Le canton attire les fédérations sportives 6 Située à Lausanne, la Maison du Sport International (MSI) agrandit en mai sa surface de 1300 m2 pour accueillir de nouvelles fédérations. dossier Le canton de Vaud et la ville de Lausanne misent sur la plus-value des fédérations internationales pour dynamiser l’économie de la région. Pari gagnant : 51 fédérations et organisations sportives internationales établies sur l’Arc lémanique génèrent un impact économique qui atteindrait plus de 200 millions de francs par année. Par Nicolas Maeder Avenue de Rhodanie, à Vidy, le contraste est saisissant. D’une part, des terrains de football et des courts de tennis. De l’autre, des blocs de verre où se situent les bureaux de fédérations sportives internationales. Dans ce quartier de Lausanne au bord du Léman, le sport et les affaires font bon ménage. C’est ici que sera inauguré le 26 mai le quatrième bâtiment de la Maison du Sport International (MSI), financée conjointement par la ville, le canton et le Comité International Olympique (CIO). Un petit carré de plus sur une carte GPS, mais un grand pas pour le canton qui avance ainsi dans sa politique d’accueil des sièges de fédérations sportives internationales, nommées dans le jargon FI. La Maison du Sport International dénombre aujourd’hui quinze sièges de fédérations et douze sièges d’organisations. Mais les fédérations de la MSI ne constituent qu’une partie du nombre réel qui existe sur l’Arc lémanique. De Nyon à Aigle, la région héberge au total 51 sièges de fédérations ou organisations sportives internationales. En trois ans, leur nombre a même doublé. On y trouve aujourd’hui pêle-mêle les sièges internationaux de boxe, golf, judo, baseball, mais aussi de bridge, taekwondo ou encore des organisations liées au monde sportif comme l’Agence mondiale antidopage ou le Tribunal Arbitral du Sport. Le tableau est donc varié, « un vivier stimulant », selon Cosima Deluermoz, déléguée cantonale vaudoise au sport international. Autre conséquence : le nombre élevé de FI propulse le canton de Vaud au premier rang national des « logeurs » de fédérations sportives, devant Berne et Zurich. Les chiffres le confirment : deux tiers des sièges de fédérations sportives internationales localisés en Suisse se trouvent aujourd’hui sur le sol vaudois. Renommée et poids financier Selon une étude parue en 2008 de l’Académie Internationale des Sciences et Techniques du Sport (L’impact économique des fédérations et organisations internationales sportives sur Lausanne et l’Arc lémanique de 2004 à 2007) l’ensemble des dépenses et des investissements des FI s’élevaient à 288 millions de francs par année et généraient un impact total de 198 millions de francs. « Ces chiffres sont néanmoins sous-évalués, car trois fédérations, dont deux très grandes, n’ont pas participé à l’étude », souligne Marcel Parietti, délégué cantonal au sport associatif. « Depuis trois ans, l’impact économique est en croissance et atteindrait aujourd’hui les 220 millions de francs ». Et selon Nicolas Imhof, chef cantonal de l’éducation physique et du sport, les FI emploient pour l’heure 1360 personnes. Comment expliquer la venue de toutes ces fédérations ? Pour Cosima Deluermoz, il n’y a aucun doute : « La nomination de Lausanne en Capitale Olympique en 1994 a accentué la force d’attraction de la ville. D’autre part, la présence du CIO est une chance qui offre au canton une carte de visite exceptionnelle. Il lui permet d’être très visible hors des frontières ! » Résultats, beaucoup de FI tendent à se rapprocher de l’association faîtière. Et parmi elles, des fédérations très importantes en renommée et en poids financier, comme l’Union Européenne des Associations de Football (UEFA) à Nyon, l’Union Cycliste Internationale à Aigle (UCI) ou encore la Fédération Internationale de Volleyball à Lausanne (FIVB). D’autres arguments sont évoqués pour expliquer l’afflux des FI : la qualité de vie, le niveau de formation et la stabilité géopolitique du pays. Et Nicolas Imhof d’ajouter : « Depuis dix ans, le canton de Vaud et la ville de Lausanne mènent ensemble une politique d’ouverture à l’égard des fédérations et organisations sportives internationales, en leur offrant des conditions attractives : appui dans les démarches administratives, exonération d’impôts et exemption de loyer durant deux ans pour celles qui s’installent à Lausanne. En outre, des services ciblés pour les fédérations ont été mis en place, tels que des cours de formation continue ou des opérations de mise en réseau ». Séminaires et formations La Maison du Sport International offre aussi à ses locataires des formations et des séminaires. Ici, c’est une première BCV | pointsforts | 20 | mai 2011 7 dossier mondiale et « l’occasion de réunir des fédérations et de réfléchir ensemble autour de thèmes communs, comme le dopage ou la violence dans le sport », souligne Cosima Deluermoz. Par ailleurs, la nouvelle loi cantonale sur le sport devrait poser prochainement les jalons légaux de la place des fédérations internationales dans le canton. Cette nouvelle loi consacrera un chapitre entier aux FI et leur relation avec l’Etat de Vaud. Elle devrait être votée en automne par le Grand Conseil. Avec cette base légale, le canton consoliderait ainsi sa position de « terreau unique et fertile » à l’égard des fédérations sportives. 8 « En outre, la présence des FI est un des facteurs qui explique la tenue de nombreuses manifestations sportives dans la région », soulève Marcel Parietti. Là encore, le canton se profile en meilleur élève national et dénombre dix manifestions sportives régulières de grande envergure, dont certaines déclarent des chiffres d’affaires de plusieurs millions de francs. L’Office fédéral du sport, dans une étude en 2008 (De l’importance économique des manifestations sportives), révèle que 12,5% du chiffre d’affaires d’une manifestation sportive profitent à des organismes extérieurs tels que les commerces, les hôtels et les transports. Ces données sont intéressantes pour l’économie vaudoise, dans la mesure où les dix manifestations sportives régulières comptabilisent un revenu global de vingt millions de francs, selon Marcel Parietti. Réseau en grappe Par ailleurs, cette ouverture tous azimuts à l’égard des FI a exigé de développer des structures nouvelles, plus en phase avec le dynamisme que les autorités souhaitent créer. Après la Maison du Sport International à l’avenue de Rhodanie, il s’agit maintenant de réaliser un secrétariat centralisé qui reliera toutes les fédérations internationales sportives du canton avec les acteurs du tissu économique local. Là encore, le projet est ambitieux. En novembre, le Conseil d’Etat, la ville de Lausanne et le CIO ont annoncé la création d’une commission chargée d’étudier la réalisation d’une plateforme, nommée Cluster Sport, qui reliera les FI aux centres de recherches (EPFL, CHUV, UNIL) et aux entreprises de la région. Pour certains, c’est un pas supplémentaire vers une Silicon Valley du sport, pour d’autres c’est une manière de consolider davantage la niche du sport dans l’économie vaudoise. « Auparavant, le sport était affilié au Département de l’instruction publique et des cultes, conclut Marcel Parietti. Au vu de l’importance des fédérations et des manifestations sportives, son appartenance au Département de l’économie est aujourd’hui justifiée ». Une Maison du Sport pour les Vaudois à Leysin A disposition des 43 associations et 1500 clubs vaudois, une Maison du Sport Vaudois verra le jour courant 2013 à Leysin. Le nouvel abri pourra être utilisé pour des camps ou des journées sportives. Cette « maison » est le premier projet financé par la Fondation « Fonds du sport vaudois » qui gère désormais les bénéfices de la Loterie Romande. Depuis le 1er octobre 2010, cette fondation indépendante remplace dans cette tâche le service cantonal de l’éducation physique et du sport. Chaque année, huit millions de francs sont ainsi distribués au milieu sportif vaudois sous forme de bourses, soutiens ou subsides. Quant à la Maison du Sport Vaudois, son coût est devisé pour l’heure à six millions de francs. Nicolas Imhof, chef du service cantonal de l’éducation physique et du sport. BCV | pointsforts | 20 | mai 2011