Agroforesterie et changement climatique

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Agroforesterie et changement
climatique
C. Dupraz, G. Talbot, J. Possoz, A. Querné
Journée Agroforesterie, Toulouse, 16 juin 2010
Anomalies de températures sur Janvier-Mai 2008
+ 0,72°C
Mais quel changement climatique ?
• Augmentation des températures. Mais quand?
• Modification des pluies. Mais où?
• Augmentation du CO2 atmosphérique, partout
• Et les accidents climatiques?
– gelées précoces ou tardives, grêles, orages, vents
violents, tempêtes
Augmentation de la fréquence des stress thermiques
AF et changement climatique
• Atténuation
(Lutte contre le changement climatique)
• Adaptation
(Tolérance au changement climatique)
1.Atténuation du changement
climatique
Agroforesterie et stockage de C
Plus de C dans les forêts (biomasse + sol) que
dans l’atmosphère..
Le déboisement = 17% des émissions de GES
Plan
• Bilan C des parcelles agroforestières
A l’échelle de l’arbre
Arbre agroforestier plus efficace que arbre forestier pour
stocker du carbone:
Croissance plus rapide
Enracinement plus profond
A l’échelle de l’hectare
La forêt stocke beaucoup plus de carbone qu’une parcelle agroforestière
Un BTA fixe beaucoup plus de C qu’une parcelle agroforestière
Mais une parcelle agroforestière stocke beaucoup plus de C qu’une
parcelle agricole
Valider les estimations de stockage de C
•
ORDRES DE GRANDEURS
•
TCS : 300 kg C/ha/an pendant ? Années
•
BTA : 3 à 4 T C/ha/an pendant 50 ans
•
Forêt : 0 à 1 T C/ha/an?
•
Agroforêt : 1 à 2 T C/ha/an pendant 50 ans?
•
Défrichement : - 100 T C/ha/an pendant 1 an
•
Conversion au bio : ?
•
Biomasse-énergie : évite dégagements de GES
•
Autres : ?
Planter un arbre pour stocker du C ?
•
Stocker du C est un processus lent, y compris avec les arbres
•
Déstocker du C peut être au contraire rapide et peu réversible
•
Planter ne veut pas dire stocker, mais mettre en place un puit potentiel
qu’il faut gérer sur le long terme. A qui va profiter l’effort?
Spéculer sur le C : les risques
•
Le BTA est l’option la plus efficace en termes de stockage annuel de C.
•
Des opérateurs industriels sont à l’affût
•
L’agroforesterie est un compromis technique : produire en stockant.
•
Un indicateur C stocké/! de produit agricole serait utile pour comparer différents
systèmes de production (LER du C stocké?)
L’arnaque agroforestière ou forestière au C
•
Si on crédite le stockage potentiel à celui qui plante
•
Si on crédite un stockage garanti, alors que personne ne peut garantir
que la parcelle sera maintenue agroforestière
•
Si on fait un calcul sur un état transitoire
Quiz
•
L’entreprise X veut compenser 1000 T C / an avec des plantations
agroforestières. Un ha agroforestier stocke en moyenne 2 T C/ha/an pendant
50 ans. Quelle est la bonne stratégie?
– 1. Investir dans la plantation de 500 ha
– 2. Investir dans la plantation de 20 ha par an pendant 50 ans
– 3. Investir dans la plantation de 20 ha par an ad eternam
– 4. Investir dans la plantation de 5000 ha
Comment répartir le crédit de C entre les
intervenants sur une opération de stockage?
•
A celui qui amène les capitaux
•
A celui qui plante les arbres
•
A celui qui entretient les arbres
•
En fonction des stockages courants (très faibles au début, plus
forts quand les arbres sont plus grands)
•
En fonction des stockages moyens?
•
En tenant compte des déstockages ultérieurs (biomasse et sol)
•
Va décourager les investisseurs
Contribution potentielle d’un plan agroforestier
sérieux en France
En résumé : potentiel de fixation comparés
•
BTA en Europe : 14 M T CO2/an
•
Gestion des forêts existantes en Europe : 19 M T CO2 /an
•
Plan agroforestier (600 000 ha) en France : 4.5 M T CO2/an
•
Plan haies (500 000 km) en France : 2 M T CO2/an
•
Conclusion : l’agroforesterie est une piste très sérieuse
PROJET DE RAPPORT sur l'agriculture de l'UE et changement
climatique (2009/2157(INI))
Commission de l'agriculture et du développement rural
Rapporteur: Stéphane Le Foll
• 4 mesures pour améliorer le bilan de C de l’agriculture européenne
– TCS et couverture végétale permanente
– Agroforesterie et haies
– Protection des terres riches en C (tourbières, zones humides)
– Economies d’énergie, modernisation bâtiments
2.Adaptation au changement
climatique
Résilience des systèmes
agroforestiers
La réaction des plantes cultivées aux
changements de température
• Besoins en froid : vernalisation
• Besoins en chaleur : sommes de température
• Seuils de stress thermique
• Stress hydrique
• Besoins en amplitude thermique jour-nuit
Effet de l’augmentation de CO2
• A l’échelle de la feuille
– Photosynthèse stimulée
– Transpiration réduite
– Efficience de l’eau améliorée
• A l’échelle du peuplement
– Surfaces foliaires augmentées
– Transpiration augmentée
– Stress hydriques plus fréquents
• Avis actuel : pas d’effet net majeur (compensations) sauf sur
des écosystèmes avec peu de stress hydrique
Effet de l’augmentation de température
• Ralentissement (vernalisation)!
• Accélération phénologique
– Optimum blé : 15 °; maïs : 22°c
• Stress thermiques
– Echaudage des céréales si t>25°c
– Baisse de fertilité des épis
– Stress hydrique induit
Effet de la variation des pluies
• Dans le sud : sécheresses accentuées
– Echaudage
• Dans le nord ; engorgement hivernal accentué
– Réduit l’enracinement : effet similaire à sécheresse
Cultures d’hiver / cultures d’été
• Raccourcissement des cycles à effets différents
• Sur cultures d’hiver : possibilité d’échapper au stress
hydrique estival
• Sur cultures d’été : on prend de plein fouet le double effet
Jusqu’en 2007 : perplexité
•
Impossible de prévoir si le réchauffement aurait des résultats
positifs ou négatifs ou négligeables sur les rendements agricoles
•
Pas de modification géographique majeure des systèmes de culture
(céréales : +100 km vers le nord par °c d’augmentation, maïs : +300
m en altitude)
•
Plutôt favorable aux hautes latitudes / altitudes, défavorable
ailleurs
2008…
Mai 2008
2009…
Pourquoi ça stagne?
• Progrès génétique qui s’essoufle?
• Baisse de l’utilisation des engrais?
• Moins bonne protection contre les ravageurs?
Le cas de la vigne…
• Pour les cultures d’hiver, le réchauffement est compensé par
l’avancée du calendrier, ce qui conduit à des réchauffements
modérés pendant les phases sensibles
• Pour la vigne, le réchauffement estival est a contrario
amplifié par l’avancée du calendrier, ce qui conduit à des
réchauffements très importants (4° ou 5°C au total).
• Viticulture of the
future, estimated
changes from 1999
to 2049.
La vigne face au changement climatique
• actions « correctrices »
– irrigation de la vigne
• actions de « changement radical »
– réduction de la densité de plantation pour économiser l’eau ;
– adaptation du rapport feuille/fruit ;
– modification de l’encépagement pour avoir des variétés mieux
adaptées à la sécheresse, produisant des raisins mûrs avec moins de
sucres
– Protéger les vignes (agroforesterie), les positionner dans des
topographies plus fraiches (versants nords, fond de vallées)
3.Prévoir la réaction des systèmes
agroforestiers au changement
climatique
Approche par modélisation
Importance des décalages phénologiques en
agroforesterie tempérée
Exemple : noyer hybride – blé d’hiver
Impact sur la compétition pour la
lumière et pour l’eau
Novembre -> mi-avril
Juillet -> Octobre
Complémentarité temporelle
!
!
Competition pour la lumière :
!
Réduite, de mi-avril à fin juin
!
(+ ombre des parties ligneuses en hiver)
Competition pour l’eau :
!
Synchrone de avril à juin
!
Différée le reste du temps
Restinclières (Hérault, France) :
LER prédit = 1.6
!
Cette forte efficience, comment l’expliquer?
!
Est-elle sensible au changement climatique?
!
Et si la phénologie change?
!
!
Le changement climatique modifie d’abord la phénologie des espèces
(http://ipcc.ch)
(Linderholm 2006, Moriondo et Bindi 2007)
Comment prédire l’effet du CC sur les LERs?
Utilisation d’un modèle d’interaction arbres- cultures (Hi-sAFe)
Jour j
Arbres individuels
Jour j+1
Cellules =
cultures
homogènes
Voxels homogènes
Couches pédo
" Croissance de l’arbre (individual based model)
" Production des cultures (Stics)
" Modélisation explicitement 3D
• Competition pour la lumière
• Compétition pour l’eau et l’azote
Modélisation de la phénologie : basée sur les sommes de température
Expérimentation virtuelle in silico
Impact de la phénologie des espèces sur la productivité du système agroforestier
3 systèmes simulés :
Culture pure
7m
7m
Simulation de combinaisons
d’arbres et de cultures précoces
ou tardifs
4m
4m
Forêt
9m
15m
1m
•Simulations sur 40 ans
•Conditions sol et climat de
Restinclières (France)
(Données 1995-2008, extrapolées par
tirage aléatoire sur 2010-2035)
4m
Agroforêt
• pas de nappe alluviale
• azote non limitant
Simulation de l’accélération phénologique
Cas du domaine de Restinclières (Hérault)
Réchauffement climatique = variétés plus précoces…
Effet possible d’un réchauffement climatique sur nos
systèmes agroforestiers
Allongement du cycle de
l’arbre, raccourcissement de
celui de la céréale
Production de biomasse en agroforesterie :
Simulation de référence : variétés moyennes en précocité
Crop growth
LER = 1.38
Tree growth
•
Quantification de la complémentarité spatio-temporelle pour l’exploitation des ressources
grâce aux modèles
Capture de la lumière par une association blé-noyer simulée par Hi-sAFe
Perdue
Arbre
Culture
Indice relatif
Référence :
Thèse Talbot, en cours
Capture Lumière
LER Biomasse
1.30
1.38
•
Quantification de la complémentarité spatio-temporelle pour l’exploitation des ressources
grâce aux modèles
Capture de l’eau par une association blé-noyer simulée par Hi-sAFe
Drainage
Evaporation sol
Transpiration Arbres
Transpiration Cultures
Indice relatif
Référence :
Thèse Talbot, en cours
Capture Eau
LER Biomasse
1.48
1.38
Une précocité accrue a des effets contradictoires sur
les cultures
Lumière interceptée x
Efficience
d’utilisation de
la lumière
=
Biomasse
Une précocité accrue stimule les arbres et leur croissance
Total biomass production
Relative biomass decomposition
Effets des arbres sur les cultures :
Résultats de modélisation
Association noyer hybride/blé dur 15 x 9, Restinclières, 40 ans .
Modèle d’arbre couplé au modèle de culture Stics
Ler simulé : 1.32 = 0.8 culture + 0.52 arbres
Comment expliquer le bon rendement relatif des cultures ?
Passage aux rendements annuels, par unité de surface
r
tion du rayonnement
60
50
40
30
20
10
0
(%)
Rendement relatif par unité de surface cultivée
40 années
x 10 simulations
Décomposition multiplicative
du rendement relatif des cultures :
Rendement relatif =
X Effet compétition pour la lumière
X Effet surface foliaire
X Effet efficience de conversion de la lumière interceptée
X Effet indice de récolte
réduction
Effets
dumultiplicatifs
rayonnement
70
60
50
40
30
20
10
0competition
: lumineuseefficience
(%)
de conversion lumineuseindice de récoltesurface foliaire
Décomposition du rendement relatif des cultures en agroforesterie
réduction
Effets
dumultiplicatifs
rayonnement
70
60
50
40
30
20
10
0phenologielumière
:
(%) eauazotetemperature
Décomposition de l’effet «"efficience de conversion du rayonnement"»
1.
0.
réduction du rayonnement
70
60
50
40
30
20
10
0durée de remplissage
(%)
du grain échaudage (température) floraison (nbre grain)
Décomposition de l’effet «indice de récolte"»
Effect possible d’un réchauffement climatique sur nos
systèmes agroforestiers
Par suite de compensations entre des effets saisonniers opposés
Stabilité du LER ?
Les systèmes AF semblent tolérants au changement
climatique (résultats provisoires à confirmer)
D’autres processus sont à prendre en compte pour progresser :
retard de la chute des feuilles des arbres (Compétition pour la lumière possible en fin
d’automne, risque accru de stress hydrique précoce pour le blé)
Conclusions
Le modèle suggère que :
Les complémentarités pour eau et lumière suffisent à expliquer les fortes valeurs de LER
Le système semble stable face au réchauffement climatique, grâce à des compensations
résultant des processus de capture de la lumière et de l’eau
Le LER semble donc stable, malgré les changements de phénologie des espèces induits par le
changement climatique
Poursuite des travaux :
Quels choix variétaux en agroforesterie?
Prise en compte d’autres processus sensibles au changement climatique (stress thermiques)
Simulations avec différents scénarii climatiques (enchaînements d’années contraignantes)
Difficulté de passer de la biomasse au rendement pour les cultures…
Merci…
• Le changement climatique conduira probablement à une augmentation
de la fréquence des stress hydriques et thermiques sur les cultures,
et, peut-être, à une augmentation de la fréquence des évènements
violents (tempêtes). Dans ce contexte, quel sera le comportement
des parcelles agroforestières? L'enracinement des arbres
agroforestiers leur donnera t-il un avantage dans ces situations? Les
cultures vont-elles bénéficier ou souffrir de la présence des arbres?
Comment optimiser la conception des systèmes agroforestiers pour
mieux prendre en compte les évolutions climatiques possibles,
notamment par le choix des variétés d'arbres et de cultures? En
particulier, faut-il privilégier des variétés cultivées précoces ou
tardives? Nous essayerons de donner quelques premiers éléments de
réponse à ces questions à partir des travaux de modélisation des
systèmes agroforestiers en cours
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