L`expérience coréenne et le développement économique de l`Afrique

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L’expérience coréenne et
le développement économique de
l’Afrique
Sous la direction de Ji Hong Kim
Professeur à la KDI School

Ce document est un projet préliminaire qui sera présenté lors de la Conférence
économique de la Banque africaine de développement sur l’accélération du
développement de l’Afrique – cinq ans après le tournant du XXIème siècle, qui aura lieu à
Tunis, Tunisie du 22 au 24 novembre 2006.
L’expérience coréenne et le développement économique de
l’Afrique
1. Introduction
1.1 Introduction
Durant les premières années de son développement économique dans les années 1960, la
Corée s’est caractérisée par un important réservoir de travailleurs sans emploi ou sous-employés
ainsi que par une accumulation de capital ou une technologie insuffisantes. Jusqu’en 1961, les
conditions économiques en Corée s’apparentaient à celles de la plupart des pays en
développement pauvres en ressources et économiquement faibles. La population affichait un
taux de croissance annuel de 3 % et le chômage était largement répandu. En 1961, le PIB par
habitant n’était que de 82 dollars et le niveau d’épargne des ménages coréens était extrêmement
faible. Avec seulement 43 millions de dollars, les exportations étaient quantité négligeable et le
pays affiche un déficit chronique de la balance des paiements depuis son accession à
l’indépendance en 1948.
Malgré ces conditions déplorables, la Corée a connu un développement économique
remarquable ces trois dernières décennies. En 2005, le PIB par habitant du pays s’élève à 16 300
dollars tandis que le volume total des échanges atteint près de 289 milliards de dollars. Quant à
la part du secteur manufacturier dans le PIB, elle est passée de 14 % en 1961 à 28 % en 2005
alors que celle de l’agriculture, de l’industrie forestière et de la pêche a reculé de 37 % à 3,5 %
durant la même période. Après 1965, la Corée est passée progressivement du statut d’économie
agraire pauvre avec un excédent de main-d’œuvre à une économie axée sur les exportations,
spécialisée au départ dans l’industrie manufacturière de main-d’œuvre puis dans les produits
manufacturés nécessitant beaucoup de capitaux et de compétences. Grâce à ce développement
rapide, la Corée est aujourd’hui reconnue comme pays membre de l’OCDE.
Aux premiers stades de son développement économique, la Corée a eu le choix entre deux
méthodes de développement. La première consistait à continuer d’appliquer une stratégie de
substitution des importations, très en vogue à l’époque dans les pays en développement. La
seconde consistait à adopter une stratégie de développement axée sur l’extérieur et favorisant la
promotion des échanges commerciaux. Pour engranger des devises et pallier l’insuffisance de ses
ressources naturelles et l’étroitesse de son marché intérieur, le gouvernement coréen adopta la
seconde stratégie. Le principe même de cette stratégie de développement tournée sur l’extérieur
adoptée au début des années 1960 était la promotion des exportations de produits manufacturés
nécessitant une main-d’œuvre importante, un domaine dans lequel la Corée avait un avantage
comparatif. Le gouvernement coréen mit en place des politiques industrielles fermes et intervint
massivement, instaurant des relations étroites entre l’Etat et les milieux d’affaires. Cependant,
les politiques de discrimination menées par le gouvernement reposaient sur le critère de
performance explicite des exportations. La transformation de la structure industrielle de
l’économie coréenne a été un succès tant au niveau de l’amplitude que de la profondeur. Le
processus de développement de la Corée est riche d’enseignements pour les autres économies en
développement et les pays moins développés. En particulier, la façon dont la Corée utilise les
technologies et les capitaux étrangers en accumulant du savoir-faire dans le pays peut
s’appliquer à de nombreuses économies africaines.
Le processus d’industrialisation de la Corée n’a cependant pas toujours été sans heurts. Il y a
eu des périodes de forte inflation et d’importants revers économiques. Durant les premiers stades
de développement économique, le manque de devises a représenté la contrainte la plus lourde,
surtout parce que l’aide étrangère était appelée à cesser un jour ou l’autre. Économie agraire, la
Corée ayant opté pour une stratégie de croissance axée sur les exportations pour engranger des
devises est devenue plus vulnérable aux vicissitudes de l’environnement international. Mais,
étant un petit pays, la Corée n’a pas eu d’autre choix que de s’adapter à l’environnement
international. Cette adaptation à l’environnement international ainsi que les problèmes de
balance des paiements constituent depuis lors un sujet permanent de préoccupation pour le
gouvernement coréen.
Le modèle coréen a toutefois ses limites, surtout à l’ère de la mondialisation et des
changements technologiques rapides. La crise financière de 1997 démontre les limites du
paradigme de la croissance régie par la production. Bien que la concurrence des derniers arrivés
ait poussé la Corée sur la pente ascendante, le pays n’a pas su saisir l’occasion de réformer son
système économique dans les années 1990. L’ancien cadre politique et institutionnel qui avait
alimenté la forte croissance s’est transformé en goulet d’étranglement pour une croissance
économique durable dans un nouvel environnement économique. Le pays a payé le prix fort pour
avoir retardé les réformes. En restructurant en profondeur les secteurs en difficulté des
entreprises et de la finance, la Corée a consenti un nouvel effort pour rénover tout son système
économique en réformant le secteur public et le marché du travail. L’expérience de la Corée en
matière de gestion des crises et des réformes est riche d’enseignements à tirer pour les autres
pays en développement. Les crises économiques peuvent être évitées et surmontées grâce aux
efforts concertés du gouvernement et de la population.
Après la crise économique, des efforts ont été consentis sur le plan politique pour transformer
la Corée en une économie fondée sur le savoir, où l’innovation est encouragée, améliorant la
productivité globale et soutenant ainsi la croissance économique. La mise en œuvre de la
nouvelle stratégie de croissance de la Corée a pris appui sur les quatre piliers de l’économie de
savoir : le cadre macroéconomique, l’infrastructure de l'information, le développement des
ressources humaines et le système d’innovation.
L’objectif premier du présent exposé est d’expliquer les réponses de l’économie coréenne
face aux risques et opportunités prévisibles ou imprévisibles du développement économique
rapide qui pourraient être utiles aux économies africaines. En premier lieu, nous évoquerons la
croissance économique rapide et la transformation structurelle de l’économie coréenne. En
second lieu, nous aborderons brièvement l’historique de l’interaction de la Corée avec
l’économie mondiale durant les quatre dernières décennies. En troisième lieu, nous examinerons
les principales politiques liées à un environnement international qui comprend le commerce
international, les marchés financiers et les marchés des matières premières. En quatrième lieu,
notre conclusion résumera les enseignements à tirer de l’expérience coréenne.
<Graphique 1> Evolution de la croissance de l’économie coréenne
12 646
PNB par habitant
(USD)
11 432
10 000
7 Plans de développement
économique quinquennaux
7355
5000
1000(1977)
67
1945
1953
87 100(1964)
1962
Libération Guerre de Corée
(1945)
(1950~53)
1970
1980
Bond en avant
1990
1995 1998 2003
Adhésion à l’OCDE
Crise financière
(1996)
(1997)
2. Évocation du processus de développement de la Corée1
La transformation industrielle de la Corée et l’augmentation parallèle de ses revenus sont le
fruit des processus d’apprentissage intensifs dans lesquels la constitution d’un savoir
technologique et le développement des ressources humaines ont joué un rôle déterminant. Un
autre aspect distinctif du processus d’industrialisation de la Corée est le rôle actif joué par le
gouvernement qui est intervenu sur le marché pour amorcer la grande transformation.
Rétrospectivement, le gouvernement semble avoir eu le choix entre plusieurs voies au début de
la grande marche vers la modernisation de l’économie traditionnelle et les stratégies de
développement adoptées par le pays font débat. Par exemple, l’intervention du gouvernement sur
le marché pour mobiliser des ressources en vue de promouvoir l’industrie lourde et chimique
dans les années 1970 a apparemment faussé le mécanisme du marché, rendant l’allocation des
ressources statique et inefficace. Ces industries deviennent pourtant aujourd’hui les moteurs de
la croissance de l’économie coréenne, ce qui montre que l’intervention de l’Etat a engendré des
avantages comparatifs dynamiques.
L’industrialisation de l’économie coréenne depuis les années 1960 ne se résume pas à un
simple processus d’accumulation du capital. Elle témoigne également des nombreux succès
remportés et échecs essuyés par des entrepreneurs qui ont osé prendre des risques, des efforts
méticuleux de formation de la main-d’œuvre et des tentatives et erreurs du gouvernement pour
créer un environnement adéquat pour les affaires. Le processus de développement de la Corée
peut être divisé en trois phases : (1) une première phase privilégiant les facteurs dans les années
1960 et 1970; (2) une deuxième phase centrée sur les investissements dans les années 1980 et
1990; (3) une troisième phase axée sur l’innovation dans les années 2000. Nous examinerons le
processus sous deux angles : les stratégies et politiques de développement qui tentent d’utiliser
au mieux les ressources existantes, et le portrait des structures industrielles qui reflètent les
étapes de l’industrialisation. Les succès remportés jusqu’aux années 1990 portent en eux les
problèmes à l’origine de la crise financière de 1997, dont nous parlerons brièvement.
2.1 Stratégies et politiques de développement – analyse chronologique
1
Cette section est le résumé du Chapitre 2 du rapport intitulé "Korea as a Knowledge
Economy" publié dans le cadre des Learning Resources Series de l’Institut de la Banque
mondiale.
2.1.1 La situation avant l’industrialisation
Pauvrement dotée en ressources naturelles et dévastée par la Guerre de Corée (1950-1953),
la Corée était demeurée une société agraire jusqu’à la fin des années 50, avec des activités
industrielles essentiellement limitées aux industries légères comme l’assemblage simple et le
traitement des matières premières. Les conditions économiques d’avant l’industrialisation à
grande échelle étaient moroses. Les efforts pour asseoir l’identité nationale durant les années qui
suivirent la libération en 1945 échouèrent pour la plupart dans un climat d’agitation et de
turbulences sociales. Néanmoins, durant cette période, le gouvernement coréen mit en œuvre
deux importantes politiques, l’éducation obligatoire et la réforme agraire. La constitution de
1949 affirma le devoir de la population d’éduquer et le droit de la population à être éduqué et le
gouvernement introduit l’éducation obligatoire pour les écoles primaires. Cette mesure permit de
créer un important vivier de personnes qualifiées qui joueront plus tard un rôle déterminant dans
l’industrialisation du pays. Les réformes agraires menées en 1947 et 1949 posèrent également les
jalons de l’industrialisation ultérieure, dans le sens où une meilleure distribution de la richesse
permit d’égaliser les chances pour la population. Malheureusement, les efforts pour jeter les
bases institutionnelles de l’économie naissante furent brutalement interrompus par la guerre en
1950.
Cette guerre qui dura trois ans dévasta la quasi-totalité des bases industrielles émergentes du
pays. Les efforts de l’après-guerre pour reconstruire les routes, les chemins de fer, les bâtiments
et les usines furent peu efficaces en raison du budget limité du gouvernement et de l’insuffisance
des ressources nécessaires. Le budget de l’Etat dépendait lourdement de l’aide américaine qui
représentait plus de 40 % des dépenses publiques totales. Après 1953, les politiques industrielles
et commerciales ont reposé sur la substitution des importations qui visait à réduire les
importations en tentant de produire les denrées de base. Des droits de douane élevés furent
prélevés et le volume des importations fut strictement contrôlé afin de protéger les industries
nationales. Le rétablissement de l’industrie domestique des biens de consommation fut favorisé
par la surévaluation des taux de change, mais au détriment des exportations dont le volume
annuel ne cessa de baisser jusqu’en 1960. De fait, le gouvernement coréen a privilégié la stabilité
politique plutôt que le développement systématique de l’économie. Après le coup d’état militaire
de 1961, la nouvelle équipe dirigeante décida que la modernisation de l’économie coréenne et la
croissance économique rapide devaient avoir la priorité absolue.
2.1.2 Années 1960 : le début de l’industrialisation
À l’époque, la Corée était une société essentiellement agraire, très pauvre en ressources
naturelles. La majorité de la main-d’œuvre était employée dans l’agriculture, l’industrie
forestière et la pêche et produisait des denrées alimentaires pour la consommation intérieure. La
surface très restreinte de terres arables disponibles (seulement un quart de la superficie totale du
pays) ne permettait guère d’accroître la production ou de produire des quantités substantielles de
produits agricoles exportables. Dans le secteur minier, le pays ne recelait pas de ressources
naturelles, hormis des quantités limitées de tungstène et quelques autres minerais exportables.
Quant au secteur manufacturier, 80 % des produits étaient des biens de consommation,
principalement des denrées alimentaires et des textiles. Le taux de croissance annuel moyen de la
population d’après-guerre de 2,8 % aggravait le problème du chômage et du sous-emploi dans le
secteur agricole et celui des services. Les services, notamment les transports et l’électricité,
manquaient cruellement de main-d’œuvre. Les stratégies de développement des années 1960
cherchèrent à briser le cercle vicieux de la faiblesse de l’épargne, la faiblesse de l’investissement
et la faiblesse de la croissance en adoptant des politiques censées promouvoir un accroissement
de l’épargne publique et une augmentation des entrées de capitaux étrangers, la priorité étant
donnée à une industrialisation axée sur les exportations. Le gouvernement établit des principes
pour l’industrialisation qui peuvent être résumés comme suit (Tae, 1973, p. 57) :
1.
Les politiques fiscales et monétaires avaient été utilisées comme des instruments pour maintenir la
stabilité des prix, une condition nécessaire pour favoriser l’épargne intérieure.
2.
Les ressources d’investissement devaient être allouées par les systèmes de prix et, parallèlement, les
variables de prix comme les taux de change, les taux d’intérêt et les salaires devaient refléter le coût
d’opportunité des ressources, ce qui permettait d’alléger les contrôles directs sur la production, les
prix, les salaires et les échanges.
3.
L’allocation des investissements via le mécanisme des prix ne préparant pas au développement
dynamique à long terme de l’économie, le gouvernement faisait appel à ses propres ressources
d’investissement pour la construction des industries clés et la formation du capital social.
Des politiques spécifiques furent élaborées à partir de ces principes :
1.
Avant 1960, le processus d’industrialisation dépendait essentiellement des industries de substitution
des importations qui étaient largement protégées sur les marchés intérieurs alors que la promotion des
exportations était totalement négligée. En conséquence, la progression du réinvestissement par
accumulation de capital était infime et il n’y avait aucune incitation à adopter une nouvelle
technologie ou à cultiver des compétences en matière de gestion. Pour continuer à se développer,
l’industrialisation devait donc absolument prendre appui sur la croissance des industries
d’exportation.
2.
Pour stimuler les exportations, l’industrialisation devait commencer dans les secteurs produisant des
biens de consommation légers où les besoins en capitaux étaient moindres.
3.
Les exportations de produits de base à forte intensité de main-d’œuvre étant confrontées à une âpre
concurrence, la faible marge à l’exportation pourrait être compensée par des politiques de
subventionnement des exportations par l’Etat comme l’exemption des droits de douane sur les
matières premières, l’octroi de prêts à des conditions préférentielles, l’exonération d’impôt et le
subventionnement des services aux collectivités publiques.
4.
Que ce soit pour la diversification des exportations ou la substitution des importations, le processus
de prise de décision était fondé sur la motivation du profit des entreprises privées, et l’allègement des
restrictions à l’importation suscitait l’intérêt pour les exportations tout en générant une pression
concurrentielle qui poussait à améliorer la gestion.
5.
L’éducation doit porter sur les activités de production en mettant l’accent sur la formation
professionnelle.
Pour résumer, la stratégie de développement des années 1960 reposait à la fois sur la
promotion des industries d’exportation et sur la substitution des importations, en commençant
par les secteurs de l’industrie légère à forte intensité de main-d’œuvre. Dans un pays tel que la
Corée, peu doté en matières premières, une structure industrielle non-intégrée, et une main
d’œuvre qualifiée recevant de bas salaires réels, il est inévitable que les exportations à ce state
consistent essentiellement de produits de transformation de matières premières importées et de
produits intermédiaires à forte intensité de main d’œuvre. L’accumulation de capital ainsi
obtenue peut désormais être utilisée pour le développement du secteur agricole et la promotion
des industries lourdes et chimiques afin d’accélérer le processus d’industrialisation. En outre,
parallèlement aux importants efforts du gouvernement en faveur du développement, les activités
volontaires comme la créativité et l’initiative privées furent encouragées. Le principe du
mécanisme du marché fut accepté comme le principe de base de l’ordre économique dans les
années 1960. Des mesures comme la normalisation des taux d’intérêt, l’adoption d’un régime de
change flexible et la libéralisation du commerce furent utilisées pour améliorer le
fonctionnement du mécanisme de prix.
2.1.3 Années 1970 : modernisation de la structure industrielle
Au milieu des années 1970, confronté à une soudaine hausse des salaires, le gouvernement
coréen adopta une nouvelle série de stratégies de développement, passant de la promotion des
industries d’exportation nécessitant une importante main-d’œuvre dans les années 1960 au
développement des industries lourdes et chimiques. Le gouvernement reconnaît que la politique
industrielle des années 1960 a surestimé la croissance quantitative de l’industrie, laquelle
bénéficiait d’une protection et d’un soutien importants de l’État. Ceci a conduit à des
déséquilibres en matière de croissance et à des faiblesses en matière de compétitivité
internationale. À l’avenir, le soutien de l’Etat devra donc rester intensif mais plus sélectif. Qui
plus est, l’économie ne peut plus compter sur les capitaux étrangers pour répondre à ses besoins
accrus d’investissements ni sur les importations pour faire face à la demande accrue
d’équipements et de matériaux. Pour financer les importants investissements requis par
l’industrie lourde et chimique (HCI), le gouvernement créa le Fonds national d’investissement
(National Investment Fund) qui octroie des prêts subventionnés à long terme à des industries
lourdes et chimiques stratégiquement sélectionnées pour développer la formation de capital de
manière efficace et cohérente. Le fonds fut établi grâce à la mobilisation d’office de dépôts
privés auprès d’établissements de banque commerciale. En outre, la plupart des prêts concédés
en Corée l’étaient par des banques spécialisées et des établissements financiers non bancaires,
dont un grand nombre étaient sous le contrôle direct du ministère des Finances. Par ailleurs,
l’intervention du gouvernement s’est manifestée sous d’autres formes, comme l’instauration de
barrières douanières élevées pour protéger les projets HCI concernés. Des barrières à l’entrée
furent également érigées dans certains secteurs afin de limiter la concurrence intérieure et
extérieure. (Ahn)
Le développement des industries lourdes et chimiques est considéré comme un moyen pour
l’économie de s’adapter à l’évolution du contexte international et national. Il témoigne aussi du
passage à une économie plus résistante, capable de continuer à dégager de la croissance et plus
mature. Les secteurs ciblés, dont les machines, la métallurgie, la chimie et la construction navale,
sont des industries de pointe qui conditionnent fortement le développement des autres secteurs.
Outre les cibles industrielles, le plan admettait explicitement l’importance du développement des
ressources technologiques et humaines, élaborant des stratégies pour mettre en valeur les
facteurs technologiques et la main-d’œuvre spécialisée. Cette dernière jouera un rôle
déterminant. Le système pédagogique de formation des techniciens devra notamment être
remodelé pour améliorer la qualité et diversifier les compétences enseignées.
L’industrialisation lourde et chimique (HCI) comporte des risques parce qu’elle engage
d’importants capitaux propres aux produits sur une longue période de remboursement. Le
premier risque concerne le degré d’intervention de l’Etat. Aucune entreprise privée n’aurait
accepté de supporter le risque inhérent aux projets sans le soutien virtuellement illimité du
gouvernement. Le projet qu’il a lui-même lancé plaça le gouvernement dans la position d’un
partenaire de risque implicite et incita les entreprises individuelles à penser que l’Etat assumerait
la responsabilité de sa politique de promotion et se porterait à leur secours en cas de
détérioration de la situation. Le deuxième risque était lié au choix des industries à promouvoir.
Une évaluation bureaucratique de l’attrait et de la faisabilité remplaça les tests de marché et les
mécanismes de feed-back entre le milieu des affaires et le gouvernement furent également
négligés. Le troisième risque concerne la détermination de l’ampleur du projet industriel retenu.
Si le gouvernement décide de la taille en fonction de la demande intérieure, l’industrie pourrait
ne pas atteindre la taille minimum nécessaire pour être compétitive sur le plan national mais
aussi pour répondre à ladite demande intérieure, rendant ainsi le prix unitaire de la matière
première trop élevé pour l’exportation et la substitution des importations et faisant par là
supporter l’essentiel de la pression au consommateur.
La promotion de l’industrialisation lourde et chimique dans les années 1970 réduisit
considérablement l’efficacité de la machine bureaucratique coréenne axée sur les exportations.
La politique économique se rigidifia, donnant naissance à un syndrome généralement associé
aux régimes de substitution des importations. Pour développer l’industrie lourde et chimique, le
gouvernement endossa l’essentiel du risque d’investissement. Une fois ce risque réduit et les
perspectives de rendement étant stimulées par l’intervention de l’Etat, les grandes entreprises,
principalement des chaebols (conglomérats), investirent massivement dans certains secteurs
comme celui des machines. Ces investissements prématurés et excessifs dans l’industrie lourde
et chimique causèrent d’importantes distorsions dans l’allocation des ressources, en particulier
au détriment de la modernisation des secteurs de main-d’œuvre.
Ce changement de cap densifia nettement la structure industrielle tout en accélérant la
progression de l’inflation et des salaires et en multipliant les inefficiences économiques. Les
effets négatifs étaient dus essentiellement au caractère démesuré des investissements, qui ont
dépassé les capacités technologiques et financières de l’économie. Les grandes entreprises furent
déterminantes dans le processus d’industrialisation lourde et chimique du fait des économies
d’échelle qu’elles ont généré, mais leur prépondérance aboutit à la concentration du pouvoir
économique entre les mains d’un petit nombre de conglomérats coréens, les chaebols. Qui plus
est, le fait que le développement des industries d’assemblage ne s’accompagnait pas du
développement des industries de composants et de matériaux accrut la dépendance de
l’économie vis-à-vis des importations étrangères.
2.1.4 Années 1980 : rationalisation de la structure industrielle
Les années 1980 furent une période de transition : transition d’un État autoritaire à une
société plus démocratique. Durant les années 1980, l’économie coréenne poursuivit sur sa
lancée, affichant une forte croissance et un redressement de sa balance des paiements. Cela dit,
l’économie coréenne paya le prix fort, en termes de multiplication des conflits sociaux, par
exemple, pour mener à bien le processus de démocratisation. L’augmentation constante des
salaires renforça les tensions inflationnistes. Face aux nouveaux défis, la promotion de
l’autonomie économique constituait l’un des objectifs prioritaires durant les années 1980. Le
gouvernement simplifia les différentes procédures d’approbation et d’autorisation qui freinaient
les initiatives privées et la créativité. Au début des années 1980, les politiques publiques de
développement mirent principalement l’accent sur la résolution des problèmes économiques
générés par l’expansion des industries lourdes et chimiques dans les années 1970. De solides
mesures de stabilisation de l’économie furent mises en œuvre pour infléchir les tendances
inflationnistes.
La déréglementation économique, qui minimise les interventions de l’État et accroît la liberté
individuelle, fut activement poursuivie. Des mesures furent également prises en vue
d’internationaliser et de libéraliser l’économie. En prévision des Jeux olympiques de Séoul en
1988, le gouvernement commença à miser plus activement sur l’international. La politique
accélérée de libéralisation des importations durant les cinq années du sixième plan de
développement économique aboutit à une libéralisation pour ainsi dire totale des importations de
produits manufacturés. Les tarifs douaniers furent également sensiblement abaissés. Ces
initiatives visèrent aussi à promouvoir la compétitivité internationale des industries nationales
par le biais d’une exposition accrue à la concurrence étrangère. Les politiques en matière de
commerce équitable et de concurrence furent renforcées pour réduire les inefficiences des
structures industrielles du pays et contrer les pratiques abusives des monopoles. En révisant à
deux reprises la Loi sur la réglementation des monopoles et le commerce équitable (Monopoly
Regulation and Fair Trade Act) en 1986 et 1990, le gouvernement consolida la base
institutionnelle de façon à réglementer les pratiques commerciales inéquitables et anticoncurrentielles.
Ces politiques de stabilisation, de déréglementation et de libéralisation contribuèrent à
maîtriser les tensions inflationnistes et améliorent considérablement la compétitivité
internationale des industries d’exportation. Cela n’empêcha toutefois pas la persistance de
problèmes tels que le fossé existant entre les petites et les grandes entreprises, les déséquilibres
entre les zones urbaines et rurales et la distribution inégale des revenus. Ainsi, dans les années
1980, le gouvernement consentit d’importants efforts pour améliorer la distribution des revenus
et promouvoir l’équité sociale. Le mouvement de démocratisation observé durant cette décennie
influença fortement, entre autres, les relations dans le monde du travail. La Déclaration de
réforme démocratique du 27 juin 1987 marqua un tournant capital dans les relations entre le
patronat et les syndicats en Corée. Une révision en profondeur du droit du travail, et notamment
des trois principales lois en la matière, fut mise en œuvre pour promouvoir les droits des
travailleurs et garantir la liberté d’action des syndicats. Il convient de noter la nette amélioration
de l’équité et des prestations sociales enregistrée à la fin des années 1980. Le gouvernement
décréta la loi sur le salaire minimum en 1988. La même année, il introduisit un système national
de retraites ainsi qu’un système national d’assurance médicale en 1989.
2.1.5 Années 1990 : libéralisation de l’économie
Les mesures politiques instaurées durant les années 1980 semblent avoir porté leurs fruits. A
titre d’exemple, l’économie coréenne renoua avec une croissance vigoureuse et l’année 1986
marqua le premier excédent de la balance courante enregistré depuis le lancement du processus
d’industrialisation axé sur les exportations. Les balances commerciales replongèrent néanmoins
dans le rouge en 1989 et d’autres types de problèmes, absents les années précédentes,
apparurent. Les salaires du secteur manufacturier s’envolèrent, dépassant la croissance de la
productivité. Allié à l’appréciation de la monnaie coréenne, ce phénomène diminua la
compétitivité de l’économie coréenne, induisant des déficits chroniques des comptes courants.
Suite à la flambée de la demande intérieure et à la rapide progression des salaires durant la
période d’excédents commerciaux, la balance des paiements afficha à nouveau des déficits.
Confronté aux nouveaux défis, le gouvernement nouvellement élu en février 1993 lança une
série de réformes économiques connues sous le nom de Plan quinquennal pour la nouvelle
économie. Ce plan reposait sur le principe que les différentes institutions mises en place au cours
des années précédentes ne fonctionneront plus dans le nouvel environnement économique. Sous
les régimes autoritaires en place durant les 30 dernières années de développement économique,
l’absence de systèmes et de règles socio-économiques explicites ne semblait pas avoir
sérieusement entravé le développement de l’économie et de la société. Cependant, le nouvel
ordre démocratique, qui donne une plus grande liberté individuelle et tend vers
l’internationalisation, appelle des règles et des systèmes économiques clairement définis qui
correspondent mieux aux normes internationales.
La réforme financière constituait une priorité absolue. La rationalisation des taux
d’intérêt avait débuté à la fin des années 1980 et les mesures de réforme financière ont
culminé en 1993 avec l’adoption par le nouveau gouvernement du « système de
transactions financières en nom propre ». Les réformes furent appliquées au départ dans
l’urgence totale, mais elles ne furent pas mises en œuvre de manière cohérente tout au
long du mandat du nouveau gouvernement. En particulier, l’appréciation du yen japonais
durant les années 1990 permit un boom des exportations coréennes, ce qui ralentit bien
évidemment les efforts de réforme.
2.2 Croissance économique et changements structurels
2.2.1 Performance macroéconomique
L’économie coréenne poursuit sa croissance économique élevée depuis sa marche vers
l’industrialisation, avec des fluctuations cycliques. Le taux de croissance moyenne du PIB dans
les années 1960 était de 8,5%, soit deux fois plus que dans les années 50. Le taux de croissance
moyenne du PIB dans les années 1970 était de 7,7%, cependant, si l’on exclut l’année 1980 lors
de laquelle le premier choc pétrolier a affecté le pays d’une croissance économique négative, les
années 1970 indiquent des taux de croissance économique de 8,8%, taux plus élevés que lors de
la décennie précédente. La tendance vers une croissance élevée s’est poursuivie dans les années
1980, avec des taux de croissance du PIB de 9,1%. Cependant, à mesure que l'économie est
entrée dans une phase mature de développement économique dans les années 1990, le taux de
croissance économique a été ramené à 7,2%. L’année 1998 a connu une croissance économique
négative à cause de la crise financière qui s’est installée à la fin de 1997. La tendance de la
croissance s’est redressée pour redevenir positive par la suite, mais en moyenne à des taux bien
inférieurs à ceux des décennies passées. La tendance établie de la croissance à la suite de la crise
financière manifeste que la Corée est désormais entrée dans la voie d’un fléchissement de la
croissance.
< Graphique 2-1> Taux de croissance annuels moyens du PIB
10
9 .1
8 .5
7 .7
8
]
7 .2
(%)
6
4
3 .9
2
0
1954-60
1961-70
1971-80
1981-90
1991-97
Source : Banque de Corée
Une autre caractéristique macroéconomique notable est la hausse continue des taux d’épargne
et d’investissement. Les taux d’épargne et d’investissement, mesurés en tant que pourcentage du
PIB, étaient restés tout à fait faibles dans les années 50, juste autour de 11%. Ces deux taux ont
commencé à augmenter à mesure que l’industrialisation à grande échelle s’est mise en place
dans les années 1960, en croissance rapide par la suite pour culminer dans les années 1990 avec
des taux d’épargne de 35% et des taux d’investissement de 37%. À l’exception des années 1980,
les taux d’investissement ont dépassé les taux d’épargne et le manque à gagner a été suppléé par
l’investissement étranger.
Le < Graphique 2-2> indique la tendance à long terme des taux bruts d’investissement de
1960 à 2004, avec une ligne de tendance qui correspond à une trajectoire d’équilibre à long
terme. Le graphique montre une courbe accentuée des augmentations des taux d’investissement
au cours des années 1960 et 1970, culminant vers la fin des années 1980. Les augmentations
rapides dans les années 1970 résultaient des politiques des HCI, tandis que les augmentations
très élevées s’étaient ralenties dans les années 1980 en raison des politiques de stabilisation et de
rationalisation. La ligne de tendance à long terme s’est infléchie à la baisse après avoir atteint un
point culminant. En observant la tendance de l’investissement, le processus de développement
économique de la Corée peut être divisé en trois phases différentes. Des augmentations rapides
et régulières des taux d’investissement dans les années 1960 et 1970 indiquent de façon non
équivoque que le développement économique au cours de la même période avait été entraîné par
l’investissement. Le rôle de l’investissement dans le développement économique était resté élevé
durant les années 1980, mais avec des taux d’accroissement en diminution, le point culminant
étant atteint vers la fin de cette décennie. Il apparaît qu’il y a un inversement de la tendance
après le point culminant : depuis les années 1990 l’économie coréenne devient de moins en
moins dépendante de l’investissement matériel. Après la fin des années 1980, la Corée entre dans
une phase mature du développement économique qui diffère du passé. Il convient d'observer que
le déséquilibre à long terme de l’investissement s’est maintenu deux fois : une première fois
dans les années 1980 et une autre fois au début des années 1990 avant la crise financière de
1997. Comme cella a été mentionné ci-dessus, le déséquilibre de l’investissement dans les
années 1980 résultait de la politique industrielle consistant à rationaliser le surinvestissement des
années 1970. La politique de rationalisation s'est avérée un succès et l'économie coréenne a
retrouvé le chemin de la croissance au cours des années 1980. Toutefois, le surinvestissement du
début des années 1990 jusqu’à ce qu’éclate la crise financière de 1997 est un cas opposé. À
l’orée des années 1990, le gouvernement coréen avait senti la nécessité de réorganiser sa
structure économique et avait essayé de mettre en œuvre des réformes à travers plusieurs
mesures, comme cela a été exposé dans la partie précédente. Cependant la réforme n’a pas été
mise en œuvre de façon constante. Le gouvernement et l’industrie ont plutôt opté pour une
expansion des capacités de production.
<Graphique 2-2> Taux d’épargne et d’investissement
40
35
(% of GDP)
32
29
30
37
31
23
19
20
15
11
12
10
0
1953- 60
1961- 70
1971- 80
gro ss saving
1981- 90
gro ss investment
Source : Banque de Corée
1991- 97
<Graphique 2-3> Tendance à long terme des taux bruts d’investissement, 1960-2004
(% )
4 0 .0
1 0 .0
1960
1964
1968
1972
1976
1980
1984
1988
1992
1996
2000
2004
Remarque : 1) Le taux brut d’investissement est la part de formation brute de capital fixe dans
le PIB dans les comptes nationaux.
2) La ligne en pointillé représente la tendance des taux de croissance de l’investissement en
régression avec une équation quadratique.
2.2.2 Structures industrielles et structures du commerce extérieur
Le processus d’industrialisation a été accompagné par des changements radicaux dans la
structure industrielle. En 1953, les secteurs primaires, qui comprennent l’agriculture, la
sylviculture, et l’extraction minière, représentaient 48% de l’économie. Cependant, à mesure que
l'industrialisation a été engagée dans les années 1960, la part du secteur primaire a rapidement
diminué, pour passer à 5% en 2000. À la place, c’est la part des industries manufacturières et des
services qui a régulièrement augmenté, l’industrie manufacturière passant à 29 % et celle des
services à 65% en 2000. Par ailleurs, la composition sectorielle des industries manufacturières a
spectaculairement évolué au cours des années. Jusqu’au début des années 1970, les industries
manufacturières étaient essentiellement composées d’industries légères telles que le textile,
l’habillement, l’alimentation et les boissons. Au tournant des années 1980, la part de l’industrie
lourde et chimique constituait plus de la moitié des industries manufacturières et à continué à
augmenter par la suite : En 2000, environ 80% du secteur manufacturier était constitué de
l’industrie lourde et chimique. En plus de la transformation externe de la composition du secteur
manufacturier, le contenu intrinsèque des activités de production du secteur manufacturier a
également considérablement changé. Par exemple, la structure principale de production de
l’industrie chimique dans les années 1970 est restée constituée pour l’essentiel de la production
de masse de produits pétrochimiques, mais elle a connu une expansion vers les produits
chimiques spéciaux et les produits chimiques fins au cours des dernières années.
<Tableau 2-1> La structure de production de l’économie coréenne, 1953-2000
(Unité : %)
Agriculture,
Pêches/Extr
action minière
Secteur
manufacturier
Industries
légères
1953
48,4
9,0
78,9
1960
38,9
13,8
76,6
1970
28,7
21,3
60,8
1980
16,7
28,6
45,6
1990
9,3
28,9
32,6
2000
5,3
29,4
20,7
Source : Banque de Corée, Comptes nationaux, chaque année
Industries
lourdes et
chimiques
21,1
23,4
39,2
54,4
67,4
79,3
Services
42,6
47,3
50,0
54,7
61,8
65.3
Parallèlement aux changements dans la structure industrielle, les industries de pointe dans le
secteur manufacturier sont en train de changer au cours des différents stades du développement
économique. Les changements dans le secteur manufacturier apparaissent dans le fractionnement
en dix industries de pointe au <Tableau 2-2>. À chaque période sont signalées les industries de
pointe, lesquelles ont changé, à partir des industries légères à forte intensité de main d’œuvre,
parmi lesquelles les industries de l’alimentation et de la boisson, jusqu’aux industries lourdes et
chimiques, à forte intensité de capital, et jusqu’aux industries de haute technologie, telles que le
secteur de l'électronique. Jusqu’au début des années 1980, l’alimentation, la boisson, le textile et
l’habillement sont en pointe de la croissance du secteur manufacturier avec une part d’environ la
moitié de ce secteur, mais la croissance de ces deux secteurs s’est ralentie au fil des ans. Les
produits électriques et électroniques, ainsi que l’automobile se sont affirmés dans un rôle de
pointe dans les années 1990, et l’industrie chimique est venue les rejoindre ultérieurement, ces
trois industries indiquant des taux de croissance plus élevés que ceux constatés dans les
industries légères telles que le textile et l’habillement.
<Tableau 2-2> Les dix premières industries de pointe dans le secteur manufacturier coréen
Ran
g
1
1970
Industries
Alimentation
et boissons
Part
28,6
1980
Industries
Industrie
textile et
habillement
Part
19,2
1990
Industries
Produits
Part
14,6
(Unité : %)
2000
Industries
Part
Produits
25,2
2
3
4
Industrie
textile et
habillement
Produits
chimiques
Automobile
20,4
Alimentation
et boissons
19,0
Automobile
13,2
Produits
chimiques
13,9
11,5
Produits
chimiques
13,1
Alimentation
et boissons
12,9
Automobile
11,3
9,1
Produits
10,4
Produits
chimiques
12,9
Produits
métalliques de
base
8,0
11,5
Alimentation et
boissons
6,9
9,0
Machines
6,9
5,6
Industrie textile
et habillement
6,9
Produits
5,5 métalliques de
base
6,7
Produits
minéraux non
métalliques
5,3
Automobile
6,1
Charbon et
pétrole raffiné
4,2
Charbon et
pétrole raffiné
5,5
5
Papier et
imprimerie
6
7
8
Produits E&E
3,7
9
Machines
2,3
10
Produits
métalliques de
base
Ensemble du
secteur
manufacturier
(en % du PIB)
1,5
Produits
minéraux non
métalliques
Papier et
imprimerie
Machines
Ensemble du
secteur
21,2
manufacturier
(en % du PIB)
5,3
3,9
3,7
28,2
Industrie
textile et
habillement
Produits
métalliques de
base
Produits
minéraux non
métalliques
Machines
Papier et
imprimerie
Produits
métalliques
fabriqués
Ensemble du
secteur
manufacturier
(en % du PIB)
5,5
4,6
Produits
métalliques
fabriqués
Papier et
imprimerie
4,8
4,3
3,8
Charbon et
pétrole raffiné
4,2
28,8
Ensemble du
secteur
manufacturier (en
% du PIB)
29,4
Remarque : Les parts sont en pourcentage du total de la valeur ajoutée du secteur manufacturier. E&E
signifie le secteur de l’électricité et de l’électronique.
Source : Banque de Corée, Comptes nationaux et Annuaire statistique, divers numéros
La composition évolutive du secteur manufacturier résulte de changements dans les
conditions factorielles de l’économie, qui se manifeste également dans la structure des échanges
commerciaux. Comme l’illustre le <Graphique 2-4>, au cours des premières années du
développement économique, l’industrie du textile et de l’habillement était le seul secteur
montrant des avantages comparatifs. Après le textile et l’habillement, les produits électriques et
électroniques sont venus contribuer positivement à la balance commerciale depuis le début des
années 1970, suivis par le matériel de transport, y compris les automobiles et les navires. Les
produits chimiques dans leur ensemble ne sont devenus un excédent commercial qu’après le
milieu des années 1990, mais la composition de ce secteur a grandement changé. Lors de
premiers stades de développement, l’industrie chimique coréenne a montré une forte
compétitivité dans les produits chimiques industriels tels que les produits pétrochimiques, les
matières plastiques et le caoutchouc, mais elle dépendait fortement des matières importées et des
produits chimiques fins. Ce n’est que récemment que la Corée a étendu sa production intérieure
de matières et produits chimiques fins afin de diminuer sa dépendance envers les importations.
Le secteur des machines est le moins développé en termes de compétitivité internationale, tout
en faisant des progrès réguliers.
<Graphique 2-4> Indice de spécialisation du commerce extérieur
1
0
-1
1967
1972
1977
1982
T e xtile & A p p a re l
C h e m ic a ls
E le c tric a l & E le c tro n ic p ro d u c ts
1987
1992
1997
2002
M a c h in e ry
T ra n s fo rta tio n E q .
2.3 Éléments de succès de la croissance économique de la Corée
2.3.1 Bilan d’ensemble
Le processus de développement économique de la Corée a entraîné de considérables
augmentations dans le revenu par tête, 132 fois en quarante ans en termes nominaux. En même
temps, ce processus s’est également engagé dans « la transformation de techniques, de
l’organisation, et de la composition de la production dans la direction d’une productivité accrue,
habituellement avec une croissance concomitante ». (Landes, 1998.) Le [TABLEAU 2-4]
récapitule certaines des caractéristiques clés de ces transformations. Avec une croissance de la
population de 27 millions d’habitants en 1962 à 48 millions d’habitants en 2002, la part de la
population active dans l’économie a également augmenté, passant de 56% à 62% au cours de la
même période, tandis que le taux de chômage a diminué, passant de 8,2% à 3,1%. Lorsque
l’industrialisation a commencé, 48% de la population endurait une pauvreté absolue, mais en
1990, ce taux avait substantiellement diminué, passant à 7,6%. L’amélioration concomitante du
bien-être des habitants est bien reflétée dans les augmentations régulières en PNB par habitant
pendant les années d’industrialisation : de 87 US dollars en 1962 à 11.499 US dollars en 2002. Il
en découle que les buts du développement économique visant à « établir une économie
autocentrée et à faire en sorte que la vie des habitants vaille la peine d'être vécue » (préambule
du premier Plan quinquennal de développement économique) sont effectivement atteints.
<Tableau 2-4> Structure de l’économie coréenne, 1962-2002
Population (millions)
Population active (en %)
Taux de chômage (en %)
Pauvreté absolue (en %)
PNB
(en
milliards
US
dollars actuels)
Taux
de
croissance du PNB
(en %)
Indicateurs
PNB/par habitant
macroéconomi
(en US dollars
ques
actuels)
Investissement
brut (en % du
RNBD)
Épargne
brute
(en % du RNBD)
Agriculture.,
sylviculture, pêche
Structure
et
extraction
industrielle (en
minière
% de valeur
Secteur
ajoutée)
manufacturier
Services
Agriculture,
sylviculture, pêche
extraction
Structure de et
minière
l’emploi
(%)
Secteur
manufacturier
Services
Exportations (en
millions US dollars
actuels)
Structure du
% d’exportation
commerce
de
biens
extérieur
d'équipement
Importations (en
millions US dollars
actuels)
1962
26,5
56,4
8,2
48,3
(‘61)
2.3
1972
33,5
57,7
4,5
23,4
(‘70)
10.7
1982
39,3
58,6
4,4
9,8
(‘80)
74.4
2.2
4.6
87
1992
43,7
60,9
2,5
7,6(‘90)
2002
47,6
61,9
3,1
-
329.3
547.5
7.5
5.9
7.2
320
1.893
7.527
11.499
11,0
21,4
28,9
37,2
29,1
9,9
17,0
25,7
36,8
31,3
37,0
28,7
15,9
7,7
4,1
16,4
20,8
27,0
27,2
27,2
46,7
63,4
50,5
50,5
57,1
32,1
65,1
14,0
68,7
9,3
7,5
14,1
21,9
26,5
19,2
29,1
54,8
35,4
1.624,1
46,1
21.853,
4
59,5
76.631,
5
71,5
162.470
,5
9,8
25,2
37,5
41,6
2.522.0
24.250,
8
81.775,
3
152.126
,2
4,9
(1968)
421,8
-% d’importation
de
biens
d'équipement
Taux
d’analphabétisme (en %)
Inscription
à
l’université
de
diplômés
du
Ressources
secondaire (en %)
humaines
Nombre
de
diplômés
de
l’université
-% part des
diplômés de S & E
Dépense
intérieure brute de
R-D en part du
PNB en (%)
Part
des
entreprises privées
Indicateurs
dans la dépense
de
intérieure brute de
technologie :
R-D
Nombre
de
chercheurs
Brevets
par
millions d’habitants
16,5
29,9
25,7
37,7
37,1
29,4(
‘60)
29,2
12,4(‘7
0)
29,0
7,2(‘80)
4,1(‘90)
37,7
34,3
2,2(‘20
00)
74.2
20.452
29.544
62.688
178.631
244.852
34,6
45,7
46,4
40,9
44,5
0,25
(1963)
0,29
0,96
2,03
2,53
22,2(19
67)
31,9
50,4
82,4
73,3
1.750(‘
63)
10,0(19
68)
5.599
28.448
88.764
189.888
6,5
66,3
240,1
951,3
Source : La Corée en tant qu’économie du savoir
La croissance économique et la rapide transformation industrielle de la Corée est
généralement considérée comme un modèle à suivre dans l’histoire économique du monde
moderne. La façon dont la Corée a atteint une telle croissance miraculeuse pendant de courtes
périodes de temps a donné lieu à de nombreuses publications laissant paraître un éventail
d'opinions différentes, voire divergentes. Comme l'état arriéré de l’économie donne en général
une opportunité de rattraper la croissance, le développement économique rapide de la Corée
partage certains éléments de succès en commun avec les expériences des pays récemment
industrialisés. Des stratégies d’industrialisation orientées vers l'exportation ont ainsi été mises en
œuvre par la plupart des économies s’industrialisant avec succès en Asie de l’Est, parmi
lesquelles la Corée. Le lancement de la croissance de rattrapage avait nécessité le recours à de
nouveaux investissements, et le maintien réussi d’une propension élevée à l’épargne dépend de
la capacité d’un pays à soutenir des taux élevés de rendement sur investissement. La croissance
orientée vers l'exportation à travers la concurrence internationale entre prix et qualité aboutit en
effet à atteindre cet objectif, et la Corée constitue un cas exemplaire du rôle de la promotion des
exportations pour les derniers venus dans leur achèvement de l’industrialisation. M. Nam Duck-
Woo, ancien Premier Ministre, prend en compte les facteurs suivants en vue d'un développement
économique réussi. Facteurs économiques : 1) une stratégie d'ouverture vers l'extérieur, 2) un
bon usage des ressources étrangères, 3) un environnement international favorable, 4) l’éducation,
5) la croyance dans le système de la libre entreprise, 6) un rôle actif joué par le gouvernement.
Facteurs non économiques : 1) l’homogénéité ethnique et culturelle et une forte tradition
confucéenne qui attache beaucoup de valeur à l’éducation, la réussite et la loyauté envers la
nation. 2) la menace sur la sécurité, 3) le leadership politique (Nam, 1997)
Il convient de mentionner certaines caractéristiques supplémentaires notables du processus de
développement économique de la Corée. Tout d’abord, d'après la dimension macroéconomique,
les taux d’investissement et d’épargne élevés signifient que la transformation économique de la
Corée a été obtenue par un investissement massif de capitaux. L’accumulation du capital par la
Corée a été possible grâce à des augmentations de l’épargne intérieure, et les pénuries d’épargne
intérieure des premières années ont été compensées en attirant des capitaux étrangers.
Deuxièmement, la composition de l’industrie et de la main d’œuvre a évolué dans la direction
d’une productivité plus élevée, à mesure que la part du secteur manufacturier a régulièrement
augmenté. Par ailleurs, le commerce extérieur a fondamentalement transformé sa structure, de
l’exportation de produits primaires à celle de produits manufacturés, y compris les exportations
de biens d’équipement, plus de 40 % du total des exportations en 2002. Troisièmement, les
changements dans les structures de l’industrie, de l’emploi et du commerce extérieur ont été
précédés par de remarquables améliorations en ressources humaines et en technologie, les deux
plus importants facteurs de soutien de la croissance économiques permettant les économies
d'efficience. Malgré les débats sur la nature des performances de croissance de l’Asie de l’Est, il
est évident que la Corée a consenti à des efforts considérables pour mettre à niveau son savoir et
les bases de ses ressources humaines. Le processus d’industrialisation de la Corée n’est pas
seulement le processus de l’accumulation du capital. Il est également un processus
d’apprentissage, un concept clé de l’économie du savoir. <Tableau 2-5> Performance de
productivité dans le secteur manufacturier en Asie du Sud et de l'Est
(Unité : en pourcentage des États-Unis)
Chine
1963
Valeur
ajoutée brute
par travailleur
Stocks de
capital fixe par
Inde
Indonésie
7,5
Taïwan
Corée
11,8
7,2
1975
6,3
7,2
10,5
19,3
16.5
1987
5,7
8,4
9,2
26,6
26,5
1993
6,3
10,9
11,6
31,3
49,1
8,5
15,8
22,4
21,0
1963
19,3
1975
17,0
30,1
travailleur
Facteur total de
la productivité
1987
20,1
21,8
29,9
44,0
1993
22,9
22,7
47,4
84,7
1963
17,7
39,5
23,0
1975
16,3
18,9
36,8
39,2
1987
15,4
17,8
40,8
36,7
1993
17,2
20,1
38,4
45,5
Source : Timmer et Szirmai (1999).
2.3.2 Gérer l’économie en vue de l’industrialisation
Accomplir la « vision de l’industrialisation » requiert de considérables efforts tant de la part
du gouvernement que de l’industrie : le gouvernement a mis en œuvre des politiques
interventionnistes pour atteindre les objectifs de développement et l’industrie a répondu en se
lançant dans les nouvelles affaires. La création des cadres institutionnels encourageant la
mobilisation des ressources vers des domaines ciblés a fait partie des tâches primordiales pour le
gouvernement, tandis que l’assimilation des technologies fait partie des tâches principales de
l’industrie. L’industrialisation est le résultat à la fois de l’accumulation et de l’assimilation, ce
qui a été rendu possible par les efforts concertés tant du gouvernement que de l’industrie.
Le rôle actif du gouvernement comporte plusieurs dimensions, dont le plan de développement
économique est la manifestation la plus claire. En tant qu’organisme gouvernemental
responsable de concevoir et de mettre en œuvre les plans de développement, le Conseil de
planification économique (Economic Planning Board/EPB) vit le jour en 1961. L’EPB, en tant
qu’agence centrale de planification économique et de coordination, avait exercé une grande part
de contrôle sur les autres ministères économiques jusqu’à ce qu’il soit transformé en ministère
des Finances et de l’Économie (MOFE) en 1994. Le gouvernement coréen a formulé une série
de plans quinquennaux pendant 35 ans à partir du lancement du premier Plan de développement
économique quinquennal en 1962. Chacun des plans quinquennaux a défini les objectifs de
développement de l’économie coréenne, tout en recherchant un accord national sur la direction
des politiques à moyen et à long terme en harmonisant les diverses opinions émises par
différentes couches sociales. Habituellement, les ministères et agences individuelles du
gouvernement déterminaient leurs propres objectifs et stratégies dans le domaine de leurs
propres missions, tandis que l’EPB jouait un rôle de « planificateur social » à travers la
coordination de ces plans et en concevant ainsi un plan détaillé final qui ait de la cohérence au
niveau de la nation. Au cours des premières phases de développement économique, le
gouvernement a assumé un rôle déterminant dans la formulation des plans. Les questions
essentielles à examiner dans le cadre de ces plans étaient celles des investissements sectoriels et
de la mobilisation du capital intérieur et étranger en vue de financer de tels investissements. À
mesure que la taille de l’économie a augmenté et que la structure économique est devenue plus
complexe, la stratégie de développement économique conduite par le gouvernement est devenue
moins efficace. En conséquence, depuis les années 1980, le plan quinquennal s’est transformé en
un plan indicatif, respectant l’initiative et la créativité du secteur privé. L’expansion des
capacités productives et la mobilisation des ressources nécessaires ont constitué les priorités
essentielles des plans des premières années, tandis que dans les dernières années la
rationalisation industrielle et la stabilisation macroéconomique se sont efforcé de rendre
l’économie plus efficiente et productive. Malgré le rôle actif joué par le gouvernement dans la
conception et la mise en œuvre des plans économiques, les plans ont constamment souligné
l’importance du marché en tant que mécanisme principal de leur mise en œuvre.
Parallèlement aux les arrangements organisationnels, le gouvernement a effectué des
interventions d’envergure dans les marchés financiers. Au début de 1961 le gouvernement
expropria la majorité des actions du secteur bancaire que détenaient les grandes compagnies et
limita le droit de vote des actionnaires privés, se donnant ainsi les moyens d'exercer un contrôle
direct du système bancaire. L’année suivante, la loi de la Banque de Corée fut révisée de façon à
donner davantage de pouvoir discrétionnaire en matière de politique financière et bancaire au
ministère des Finances. En outre, les banques privées durent déposer une partie de leur épargne à
la Banque de développement de Corée, contrôlée par le gouvernement, afin que les dépôts
puissent être transférés dans les projets de développement industriel. Les prêts à l'appui avaient
atteint plus d’un tiers du total des prêts bancaires à l'époque bénie de l’industrialisation. Outre les
prêts à l’appui affectés aux dépenses dans les domaines ciblés, le gouvernement avait maintenu
deux différents taux d’intérêt. Dans le but d’attirer l’épargne intérieure, les taux d’intérêt pour les
dépôts d'épargne à terme d’un an furent doublés de 15% à 30 % en 1965, tandis que les taux
d’intérêt pour les prêts à l’exportation restaient à 6,5% par an, offrant ainsi une incitation directe
à l’exportation. (Park Hun Joo, 2004, p. 463) À travers l’ensemble de ces actions, le système
bancaire de Corée s’est transformé en vue d'appuyer les objectifs de développement industriel du
gouvernement.
<Tableau 2-6> Taille et pourcentage des prêts à l’appui réalisés par les banques de dépôt
(Unité : milliards de won, en %)
Année
Total
Prêts d'ordre général
1970
722,4
510,5
(70,7)
Prêts à l’appui
211,9
(29,3)
Prêts à l'exportation
55,9
(7,7)
1975
2.905,5
2.117,9
12.204,
1980
7.904,8
4
33.810,
23.382,
1985
7
6
Source : La Banque de Corée
(72,9)
787,6
(27,1)
339,2
(11,7)
(64,8)
4.299,6
(35,2)
1.720,8
(14,1)
(69,2)
10.428,
1
(30,8)
3.129,9
(9,3)
Malgré ces mesures, toutefois, la Corée a souffert des pénuries chroniques d'épargne
intérieure et ceci a conduit le pays à dépendre fortement des capitaux étrangers pour financer
l’industrialisation rapide. Afin de faciliter l’entrée de capitaux étrangers, le gouvernement
promulgua la loi sur les capitaux étrangers en 1962, dont l’un des mandats clés était la garantie
du délai de récupération des capitaux étrangers importés par la Banque de Corée, garanti à son
tour par le gouvernement. Les prêts à moyen et à long terme et les investissements directs
étrangers s’élevaient à seulement 300 millions de dollars au cours du premier Plan, mais ils ont
substantiellement augmenté au cours des deux plans subséquents, de 2,3 et 6,0 milliards de
dollars respectivement. Pendant les quatre années du quatrième plan, le montant des flux de
capitaux étrangers a atteint 10,7 milliards US dollars. Les capitaux étrangers ont joué un rôle très
important dans la mise en œuvre des stratégies de développement. L’accélération de l’entrée de
capitaux étrangers n’a pas été le seul facteur à contribuer à la croissance économique en
finançant l’expansion des capacités de production. Le transfert concomitant de technologies
avancées a également été la source d’augmentations de gains de productivité. Comme l’illustre
le <Graphique 2-5>, un mouvement étroitement parallèle apparaît entre les importations de biens
d’équipement et les paiements de redevances pour les technologies étrangères sous licence, ce
qui signifie que, parallèlement aux importations de biens d’équipement financées en partie par
des capitaux étrangers, le secteur a accompli de grands efforts pour faire l’apprentissage de
l’industrialisation.
<Tableau 2-7> Entrée de capitaux étrangers
Premier Plan
(1962-1966)
(Unité : (en millions US dollars actuels)
Deuxième
Troisième
Quatrième
Plan
Plan
Plan
(1967-171)
(1972-1976)
(1977-1980)
Prêts
291
2.166
5.432
10.256
- Publics
116
811
2.389
4.084
- Commerciaux
175
1.355
3.043
6.172
Investissement
étranger
17
96
557
425
direct
Total
308
2,262
5,989
10,681
Remarque : Les capitaux et les prêts bancaires à court terme sont exclus.
Source : Gouvernement de la République de Corée, le Plan quinquennal de développement
économique et social, 1982, p.5.
<Graphique 2-5> Paiement de redevances et importations de biens d’équipement
(growth rate in 3 year moving average, %)
50
40
30
20
10
0
69
70
71
72
73
74
75
76
77
78
79
80
81
82
83
84
85
86
87
88
89
90
91
92
-10
-20
R o ya lty p aym e nt
C a pita lgo o d s im po rts
Source : Office National de la Statistique
2.3.3 Construire des capacités technologiques
La Corée a fait de grands efforts pour construire des capacités technologiques dans le pays.
Les sciences et la technologie constituent un des secteurs de dépenses prioritaires : par exemple,
lors de la conception du premier Plan quinquennal de développement économique, l’EPB a
également réalisé le « premier plan quinquennal de promotion de la technologie » Le plan de
technologie affirme explicitement l’importance des efforts de développement des technologies
dans le pays en vue d'une industrialisation réussie. Le montant brut des dépenses en recherche et
développement de la Corée (GERD/DIRD) a remarquablement augmenté tant en taille qu’en
intensité : la part de pourcentage du DIRD s’est accrue, passant de 0,25% en 1963 à 2,64% en
2003. Le nombre des chercheurs a été multiplié par 100 en quarante ans, de 1.900 à 198.500. Les
augmentations rapides en R-D ont été rendues possibles grâce à une expansion active de
l’investissement du secteur privé. Au cours des premières années de l’industrialisation, les
dépenses en R-D du secteur privé étaient négligeables. Cependant, après que la croissance rapide
de l’économie a réclamé des investissements appropriés dans le développement des
technologies, les entreprises privées ont continuellement augmenté la R-D. En conséquence, les
sources de financement ont aussi considérablement changé : la part de la DIRD financée par les
pouvoirs publics a continuellement diminué, et au cours des dernières années seulement un quart
de la DIRD est venue des pouvoirs publics.
Le processus d’édification des capacités technologiques en Corée peut être caractérisé par un
processus dynamique de jeu réciproque entre les technologies importées et les efforts du pays en
R-D. Le <Graphique 2-7> illustre la tendance du taux de paiement de la redevance par rapport
aux dépenses en R-D sur l’axe horizontal, et la tendance de l’intensité de la R-D est observée en
termes de dépenses en R-D par rapport aux ventes de 1976 à 2002. Le taux de paiement de la
redevance par rapport à la DIRD a substantiellement diminué jusqu'au début des années 1980, ce
qui signifie que la croissance de la DIRD a excédé celle du paiement des redevances. L’intensité
de la R-D, cependant, n’a pas augmenté, car elle reste au niveau de 0,5%. Le début des années
1980 indique clairement un changement dans les tendances. Alors que le taux de paiement de la
redevance par rapport à la DIRD est resté au niveau de 30%, l’intensité de la R-D avait
commencé à s’accroître.
<Graphique 2-6> Tendance de la R-D, 1963-2003
3
90
80
2.5
70
2
60
50
1.5
40
1
30
20
0.5
10
GERD/GDP (%, left axis))
2003
2001
1999
1997
1995
1993
1991
1989
1987
1985
1983
1981
1979
1977
1975
1973
1971
1969
1967
1965
0
1963
0
private share of GERD (%, right axis)
Source : ministère des Sciences et de la Technologie
<Graphique 2-7> Relation changeante entre le paiement de la redevance et la R-D (19762002)
BERD/Sales
2 .5
1994
2002
1996
2 .0
1992
1988
1 .5
1998
2000
1990
1986
1984
1 .0
1982
0 .5
1978
1980
1976
0 .0
0
20
40
60
80
R o ya lty P a ym e n t/B E R D
100
120
Source : La Corée en tant qu’économie du savoir
À la base de ces relations évolutives, tant le secteur privé que les pouvoirs publics ont fait
des efforts concertés de développement des capacités technologiques. Premièrement, il y a eu un
changement de cap fondamental dans la stratégie globale. Au cours des premières années, la
compétitivité internationale dépendait dans la plupart des cas de facteurs de coûts tels que les bas
salaires et les économies d’échelle basées sur la production de masse. Comme les technologies
importées étaient d’une nature qui nécessitait une simple assimilation et adaptation, il n’y avait
pas besoin d’organiser des activités de R-D. Au cours des années suivantes, au contraire, à
mesure que l'avantage au niveau des coûts d’une main d’œuvre qualifiée à bon marché s’épuisait
et que la structure économique se transformait en secteurs à forte composante technologique, il y
eut un besoin pressant pour des activités R-D institutionnalisées. Le secteur privé répondit à ce
besoin en établissant des laboratoires de R-D sur place.
Conformément aux premiers stades de développement économique, le gouvernement coréen
a transformé avec succès l’orientation de sa politique en matière de sciences et de technologie.
Au cours des premières années, l’importance de bâtir l’infrastructure du développement
technologique a été mise en relief, tandis qu’au cours des années suivantes on a plutôt insisté sur
l’importance du développement technologique plus spécifiquement ciblé. Au cours des
premières années du lancement des plans développement économique à grande échelle, les
pouvoirs publics coréens ont reconnu très clairement que les sciences et la technologie joueraient
un rôle important dans les années à venir. Dans les années 1960, deux mesures d’orientation
dignes d’intérêt ont été lancées à cet égard : l’établissement de KIST (1966) et de MOST (1967).
Ces deux institutions, conjointement avec KAIS, qui a été établi en 1971, ont exercé une
influence puissante sur la communauté des sciences et technologies en Corée. MOST a été le
concepteur principal de la politique d’ensemble de la Corée en matière de S&T ; KIST a joué le
rôle d’un fonctionnaire technologique en répondant aux exigences industrielles pour une rapide
croissance économique ; et KAIS (par la suite KAIST) a d’abord mis en œuvre le concept de
l’université orientée vers la recherche dans le système de l’enseignement supérieur en Corée. En
dépit des efforts des pouvoirs publics en vue de bâtir des institutions de S&T dans les années
1960 et de définir des infrastructures de S&T telles que les GRI (Global Reporting Initiatives)
spécialisés en plus du KIST dans les années 1970, la politique de S&T a joué un rôle limité
durant ces années.
Les capacités technologiques des industries d’exportations à forte intensité de main d’œuvre
dans les années 1960 et dans l’industrie lourde et chimique dans les années 1970 ont pu
facilement être acquises à partir des sources étrangères. (OCDE, 1996, p. 27) Des changements
significatifs sont survenus dans les années 1980, à mesure que de nombreuses industries
d’exportation coréennes se sont éloignées de la production pour le compte des équipementiers
informatiques (OEM) et ont commencé à être commercialisées sur le plan international sous
leurs propres noms de marque. Les changements dans la stratégie concurrentielle des sociétés
ont engendré de nouveaux défis en matière de politiques gouvernementale. Dans le passé, la
politique de S&T avait été orientée vers l’offre, pour apporter les fondations nécessaires à
l’adoption de technologies étrangères. Au cours des années 1980 la direction de la politique de
S&T s’est orientée cers l’encouragement des activités de R-D. Le ministère des Sciences et de la
Technologie a lancé un programme national de R-D en 1982, et par la suite d’autres ministères
ont mis en place des programmes de R-D thématique.
2.3.4 Investissement dans le développement des ressources humaines
Les pouvoirs publics ont appliqué leur politique en faveur du DRH (développement des
ressources humaines) et de l’ensemble du système éducatif dans les stades de développement de
l’économie. Au cours des années initiales, la politique de l’éducation a été axée sur l’expansion
de l’éducation primaire et secondaire qui est critique en vue de fournir une main d’œuvre
instruite à l’industrie. La caractéristique la plus évidente du développement de l’éducation dans
les années 1960 fut l'expansion quantitative de l’inscription des élèves et le nombre d'écoles.
L’achèvement d’un programme d’éducation obligatoire de six ans a permis aux enfants de tous
les groupes d’âge correspondants de s’inscrire dans les écoles, et le nombre d’élèves du
secondaire a triplé comparé à celui des décennies précédentes. Les lycées professionnels ont été
établis dans les années 1960 pour fournir une formation en compétences professionnelles pour
les métiers du secteur croissant des industries légères à forte intensité de main d’œuvre. Le
renforcement de la formation professionnelle à l’école fut l’un des domaines prioritaires des
plans de développement économique au cours des années 1970. Les collèges d’enseignement
professionnel furent établis dans les années 1970 afin de fournir des techniciens pour l’industrie
lourde et chimique. Le cadre de la formation professionnelle a été institutionnalisé par l’adoption
de la « loi sur la formation professionnelle de base » de 1976, laquelle a été entièrement
modifiée en 1981. En plus des établissements publics de formation professionnelle, le système
de la répartition des coûts de la formation entre les entreprises et les pouvoirs publics fut
introduit dans le but de faciliter la formation extrascolaire par les entreprises. Depuis 1976, il a
été demandé aux grandes entreprises soit de former leurs employés soit de payer un impôt au
gouvernement pour le coût de la formation professionnelle dispensée dans les établissements de
formation.
Au cours des années 1970 et 80 il a été procédé à l’expansion rapide de l’enseignement
supérieur des deux façons suivantes : un accroissement de l’inscription des élèves et la
diversification des établissements d’enseignement supérieur. À mesure que les collèges collège
pré-universitaires ont assumé une plus large part de l’enseignement supérieur, leurs programmes
ont été diversifiés pour répondre aux besoins de l’industrie. Le 30 juillet 1980, les pouvoirs
publics ont annoncé la « réforme de l’éducation » qui comprenait des mesures telles que la
suppression de l’examen d’entrée à l’université, la rénovation des installations scolaires et
l’introduction d’incitations pour les enseignants. Afin de financer les mesures de la réforme de
l’éducation, le gouvernement a introduit l’impôt éducatif. La disponibilité de la main d’œuvre a
connu des tensions dans les années 1980. Le taux d’accroissement de la population active a
fortement décru dans les années 1980, en comparaison avec la décennie précédente, alors que la
demande de main d’œuvre a continué à croître à mesure que l’économie montrait un taux annuel
moyen de croissance de 10% dans la seconde moitié des années 1980. Les changements dans la
demande de main d’œuvre, dus à la croissance économique rapide, vers un effectif plus
compétent et de haut calibre dans les années 1980 invitèrent à un renforcement de l’éducation en
sciences et ingénierie dans les universités. « Réformer l’éducation et le système de formation
pour répondre aux besoins d’une société en train de s’industrialiser, » fut l’un des dix principaux
objectifs de politique et programmes du septième plan quinquennal de développement
économique et social de 1992.
<Table 2-8 > Tendances du budget de l’éducation et impôt éducatif de 1996 à 2004
1996
1998
2000
2002
2004
17,9
19,4
22,9
28,1
33,3
3,99
4,01
3,95
4,11
4,28
Total du budget de l’éducation en billions
de won (A)
- En part du PIB (en %)
Impôt éducatif en billions de won (B)
3,8
4,5
5,1
7,6
7,6
B/A [autorisation budgétaire] (%)
21,5
23,2
22,3
26,9
22,9
Source : ministère de la Planification et du Budget
Le système éducatif coréen a fait l’objet d’une série de réformes comme par exemple celle
de juillet 1980. Les priorités des réformes ont changé en fonction des étapes du développement
social et économique, et pourtant le fil directeur des réformes reflète une constance dans la
vision de « l’éducation en tant que levier principal du développement national ». (Commission
présidentielle sur les réformes éducatives [PCER], 1997, p.17). Toutefois, les réformes
éducatives n’ont pas toujours été réussies. L’expansion quantitative fut plutôt aisée à mettre en
œuvre ; par exemple, les nouveaux besoins industriels dans les années 1970 ont été satisfaits en
accroissant les capacités d’inscription dans les universités. Cependant, l’amélioration de la
qualité passe, entre autres éléments, par des dépenses d'équipement. L’investissement des
pouvoirs publics dans l’éducation a régulièrement augmenté mais pas suffisamment pour
financer les montants imputables au renforcement de la qualité. Le rapport PCER énonça le
problème de financement dans les termes suivants : « Au cours des 30 dernières années, la
transformation de la croissance économique et sociale s’est déroulée à un rythme stupéfiant.
Toutefois, l’investissement dans l’éducation a augmenté d’une lenteur lamentable. (op. cit., p.18)
En 1995, les dépenses brutes dans l’éducation en pourcentage du PIB étaient au dessus de
la moyenne des pays de l'OCDE. Cependant, l’investissement public est bien inférieur à celui de
la moyenne des pays de l’OCDE ; l’insuffisance de l'investissement est en grande partie
compensée par des sources privées. En plus des augmentations de l’investissement dans
l’éducation, il est nécessaire que le système éducatif coréen encourage la créativité. Le plan de
réforme de l’éducation annoncé en 1997 énonçait succinctement les défis auxquels la Corée était
confrontée : « L’éducation coréenne, ayant enregistré en termes quantitatifs une croissance
marquée à l’époque de l’industrialisation, ne conviendra plus à l'ère des technologies de
l’information et de la mondialisation. Elle ne sera plus en mesure de former des personnes qui
possèdent de hauts niveaux de créativité et de sensibilité morale, lesquels sont nécessaires à
affiner l'avantage compétitif de la nation dans l’ère à venir. » (op. cit., 1997, p.17)
<Tableau 2-8 > Dépenses d’éducation dans les pays de l’OCDE en pourcentage du PIB en
1995
(Unité : %)
Éducation
publique
Éducation
privée
Brute
Corée
Japon
ÉtatsUnis
Canad
a
France
Allema
gne
Moyen
ne OCDE
3,6
3,6
5,0
6,3
5,8
4,5
4,8
2,6
1,1
1,7
0,7
0,5
1,3
1,2
6,2
4,7
6,7
7,0
6,3
5,8
6,0
Source : OCDE, Système éducatif en un coup d’œil, 1998.
La croissance économique rapide affecte considérablement le développement des ressources
humaines de deux façons. Du point de vue de l’industrie, l’industrialisation rapide a eu une
incidence sur la formation aux compétences sur le lieu de travail : en particulier,
l’approfondissement industriel sur une courte période de temps a nécessité des efforts
substantiels pour mettre à niveau les compétences et les connaissances de la main d’œuvre. Du
côté de l’offre, le système d’éducation et de formation doit changer afin de satisfaire aux
nouvelles exigences de l’industrie. Aussi, le système d’éducation et de formation de la Corée a
répondu à la croissance de l’économie coréenne grâce à une rapide expansion des capacités
d’inscription des élèves. Cependant, ceci provoque un problème de déséquilibre entre
l’expansion quantitative et l’amélioration qualitative de l’éducation et un décalage entre la
formation publique et les besoins de l’industrie. « La formation sur le tas » est mise en relief à
tout moment tant par les pouvoirs publics que par les entreprises, mais la formation
professionnelle publique a été également critiquée pour être à la traîne par rapport aux besoins de
l’industrie. Il est dit que la formation publique se limitait à la formation de base, alors que
l'industrie avait besoin de formations spécialisées en mesure d'affronter les rapides changements
techniques et structurels. (Koh, 1998, p.64) Le système d’éducation de la Corée et la politique
de développement des ressources humaines des pouvoirs publics est un exemple par excellence
de l’incessant processus de transformation visant à accomplir la vision de « l’éducation en tant
que levier principal du développement national ».
<Tableau 2-9 > Dépenses d’éducation par rapport au Produit Intérieur Brut
Corée
Total
OCDE
Dépense publique
Dépense privée
1993
3,8
1,9
1995
3,6
2,6
1997
4,4
2,9
1999
4,1
2,7
2001
4,8
3,4
Dépense totale
5,7
6,2
7,4
6,8
8,2
Dépense publique
5,0
4,8
4,9
4,6
4,8
Dépense privée
1,1
1,2
1,2
1,1
1,4
Dépense totale
6.1
5.9
6.1
5.8
6.2
Source : OCDE
2.3.5. Récapitulatif
La transformation de l’économie coréenne pendant environ quarante ans montre une
transition progressive vers des structures industrielles plus sophistiquées et avancées. Cette
transformation réussie a été rendue possible à travers le cadre stratégique du gouvernement et
l’engagement actif de l’industrie. Le gouvernement définit les objectifs de développement qui
indiquent clairement dans quelle direction le pays devrait avancer. Les objectifs de
développement et les orientations politiques majeures ont évolué en fonction des étapes de
développement et des changements dans les conditions économiques intérieures et
internationales. Le gouvernement a adopté des approches pratiques au cours des ans, bien que
l’intervention des pouvoirs publics ait été omniprésente comme cela est mis en évidence par la
planification économique. Il y a eu également plusieurs tâtonnements, par exemple lorsque la
campagne pour les HCI a occasionné de sérieuses distorsions dans l’affectation des ressources et
le surinvestissement. Le gouvernement coréen a répondu à cette erreur au moyen de la
rationalisation des politiques destinées à rétablir les mécanismes du marché. À cet égard, le rôle
du gouvernement coréen ne vient pas se substituer à celui du marché ; au lieu de cela, il a réussi
après avoir complété le fonctionnement du marché, en particulier dans les premières années
lorsque les marchés et les institutions en étaient encore dans une phase liminaire. (Aoki, Kim et
Okuno-Fujiwara, 1997)
L’intervention du gouvernement dans le marché n’a pas été uniforme à travers les années,
comme cela est indiqué dans les changements du cadre stratégique macroéconomique qui a
évolué d’une forme d’intervention directe lors des années initiales vers la libéralisation et
l’autonomie dans une phase ultérieure. Gérer l’économie pour soutenir l’industrialisation a
apporté d’immenses avantages, mais il y a tout de même des coûts. Sans l’intervention du
gouvernement pour mobiliser les ressources limitées au service de quelques industries ciblées
dans lesquelles un petit nombre de grandes compagnies ont bénéficié de conditions favorables
pour obtenir une croissance rapide, il n’est pas certain que la Corée pourrait avoir construit des
industries aussi modernisées que celles de l’acier, de l’automobile et de la construction navale.
Le coût des politiques industrielles, cependant, n’a pas été négligeable. Entre autres, le sousdéveloppement du secteur financier, qui a été soumis aux objectifs de l’industrialisation, n’a pas
seulement entraîné le coût des pertes dans le secteur financier lui-même, mais encore il affecte
l’économie au sens large. Il s’avère que le coût direct de dispositions financières contraignantes
au début des années 1970 a affecté négativement la croissance de la production durant la même
période et ses effets d’ensemble sur l’économie sont fortement négatifs (Park, Song et Wang,
2004). En revanche, c’est le décalage entre le système financier et le système économique dans
son ensemble qui a rendu l’économie coréenne vulnérable aux chocs financiers venus de
l’extérieur. En outre, en dépit des efforts du gouvernement coréen pour remettre à neuf le
système économique, y compris le secteur financier au début des années 1990, les résultats
satisfaisants escomptés ne se sont pas produits.
Il existe deux domaines dans lesquels l’intervention du gouvernement en général a apporté
des effets grandement positifs : le développement des ressources humaines et les sciences et la
technologie. L’investissement en biens publics tels que l’éducation et l’innovation est toujours
préconisé comme domaine prioritaire du gouvernement, et le cas coréen montre que des
approches pratiques et graduelles sont effectivement possibles dans le prolongement des étapes
de développement d’ensemble.
L’expansion des infrastructures fut l'objectif stratégique
primordial au cours des années initiales, alors que le renforcement de la qualité de l’éducation et
du système d’innovation fut la priorité essentielle des années ultérieures. L’investissement dans
ces domaines n’est pas seulement important pour lui-même. Il est également important pour
renforcer la productivité des travailleurs, des entreprises et de l'industrie dans son ensemble.
Outre les systèmes d’éducation et d’innovation, à mesure que les technologies de l’information
et des communications acquièrent une importance critique en vue de pousser la croissance
économique nationale, la Corée a accompli de grands efforts pour étendre l’investissement dans
ces domaines, dans lesquels le gouvernement a aussi joué un rôle de pointe. La détermination de
la Corée en vue de construire une société de l’information a constitué un mouvement plutôt
tardif après la crise financière de 1997.
2.4 Les Problèmes à l’origine de la crise financière de 1997
L’économie coréenne dans les années 1990 a confronté le besoin urgent de réformer son
système économique : en rendant le système financier plus autonome et en restructurant les
excédents hors exploitation dans les industries. En dépit des efforts du nouveau gouvernement,
cependant, la réforme et la restructuration n’ont pas été couronnées de succès. Fugakawa (1997)
considère que la raison fondamentale du retard mis à la restructuration industrielle réside dans le
« triangle de fer banques-chaebol-gouvernement » qui entrave le libre flux des ressources
financières qui sont nécessaires à la restructuration des industries marquées par le
surinvestissement. Ayant jadis constitué le moteur de la croissance pour l’industrialisation, le
système ancien commence à entraver l’avenir du développement de l’économie coréenne.
2.4.1 Problèmes du développement économique de la Corée
Au cours des décennies de développement rapide, croyant que le rôle d’un gouvernement
central mènerait l’économie vers une croissance élevée, les administrations précédentes ont
incité les entreprises à investir dans les industries sélectionnées, forçant souvent les institutions
financières à mettre à disposition les fonds nécessaires. Les présidents de banque, nommés par
les autorités politiques, furent effectivement obligés de prendre leurs décisions de gestion et de
prêts en conformité avec les exigences de ce développement politiquement motivé, contribuant
ainsi à l’insolvabilité future de la banque. Les institutions financières qui se conformaient à ce
système voyaient leur survie garantie quelles que soient leurs pratiques de gestion. Pareillement,
les chaebols politiquement soutenus bénéficiaient de privilèges divers y compris des profits
quasi monopolistiques.
La promotion des industries lourdes et industries chimiques par le gouvernement coréen dans
les années 1970 a accéléré la concentration des ressources nationales en fournissant à de larges
conglomérats des prêts à l'appui à des taux plus avantageux que ceux du marché. Le mécanisme
d’affectation des ressources selon lequel le gouvernement exerçait avec autorité un pouvoir
discrétionnaire sur le marché avait été efficace dans le passé lorsque l’économie était florissante.
Cependant, ce système a approché ses limites lorsque l’économie s'agrandit et que le besoin s’est
fait sentir de renforcer l'autonomie du marché. Ainsi l’intervention du gouvernement a contrarié
l’efficacité de l’économie et a réduit son potentiel de croissance. Les grandes sociétés et les
institutions financières devinrent insolvables, alors que le problème de plus en plus omniprésent
de la corruption et de la collusion entre le gouvernement et les milieux d’affaires s’est infiltré
dans tous les recoins de la société. Plutôt que maximiser leurs profits à travers la concurrence du
marché libre, de nombreuses firmes se sont concentrées sur l’accroissement des profits en
exerçant une influence politique et économique, souvent en enfreignant ou en contournant les
règlements.
En Corée, les années 1990 étaient le bon moment pour remodeler le système économique,
mais le gouvernement n’a pas réussi à établir soit les fondations d’une économie de marché, soit
un environnement dans lequel les entreprises et les banques assumeraient la responsabilité de
leurs erreurs dans la concurrence du marché libre. Dans divers segments de la société, les aléas
de moralité ont prévalu là où les principes du marché n’ont pas réussi à fonctionner. Les
Chaebols et les institutions financières s’attendaient à ce que le gouvernement prenne des
mesures fiscales pour les renflouer lorsque l'économie fléchissait. Un marché du travail perturbé
contribua également à faire en sorte que la situation empire. Au milieu d’un mouvement
rappelant le milieu des années 1980 et visant à améliorer les conditions de travail inférieures et
l’échelle des salaires du passé, les travailleurs ont commencé à exiger des augmentations de
salaire qui excédaient le niveau de croissance de la productivité, ce qui a eu des effets
préjudiciables sur le moral de la main d’œuvre et sur l’esprit d’entreprise des employeurs.
Comme les processus démocratiques n’étaient pas encore bien ancrés, les élites autoritaires de la
nation n'ont pas réussi à gérer le conflit social de façon appropriée. Depuis l’introduction des
élections présidentielles au scrutin direct en 1987, quelques progrès dans la démocratisation ont
été accomplis. Toutefois, la faiblesse de la supervision et du contrôle citoyen n’avaient pas
encore permis de faire cesser la collusion entre le gouvernement et les milieux d'affaires.
2.4.2 Échec de la libéralisation et des politiques de réforme
En dépit de l’accélération de la mondialisation et de la révolution de l’information du début
des années 1990, les politiques gouvernementales n’ont pas réussi à faciliter l’intégration du
système économique coréen dans le nouvel environnement international. L’ère de l’intense
concurrence sans frontières avait commencé, et pourtant une attitude de type « Corée seulement
» a persisté dans l’état d’esprit de nombreuses personnes. La Corée est restée passive par rapport
à la transformation de ses institutions et pratiques en conformité avec les normes internationales.
Les efforts visant à établir des principes d’une économie de marché en Corée étaient en cours,
mais une authentique réforme économique basée sur la démocratie ne s’était pas encore produite.
Le gouvernement a continué ses politiques interventionnistes dans un marché de plus en plus
complexe. D’autres tentatives de réforme dans les secteurs public, financier, judiciaire, médical,
et éducatif, ainsi que dans les relations entre patronat et syndicats étaient retardées par les
groupes d’intérêts respectifs. Le gouvernement a tenté de procéder aux plans de réforme dans le
secteur financier et dans les relations entre patronat et syndicats en établissant des comités de
réforme en 1996 et en 1997, mais il échoua lamentablement, ne parvenant qu’à intensifier encore
davantage la confrontation et le conflit.
Le fait que l’économie coréenne perdait sa compétitivité à long terme est devenu
plus clair à mesure que les conditions internationales du marché se sont détériorées. Le
prix des exportations baissa spectaculairement en 1996, certaines industries entrant dans
un marasme, endommageant sérieusement les secteurs endettés lestés d’excessives
capacités de production. En particulier, l’interfinancement des chaebol (dans lesquels les
filiales saines portaient assistance aux filiales insolvables) ébranlaient la structure
financière de l’ensemble d’un conglomérat. Au début de 1997, l’état financier de
nombreux chaebols a atteint un point de non-retour, faisant chuter la crédibilité
internationale de la Corée en exacerbant ainsi la crise économique de la nation.
2.4.3 Causes de la crise financière
Les causes de la crise financière peuvent être considérées à partir des trois aspects suivants.
Le premier est d'envisager l'aspect financier. Les mouvements internationaux de capitaux dans
un monde global peuvent affaiblir l’autonomie des pays individuels à gérer les marchés
financiers intérieurs, et le problème ne fait qu’empirer lorsque les institutions financières sont
faibles en matière de gestion du risque. Les secteurs financiers de la Corée ont été réglementés
par le gouvernement, à telle enseigne que la libéralisation des marchés financiers poursuivie vers
le milieu des années 1990 a rendu le système bancaire coréen rapidement exposé aux chocs
exogènes sans préparation appropriée. À mesure que les conditions économiques se sont
détériorées en octobre 1997 avec le début de la crise cambiaire en Asie du Sud-Est, la confiance
des institutions financières étrangères et des investisseurs dans l’économie coréenne a commencé
à baisser. En 1997, de nombreuses banques et institutions financières sont devenues insolvables,
à mesure qu’on leur a mis sur les bras les énormes dettes impayées des chaebols en banqueroute.
Néanmoins, une telle insolvabilité rampante ne fut pas la seule cause de la fuite des capitaux
étrangers. La crise cambiaire coréenne fut la résultante de deux événements. Premièrement, la
part de la dette à court terme augmenta rapidement, excédant celle de la dette à long terme dès
1994. Sans cette exorbitante accumulation de dette à court terme, la massive sortie de capitaux,
laquelle à son tour a déclenché la crise cambiaire, ne se serait pas produite. Deuxièmement, les
analystes étrangers révisèrent à la baisse les perspectives de l’économie coréenne, exacerbant
encore plus la fuite des capitaux. Il y a plusieurs causes à cette rapide augmentation de la dette à
court terme et à la perception négative du marché financier coréen par les créditeurs étrangers.
Le déluge de la dette à court terme a son origine dans la négligence de supervision financière
pendant le processus de rapide libéralisation du capital, ainsi que dans l’instabilité du marché
monétaire international et dans les politiques simplistes du gouvernement dans ses réponses à la
situation.
<Tableau 2-11> Tendances de la dette extérieure à court et à long terme, 1992~1997
Dette à long terme
pourcentage
Taux de croissance
Dette à court terme
pourcentage
1992
1993
1994
1995
1996
1997
56,8
56,3
46,6
42,2
41,7
42,4
11,0
1,6
7,3
24,9
32,0
17,2
43,2
43,7
53,4
57,8
58,3
57,6
Taux de croissance
7,6
3,8
Source : Ministère des finances et de l’économie
58,3
49,0
34,7
14.1
Plus fondamentale que l’aspect financier est l’érosion continue de l’économie coréenne en
termes de compétitivité internationale. La crise économique a commencé dans la première moitié
de 1997, à mesure que le problème de l’insolvabilité générale et financière est devenu apparent
dans une série de difficultés et de banqueroutes de conglomérats financiers. La chute de Hanbo
Steel Co. au début de 1997 a introduit l’instabilité dans le marché financier, et ceci à son tour a
déclenché les banqueroutes d’autres grandes entreprises. Les causes sous-jacentes de
l’insolvabilité financière et des banqueroutes des grandes sociétés résident dans la détérioration
de la rentabilité des entreprises conjointement avec la hausse des salaires et une baisse de la
productivité depuis la fin des années 1980. Accoutumées aux stratégies de « la croissance
d’abord » dans le passé et sous le patronage du gouvernement, ces grandes sociétés avaient
négligé de changer leurs stratégies et de mettre à niveau les facteurs non liés aux prix de la
compétitivité. Au lieu de cela, les grandes entreprises ont opté pour l’expansion de leur échelle
d’affaires, ce qui était possible par l’intermédiaire d’emprunts supplémentaires aux banques.
La troisième cause, à première vue plus éloignée, est l’échec du gouvernement à construire
un nouveau système économique. Sous les régimes autoritaires durant les 30 années de
développement économique précédant la crise, le gouvernement était fortement intervenu sur le
marché. En dépit de l’effort du gouvernement visant à renforcer les fonctions du marché,
l’omniprésent capitalisme de réseau entre les milieux politiques et les milieux d’affaires avait un
effet préjudiciable à l’économie dans sa totalité. Une aspiration accrue à la liberté individuelle
après la démocratisation vers la fin des années 1980 réclamait des règles économiques et des
systèmes clairement définis qui soient davantage compatibles avec les normes internationales.
Le gouvernement avait senti la nécessité de réformes, et le nouveau gouvernement en 1993 a
tenté d’introduire plusieurs mesures réformatrices. Cependant, les efforts réformateurs dans les
années 1990 jusqu’à ce qu’éclate la crise financière de 1997 avaient été abandonnés en raison
d’un rétablissement économique qui avait profité, entre autres facteurs, de l’appréciation du Yen.
2.4.4 Réactions à la crise financière
À travers des décennies de croissance induite par le gouvernement, les chaebols sont devenus
étroitement enchevêtrés avec les hommes politiques. Le gouvernement a procuré aux 30
chaebols les plus importants toute un arsenal de garanties implicites. À la suite de quoi, les
dirigeants d’entreprises eurent davantage le souci d’engranger des influences extérieures que
d’assurer la rentabilité de leurs compagnies, et le Conseil d’administration ou la minorité des
actionnaires avaient peu de moyens de freiner les agissements des dirigeants. L’aléa de moralité
prévalait. Les conglomérats qui étaient « trop gros pour échouer » exerçaient un considérable
pouvoir dans la société.
La restructuration des grandes sociétés est un objectif majeur de réformes post-crise en Corée.
Tant le gouvernement de Kim Dae Jung que les dirigeants du patronat se sont mis d'accord sur
cinq principes de restructuration des grandes sociétés :
(1) Assurer la transparence de la gestion des grandes sociétés
(2) Démanteler les garanties croisées de dettes parmi les affiliés
(3) Améliorer de façon significative la structure du capital
(4) Identifier les activités essentielles et renforcer les relations de coopération avec les
compagnies de petite taille et de taille moyenne
(5) Renforcer la responsabilisation du contrôle des actionnaires et de la direction
Sur la base de ces orientations, la restructuration du secteur des grandes sociétés coréennes a
été poursuivie avec un calendrier clair malgré les difficultés à court terme. Parmi les mesures
concrètes adoptées jusque là se trouve l’obligation pour les 30 chaebols les plus importants de
soumettre des états financiers consolidés qui lient tous les affiliés à partir de 1999. Ces états
financiers fourniront un tableau plus précis de la gestion des chaebol en clarifiant les
transactions intra-chaebol, en rendant publiques les actions détenues entre les affiliés, en mettant
en relief les garanties croisées de paiement et les échanges de crédit. Sur trente chaebols, les 5
premiers chaebols représentent environ la moitié de la dette totale de la Corée, équivalente à 500
milliards US dollars (150 % du PIB) et plus d’un tiers de la production manufacturière. Un
nouveau système de gouvernance avec des membres du Conseil d’administration venant de
l’extérieur a été introduit pour mettre en exergue les droits des actionnaires minoritaires et la
transparence de la gestion.
Depuis la crise financière de la fin 1997, la Corée a fait des avancées positives pour réformer
son faible secteur financier en effectuant des acquisitions d'avoirs non productifs de banques
fortement sous-capitalisées, en en y injectant des fonds. À la fin 1999, la Corée avait mis en
œuvre la première phase de sa restructuration financière, en priorité dans le secteur bancaire. Un
total de 64 billions de won de fonds publics a été injecté pour résoudre le problème des prêts non
productifs dans le secteur financier en vue d’assainir les institutions financières par le biais de la
recapitalisation.
<Tableau 2-11> Utilisation des fonds publics pour la restructuration du secteur financier à la
fin 1999
Acquisition de
(Unité :
Billions de prêts non productifs
(A)
won
Banque
17,28
s
Nonbanques
3,22
Recapitalisation
(B)
Paiement de
dépôt
(C)
Total
(A+B+C)
14,59
13,33
45,2
3,96
11,61
18,8
20,5
18,56
24,94
64,0
Total
Source : ministère des Finances et de l’Économie, Centre d’informations économiques
KDI, Bulletin économique, mars 2000, p. 35
<Tableau 2-1> Stades de développement de l’économie coréenne
Objectifs de
développement
Orientations
politiques
majeures
Cadre
stratégique
macroéconomiqu
e
Développemen
t des ressources
humaines
Sciences et
technologie
Années
1960

Construction
d’une base de
production
pour une
industrialisatio
n orientée vers
l’exportation
 Construire
une base de
croissance
auto-centrée
Années
1970
Années
1980
années
1990
Années
2000

Développer les
industries à
forte
composante
technologique

Promouvoir
l’innovation
dans la haute
technologie
 Transition
avec une
économie
basée sur le
savoir
 Expansion de
l’orientation vers
l’exportation
Industries
légères
Mobiliser
le capital
intérieur et
étranger
 Ciblage
industriel
Promouvoir le
HCI et mettre à
niveau la
structure
industrielle
 Construire
des
équipements
collectifs
sociaux fixes

Rationalisation
industrielle
 Diminuer
les subventions
aux
exportations et
étendre la
libéralisation
des
importations
 Soutenir le
développement
des
technologies
 Construire
l’infrastructure
de
l’information

Promouvoir le
capital risque
et les PME
Source : La Corée en tant qu’économie du savoir
 Préparer
les bases
légales et
institutionnelle
s de soutien à
l’industrialisati
on
 Faire baisser
l’analphabétisme
 Établir une
infrastructure
nationale
 Construire
des institutions
scientifiques
Cadre légal et
administratif
 Maximiser la
croissance :
Étendre les prêts
à l’appui
Interventio
n du
gouvernement
dans les
marchés
 Formation
professionnelle
 Améliorer la
qualité de
l’enseignement
 Augmenter
les diplômés
d’universités en
ingénierie
 Définir des
infrastructures
scientifiques
Établissements
S&T
spécialisés,
Cité des
sciences de
Daeduck
 Étendre le
système de
l’enseignement
supérieur
 Développer
les RH semiqualifiées
 Promotion
de la R-D et du
centre de
recherche privé
 NRDP
 RH
hautement
qualifiées dans
des domaines
stratégiques IT,
BT, etc..
 Développer
un système
d’apprentissage à
vie
 Augmenter la
productivité de la
recherche
 Améliorer la
qualité de
l’éducation à
l’université

Développement
régional
 Rôle de
pointe dans le
domaine
stratégique :
HAN
 Stabilisation
 Renforcer
l'autonomie
privée et la
concurrence
 Libéralisation
 Réforme et
restructuration

Mondialisation

Développemen
t national
équilibré
 Construire
des systèmes
nationaux et
régionaux
d’innovation
3. Participation de la Corée à l’économie mondiale
A.
Le système mondial des échanges et la promotion des exportations
Dans les années 1960 et 1970, l’environnement international des échanges était très favorable
aux industries exportatrices de la Corée. L’expansion du commerce international dans le cadre
des négociations au sein du GATT (Kennedy Round et Tokyo Round) et l’accès des États-Unis
au Système de préférences généralisé (GSP − General System Preference), joints aux efforts de
la Corée pour développer ses exportations, ont été décisifs pour le succès du Pays du Matin
Calme sur les marchés étrangers.
Le GATT, qui visait à instituer un nouvel ordre mondial des échanges et des flux de capitaux,
avait fait baisser le niveau des tarifs douaniers dans l’ensemble du globe. Au fil des divers cycles
de négociation qui se sont succédé depuis la fin des années 1940, le niveau moyen des droits de
douane sur les produits industriels a été ramené d’environ 40 % dans la décennie 1940 à moins
de 5 % dans les années 1980. Depuis 1964-1967, plusieurs initiatives des États-Unis ont réduit
les tarifs douaniers de près de moitié. Le grand principe du GATT est la clause de la nation la
plus favorisée (NPF), qui oblige les parties contractantes à offrir les mêmes avantages aux autres
pays. L’engagement d’appliquer des tarifs également bas à tous les membres a entraîné une
expansion rapide des possibilités d’échange. L’envolée du commerce mondial depuis la Seconde
Guerre mondiale a beaucoup contribué à l’essor des exportations coréennes. Cependant, dans les
années 1970, de nombreux pays membres du GATT se sont plaints que la libéralisation des
échanges ne soit pas mutuellement bénéfique et ont érigé des barrières non tarifaires telles que
des quotas (Accord multifibres − AMF), des droits anti-dumping, des restrictions sur les marchés
publics, etc. Le 7e cycle de négociations, appelé Tokyo Round (1973-1979), était consacré à ces
différends. Les États membres sont convenus de ramener les droits de douane sur les produits
industriels à 5 %-7 % et ont enrichi les règlements du GATT de nouveaux codes sur les barrières
non tarifaires. Cependant, ces barrières n’avaient guère d’effets sur les performances de la Corée
à l’exportation.
De plus, le système de préférences généralisées des États-Unis permettait à la Corée d’accéder
à leur marché, qui est le plus grand marché ouvert du monde. Il donnait aussi aux entreprises
coréennes la possibilité d’apprendre les techniques du commerce international et de grossir leur
volume d’affaires de manière à dégager des économies d’échelle. En tant que premier débouché
extérieur de la Corée, les États-Unis ont absorbé 32 % de ses exportations entre 1970 et 1985. En
revanche, elle n’a adressé que 18 % de ses exportations au Japon, dont la part a constamment
diminué au fil de la période, revenant de presque 28 % en 1970 à tout juste 15 % en 1985.
Cependant, le poids des autres pays d’Asie et du Pacifique dans les exportations de la Corée a
quasiment doublé et ils sont devenus l’un de ses principaux débouchés pour les fils et fibres
textiles ainsi que pour les plastiques et achètent une part non négligeable de son fer, de son acier,
de ses machines et de son matériel de transport.
3.2. Principales politiques internationales
Compte tenu des informations générales dont nous disposons sur l’interaction entre la Corée et
l’économie mondiale, nous revenons sur les principales politiques qu’elle applique dans les
domaines (1) de la promotion des exportations, (2) du taux de change et (3) des tarifs douaniers
et sur le contexte international dans lequel elles s’inscrivent.
3.2.1. Politique de promotion des exportations
Les excellentes performances de la Corée à l’exportation ne sont pas l’effet du hasard et elles
ne s’expliquent pas uniquement par un environnement favorable. Elles sont dues à plusieurs
causes. Premièrement, le gouvernement a mis en place des incitations grâce auxquelles exporter
était rentable pour les entreprises du secteur privé. Ainsi, la monnaie a été dévaluée de presque
100 % en 1961-64 et le taux d’intérêt préférentiel sur les prêts accordés aux exportateurs pour
financer leur fonds de roulement a progressivement diminué. En outre, les exportateurs étaient
exonérés de droits de douane, de quotas d’importation, d’impôts indirects sur les biens
d’équipement et les biens intermédiaires et de taxes indirectes sur les ventes à l’exportation. De
plus, une franchise pour déchets sur les matières premières importées en vue d’être exportées
constituait une incitation supplémentaire à exporter parce qu’il était permis soit de revendre ces
matières premières sur le marché national, soit de s’en servir pour produire des biens de
consommation destinés à y être vendus, ce qui procurait des bénéfices confortables aux
exportateurs et les poussait à utiliser des biens intermédiaires importés.
La politique d’exportation de la période du décollage d’avant 1973 visait en priorité à
développer les exportations mais appliquait un traitement quasiment identique aux diverses
industries exportatrices. Contrairement à une approche ciblant quelques industries (campagne de
promotion des exportations des industries lourdes et chimiques de 1973 à 1979), elle ne donnait
lieu à aucune intervention spécifique à une branche ou une entreprise. Le secteur privé,
encouragé par tout un arsenal d’incitations, allouait des moyens croissants aux activités tournées
vers l’exportation sans que l’État ait à s’engager fortement en direct. La politique industrielle de
la Corée dans les années 1960 était caractérisée par un biais favorable aux exportations. Krueger
résume le régime applicable aux exportations par la politique du commerce extérieur, qui
favorisait nettement les exportations à partir du milieu de la décennie 1960, cette tendance se
prolongeant sans grand changement tout au long des années 1970 ; cette politique attachait plus
d’importance à la destination des ventes (à l’étranger plutôt que sur le marché intérieur) qu’à la
nature des produits concernés (ce qui n’excluait pas une certaine différenciation entre les
produits), mais ce biais était moins prononcé qu’on ne l’a souvent prétendu, sans d’ailleurs en
apporter la preuve.
Les industries légères à forte intensité de main-d'œuvre, stimulées par la politique de promotion
des exportations et un environnement favorable au commerce extérieur, ont considérablement
accru leurs ventes à l’étranger et employé beaucoup de travailleurs non ou peu qualifiés. La
croissance à marche forcée a amené une nombreuse population rurale à migrer vers les villes, de
telle sorte que la Corée, de société agricole, s’est transformée en une nation semi-industrialisée.
3.2.2. Une politique de change réaliste
La Corée s’est toujours efforcée de soutenir ses exportations par une politique de change
réaliste combinant de fortes dévaluations et des ajustements de moindre ampleur opérés parfois
avec un certain retard. En outre, les pouvoirs publics veillaient à compenser la surévaluation
récurrente de la monnaie par des avantages financiers et fiscaux pour les exportateurs de manière
à empêcher la fuite des capitaux et à laisser entrer sélectivement des flux de capitaux. Cette
politique transparaît clairement dans l’évolution du taux de change nominal et effectif des
exportations et des importations corrigé par les parités de pouvoir d’achat qui est retracée dans le
tableau ci-dessous.
<Tableau 3-1> Evolution du taux de change nominal et effectif de la Corée corrigé par
les parités de pouvoir d’achat (PPA)
Taux de change nominal
(Won/US dollars)
Année
Taux de change exprimé en PPA
(Won/US dollars)
Effectif
Effectif
OfficielExportations
Officiel(3)
Importations(2)
Exportations(4)Importations
(1)
1965 265,4
275,3
293,1
265,4
275,3
293,1
1970 310,7
331,5
336,4
240,2
256,2
260,0
1973 398,3
407,0
417,7
320,6
327,6
336,2
Biais contre
les
exportations
(4)/(5)
0,94
0,99
0,97
1975
1978
1980
1983
1985
1988
1990
484,4
484,0
607,4
775,8
870,0
730,6
708,6
496,9
495,0
628,0
775,8
870,0
730,6
708,6
508,9
526,9
641,8
831,7
920,3
780,3
748,0
274,4
272,0
250,1
264,5
290,6
319,3
289,1
281,7
278,2
260,0
264,5
290,6
319,3
289,1
288,5
296,1
265,7
283,6
307,4
341,0
305,2
0,98
0,94
0,98
0,93
0,95
0,94
0,95
Remarques : (1) Taux de change officiel plus subventions nettes aux exportations par US DOLLARS
d’exportations.
(2) Taux de change officiel plus droits de douane réels et équivalents par US DOLLARS d’importations.
(3) Multiplication du taux de change nominal par l’indice en PPA divisé par 100. L’indice en PPA est
égal à la moyenne pondérée par leur part moyenne respective dans le volume total des échanges de la
Corée.
Source : Kim, K. S, "Korea", dans M, Michael et autres (eds), Liberalizing Foreign Trade: Korea, the
Philippines and Singapore, Vol. 2, Cambridge : Basil Blackwell, pp. 1-131.
3.2.2. Politique en matière de tarifs douaniers
Tandis qu’il éliminait le biais défavorable aux exportations, le gouvernement coréen mettait
en place une protection sélective des branches stratégiques sur le marché national dans le but
d’obtenir une croissance auto-entretenue. Le Tableau 3-2 met en évidence plusieurs
caractéristiques remarquables des mesures de protection ou d’incitation adoptées entre 1968 et
1978. On constate tout d’abord que non seulement les taux de protection apparent et réel étaient
assez bas au regard de ceux d’autres pays en développement, mais aussi qu’ils assuraient une
protection beaucoup plus forte au secteur primaire qu’à l’industrie. Deuxièmement, au sein de
cette dernière, les incitations à exporter étaient, en moyenne, nettement plus puissantes que
celles à la substitution d’importations. Troisièmement, les taux apparent et réel des biens de
consommation durables, des machines et du matériel de transport sont restés beaucoup plus
élevés que pour les autres branches industrielles pendant deux décennies, encore que la
configuration de ce système de protection de l’industrie ait été profondément remaniée en 1988.
Cela suggère que la Corée a aussi cherché à substituer des productions nationales aux
importations de machines, de matériel de transport et de biens de consommation durables
jusqu’à ce que ces secteurs soient internationalement compétitifs, tandis qu’elle favorisait
activement les exportations de produits finis fabriqués par ces branches de l’industrie pendant la
période étudiée.
Les États-Unis sont traditionnellement le premier client de la Corée à l’étranger. C’est en
1985 qu’elle a dégagé son premier excédent commercial (1,9 Md US dollars), lequel a culminé à
9,5 Md US dollars en 1987. Le creusement du déficit du commerce extérieur des États-Unis les a
amenés à adopter des mesures protectionnistes à l’encontre de leurs partenaires commerciaux, y
compris les pays connaissant une forte croissance économique. La Corée a dû accepter de limiter
ses exportations et fait l’objet de mesures anti-dumping et de contingentement, en particulier aux
États-Unis.
Depuis le milieu des années 1980, la Corée s’est efforcée d’apaiser les tensions bilatérales
avec ses partenaires commerciaux en ouvrant son marché à certains produits agricoles en 1989
pour respecter l’Article XI du GATT et en accélérant la libéralisation des échanges, à telle
enseigne qu’en 1994 99 % de ceux-ci étaient libres. La libéralisation des importations était
motivée par le fait que les industries nationales de la Corée étaient devenues compétitives plutôt
que par le souci d’améliorer le niveau de vie de consommateurs. Les entreprises coréennes
exposées à la concurrence internationale ne pouvaient plus se contenter de majorer leurs prix de
vente et d’assembler des pièces importées pour réaliser des bénéfices. Depuis 1984, un vaste
programme de libéralisation des importations a eu des effets positifs en accentuant la poussée
des importations dans les industries de la métallurgie et de la mécanique, dont le ratio de
dépendance envers les importations a sensiblement augmenté.
<Tableau 3-2> : Taux de protection réel et apparent des ventes sur le marché intérieur et
taux de subvention effectif aux exportations de certaines branches industrielles (unité : %)
Taux de protection Taux de protection Taux
de
1)
2)
Branche
nominal (ventes sur le réel (ventes sur le subvention effectif 3)
marché intérieur)
marché intérieur)
(exportations)
1968
1988
1968
1988
1968
1988
Agriculture
17
100
19
159
-10
16
Industries extractives
9
24
4
32
3
11
Industrie
12
5
1
1
12
23
Agro-alimentaire
3
9
-18
-55
2
32
Bière et tabac
2
23
19
38
15
13
Matériaux
de
4
8
-11
-2
6
19
construction
Produits
3
11
-25
-27
43
24
intermédiaires I
Produits
21
7
26
14
17
26
intermédiaires II
Biens
de
consommation
non 12
-2
-11
4
5
17
durables
Biens
de
consommation
39
3
64
22
2
38
durables
Machines
30
11
44
17
5
24
Matériel
de
55
14
163
54
23
26
transport
Total de l’industrie
12
5
1
1
12
23
Ensemble des branches
14
13
11
16
9
18
Sources : Westphal et Kim (1982) pour les chiffres de 1968 ; Hong(1992) pour les chiffres de
1988
5. Conclusion
5.1. Les leçons de l’expérience coréenne
Quand on examine le développement de la Corée sur les quatre dernières décennies, il est
clair que son économie a constamment été confrontée à des défis qu’elle a toujours su relever
victorieusement d’une manière ou d’une autre. Par exemple, dans les années 1960, elle a tiré
profit de l’expansion du commerce international en appliquant une stratégie de développement
ouverte sur l’extérieur. Cependant, au fil de la décennie suivante, la santé de son économie s’est
dégradée, essentiellement à cause de l’interventionnisme excessif des pouvoirs publics et d’un
plan de développement des industries lourdes et de la chimie trop ambitieux. La décennie 1980 a
été marquée par un ajustement structurel ayant pour but de favoriser une expansion pérenne de
l’économie sans inflation. Les années 1990 ont été caractérisées par la libération de l’économie
et la réforme financière, en particulier dans le domaine des taux d’intérêt.
Le gouvernement coréen s’est beaucoup impliqué dans le processus de développement
économique tout au long des années 1960 et 1970, non seulement en élaborant des plans de
développement économique, mais aussi en incitant le secteur privé à atteindre les objectifs
assignés par le plan. La planification économique était constamment actualisée de manière à
répondre à un contexte économique évolutif.
Les pouvoirs publics se sont fortement impliqués dans le fonctionnement des marchés jusqu’à
la fin des années 1970. Lorsque le développement économique était encore balbutiant,
l’intervention de l’État se justifiait et, de fait, elle a contribué à rendre l’économie plus efficiente
au vu des moyens limités dont disposait la Corée et d’un accès à l’information insuffisante dans
le secteur privé. Cependant, à mesure que la taille et la complexité de l’économie coréenne
augmentaient, l’État aurait dû se désengager progressivement. En réalité, c’est le succès même
de son intervention qui rendait difficile son retrait. Comme on l’a vu plus haut, la politique de
développement de l’industrie lourde et de la chimie à partir de 1975 exigeait une intervention
beaucoup plus forte de l’État sur le marché et était inévitablement la cause de graves distorsions
économiques. Il semble que l’histoire de la Corée prouve les dangers inhérents à un
interventionnisme excessif de la puissance publique.
Le développement économique de la Corée montre que l’adaptation ne va pas sans des
incertitudes et des risques considérables. L’expérience de la Corée semble être un cas à part en
ceci que ces risques ont été surmontés et qu’elle a réussi à s’adapter à l’évolution de son
environnement économique au long des quarante dernières années. Ce succès tient
principalement à deux facteurs. Le premier est que l’État n’a pas relâché ses efforts pour faire en
sorte qu’un consensus national se dégage à propos de l’orientation de ses principales politiques
économiques. Les principaux moyens par lesquels il y est parvenu sont l’élaboration de plusieurs
types de plans et une action de formation en direction de l’opinion publique. Tout au long de ce
processus, le gouvernement a pu formuler des politiques conformes aux impératifs du marché et
préparer le changement. Le deuxième facteur est que, avec l’aide de conseils et de mesures de
soutien appropriées, les chefs d’entreprise innovants et leur personnel diligent ont su tirer le
meilleur parti des débouchés qui s’ouvraient largement à eux et faire ainsi avancer l’économie. Il
semble que ces deux facteurs, qui ont permis au peuple de s’adapter aux défis tout en minimisant
les risques, soient la clef du miracle économique de la Corée, si tant est qu’il existe.
Le gouvernement a mis en place une politique de soutien aux exportations à un stade précoce
du développement de l’économie afin de compenser l’étroitesse du marché national et de gagner
des devises. La plupart des pays en développement, dont la Corée, n’ont guère d’influence sur
l’environnement international et doivent bâtir leur stratégie de développement économique en
tenant compte de la contrainte de l’extérieur. Au demeurant, l’environnement international est
imprévisible et, si l’économie mondiale offre des débouchés à l’économie nationale, elle recèle
des risques. Le problème est de s’adapter à un environnement mouvant en tirant le meilleur parti
de son évolution et en minimisant les risques. Plusieurs leçons peuvent être tirées de
l’expérience de la Corée.
Premièrement, aux premiers stades de son développement économique, l’étroitesse de son
marché intérieur imposait à la Corée d’axer sa stratégie de croissance sur l’exportation. Ce choix
lui a permis de réaliser des économies d’échelle et d’accroître rapidement sa productivité. Il est
néanmoins clair que l’augmentation du PNB et des importations des pays de la zone OCDE
influait fortement sur les performances macro-économiques de la Corée. Son économie
demeurait ouverte et certains changements structurels la rendaient vulnérable aux chocs
exogènes.
Deuxièmement, l’augmentation des revenus, la dette extérieure et l’épargne nationale sont
intimement liées. Si l’investissement productif offre un taux de rendement supérieur au coût
marginal de la dette extérieure, il est logique, sous l’angle économique, d’accroître cette dernière
pour financer des investissements. En dernière analyse, ce n’est pas le niveau de l’endettement
qui est critique mais l’emploi qui en est fait. Le meilleur moyen de réduire la vulnérabilité
financière est de diversifier les sources de financement extérieures, c'est-à-dire de substituer des
financements en actions à l’endettement.
Troisièmement, dans les premiers stades du développement, le marché de la plupart des pays
en développement est imparfait. La Corée a su combiner judicieusement le libre jeu des forces
du marché avec l’impulsion de l’État. Dès le début, ce dernier s’était mis en devoir d’identifier
les objectifs et priorités à assigner à l’économie nationale. Il se souciait aussi de faciliter
l’atteinte de ces objectifs. Il s’était efforcé de faire en sorte que le secteur privé dispose de
moyens suffisants à cet effet. Il est toutefois impossible de faire reposer une économie en totalité
sur la planification. Le fait saillant de la relation entre État et entreprises en Corée est que les
secondes communiquent étroitement avec les divers services du premier. Il en résulte un style de
développement industriel qui a laissé aux entreprises une marge de manœuvre considérable alors
même qu’elles étaient soumises à l’impulsion des pouvoirs publics, qui mettaient en œuvre une
vaste panoplie d’aides et incitations.
Quatrièmement, pour être pérenne, le succès de la transition industrielle est conditionné par
des réponses politiques promptes, cohérentes et pragmatiques. L’économie devrait s’adapter à
l’évolution rapide des avantages comparatifs. Un changement de la composition des emplois
plus rapide est nécessaire pour répondre à l’évolution des besoins en compétences et il doit être
accompli avec le moins de frictions et de résistances possible.
Cinquièmement, la politique du commerce extérieur se caractérisait principalement par : (1)
une protection modérée du marché national compensée par des subventions spéciales aux
exportations ; (ii) des prix à peu près conformes à ceux qui sont pratiqués sur le marché mondial
pour les intrants utilisés pour les divers produits exportés ; (iii) une forte protection du marché
intérieur pour les branches dont les perspectives à l’exportation étaient médiocres ; (iv) une forte
protection pour les biens de consommation et une protection pour la plupart des biens
d’équipement et matières premières industrielles. Globalement, la distorsion occasionnée aux
incitations à exporter dans leur ensemble ou à leur composition interbranche par les dispositifs
de protection était faible. C’est pourquoi la structure émergente des exportations était plus
conforme à l’avantage comparatif.
5.2. Conséquences pour l’économie africaine
La mondialisation offre d’immenses débouchés au prix de risques non négligeables et
l’économie des pays africains devrait être prête à participer aux échanges mondiaux. Une
stratégie ouverte à l’extérieur et une politique de promotion des exportations sont indispensables
pour compenser l’étroitesse du marché intérieur et s’assurer des recettes en devises. La plupart
des pays en développement ont peu d’influence sur l’environnement international et doivent
bâtir des stratégies de développement économique tenant compte de la contrainte extérieure. Au
surplus, l’environnement international est imprévisible et les relations entre l’économie nationale
et l’économie mondiale, si elles offrent des débouchés, comportent aussi des risques. Une
approche intégrée de tâches multiples est nécessaire pour assurer le dynamisme de l’économie et
la réussite de la mondialisation. Le degré de l’ouverture et son rythme doivent être gérés avec
soin en fonction de la localisation géographique et de facteurs politiques et institutionnels.
Globalement, les États doivent faire en sorte que la politique industrielle jette les bases de
l’économie dans un cadre conforme aux règles du marché. Les incitations, mais aussi les
désincitations, ont été conçues pour rendre l’allocation de ressources limitées aussi efficiente que
possible en s’aidant des forces du marché autant que faire se peut. Dans un contexte incertain, il
est dans l’ordre des choses que des erreurs politiques soient commises, mais un mécanisme de
remontée rapide de l’information devrait permettre de les corriger assez vite.
Le cadre institutionnel des économies africaines doit être amélioré. Nous pensons en
particulier à l’existence d’un gouvernement crédible et s’engageant au service de la croissance, à
une administration méritocratique exempte de corruption, à l’interaction entre les secteurs public
et privé, à la reconnaissance des droits de propriété et contractuels, à l’existence d’un système
judiciaire inspirant confiance, etc. Si ces conditions préalables ne sont pas réunies, il en résulte
non seulement des incertitudes, mais aussi des coûts de transaction supplémentaires. Il est
essentiel de stimuler la concurrence dans les limites imparties par la réglementation et la loi pour
garantir un traitement équitable et un égal accès au marché à tous ses acteurs.
L'esprit d’entreprise est indispensable pour mettre en œuvre la politique des pouvoirs publics
à tous les stades de l’industrialisation. C’est pourquoi il importe de favoriser l’apparition d’une
population d’entrepreneurs aptes à donner l’impulsion. Une main-d'œuvre disciplinée et une
administration capable sont aussi indispensables au développement économique. Il ne fait aucun
doute que la formation continue des chefs d’entreprise comme des fonctionnaires est une
condition du développement et l’on sait que l’éducation rend une nation plus apte à assimiler de
nouvelles technologies et connaissances. L’État doit donc assumer l’entière responsabilité des
mesures nécessaires pour promouvoir le développement des ressources humaines. La formation
et l’industrialisation se confortent mutuellement en soutenant et accélérant leur développement
mutuel. C’est la formation qui a rendu possible l’apprentissage technologique et donc
l’industrialisation, tandis que cette dernière a accru la rentabilité de l’investissement dans la
formation.
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