Vais-je moi, l`incroyant volontiers anticlérical, critiquer l`attitude de

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ISLAMOPHOBIE, une faiblesse intellectuelle.
Vais-je moi, l’incroyant volontiers anticlérical, critiquer l’attitude de rejet que
je rencontre fréquemment à l’égard de l’islam ?
Assurément.
Car je suis aussi un laïque convaincu et à ce titre je réclame la stricte égalité de
traitement pour chaque citoyen indépendamment de ses convictions religieuses
ou philosophiques. Point final.
Qui voudrait aujourd’hui être musulman en Belgique ? On est passé, ces
dernières années, de l’indifférence à l’égard des musulmans à un mépris teinté
de suspicion pour se muer aujourd’hui en hostilité. C’est que l’image que l’on
s’en est fait nous venait, dans l’ordre, des cheiks bourrés de pétro-dollars, des
palestiniens, des ayatollahs iraniens, d’un afflux de travailleurs immigrés et
maintenant, pour finir, des islamistes fanatisés responsables des morts dans les
tours de Manhattan.
C’est l’émoi que suscite tout mouvement migratoire important qui provoque
dans nos sociétés la question de savoir si, en définitive, certains aspects de la
religion musulmane ne sont pas incompatibles avec les valeurs de nos
démocraties occidentales. Si la réponse à cette question était oui, il y aurait un
grave problème puisqu’ils sont des millions en Europe à adhérer à l’Islam (soit
dit en passant, aux Etats-Unis l’Islam est la religion qui se développe le plus !).
Ne vous frappez pas, les amis. Ce oui est, je pense, la fausse réponse.
Les musulmans ne sont pas une cinquième colonne dans nos pays. La grande
majorité de ceux-ci vit paisiblement, respecte les lois et ne se prépare pas à
renverser notre gouvernement. S’il est vrai qu’une minorité pense que les
injonctions de leur religion sont plus importantes que les lois séculières, c’est
une prééminence à laquelle sont attachés certains chrétiens (aux USA et en
Irlande !), certains hindous (en Inde, un état laïque), certains juifs (Israël,
pourtant, est une démocratie).
Il ne serait pas malin, pour autant, de faire semblant que l’islam dans notre
société ne pose pas de problèmes. Il en pose.
D’abord les problèmes associés à l’immigration en général car, comme
beaucoup d’immigrés, les immigrés musulmans sont souvent originaires de
régions rurales pauvres, ils ont un faible niveau de scolarité et leur couleur de
peau les met en butte au racisme et à la xénophobie de nos « braves » citoyens.
A l’école, leurs enfants peinent dans une langue qu’ils ne maîtrisent pas bien.
Beaucoup logent entassés dans les quartiers pauvres et, dans ce contexte, ils
tendent à se replier dans leur petit monde à eux puisqu’ils sont en nombre
suffisant pour former un « petit monde ».
Cela n’est pas bon. Cela ne facilite pas une souhaitable intégration. Mais c’est
ici que l’action du gouvernement peut être efficace avec une politique qui tient
compte de ce qui est une évidence: il faut accorder à ces immigrés - qui vont
s’installer de manière durable chez nous et auxquels on demande d’être de bons
citoyens - les droits dont bénéficie chaque citoyen, notamment le droit de vote.
Il faut aussi vigoureusement s’attaquer à tout racisme, à toute xénophobie, à
toute discrimination d’origine religieuse, en renforçant l’application des lois
existantes et, s’il y a lieu, en les complétant.
On peut alors légitimement demander aux immigrés eux-mêmes de faire l’effort
de s’intégrer, aux musulmans comme aux autres, d’autant que leur religion
semble entraîner des difficultés spécifiques que l’on appellera, faute de mieux,
«culturelles ». (Qu’est-ce qui est culturel, qu’est-ce qui est religieux dans la vie
quotidienne d’un musulman pratiquant? Le port du voile, les mariages arrangés
par la famille, l’abattage rituel des moutons lors de la fête d’Aid al Adha, c’est
religieux? La réponse du musulman, selon qu’il est turc, pakistanais ou
saoudien, risque fort d’être différente !)
Ah oui, l’Islam impose des obligations à ses fidèles et des zélotes musulmans
affirment que celles-ci impliquent une hostilité farouche aux valeurs
fondamentales du monde occidental. Mouais,…ce n’est pas l’avis, ni de la
plupart des docteurs de l’Islam, ni de la grande majorité des musulmans qui
estiment qu’ils peuvent parfaitement vivre leur religion dans notre pays.
Néanmoins, des difficultés subsistent ne serait-ce que parce que l’Islam n’a pas
de hiérarchie bien définie. Alors, avec qui traiter parmi tous les groupes de
musulmans, financés par des pays étrangers et parfois opposés l’un à l’autre ? Je
suggérerais de commencer par faire barrage à cette dépendance de « nos »
musulmans à l’égard de leurs sponsors - des régimes politiques peu ou pas
démocratiques - en assumant le financement des mosquées et de leurs imams
comme on le fait pour les autres religions reconnues. Avec le temps l’intégration
des musulmans pourrait alors se faire, d’autant mieux qu’ils ne se sentiraient
plus traités en citoyens de seconde zone. Et cela a son importance, car n’est-il
pas vraisemblable que des gens qui se sentent aliénés de la société aillent
chercher - dans la pratique dévote de la religion, précisément - le réconfort d’une
identité pleine et entière ?
La bonne réponse à donner à ceux qui prêchent la violence, c’est de les
poursuivre et de les juger. Pour la majorité des musulmans, qui n’ont rien à voir
avec le terrorisme, c’est un autre travail qu’il faut faire. Il faut leur montrer et
leur démontrer que, dans notre société, la place de l’individu dans la société est
indépendante de la confession religieuse, s’il en a une. A charge des musulmans
de nous montrer qu’ils peuvent organiser leur clergé et leurs lieux de culte, à
l’intérieur de leur communauté, sans concession aucune à la minorité de coreligionnaires qui aimeraient utiliser l’Islam comme instrument de violence.
Louis Wyckmans,
Secrétaire de l’asbl PLN
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