Analyse du projet de loi Santé Le projet de loi de santé est un texte important qui nous concerne tous citoyens, médecins, universitaires. Certains points sont très contestés dans les médias. Le collège n’a pas vocation à être un syndicat. Nous avons jugé important de décrypter cette loi en nous efforçant d’effacer toute expression de parti-pris. I - Points qui font débat : Elargissement des domaines d’intervention et les compétences des ARS. Les ARS ont un droit de regard sur l'installation comme sur la cessation de l’activité des médecins. L’ARS contrôlera les contrats types d’installation et les modalités d’exercice du service public hospitalier. Ce pouvoir accru témoigne d’une volonté de régionalisation de l’offre de soins. Généralisation du tiers payant. Expression d’une politique de santé publique pour les uns, il est pour d’autres le prélude à des tracasseries administratives comme le retard dans les remboursements, à la perte de contractualisation directe entre le médecin et son patient et fait craindre la déresponsabilisation des malades face à la consommation de soins. Restructuration de l’offre hospitalière de formation en incluant la partie formation initiale, et implication dominante de l’université dans le DPC (Développement Professionnel Continu). Transfert de compétences vers les infirmiers (vaccinations, conseils), et les sages-femmes (avortements chimiques). Réglementation du recours à l’intérim médical, notamment pour le niveau des rémunérations. II - Points qui font la différence avec le passé 1- Des pouvoirs élargis aux ARS pour décliner la politique de santé, qui feront appel à la Conférence Nationale de Santé et au Haut Conseil de la santé publique pour faire appliquer cette politique. 2- Actions de prévention adaptées aux besoins modernes de santé publique - promotion des politiques de la santé en milieu scolaire, - élargissement de l’accès à la contraception d’urgence. Suppression de la notion de détresse vitale pour délivrer la contraception d’urgence - lutte contre l’alcoolisation (en particulier de l’alcoolisation aiguë massive) chez les jeunes en durcissant la loi pénale. - mise en place de tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) pour le dépistage des maladies transmissibles. - rénovation du cadre de la politique de réduction des risques en matière d’addiction avec extension en milieu carcéral et expérimentation des salles pour toxicomanes pour une durée de 6 ans. 3- Création d’un service territorial de santé au public qui donne une nouvelle dimension aux ARS, lesquelles ont un plus grand domaine d’intervention. L’ARS participe, en lien avec les universités et les collectivités territoriales concernées, à l’analyse des besoins et de l’offre en formation pour les professionnels des secteurs sanitaire et médico-social. Association avec les universités, les établissements de santé, les établissements publics à caractère scientifique et technologique ou autres organismes de recherche pour participer à l’organisation territoriale de la recherche en santé. Les ARS contribueront à évaluer et à promouvoir les formations des professionnels de santé. Elles autorisent la création et les activités des établissements de santé et des installations. Elles renforceront l'organisation territoriale de la santé mentale et de la psychiatrie.. 4- Création d'un numéro d'appel national harmonisé pour la permanence des soins, en coexistence du 15 pour l’aide médicale d’urgence. 5- Extension du parcours de soins coordonnés aux patients de moins de 16 ans : Choix du médecin traitant pour les ayants droit âgés de moins de 16 ans. 6- Centres de santé prévoyant la transposition des nouveaux modes de rémunération conventionnels des libéraux : Prévoit le recours au règlement arbitral en cas de rupture des négociations préalables à l’élaboration de l’accord national, ou d’opposition au nouvel accord national, ou à l’issue d’un délai de six mois à compter du début des négociations 7- Expérimentation pour cinq ans de projets pilotes d'accompagnement des patients souffrants de maladies chroniques. Objectifs : accroître l’autonomie des personnes souffrant d'une maladie chronique ou particulièrement exposées au risque de maladie chronique, de disposer des informations, des conseils, des soutiens, des apprentissages, notamment de l'éducation thérapeutique, et de la formation nécessaires pour prendre les décisions médicales et médico-sociales qui leur incombent et mettre en œuvre les traitements et actions de prévention prescrits ou préconisés, de participer à l’élaboration du parcours de santé, de bénéficier d’une coordination des services et professionnels intervenant dans ce parcours de santé, de faire valoir leurs droits et de développer leurs projets de vie. Chaque projet pilote fait l’objet d’une convention entre l’ARS et le ou les acteurs de santé volontaires pour accomplir l’action ou les actions du projet. Les ARS participent à l’expérimentation, assurent un suivi et une évaluation annuelle des projets pilotes. 8- Renforcement de la coordination du parcours de soin : Remise obligatoire au patient de « lettre de liaison » lors de l'hospitalisation ou la sortie d'hospitalisation afin de faciliter la coordination avec sa prise en charge en ville. Refondation du dossier médical personnel (DMP) qui redevient « partagé » et est confié à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts). 9- Restauration d'un « service public hospitalier » et suppression des « missions de service public » Objectifs : - L’accueil de toute personne qui recourt à leurs services, dans des conditions adaptées aux personnes en situation de handicap ou de précarité sociale - La permanence de l’accueil et de la prise en charge, notamment dans le cadre de la permanence des soins organisée par l’agence régionale de santé ou, à défaut, l’orientation vers un autre établissement de santé ou une autre institution Un délai de prise en charge raisonnable, en rapport avec l’état de santé du patient L’égal accès à des soins de qualité L’absence de facturation au patient de dépassements des tarifs Ces établissements ont pour obligation de garantir la participation des représentants des usagers, de transmettre annuellement à l’ARS compétente les données de leur compte d’exploitation., Ils sont tenus d’avertir l’ARS de tout projet de cessation ou de modification de leur activité de soins susceptible de restreindre l’accessibilité géographique de cette activité et recherchent avec l’agence les possibilités d’adaptation ainsi que les voies de coopération avec les autres établissements du territoire, en vue notamment d’assurer la viabilité économique de l’activité. En cas de carence d’une offre de soins accessible et continue, ils peuvent être désignés par le directeur de l’agence régionale de santé pour développer des actions en vue de pallier les insuffisances d’offre, ou les carences, notamment dans l’accès aux soins pour les personnes en situation de handicap. 10- Création des groupements hospitaliers de territoire (GHT) à adhésion obligatoire dont chacun élabore un projet médical unique pour l’ensemble de ses membres. L’établissement support désigné par la convention constitutive assure obligatoirement, pour le compte de l’ensemble des établissements membres. La formation initiale et continue des professionnels de santé. Les établissements publics de santé non membres d’un groupement hospitalier de territoire et qui ne bénéficient pas de la dérogation mentionnée au premier alinéa ne peuvent se voir attribuer de dotations de financement. 11- Création de l’infirmier clinicien : L’exercice en pratique avancée est défini par des missions de santé qui peuvent comporter la formulation d'un diagnostic, la réalisation d’une analyse clinique, l’établissement de prescription, ou l’accomplissement d’activité d’orientation ou de prévention. Ces missions sont réalisées dans le cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire du patient. La nature des missions en pratiques avancées et les modalités et conditions de mise en œuvre sont déterminées par décret en Conseil d’Etat 12- Elargissement des missions des sages-femmes : Les Sages-femmes peuvent désormais pratiquer des IVG réalisée par voie médicamenteuse et les vaccins. 13- Autorisation des pharmaciens à délivrer et administrer eux-mêmes les vaccins 14- Autorisation des médecins du travail et des infirmiers à prescrire des substituts nicotiniques et autorisation des sages-femmes à en prescrire à l'entourage de la femme enceinte 15- Encadrement du recours à l'intérim médical à l'hôpital : Le montant journalier des dépenses engagées pour un praticien au titre d’une mission est plafonné. Les modalités de fixation de ce plafond sont déterminées par voie réglementaire. Les praticiens concernés peuvent être placés, sur la base du volontariat, auprès du Centre national de gestion, en position de remplaçants dans une région pour assurer des missions de remplacements temporaires au sein des établissements publics de santé 16- Territorialisation de la politique de santé - Projet régional de santé. Volonté de favoriser une meilleure répartition géographique de l’accès à la santé (professionnels de santé, maisons de santé, pôles de santé et centres de santé). Le directeur général de l’agence régionale de santé arrête les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins et les zones dans lesquelles le niveau de l'offre de soins est particulièrement élevé 17- Plan national de gestion du risque conclut entre l'autorité compétente de l'Etat et l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (définit pour une durée de 2 ans). Il fixe les objectifs pluriannuels de gestion du risque communs aux trois régimes membres de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie visant à promouvoir des actions relatives à la prévention et l'information des assurés, ainsi qu'à l'évolution des pratiques et de l'organisation des professionnels de santé et des établissements de santé, de manière à favoriser la qualité et l'efficacité des soins. Le plan est validé par le conseil national de pilotage des ARS et mis en œuvre au travers d’un contrat type définit par le conseil national de pilotage des ARS. Le directeur général de l’ARS arrête l’adaptation régionale des contrats types nationaux, sous la forme de contrats-type régionaux. Les contrats types fixent les modalités d’adaptation régionale des dispositifs visant à favoriser l’installation des professionnels de santé en fonction des zones d’exercice définies conformément à l’article L. 1434-7 CSS. 18- Mise en place d’un « Institut national de prévention, de veille et d'intervention en santé publique » par fusion de l'Institut national de veille sanitaire (InVS), de l'Institut national de prévention et de l'éducation pour la santé (Inpes) et de l'Etablissement de préparation aux urgences sanitaires (Eprus). Simplification de certaines missions de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de l'Etablissement français du sang (EFS). 19- Rénovation de la gouvernance des établissements de santé. Le directeur définit l’organisation de l'établissement en pôles d'activité. Le directeur nomme les chefs de pôle, sur proposition du président de la commission médicale d'établissement pour les pôles d'activité clinique ou médicotechnique, sans toutefois être tenu par cette proposition. Pour les pôles hospitalo-universitaires, la proposition est faite conjointement par le président de la commission médicale d'établissement et le directeur de l'unité de formation et de recherche médicale ou le président du comité de coordination de l'enseignement médical. Lorsque le directeur général de l'ARS constate le non-respect des dispositions prévues à l'alinéa précédent, il peut prendre les mesures appropriées, notamment une modulation des dotations de financement dans des conditions définies par décret. Le texte complet vous est fourni dans le document .pdf joint. Bonne lecture Cecilia Frasconi, Karim Boudjema, Pierre Balladur