bonheur est-il vraiment désirable ?
1/ Bonheur et vie accomplie
● L’homme qui compte des brins d’herbe. Mill : « Il vaut mieux être un homme insatisfait qu'un porc satisfait ; il
vaut mieux être Socrate insatisfait qu'un imbécile satisfait. ». La question de la qualité des plaisirs (Bentham
vs. Mill).
2/ Bonheur et vérité
● La machine à expérience de Nozick. Matrix : le choix de Néo vs. le choix de Cypher.
3/ Bonheur et liberté
● Bonheur et liberté dans la fiction (notamment : Huxley, Le Meilleur des mondes).
● Bonheur et liberté dans les sociétés démocratiques : le despotisme doux (Tocqueville).
● Le désir fondamental de l’individu est d’affirmer librement sa puissance (Alain).
4/ Bonheur et morale
● Le choix d’Hercule.
● Le cas du méchant heureux. Morale et sacrifice de soi, souci des autres et souci de soi.
CHAPITRE II : LA LIBERTÉ
Question 3 – Sommes-nous vraiment libres ?
●
Liberté d’action et liberté de la volonté
I - Les arguments en faveur du libre arbitre
1/ L’expérience de la liberté
● L’expérience du choix. L’intuition qu’on aurait pu faire autrement.
● Limite de cet argument : ce sentiment n’est-il pas illusoire ? Spinoza : la croyance en la liberté repose sur
l’ignorance des causes qui nous déterminent.
2/ Liberté et responsabilité morale
● Sans libre arbitre, il n’y a pas de responsabilité morale (Thomas d’Aquin). Le cas des procès d’animaux au
Moyen Âge. L’article 122-1 du Code pénal.
● 1ère critique : On peut penser la responsabilité morale sans faire référence à une possibilité d’agir autrement
(cf. critique par Frankfurt du principe des possibilités alternatives. Analyse de la notion de responsabilité à
partir des cas d’absence, de diminution ou d’aggravation de la responsabilité. (i) Plus une action repose sur
les désirs, les croyances, les intentions d’un individu, plus nous tenons cet individu pour responsable de cette
action (le cas de l’ignorance, de l’accident, de la contrainte, de la préméditation). (ii) Plus l’individu est capable
d’un contrôle de lui-même, plus nous le tenons pour responsable (le cas de l’enfant, de la maladie mentale,
du crime passionnel). Complexité de la notion de responsabilité (le cas de l’addiction, de l’influence, de la
faiblesse de la volonté).
● 2e critique : L’argument ne prouve pas directement l’existence de la liberté. Le libre arbitre n’est-il pas une
invention pour justifier la responsabilité morale ? Le libre arbitre comme “tour de passe-passe théologique”
(Nietzsche).
3/ Liberté et raison
● La liberté semble fondée sur une propriété caractéristique des hommes : la raison (Thomas d’Aquin).
Distinction entre la raison et l’instinct.
● Critique : L’homme est-il vraiment un être à part, un “empire dans un empire” (Spinoza) ?
II - Le déterminisme
1/ Déterminisme et fatalisme
● Le déterminisme repose sur une démarche rationnelle d'explication, et non sur un simple sentiment ou une
mythologie.
● Le déterminisme nous permet de connaître les lois de la nature et d'agir sur le cours des choses, tandis
que le fatalisme nous maintient dans un sentiment d'impuissance face au destin (discussion de l’argument
paresseux ; la critique du fatalisme politique par Bourdieu).
● Le déterminisme repose sur l'idée d'une nécessité conditionnelle (qui s'exprime sous la forme de lois : “si …,
alors …”), tandis que le fatalisme repose sur l'idée d'une nécessité inconditionnelle (“de toute façon, ce qui
doit arriver arrivera")
2/ Les différentes formes de déterminisme
● Le déterminisme physique (ou déterminisme matérialiste). 1er exemple : le lancer d’un projectile. 2e
exemple : le lancer d’un dé. La question du hasard. Le hasard est-il dans la réalité ou bien n’est-il que l’effet
de notre ignorance ? Le démon de Laplace : un être qui aurait connaissance de toutes les lois et tous les
paramètres physiques pourrait-il prédire ce qui va se passer ? Les limites de notre connaissance (théorie de
la complexité ; théorie du chaos : sensibilité aux conditions initiales, effet-papillon, limites de nos instruments
de mesure). Application du déterminisme physique à la question du libre arbitre : le déterminisme neuronal
(l’expérience de Libet ; le neuromarketing) et le déterminisme génétique (la génétique des comportements ;
le cas des animaux : la “fidélité” des campagnols et la parade sexuelle de la drosophile ; les limites de
l’application à l’homme).
● Le déterminisme psychique. Cf. le cours sur l’inconscient.
● Le déterminisme social. Les tables de destinée, l’analyse de Bourdieu (le poids des différences de capital
économique, social et culturel sur la réussite scolaire et sociale ; critique de la notion de mérite : l’école
comme lieu de reproduction et de justification des inégalités).
● Remarque générale : l’état des connaissances ne permet pas de conclure à un déterminisme strict
s’appliquant à l’individu, mais à un déterminisme probabiliste qui s’applique à des populations.
SÉQUENCE 2 : PHILOSOPHIE DE LA CULTURE
CHAPITRE III : LA CULTURE
Question 4 – En quel sens peut-on dire que l’homme est un être culturel ?
●
Les différents sens de la notion de culture.
I - La culture comme processus de formation de l’humanité
1/ La transformation du monde extérieur en un milieu proprement humain
● Cf. cours sur le travail et la technique + cours sur l’art
2/ La transformation de l’individu en un être proprement humain
● La culture comme éducation. L’éducation comme instruction et discipline.
● La discipline (i) : la domestication des pulsions. Le cas des pulsions sexuelles (Lévi-Strauss et la prohibition
de l’inceste ; Diogène le cynique et la masturbation). Le cas des pulsions agressives (Norbert Elias :
le “processus de civilisation. Refoulement et sublimation de l’agressivité).
● La discipline (ii) : les techniques du corps (Marcel Mauss).
3/ Les limites de cette représentation de la culture
● L’analyse critique de Lévi-Strauss (critique de l’ethnocentrisme, de l’idée de progrès, de l’esprit de la
colonisation).
● Analyse de cas : les zoos humains et la construction de la distinction sauvage/civilisé à travers trois
dimensions (voir, savoir, pouvoir).
II - Cultures et politique
1/ Le nationalisme culturel
● Le contexte historique.
● Deux arguments : (i) la cohésion sociale reposerait sur l'unité culturelle ; (ii) l'identité individuelle reposerait
sur l'identité culturelle.
● Analyse critique : (i) L'idée d'identité ou d'unité culturelle a-t-elle un sens ? un contenu précis ? (Les
sociétés contemporaines sont des sociétés pluralistes, individualistes et l'idée même d'identité culturelle
ne suppose-t-elle pas un rapport fictif à l'histoire ?). (ii) La cohésion sociale suppose-t-elle nécessairement
l'unité culturelle ? Pour vivre ensemble, faut-il nécessairement avoir la même culture ? L'important n'est-il
pas de respecter les mêmes lois, les mêmes principes fondamentaux ? (iii) L'identité individuelle n'est pas
monolithique, elle est plurielle. (iv) Le nationalisme culturel peut prendre plusieurs formes, qui évoluent entre
deux pôles : une forme clairement légitime, celle de la visée d'une autodétermination d'un peuple par luimême, et une forme clairement malsaine, celle d'une xénophobie, d'une volonté de purification ethnique.
2/ L’universalisme républicain
● Argument : faire abstraction de la diversité culturelle permettrait de garantir la liberté, l’égalité et la fraternité.
(i) La liberté, en émancipant l’individu du poids des traditions ; (ii) l’égalité, en considérant tous les citoyens de
la même manière ; (iii) la fraternité, en évitant les tensions communautaires.
● Analyse critique à partir de l’examen de loi de mars 2004 interdisant le port de signes religieux ostensibles
à l'école. (i) Voile et liberté (le port du voile est-il nécessairement le signe d’une domination masculine ?). (ii)
Voile et égalité (le port du voile est-il nécessairement contraire à la laïcité ?). (iii) Voile et fraternité (le port du
voile est-il nécessairement la manifestation d’une revendication communautaire ?).
● Universalisme républicain et multiculturalisme libéral : faut-il faire abstraction des différences culturelles ou
bien faut-il les reconnaître ?
CHAPITRE IV : LA TECHNIQUE
Question 5 – Quelle valeur faut-il accorder à la technique ?
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Définition de la technique. La technique et la nature. La technique et l’utile.
I - La technique au fondement de l’humanité
1/ La technique est au cœur de l’existence et de l’essence même de l’humanité
● La technique comme condition d’existence des hommes. Le mythe de Prométhée. Les grandes inventions
techniques.
● L’homme se définit essentiellement comme homo faber (Bergson).
● Distinctions entre la production animale et la production humaine. 4 points de vue : (i) les matériaux utilisés
(matériaux sécrétés par le corps de l’animal ou bien trouvés dans la nature vs. matériaux inventés) ; (ii) la
structure du produit (la structure du produit est le résultat de l’instinct vs. la structure du produit est le fruit
d’une réflexion [cf. Marx], qui elle-même repose sur un savoir-faire, un apprentissage) ; (iii) les moyens pour
produire (le corps de l’animal lui-même vs. la main [cf. Aristote], des outils, des machines) ; (iv) la finalité (la
survie, la simple continuation de l’existence dans la durée vs. une extension de l’existence, une ouverture à
d’autres dimensions [notamment ludiques, artistiques, théoriques…]).
● La technique manifeste la capacité d’invention de l’homme, c’est-à-dire à la fois son intelligence et sa liberté.
2/ Le progrès technique : passage du savoir-faire empirique à la technologie
● La technologie : une technique qui repose sur la science, et non plus sur un simple savoir-faire empirique.
L’exemple de 2001, L’odyssée de l’espace : passage de l’usage de l’os comme arme au vaisseau spatial.
● Quand la technique devient technologie, la technique permet de “nous rendre comme maîtres et possesseurs
de la nature” (Descartes). Maîtrise théorique et maîtrise pratique de la nature. Un changement dans la
conception de la nature : le grand Tout dans lequel l’individu s’inscrit vs. le réservoir d’énergie dans lequel on
peut puiser. L’arraisonnement de la nature (Heidegger) : la compréhension rationnelle des lois de la nature
(maîtrise théorique) permet l’exploitation des forces de la nature (maîtrise pratique).
3/ En quel sens peut-on dire que la technique représente un progrès pour l’homme ?
● Une libération des contraintes que nous impose la nature : (i) La machine comme substitut de l’esclave (la
définition par Aristote de l’esclave comme “instrument animé”) : satisfaction plus facile des besoins, réduction
de la pénibilité de certains efforts, libération de temps pour autre chose, amélioration des conditions de vie. (ii)
une extension de notre capacité d’action, un dépassement des limites de notre corps (l’exemple du transport
et de la vision).
● Progrès technique et croissance économique. Technique et gains de productivité. Cycles de la croissance et
cycles de l’innovation technique. La notion de destruction créatrice (Schumpeter).
● Progrès technique et progrès intellectuels. La science et les instruments techniques de mesure et
d’observation. Les technologies de l’information et de la communication (l’imprimerie, internet).
II - Les critiques de la technique
1/ Vivons-nous dans un monde davantage maîtrisé grâce à la technique ?
● Les risques techniques. Virilio : “Inventer un objet technique, c’est inventer une nouvelle possibilité
d’accidents”. Peut-on contrôler ces risques ? La technique peut-elle nous échapper ? Le mythe d’Icare, la
figure de Frankenstein. Le cas du nucléaire (la question de l’instabilité au niveau physique et au niveau
social), le cas des biotechnologies (le clônage et l’eugénisme, les OGM, le principe de précaution), le cas des
nanotechnologies (miniaturisation et contrôle citoyen).
● La question écologique. Pourquoi devrait-on respecter la nature ? Le respect de la nature et la question des
conditions d’existence des individus. La “transformation de l’essence de l’agir humain” et la responsabilité visà-vis des générations futures (Hans Jonas : le principe responsabilité). L’exemple de l’automobile (la critique
d’Ivan Illitch).
● Qui a véritablement une maîtrise de l’objet technique ? La technique participe-t-elle véritablement
d’un “désenchantement du monde”, d’un univers davantage rationalisé ? La technique comme “magie”. Ni
l’utilisateur lambda, ni l’ouvrier n’ont une véritable maîtrise de la technique (la critique de Simondon). La figure
du bidouilleur (Crawford : éloge du carburateur ; l’exemple du hacker informatique). La dépendance vis-à-vis
de l’objet technique (la critique de Rousseau).
2/ La technique représente-t-elle véritablement une libération de l’individu ?
● Le cas de la télévision. Régis Debray à propos de la télévision : “Ce par quoi nous voyons le monde construit
simultanément le monde et le sujet qui le perçoit”. La construction par le “journal” d’une vision du monde. La
construction d’un type d’individu : comparaison entre le rapport à l’écrit et le rapport à l’écran (passivité dans
la réception d’une information/activité de recherche ; immédiateté / patience de la compréhension ; rapidité,
vitesse / lenteur ; zapping / attention constante [Stiegler]). Analyse critique de cette perspective médiologique
selon laquelle une technique particulière peut définir une certaine forme de vie et de pensée.
● La vie au rythme des objets : “Comme l’enfant-loup est devenu loup à force de vivre avec eux, nous devenons
lentement fonctionnels nous aussi. Nous vivons le temps des objets” (Baudrillard). 3 niveaux d’analyse : (i) la
présence massive des objets techniques dans notre espace (“à force de vivre avec eux”) ; (ii) la vie assujettie
au rythme de la production des objets, l’insatisfaction cyclique du désir dans la société de consommation
(“nous vivons le temps des objets”) ; (iii) L’extension de la norme de la performance et de la fonctionnalité
(dans le travail, l’éducation et la culture, la sexualité…).
CHAPITRE V : L’ART
Question 6 – Comment peut-on comprendre la création artistique ?
●
Introduction au questionnement sur l’art à partir d’une œuvre de Marcel Duchamp : Fountain
I - La création d’une œuvre d’art se distingue de la production d’un objet technique
1/ Une œuvre d’art ≠ un objet technique
● L’objet technique est destiné à une utilisation, l’œuvre d’art est destinée à une contemplation.
● L’objet technique est destiné à être usé par l’usage qu’on en fait, l’œuvre d’art est destinée à être une trace
qui dure. Hannah Arendt : « l’art est la patrie non-mortelle des êtres mortels » ; Malraux : « l’art est un antidestin ». Exemples : les mains négatives et positives dans l’art pariétal préhistorique ; Roman Opalka.
Hegel: “L’art rend durable ce qui à l’état naturel n’est que fugitif et passager”. Baudelaire, À une passante. La
fonction du poète archaïque (Detienne). Le mythe d’Orphée (Blanchot, L’Espace littéraire).
2/ Créer ≠ produire
● Distrinction à première vue entre la production technique et la création artistique : (i) production en série vs.
création unique ; (ii) répétition d’un modèle préalable et application de règles de production vs. originalité,
liberté, recherche ; (iii) savoir-faire, habileté, technique vs. imagination, inspiration ; (iv) apprentissage,
formation, transmission possible vs. génie, don.
● Comment peut-on alors expliquer la création artistique ? 2 théories de la création : l’appel à un au-delà de la
raison (les Muses, l’inspiration divine) ; l’appel à un en-deçà de la raison (Freud). L’exemple du surréalisme
(la place du rêve, l’écriture automatique). L’art et la folie. La représentation commune de l’artiste (Mozart dans
Amadeus).
II - Démystification de l’art
1/ L’œuvre d’art est la trace de son temps
● La création artistique ne se fait pas ex nihilo. Elle émerge dans un contexte particulier.
● Exemples : l’art grec (temples et statuaire) manifeste la valorisation du sens de la mesure que l’on retrouve
dans la culture grecque. Les transformations culturelles du Moyen Âge à la Renaissance se manifestent dans
l’art (dans la cathédrale gothique, l’art se pensait sous le regard de Dieu et comme regard vers Dieu ; avec
la perspective en peinture, l’art se pense du point de vue du regard de l’homme et comme regard vers des
choses humaines). Exemple moderne : le pop art et la société de consommation.
2/ Critique de l’idée de génie
● Critique de l’idée d’un “don naturel” : analyse du travail de l’artiste (Alain). Le travail de répétition en musique,
dans le théâtre. La réécriture, les brouillons, les révisions en littérature (les manuscrits de Flaubert). Le
travail en série (Cézanne : les pommes, la montagne Sainte-Victoire ; Monet : la cathédrale de Rouen, les
Nymphéas) et les esquisses préparatoires en peinture (Picasso : la préparation de Guernica, Le Mystère
Picasso de Clouzot).
● La source principale de l’inspiration de l’artiste : c’est l’art lui-même, la pratique artistique et le travail d’autres
artistes. Les “reprises” dans l’art : la notion d’influence en musique ; les thèmes dans le jazz, dans la musique
baroque ; le sampling dans le rap ; la reprise de Vélasquez par Picasso, et par Bacon ; les adaptations au
cinéma ; les idées d’intertextualité et de palimpseste en littérature (les réécritures de l’Odyssée).
● L’idée de génie entoure l’artiste d’une certaine aura mystérieuse (la critique de Nietzsche). L’exemple de
Thomas Pynchon.
Question 7 – Qu’est-ce que l’art peut nous apporter ?
I - L’art enrichit notre existence
1/ L’attitude esthétique
● Bergson. Attitude ordinaire vs. attitude esthétique. La perception ordinaire consiste à lire des étiquettes et non
à voir les choses elles-mêmes (étiquettes générales et abstraits). La perception ordinaire est “auxiliaire de
l’action”. La perception ordinaire est une perception “pâle et décolorée” ; l’artiste est un “révélateur” : il nous
fait saisir des nuances que nous ne saisissons pas d’ordinaire.
● 3 niveaux d’analyse de cette idée : la perception, l’émotion, la cognition.
2/ Art et perception
● L’exemple de la peinture. Klee: “l’art ne reproduit pas le visible, il rend visible”. On peut appliquer cette idée
à l’art figuratif, dans la mesure où il peut (i) rendre visible le talent de l’artiste (Zeuxis ; Diderot sur Chardin) ;
(ii) rendre visible l’intériorité et non pas simplement reproduire l’apparence (Hegel sur Raphaël) ; (iii) rendre
visible une transcendance (l’icône) ; (iv) rendre visible tout un univers particulier (Heidegger sur Van Gogh ;
cf. plus haut sur le rapport entre une œuvre et l’époque).
● Sens principal : non pas rendre visible quelque chose en particulier, mais ramener à un regard purement
contemplatif. Cézanne : “peindre la virginité du monde”.
L’art permet d’apprendre à voir : l’artialisation du regard (Oscar Wilde).
3/ Art et émotion
● La littérature et le sentiment amoureux. Barthes, Fragments d’un discours amoureux).
● La tragédie et la catharsis (Aristote). La littérature et l’empathie.
● L’exemple de la musique. La place de la musique dans la classification des arts par Hegel : la musique
comme art du temps et le lien avec l’intériorité de l’âme. L’analyse de la musique par Schopenhauer. Musique
et émotions : Mozart, Don Giovanni, l’air du champagne vs. Gustav Mahler, Symphonie n°5, adagietto (cf.
Visconti, Mort à Venise).
4/ Art et cognition
● L’exemple de la littérature. Proust : “La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par
conséquent réellement vécue, c’est la littérature”. Ricœur, l’identité narrative. La littérature et le sens du
possible (Musil). La science-fiction, l’utopie. Littérature et philosophie (Sartre et Camus). L’art engagé.
●
II - Les jugements sur l’art sont-ils relatifs à chacun ?
1/ Le relativisme esthétique
● Voltaire : “Demandez à un crapaud ce que c'est que la beauté […]. Il vous répondra que c'est sa crapaude”.
Formulations ordinaires : “à chacun ses goûts”, “des goûts et des couleurs, on ne discute pas”.
● Comparaison entre le relativisme esthétique et les autres formes de relativisme : relativisme moral,
relativisme de la vérité.
Relativisme esthétique vs. dogmatisme esthétique. L’académisme (la querelle du Cid).
Relativité par rapport à l’individu ou relativité par rapport à la classe sociale (Bourdieu).
2/ Critiques du relativisme esthétique
●
●
● La critique de Hume. Tous les jugements de goût ne se valent pas. Il y a une différence à faire entre
le profane d’une part et l’initié, l’amateur, l’expert d’autre part. L’exemple du vin. La capacité à saisir
des nuances, à comparer (i) grâce à la pratique, l’expérience, l’habitude, (ii) grâce aux connaissances
(notamment : possession d’un vocabulaire théorique). Le goût peut être éduqué.
SÉQUENCE 3 : PHILOSOPHIE POLITIQUE ET SOCIALE
CHAPITRE VI : LA JUSTICE ET LA LOI
Question 8 – Qu’est-ce qui constitue le pouvoir de l’État ?
I - L’État se constitue par un processus d’autonomisation du pouvoir
1/ Analyse des sociétés sans État
● Pierre Clastres : les sociétés sans État sont des sociétés contre l’État
2/ La genèse de l’État moderne
● Max Weber et l’institutionnalisation du pouvoir. La monopolisation des moyens de domination. L’autorité
légale-rationnelle.
II - État et domination
● Les différentes doctrines politiques peuvent être pensées comme autant de réponses possibles à la question
de la domination que peut exercer l’État.
1/ Le libéralisme
● 1er argument : raison morale ; responsabilité de l’individu, la propriété de soi, le refus du paternalisme.
● 2e argument : raison économique ; la critique de l’efficacité de l’intervention de l’Etat ; la défense de l’ordre
naturel du marché (Adam Smith ; Hayek).
2/ Le socialisme
● La lutte contre la domination économique.
● 3 piliers du socialisme : la réglementation du travail, la redistribution des richesses, le service public.
3/ Le marxisme
● Le déterminisme économique (infrastructure et suprastructure). L’Etat comme instrument de la lutte des
classes.
● L’idéologie. Exemples d’idéologie (l’idéologie du naturel féminin, l’idéologie coloniale, l’idéologie du mérite).
Le cas de l’idéologie démocratique (“le vote libre” : Qui possède les moyens de diffusion des idées ? Les
idées dominantes sont les idées de la classe dominante ; “la représentation politique” : De quelle classe
sociale les représentants sont-ils issus ?).
● La révolution et la dictature du prolétariat.
4/ L’anarchisme
● La lutte contre toute forme de domination (“ni Dieu, ni maître”), dès maintenant.
● La critique anarchiste du marxisme.
Question 9 – Quelle est la finalité du pouvoir politique ?
I - La société bien ordonnée selon Platon
1/ La critique de la démocratie
● Critique de la pratique du tirage au sort. L’image du pilote dans le navire. La thèse du philosophie-roi. Pouvoir
et savoir.
● Critique d’un pouvoir qui repose sur l’opinion. (i) Quantité de voix en faveur d’une décision vs. qualité de
cette décision. Le cas de Socrate, condamné par la démocratie athénienne. (ii) Démocratie et démagogie. La
manipulation de l’opinion (la rhétorique, les sophistes ; modernité de cette critique : la politique spectacle, les
conseillers en communication).
2/ La cité idéale
● La cité idéale doit être hiérarchisée. Les 3 classes sociales (gouvernants, gardiens, producteurs). Cet ordre
est un ordre naturel, qu’on retrouve également dans l’individu lui-même (la raison, la volonté, les désirs).
● Dans la cité idéale, le plus important, c’est la société elle-même et non l’individu (holisme social). Le cas des
gardiens : suppression de tout ce qui est individualisant [la propriété privée, la famille (enfants et mariage)].
● Peut-on comparer le modèle platonicien à une forme de totalitarisme ? (Analyse critique de la thèse de
Popper). Point commun : fusion entre l’individu et l’Etat. Différences : (i) La cité platonicienne ne repose
pas sur la terreur. (ii) Le totalitarisme repose sur un clivage entre des catégories de la population (races
supérieures / races inférieures ; révolutionnaires / ennemis de la révolution).
II - La société bien ordonnée selon Hobbes
1/ L’état de guerre
● L'état initial des hommes est un état de guerre. 3 causes de querelles : rivalité, méfiance, fierté.
● Cet état de guerre est un état de misère.
● ≠ 2 thèses du libéralisme économique : (i) possibilité d'une autorégulation, d'une harmonie naturelle des
intérêts (Adam Smith : la main invisible), (ii) la concurrence comme source de progrès (cf. Kant : l'image de la
concurrence des arbres pour la lumière).
2/ Un pouvoir est nécessaire pour sortir de l’état de guerre
● Pour sortir de l'état de guerre, il faudrait un accord de paix entre les hommes. Mais à l'état de guerre, on ne
peut pas avoir confiance envers les autres. Seule possibilité = l'instauration d'un pouvoir.
● Le pouvoir émerge à partir d'un pacte. Ce pacte est un pacte de soumission : le souverain a un pouvoir
absolu.
● L'Etat pour Hobbes ≠ un État de droit. L'État-Léviathan. Un retour de l'État-Léviathan dans le monde
contemporain ? Le cas de la lutte contre le terrorisme, le cas de la rétention de sûreté.
III - La société bien ordonnée selon Rawls
1/ La position originelle
● Une expérience de pensée pour tester nos conceptions de la justice : la position originelle. Des individus
doivent choisir les principes fondamentaux de la société dans laquelle ils auront à vivre, mais ils ne savent
pas qui ils vont être, ce qu’ils vont être dans cette société (ils sont sous un voile d’ignorace). Une conception
procédurale de la justice.
2/ Les principes de justice
● Égalité des droits. Un maximum de droits pour tous. Le libéralisme politique. La critique de l’utilitarisme.
● Égalité des chances. Égalité formelle et égalité réelle. La critique de la conception méritocratique de l’égalité
des chances.
● La question de la répartition des revenus. La répartition juste n’est pas ici la répartition égalitaire, c’est la
répartition la plus favorable possible pour les plus défavorisés.
● Les principes de justice comme cadre de discussion des lois dans une démocratie.
CHAPITRE VII : LES ÉCHANGES
Question 10 – Que peuvent nous apporter les échanges ?
●
Les différents types d’échanges. Définition de la notion d’échange.
I - Nécessité des échanges
1/ Du point de vue économique
● Échanges et production : Adam Smith à propos de la division du travail. L’exemple du crayon. Analyse
critique de la doctrine du libre échange.
● Échanges et consommation (la question de la répartition optimale des ressources par le marché).
● La monnaie et les échanges (les 3 fonctions économiques de la monnaie : la monnaie comme intermédiaire
dans les échanges, unité de compte et réserve de valeur ; les dimensions non économiques de la monnaie :
la monnaie et le lien social, la monnaie et la politique)
2/ Du point de vue social
● L’obligation sociale d’échanger : la prohibition de l’inceste selon Lévi-Strauss, le potlatch selon Mauss, les
manifestations ordinaires de cette obligation d’échanger (le repas [Lévi-Strauss : la bouteille de vin dans les
bistrots du sud ; Clastres : l’interdit de consommer la viande qu’on a chassé chez les Guayaki], les cadeaux :
le perteséchisme de Noël, la fonction phatique du langage).
● Les échanges sont nécessaires pour tisser des liens sociaux : analyse de l’effet pacificateur du commerce
(Montesquieu, Benjamin Constant), l’ouverture à l’autre dans le dialogue (l’expérience du dialogue selon
Merleau-Ponty, l’éthique du dialogue selon Habermas)
3/ Du point de vue de l’individu
● Du point de vue psychologique : le Moi ne peut pas se construire sans la relation à Autrui (identité et
reconnaissance sociale (cf. cours sur la notion de personne) ; identité narrative (idem) ; la construction
de l’identité personnelle dans la psychanalyse (cf. cours sur l’inconscient) ; le cas des enfants sauvages ;
Robinson Crusoé).
II - Limites des échanges
1/ Du point de vue économique
● L’exploitation dans les échanges : l’analyse de Marx. Les externalités négatives : la question écologique. Le
fétichisme de la marchandise. La démarche de labellisation des produits.
2/ Du point de vue social
● L’échange avec l’autre n’est pas nécessairement une ouverture à l’autre. Cf. le cours sur la culture à propos
de l’ethnocentrisme. Le tourisme est-il toujours une ouverture à autrui ?
3/ Du point de vue de l’individu
● Dans l’échange avec autrui, je peux ne plus être véritablement moi-même. La comédie humaine, les
apparences sociales, le désir de solitude. (Cf. Sartre sur la mauvaise foi, Rousseau sur l’amour propre et
l’amour de soi, Jung sur la persona).
SÉQUENCE 4 : PHILOSOPHIE DE LA CONNAISSANCE (ÉPISTÉMOLOGIE)
CHAPITRE VIII : LA RAISON ET LA CROYANCE, LA VÉRITÉ, L’EXPÉRIENCE
Question 11 – La recherche de la vérité a-t-elle un sens ?
I - À quoi bon chercher à connaître la vérité ?
1/ La vérité peut être douloureuse
● La vérité est-elle toujours préférable à l’illusion ? Vérité et bonheur (cf. cours sur le bonheur). Vérité et
relations sociales.
2/ Utilité de la connaissance
● Connaissance et maîtrise du monde. Cf. le cours sur la technique. Auguste Comte : “science d’où
prévoyance ; prévoyance d’où action”.
3/ Valeur de la connaissance
● Vérité et liberté : penser par soi-même (Kant : “Ose te servir de ton entendement”). Autonomie et autorité. Le
refus des préjugés, l’attitude critique face à la manipulation possible des opinions. L’allégorie de la caverne. .
● (Connaissance, recherche de la vérité et vertus intellectuelles).
II - La vérité existe-t-elle et est-elle connaissable ?
1/ Le relativisme : la vérité n’existe pas
● Le relativisme de la vérité. Formes particulières de relativisme : relativisme moral, relativisme culturel,
relativisme esthétique. (Remarques sur la tendance au relativisme des élèves).
● Première objection : la confusion entre vérité et opinion. (i) L’opinion est particulière, subjective, on peut très
bien utiliser l’expression “son opinion”. Mais, dire “c’est vrai”, c’est dire que ce que je pense correspond à la
réalité (la vérité est objective, sinon elle n’est pas la vérité) ; et c’est dire que ce que je pense est aussi ce
que l’autre doit penser (la vérité est universelle, sinon elle n’est pas la vérité). On ne peut donc pas dire “sa
vérité”. (ii) Peut-on alors dire : “à chacun son opinion” ? 2 significations : sens descriptif (“chacun a, de fait,
une opinion différente”) / sens normatif (“chacun a le droit d’avoir une opinion différente”). Au sens normatif, la
formule semble légitime, sauf s’il existe un critère de vérité qui permet de démontrer la fausseté de l’opinion
(la vérité comme norme : obligation de conformer son jugement aux faits ; examen du sujet : “peut-on avoir
raison contre les faits ?”) / s’il y a un critère moral qui permet de condamner l’opinion / si la formule est utilisée
pour couper court à toute discussion et pour ne pas répondre aux critiques qui sont faites de l’opinion en
question.
● Deuxième objection : le relativisme est autoréfutant.
2/ Le scepticisme : la vérité n’est pas connaissable
● Le scepticisme est-il autoréfutant ? L’attitude sceptique : doute ; suspension du jugement. Quelques formes
particulières de scepticisme (doute envers l’existence du monde extérieur, doute envers l’existence d’autres
esprits…).
● Argument principal : l’argument des désaccords. Limites de l’argument : (i) Tous les arguments ne sont
pas équivalents, un argument peut être plus ou moins convaincant. (ii) Qu’est-ce que la connaissance ?
L’absence totale de doute ? Cf. la distinction à première vue entre croire et savoir : croire implique qu’on
pense quelque chose, tout en estimant qu’il est possible que ce soit faux, tandis que savoir implique
qu’on pense quelque chose, tout en estimant qu’il n’est pas possible que ce soit faux. L’absence de doute
raisonnable ? Le cas du scepticisme déraisonnable (le négationnisme historique, les climato-sceptiques, le
cas des théories du complot).
Question 12 – Comment peut-on parvenir à la connaissance de la vérité ?
● Les différentes manières d’accéder à la vérité. Correspondance entre le type d’objet étudié et le type de
méthode utilisé. Deux cas étudiés ici : la démonstration pour les mathématiques ; l’expérience pour les
sciences de la nature.
I - La démonstration
1/ Définition de la démonstration
● Exemple de la démonstration que 4 est un nombre pair.
● La démonstration au sens strict : preuve certaine de la vérité d’une affirmation par le biais d’un raisonnement
purement logique qui part de prémisses reconnues comme vraies.
2/ Qu’est-ce qu’un raisonnement purement logique ?
● La déduction repose : sur un lien nécessaire entre les idées et sur un lien purement formel (qui fait abstraction
de leur contenu et de leur vérité).
● La démonstration = déduction + prémisses vraies. Qu’est-ce qui peut former le point de départ d’une
démonstration ? Limite de la démonstration : elle n'a d'application au sens strict qu'en mathématiques.
II - L’expérience
● Distinction des différents sens de la notion d’expérience.
1/ L’empirisme
● L’expérience comme origine de nos connaissances : il faudrait partir de l’observation du réel avant de
chercher à construire une théorie. Aristote vs. Platon dans L’École d’Athènes (fresque de Raphaël). (i) Il n’y
a pas d’idées innées : l’image de la tabula rasa (Locke). (ii) Il n’est pas possible d’avoir une connaissance a
priori du monde (contre le rationalisme dogmatique). L’analyse de la causalité
● L’expérience comme fondement de nos connaissances : une théorie ne peut être justifiée que si elle est
confirmée par l’expérience. La justification par l’expérience repose sur la nature même de la perception (cf. le
cours sur la perception à propos de la perception comme contact direct avec la réalité) et sur l’affirmation de
la légitimité de l’induction à partir de la perception.
2/ L’expérience est-elle vraiment le point de départ des théories scientifiques ?
● (L’expérience première n’est pas vraiment un point de départ de la théorie scientifique. Elle constitue plutôt un
obstacle épistémologique (Bachelard)).
● Dans le cas de l’expérience scientifique, le fonctionnement de la science montre que la théorie vient le plus
souvent avant l’expérience elle-même. Analyse du cas de la découverte de Neptune (décalage entre la
trajectoire théorique et la trajectoire observée d’Uranus ; hypothèse par Urbain Le Verrier de l’existence d’une
autre planète + calcul de sa trajectoire, de sa masse, de sa position ; observation par Galle de Neptune, grâce
aux calculs d’Urbain Le Verrier). Autres exemples (la classification des éléments par Mendeleïev‎, la déviation
de la lumière par la matière (Einstein), le postulat de l’existence des neutrinos par Pauli, les quarks et la
théorie des groupes).
● 3 raisons qui expliquent pourquoi la théorie précède l’expérience. (i) L’expérience vise à tester une théorie et
les observations qui intéressent le chercheur sont celles qui se rapportent à la théorie à tester (c’est la théorie
qui définit le protocole expérimental ; l’observation dans une expérimentation n’est pas passive, elle est une
recherche active d’informations, guidée par la théorie). C’est encore la théorie qui précise comment éviter les
interférences qui empêchent d’obtenir des conditions idéales d’observation.
● (ii) La fabrication et l’utilisation des instruments scientifiques (pour provoquer le phénomène à observer, et
pour l’observer) reposent sur des théories scientifiques
● (iii) L’interprétation des observations faites au cours de l’expérience repose sur des théories scientifiques.
3/ L’expérience peut-elle vraiment jouer le rôle d’une preuve ?
● L’expérience permet-elle vraiment de prouver la vérité d’une théorie ? La critique de l’induction : l’analyse
de Popper. L’expérience peut en revanche prouver la fausseté d’une théorie (le raisonnement est déductif
et prend la forme d’un modus tollens). La falsifiabilité comme critère de scientificité (la critique des pseudosciences : la critique par Popper de la psychanalyse et du marxisme. Le cas de l’astrologie. Les médecines
alternatives.).
● Mais l’expérience peut-elle jouer le rôle de critère de fausseté ? La critique de l’idée d’une expérience
cruciale. Si l’expérience n’est pas en accord avec la théorie, il y a trois possibilités : (i) la théorie est fausse,
(ii) l’expérience est faussée (cas des neutrinos), (iii) on peut sauver la théorie en ajoutant, supprimant ou
modifiant des hypothèses secondaires (cas de la découverte de Neptune). L’image du radeau vs. l’image de
la pyramide.
Question 13 – La philosophie peut-elle parler de la religion ?
I - Comment peut-on expliquer le fait religieux ?
1/ Qu’est-ce qu’une religion ?
● Aperçu de la diversité des religions..
● Les trois caractéristiques d’une religion : (1) un univers de croyances et de pratiques, (2) une communauté
d’individus, (3) une relation à quelque chose de sacré.
● L’étymologie du mot “religion” : relier => lien horizontal entre individus (caractéristique 2) et lien vertical avec
le sacré (caractéristique 3) ; relire => vérifier la conformité des croyances et des pratiques (caractéristique 1)
● Qu’est-ce qui fait la force du phénomène religieux ?
2/ Le fait religieux envisagé d’un point de vue anthropologique
● Religion et psychologie : le modèle de Freud. La religion répond à trois grands besoins de l’humanité : un
besoin affectif de protection, un besoin intellectuel de compréhension du monde et de soi-même, un besoin
moral de justice. La religion comme illusion et comme névrose.
● Religion et sociologie : le modèle de Durkheim. La religion comme projection de la société. La force de la
religion = capacité à faire lien social, à faire communauté. Les rituels de sacrifice selon René Girard, comme
moyen d’expulser la violence contenue dans le corps social..
● Religion et économie : le modèle de Marx. La religion comme “opium du peuple” : la religion naît dans un
contexte de misère matérielle, d’incapacité à maîtriser les conditions d’existence ; la religion prétend délivrer
l’individu de la sensation de souffrance (elle anesthésie, donne de l’espoir...), mais elle ne délivre pas des
causes de la souffrance (elle maintient dans l’inaction, la léthargie ; empêche de se révolter contre l’état-defait).
3/ Religion statique vs. religion dynamique
● Limites de ce type d’analyse : la religion est ici considérée seulement du point de vue de la religion statique
(Bergson). Les modèles précédents se rapportent à la religion statique, c’est-à-dire la religion figée dans une
posture de réaction : face à l’angoisse des individus (Freud), contre la dissolution du lien social (Durkheim),
face à une situation de misère économique (Marx).
● La force du phénomène religieux peut se comprendre aussi du point de vue de la religion dynamique
(Bergson), c’est-à-dire du point de vue de la religion comme élan spirituel (analyse de l’expérience mystique ;
analyse de la foi comme croyance-en, plutôt que comme croyance-que).
II - Est-ce rationnel de croire que Dieu existe ?
1/ Examen des arguments en faveur de l’existence de Dieu
a) Les témoignages
● Le livre sacré
● Les miracles. La critique de Hume : plus une affirmation sort de l’ordinaire, plus nous avons de raison d’en
douter ; donc, face à un témoignage de miracle, nous avons plus de raison de douter du témoignage plutôt
que de l’accepter.
● L’expérience mystique. La critique de Freud : une preuve doit être communicable ; l’expérience mystique ≠
l’expérience scientifique (répétable, définie par un protocole expérimental qui dit comment faire l’expérience) ;
le vécu d’une personne ne peut constituer une raison de croire.
b) La théologie naturelle
● L’argument cosmologique. Problèmes : si Dieu existe, quelle est la cause de Dieu ? Y a-t-il un sens à dire
que Dieu est causa sui ? Peut-on appliquer les notions de cause et de raison au monde en tant que tel ?
L’existence du monde comme mystère). Religion et raison : la religion comme réponse à un besoin de la
raison.
● L’argument téléologique. L’exemple de Paley : la montre trouvée sur une île déserte. Limites : (i) on peut
remettre en question l’idée d’un ordre du monde ; (ii) on peut remettre en question l’idée que la complexité ne
peut être expliquée que par une cause intelligente (cf. la théorie darwinienne de l’évolution).
2/ Examen des arguments à l’encontre de l’existence de Dieu
● L’argument du mal. La version courte de l’argument du mal. La théodicée. La version développée de
l’argument du mal. Première réponse possible : le mal serait nécessaire pour que le bien existe. Problème
principal : tous les degrés de mal sont-ils justifiés par ce type d’argument ? Autre réponse à l’argument
du mal : l’existence du mal serait une conséquence de la liberté humaine. Problèmes : (i) le mal n’est pas
seulement causé par les hommes ; (ii) intervenir pour empêcher une forme de mal n’est pas nécessairement
une atteinte à la liberté, et n’est pas nécessairement une restriction illégitime de la liberté. Examen d’une
autre réponse à l’argument du mal : “les voies de Dieu sont impénétrables”.
● Les arguments normatifs à l’encontre de la croyance en un Dieu : l’argument naturaliste, l’argument de la
meilleure explication. Examen du principe de Clifford selon lequel on n’a pas le droit de croire en quelque
chose sans preuve suffisante.
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