LA RADIOFREQUENCE RENALE AU SCANNER E.Fournier, M.Laurin. CHU Amiens, Hôpital Sud • Connaître les indications et contre-indications de la radiofréquence rénale. • Connaître le bilan pré-requis avant une radiofréquence de tumeur rénale. • Connaître les étapes techniques de réalisation de la radiofréquence et le rôle du manipulateur. • Connaître les modalités de suivi après radiofréquence. • • • • • • • • • • INTRODUCTION RAPPORTS ANATOMIQUES PRINCIPE DE LA RADIOFREQUENCE INDICATIONS ET CONTRE INDICATIONS BILAN PRE RADIOFREQUENCE DEROULEMENT DE LA RADIOFREQUENCE SUIVI CONCLUSION QCM REFERENCES • La radiofréquence rénale est une technique récente et peu invasive validée dans le traitement du cancer du rein, en particulier chez des patients fragiles ou à risque de tumeurs multiples. • Le bilan pré radiofréquence inclut la confirmation histologique de la tumeur, la recherche d’éventuelles contre-indications et permet d’optimiser la prise en charge anesthésique. • Le choix de traitement par radiofréquence par rapport à la chirurgie conventionnelle est décidé en réunion de concertation pluri disciplinaire. • Un courant alternatif progressif est appliqué entre une électrode positionnée au sein de la tumeur et des plaques de conduction périphériques afin d'augmenter la température intra-tumorale jusqu’à obtenir une nécrose de la lésion. • En fin de procédure, un scanner de contrôle recherche d’éventuelles complications. • Des contrôles d’imagerie (scanner ou IRM) sont effectués à 1-3-6 mois et annuellement afin de s’assurer de l'absence de récidive. • La radiofréquence rénale est une technique qui permet de traiter de façon peu invasive certaines tumeurs rénales. • Le cancer du rein est la 3ème tumeur urologique de l’adulte. • Le nombre croissant d’examens d’imagerie permet de détecter de façon fortuite des petites lésions asymptomatiques, accessibles à un traitement conservateur. Rapports anatomiques • Les reins sont 2 organes rétro-péritonéaux de part et d’autre de la colonne vertébrale : • Rapports antérieurs, espace pararénal antérieur (1) : • Bloc duodéno-pancréatique. • Colons ascendant et descendant. • Voies excrétrices, surrénale dans l’espace périrénal (2). • Rapports postérieurs, espace pararénal postérieur (3) : • Muscles. • Cul-de-sacs pleuraux. • 11ème et 12ème côtes. Vue postérieure des reins, avec leurs rapports anatomiques. Schéma issu de l’atlas d’anatomie humaine, Frank H. Netter. Principe de la Radiofréquence • La radiofréquence consiste en une application d’un courant alternatif (200 Watts maxi) au moyen d’une électrode insérée dans la lésion tumorale. • L’agitation ionique entraîne un échauffement entre 50°C et 100°C, température létale pour les cellules tumorales. Elle aboutit à une nécrose de coagulation. • Les cellules détruites augmentent leur résistance à la conduction du courant électrique : cette résistance est mesurée par l’impédance (Ω). • La nécrose doit concerner tout le volume tumoral et au-delà, afin de créer une marge de sécurité. Indications et contre-indications de la Radiofréquence rénale. • INDICATIONS • La réussite du traitement d’une tumeur rénale par radiofréquence dépend de ses caractéristiques : • Taille : tumeur < 4 cm (RF moins efficace au-delà). • Position : pôle inférieur, exophytique, à distance des structures vulnérables (digestives, hile rénal, voies excrétrices urinaires). • Rein unique ou insuffisance rénale sévère. • Tumeurs récidivantes, héréditaires (mal. de Von Hippel Lindau). • Risque anesthésique élevé. • Espérance de vie inférieure à 10 ans. • CONTRE-INDICATIONS • Tumeurs au contact des voies excrétrices et du tube digestif. • Tumeurs centrales, antérieures, ou de plus de 4 cm. • Sepsis. • Troubles de la coagulation. • Retard mental. • Précautions en cas de prothèse de hanche et de pace maker / défibrillateur (avis du Cardiologue). Bilan pré-RF • Avant toute ablation par radiofréquence, il est nécessaire de réaliser : - Bilan biologique complet. - Uroscanner. - Ponction biopsie sous scanner/échographie. - Réunion de concertation pluridisciplinaire. - Consultation d’information. - Consultation pré anesthésique. • Le bilan biologique comporte : • Une numération formule sanguine. • Un bilan de coagulation (TP, TCA, Plaquettes…). • Une évaluation de la fonction rénale. • Bilan pré anesthésique standard. • UROSCANNER • Examen de référence. Protocole réalisé au CHU d’Amiens : • PREPARATION : • Pose d’un accès veineux périphérique de 18 G. • Attention : prendre la tension artérielle du patient avant injection de furosémide (à éviter quand la tension est basse, voir le radiologue). • PRODUIT DE CONTRASTE : • De concentration de 350 mgI/ml : environ 150 ml (selon le poids). • PROTOCOLE URO-SCAN 3 PHASES : • Vider la vessie avant l’examen. • Faire boire 2-3 verres d’eau. • Topogrammes de face et de profil. • UROSCANNER • Puis réaliser les différentes phases suivantes : • Hélice abdomino-pelvienne sans injection (vérifier l’absence de contreindication à l’injection). • Injection de 20 mg de furosémide en l’absence d’obstruction. • Injection de 100ml de produit de contraste à 4 ml/s. • Hélice abdomino-pelvienne au temps cortical 40 s après le début de l’injection. • Pause de 7 min. • Injection de 50ml de produit de contraste à 2ml/s. • Hélice abdomino-pelvienne à 90 s après la deuxième injection (obtention d’un temps mixte, tubulaire et excréteur). • Ponction biopsie scano ou écho-guidée. • Sous anesthésie locale. • A l’aide d’une aiguille co-axiale de 18 G. • Réalisée 1 mois avant la radiofréquence pour éviter les inconvénients liés à une éventuelle complication hémorragique. • Elle permet de confirmer l’accessibilité de la lésion par voie percutanée. • Réunion de concertation pluridisciplinaire. • Urologues, oncologues et radiologues. • Confirme l’intérêt de la radiofréquence par rapport à la chirurgie. • Consultation d’information par le radiologue. • Présente au patient l’intérêt de ce traitement. • Définit les complications possibles. • Recueil le consentement éclairé du patient. • Consultation pré-anesthésique. • Obligatoire pour toute intervention sous anesthésie générale. Déroulement de la RF • La veille, hospitalisation du patient dans un service de soin : • Vérification du bilan de coagulation. • Douche antiseptique. • Préparation en vue de l’anesthésie : • Jeun. • Mise en place d’un accès veineux périphérique. • Le jour J : • Douche antiseptique. • Accueil du patient au scanner. • Au scanner, prise en charge du patient par l’équipe anesthésique : • Anesthésie générale avant l’installation sur la table du scanner. • Mise en place de billots selon la position (décubitus ventral ou latéral). • Prise en charge du patient par le manipulateur radio : • Positionnement sur la table : En fonction de la localisation de la lésion, le manipulateur optimise avec le radiologue la position du patient : • Décubitus ventral ou latéral. • Bras le long du corps ou au-dessus de la tête. • Tête ou pieds en premier selon l’organisation de la salle et le côté concerné. • Mise en place de plaques de conduction sur les cuisses (2 plaques par cuisse, face interne et face externe, à distance l’une de l’autre) . • Repérage : • Topogrammes de face et de profil. • Hélice abdominale avec éventuelle injection de produit de contraste afin de repérer la tumeur et les voies excrétrices, pour optimiser la voie d’abord, +/- guidage échographique. Scanner abdominal avec injection de PDC : Vue axiale à gauche, vue coronale à droite • Préparation du site opératoire par le manipulateur : • Une détersion de la zone de ponction est réalisée en 4 temps. • Un champ stérile troué recouvre complètement le patient. • Préparation du site opératoire par le manipulateur : • Préparation du plateau stérile : • • • • • Compresses stériles. Bétadine® dermique. Blouse opérateur stérile, gants stériles. Scalpel. Aiguille coaxiale de type Leveen™ CoAccess™ avec électrodes rétractables. • Mise en place de l’électrode par le radiologue après avoir effectué une asepsie. • Hélice de contrôle centrée sur le rein pour vérifier le positionnement de l’aiguille. Scanner de repérage sans injection, coupe axiale : Vérification du bon positionnement de l’aiguille coaxiale • Déploiement de l’électrode. • Hélice de contrôle. Scanner de repérage sans injection : Vue dans les 3 plans de l’électrode déployée. • Branchement du générateur de radiofréquence. • Induction du courant alternatif. • Augmentation progressive de la puissance du courant appliqué aux intervalles de temps indiqués selon l’algorithme correspondant au diamètre de l’aiguille. • Quand la température efficace pour la nécrose de coagulation est atteinte, il existe une augmentation rapide de l’impédance au sein de la tumeur : c’est le Roll-Off. La plupart des algorithmes nécessitent l’obtention de 2 Roll-Off successifs. • Rôle du manipulateur : surveillance de l’impédance, chronomètre, gestion du générateur de radiofréquence en association avec le radiologue. • En fin de traitement, rétraction de l’aiguille au sein du système coaxial par le Radiologue, et retrait du matériel. • Compression au point de ponction. • Asepsie et mise en place d’un pansement. • Hélice de contrôle abdomino-pelvienne pour vérifier l’absence d’éventuelles complications immédiates. Vue axiale et coronale post radio-fréquence. Présence habituelle de bulles d’air (flèches) • Retrait des champs stériles. • Après avoir remis le patient dans son lit, l’équipe d’anesthésie prend le relais pour le réveil. • Le patient est transféré en salle de soins post intervention, puis dans un service de soins. • Une visite de contrôle est effectuée le lendemain par le radiologue et l’urologue référents. Complications de la RF rénale • Moins fréquentes qu’en chirurgie, les complications peuvent être : • Une atteinte sensitivomotrice de la paroi abdominale antérieure qui est transitoire mais qui peut durer de quelques mois à 1 an. • Un hématome péri-rénal, une hémorragie. • Une sténose/nécrose de la voie excrétrice entrainant soit une dilatation des voies excrétrices sur obstacle, soit un urinome (fuite d’urines en dehors des voies excrétrices). • Des brûlures cutanées. • Une lésion d’un organe avoisinant : une occlusion intestinale, perforation digestive, pneumothorax. Scanner de contrôle à J1, sans injection de PDC en coupes axiales : A gauche, hématome sous capsulaire spontanément hyperdense, en forme de croissant. A droite, hématome rétro-péritonéal péri-rénal. Scanner injecté au temps tardif : Urinome, nécrose de la jonction pyélo-urétérale. A gauche, fuite péri urétérale du produit de contraste en coupe axiale. A droite, reconstruction 3D MIP coronale de la fuite de PDC. Suivi après RF • La surveillance radiologique post-radiofréquence s’effectue : • À 1 mois, où l’on réalisera un dosage de la créatinine, ainsi qu’un uroscanner pour rechercher : • des arguments en faveur d’un traitement incomplet de la tumeur. Dans ce cas, la réalisation d’une nouvelle radiofréquence sera rediscutée. Scanner de contrôle à 1 mois après injection, temps tubulaire : Absence de prise de contraste résiduelle de la tumeur. Petit hématome sous capsulaire en avant de la tumeur (flèche). • À 3, 6 et 12 mois puis annuellement pendant 5 ans, un dosage de la créatinine et un uroscanner seront réalisés pour vérifier : • Le site tumoral. • Une absence de récidive ou de dissémination. • L’absence d’apparition de nouvelles localisations tumorales. • Il faut savoir que lorsque la créatinine ne permet pas l’injection au scanner, une IRM rénale avec injection de gadolinium sera réalisée à la place en l’absence de contre-indication. • La radiofréquence est une alternative au traitement chirurgical des tumeurs du rein. • Le bilan d’imagerie est essentiel pour le succès de la procédure et l’évaluation de la réponse thérapeutique. • Le rôle du manipulateur est essentiel afin d’optimiser le bon déroulement de la procédure. Remerciements Nous tenons à remercier l’ensemble de l’équipe médicale et paramédicale du service de radiologie de l’hôpital Sud d’Amiens, et plus particulièrement : Docteur C. Renard, Responsable du service, pour sa disponibilité et son soutien. Docteur A. Texier pour sa patience, sa relecture et son iconographie. Docteur M-A. Auquier pour son expérience et la documentation fournie. Un grand merci aussi à Julien, notre mannequin devenu adepte de l’épilation par plaque de conduction. QCM • Quelles sont, parmi ces propositions, des indications validées à la radiofréquence rénale? • Polykystose rénale. • Tumeur > 10 cm. • Maladie de Von Hippel Lindau. • Patient insuffisant rénal. • Qui participe à la décision de réaliser une RF rénale? • Le radiologue. • L’urologue. • L’anesthésiste. • Le patient. • Quelles techniques d’imagerie sont utilisées lors de la radiofréquence rénale? • IRM. • Scanner. • Radiologie standard. • Echographie. QCM réponses • Quelles sont, parmi ces propositions, des indications validées à la radiofréquence rénale? • Polykystose rénale. • Tumeur > 10 cm. • Maladie de Von Hippel Lindau. • Patient insuffisant rénal. • Qui participe à la décision de réaliser une RF rénale? • Le radiologue. • L’urologue. • L’anesthésiste. • Le patient. • Quelles techniques d’imagerie sont utilisées lors de la radiofréquence rénale? • IRM. • Scanner. • Radiologie standard. • Echographie. 1. SIEMER S, UDER M, HUMKE U et al. Value of ultrasound in early diagnosis of renal cell carcinoma. Urologe A, 2000 ; 39 : 149-53. 2. GERVAIS DA, MCGOVERN FJ, ARELLANO RS et al. Radiofrequency ablation of renal cell carcinoma : part 1, Indications, results, and role in patient management over a 6-year period and ablation of 100 tumors. Am J Roentgenol, 2005 ; 185 : 64-71. 3. MAHNKEN AH, GUNTHER RW, TACKE J. Radiofrequency ablation of renal tumors. Eur Radiol, 2004 ; 14 : 1449-55. 4. MAYO-SMITH WW, DUPUY DE, PARIKH PM et al. Imaging-guided percutaneous radiofrequency ablation of solid renal masses : techniques and outcomes of 38 treatment sessions in 32 consecutive patients. Am J Roentgenol, 2003 ; 180 : 1503-8. 5. GERVAIS DA, ARELLANO RS, MCGOVERN FJ et al. Radiofrequency ablation of renal cell carcinoma : part 2, Lessons learned with ablation of 100 tumors. Am J Roentgenol, 2005 ; 185 : 72-80. 6. PARK BK, KIM SH, BYUN JY et al. CT-guided Instillation of 5 p. 100 dextrose in Water into the anterior pararenal space before renal radiofrequency ablation in a porcine model : positive and negative effects. J Vasc Interv Radiol, 2007 ; 18 : 1561-9. 7. MATIN SF, AHRAR K, CADEDDU JA et al. Residual and recurrent disease following renal energy ablative therapy : a multi-institutional study. J Urol, 2006 ; 176 : 1973-7. 8. BOSS A, CLASEN S, KUCZYK M et al. Thermal damage of the genitofemoral nerve due to radiofrequency ablation of renal cell carcinoma : a potentially avoidable complication. 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