Comment gérer un refus de soins ou d`hospitalisation

publicité
Comment gérer un refus de soins ou d'hospitalisation ?
SNSMCV
-- Syndicat - Vie professionnelle - Assurances RCP - En 2006 --
En 2006
Comment gérer un
refus de soins ou
d'hospitalisation ?
Par Cédric Gaultier (Mai
2006)
Equipe éditoriale
Publié le mardi 20 juin 2006
Modifié le dimanche 9 juillet 2006
Fichier PDF créé le lundi 10 juillet 2006
SNSMCV
Page 1/4
Comment gérer un refus de soins ou d'hospitalisation ?
Régulièrement, les médecins doivent faire face à une situation paradoxale de patients qui
refusent des soins pourtant destinés à améliorer leur santé. Avant de conclure à un refus de
soins, le médecin se doit de vérifier qu'il n'existe pas un problème de compréhension de la
part du patient. Le pronostic vital étant potentiellement engagé, une lourde responsabilité
repose sur les praticiens pour les inciter à convaincre à tout prix leurs patients.
Si malgré tous ces efforts, le patient persiste dans le refus, il est alors de l'intérêt du médecin de
prendre un certain nombre de précautions pour se protéger juridiquement contre d'éventuelles
réclamations en cas d'accidents.
1) S'agit-il réellement d'un refus de soins ?
Avant de parler de refus de soins, le médecin doit se poser un certain nombre de questions.
a) Faculté de compréhension du patient ?
Il n'est, en effet, pas question d'invoquer un refus de soins face à un patient dément, ou présentant
des troubles de la conscience (bas débit cérébral).
L'absence de maîtrise de la langue française est une autre source potentielle de refus. Le médecin
devra prendre toutes les dispositions pour se faire comprendre, idéalement en faisant appel à la
famille proche, ou à un interprète.
b) Compréhension spécifique de la situation médicale ?
Il y a bien longtemps, il n'était même pas envisageable pour un patient de refuser ce que le médecin
envisageait pour lui. Maintenant, relégué au statut de prestataire de services, le médecin doit
désormais batailler avec son patient, qui n'hésite plus à lui opposer des informations glanées sur
Internet.
Plus que jamais « le médecin doit à la personne qu'il soigne une information loyale, claire et
appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il lui propose. Il tient compte de la
personnalité dans ses explications et veille à leur compréhension », comme le stipule l'article 35 du
code de déontologie médicale.
Il est donc impératif que le médecin ne conclue pas trop hâtivement à un refus de soins, devant la
moindre réticence d'un patient. Toujours enclin à défendre « la veuve et l'orphelin », les tribunaux
considèrent toujours que le patient n'a pas la connaissance suffisante pour prendre une décision,
raison pour laquelle ils attendent du médecin qu'il ait pris le temps de se faire comprendre, d'autant
plus que le risque vital est élevé.
c) Refus de soins ou refus de l'équipe soignante ? En effet, il n'est pas rare qu'un patient refuse les
soins, uniquement parce qu'il n'est pas en confiance avec l'équipe médicale. Il convient donc de
savoir l'interroger sur le sujet et lui proposer un transfert avec les conditions de sécurité requises en
assurant la transmission des informations, plutôt que d'accepter une rupture de la continuité des
soins, qui est toujours risquée.
SNSMCV
Page 2/4
Comment gérer un refus de soins ou d'hospitalisation ?
2) Conduite à tenir ?
a) Appel du Joker !
Quand le médecin est allé au bout de son imagination et de sa rhétorique, il lui reste alors la
possibilité de faire intervenir un tiers (médecin, infirmier...) pour tenter une ultime démarche de
persuasion. L'appel du médecin traitant, qui connaît souvent bien la personnalité de son patient, peut
être pertinent.
Enfin, l'intervention de membres de la famille ou de proches est souvent bénéfique. Cependant, pour
des raisons évidentes de secret médical, ces proches ne peuvent pas être sollicités sans l'accord du
patient !
b) Refus de soins, en dehors de l'urgence
Si le droit élémentaire du patient est de pouvoir choisir son médecin, « le médecin a le droit de
refuser ses soins » (art. 47 du code de déontologie), en dehors de l'urgence. En effet, pourquoi
risquer de continuer à suivre un patient qui n'exécute pas les prescriptions faites et s'expose donc à
court terme à des complications médicales, qui pourraient éventuellement être imputées au
médecin ?
Le praticien qui décide de rompre le contrat de soins doit en avertir son patient et transmettre le
dossier au nouveau médecin désigné.
c) Refus de soins en contexte d'urgence Dans ce cas, les obligations du médecin sont
particulièrement pesantes.
De façon ancestrale, « le médecin qui se trouve en présence d'un malade ou d'un blessé en péril, ...
doit lui porter assistance ou s'assurer qu'il reçoit les soins nécessaires » (art. 9 du code de
déontologie). Il n'est alors plus question d'envisager de refuser de prendre en charge le patient.
Pouvant être perçue comme contradictoire avec le précepte précédent, la loi KOUCHNER (4 mars
2002) demande désormais au médecin de « respecter la volonté de la personne après l'avoir
informée des conséquences de ses choix. Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être
pratiqué sans le consentement de la personne... ». Une obligation quasiment de résultat est exigée
des médecins dans ce dernier article : « si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre le
traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d'accepter
les soins indispensables ». L'exemple le plus concret est celui de la transfusion chez les témoins de
Jéhovah. En effet, tant qu'ils sont conscients, on ne peut pas les transfuser contre leur gré. C'est
uniquement en cas de danger de mort imminent et hors d'état de s'exprimer, que la jurisprudence a
tendance à accepter le principe de transfusion, considérée comme le dernier recours permettant la
survie du patient.
Dans le cas rare où un représentant légal d'un mineur ou d'un majeur sous tutelle s'opposerait aux
soins, alors qu'il s'agit de soins urgents, le médecin devra avertir les autorités judiciaires (procureur)
ou administratives.
d) Matérialiser les preuves de l'information des conséquences du refus de soins
Face à un patient résolument réfractaire aux soins, malgré l'insistance du médecin, ce dernier doit
tout mettre en oeuvre pour prouver qu'il a informé le patient des risques encourus en l'absence de
SNSMCV
Page 3/4
Comment gérer un refus de soins ou d'hospitalisation ?
soins.
La première étape consiste à mettre une mention très explicite dans son observation relatant le
contexte.
Il demandera au patient de faire une attestation écrite de refus de soins ou de sortie contre avis
médical, en lui faisant préciser qu'il a reçu toutes les informations sur sa maladie et sur les risques
spécifiques de ne pas suivre les traitements proposés. Il faut éviter les documents parlant de
décharge, ou n'expliquant pas les risques encourus. Si le patient se refuse à remplir cette attestation,
il demandera le témoignage d'un confrère ou d'une infirmière, consigné dans son dossier.
Si le patient ne lit pas le français, rien ne sert de lui faire signer le document, à moins qu'une
personne de son entourage lui ait expliqué le contexte et, idéalement, accepte de contresigner
également ce document.
Comme tous les documents d'information, il faut scrupuleusement veiller à ce qu'il soit intégré (et
solidement agrafé !) au dossier médical. En cas de litige, il n'est pas rare que le « précieux »
document soit égaré !
Même si on a l'intime conviction que le patient ne va pas suivre les consignes d'hospitalisation, le
praticien doit rédiger le courrier d'admission hospitalière en y faisant figurer des directives claires. En
effet, après réflexions, le patient peut toujours changer d'avis, et ce document constitue une preuve
supplémentaire de l'orientation stratégique que vous aviez choisie.
Parallèlement, un courrier, adressé immédiatement à son (ou ses) médecin (s), expliquant la
situation, ne sera pas superflu.
Se pose l'éternel débat de savoir s'il faut délivrer une ordonnance à un patient qui refuse une
hospitalisation ou sort contre avis médical. Malgré l'exaspération suscitée par la situation, il est utile
de s'interroger sur les conséquences de l'absence totale de traitements. En prenant l'exemple d'un
patient en angor instable refusant l'hospitalisation, la délivrance d'une ordonnance (aspirine,
bêtabloquant, dérivé nitré, statines...) aura l'avantage de réduire le risque de complications liées à la
maladie. Pour bien montrer que le praticien n'a pas choisi cette stratégie sans hospitalisation, il sera
idéalement noté sur l'ordonnance, une formule du type : « Hospitalisation en urgence refusée par le
patient, malgré l'information des risques encourus. Ordonnance délivrée en attendant qu'il ne se
décide à se rende à l'hôpital ».
Devant une ischémie étendue à la scintigraphie, un cardiologue avait proposé une hospitalisation
immédiate, refusée par le patient, préférant, pour des raisons professionnelles, la différer de
quelques jours. Malheureusement, le patient est décédé quelques jours plus tard d'un infarctus
massif. La famille a soutenu qu'il n'avait pas été proposé une hospitalisation immédiate et qu'il n'avait
pas été informé du risque vital à court terme. N'ayant aucune trace écrite dans son dossier, le
cardiologue s'est vu condamné pour ne pas avoir prodigué des soins consciencieux et pour défaut
de conseil !
Règles en cas de refus de soins Obligation d'information sur les risques encourus. Obligation de moyen : demander l'aide de confrères ou proches. Obligation de « résultat » : convaincre ! Traçabilité de la proposition de soins et de son refus.
SNSMCV
Page 4/4
Téléchargement