La notion de démonstration : peut-on parler de vérité démonstrative ? Définition de la démonstration (dictionnaire Lalande) : « une démonstration est une déduction destinée à prouver la vérité de sa conclusion en s’appuyant sur des prémisses reconnues et admises comme vraies ». 1) la démonstration est une déduction : notons que cela renvoie d’abord à l’idée de raisonnement. On se situe donc ici dans le domaine de la logique, mais aussi des mathématiques. Un raisonnement est un ensemble de jugements ; on part de quelque chose de déjà admis, et on en déduit d’autres jugements. Exemple : (1) Tous les hommes sont mortels (majeure) (2) Or Socrate est un homme (mineure) (3) Donc, Socrate est mortel (conclusion) 2) Une démonstration peut-elle être qualifiée de « vraie » ? Non, pour trois raisons : a) elle ne renvoie pas au réel : c’est une vérité formelle, non matérielle (vérité matérielle : est vrai ce qui est conforme au réel ; vérité formelle : est vrai ce en quoi ne réside aucune contradiction). Un raisonnement peut très bien être formellement correct mais matériellement faux. On parle d’ailleurs non pas vraiment de « vérité » mais de « validité » d’une démonstration. Exemple : (1) Tous les chats ont 5 pattes (2) Or Gromatou est un chat (3) Donc Gromatou a 5 pattes b) la démonstration peut éventuellement partir du vrai mais pas le découvrir Les points a) et b) signifient que la démonstration se distingue de la preuve ou même de l’argumentation : on se passe de toute vérification par l’expérience. On ne s’intéresse qu’à la cohérence du raisonnement. La démonstration, logique ou mathématique, n’est vraie absolument… que parce que, justement, elle ne renvoie pas au réel ! Il semble que l’esprit humain, dans le domaine de la démonstration, ou du raisonnement, n’ait affaire qu’à lui-même, qu’à ses définitions, etc. c) et puis, à la limite, on pourrait dire que la démonstration n’est pas si « justifiée » que ça puisqu’il faut bien partir de quelque part (cf. deuxième partie de la définition Lalande : on part de quelque chose admis ou reconnu pour vrai). Cf. en mathématiques les axiomes : on les tient pour évidents mais qui dit qu’ils sont vrais ? C’est ce qu’on nous demande d’accepter mais qui n’est pas démontré ! La démonstration repose donc sur du non démontré ! Conclusion : nous avons fait comme si raisonner c’était accomplir une démonstration ; or, n’existe-t-il pas, au contraire, plusieurs formes de raisonnements ? La démonstration est en fait, on va le voir, une forme de raisonnement seulement, et c’est la forme de raisonnement la plus rigoureuse. Il existe trois formes de raisonnements : La démonstration La preuve L’argumentation A à voir avec les règles de la pensée Ont à voir avec la réalité logique, ou bien avec des « objets idéaux » en mathématiques On démontre un théorème. La On prouve une loi. Cf. On argumente dans une discussion, ou bien dans démonstration mathématique est cours vérité scientifique… les sciences humaines, qui ne peuvent toujours (cf. essentiellement de type déductif. Elle l’histoire) faire des expériences comme dans les consiste à tirer une ou des sciences naturelles. conséquences de principes (axiomes) en s’aidant de propriétés préalablement Argumenter, c’est poser de manière ordonnée des démontrées ou admises. Lorsque ce qui énoncés de manière à rendre acceptable la thèse est démontré a une portée universelle, que l’on soutient. L’argumentation n’est pas aussi il est appelé théorème. rigoureuse qu’une démonstration, elle peut admettre les détours (cf. plaidoirie d’un avocat), et même recourir à des procédés non « rationnels (persuasion, rhétorique). Plus on va vers l’argumentation, plus on y perd en « certitude ».