VI CONFÉRENCE DE CONSENSUS EN MÉDECINE D’URGENCE PRISE EN CHARGE DES MALAISES AU SERVICE D’ACCUEIL ET D’URGENCE Introduction Le malaise est un motif de recours fréquent dans les services d’accueil et d’urgences (SAU), (près de 10 p. 100 des patients). Prendre en charge un malaise est un exercice quotidien en médecine d’urgence, qui présente cependant un risque d’erreurs important en raison de plusieurs difficultés. La première difficulté est liée aux nombreuses situations recouvertes par le terme de malaise ». Le cadre restrictif des syncopes est plus fréquemment étudié dans la littérature, mais limiter la réflexion aux syncopes est peu opérant. C’est en effet aux « malaises» qu’est confronté le médecin aux urgences, et la démarche s’effectue à partir de ce motif de recours apparent et vague. La deuxième difficulté est liée à l’appréciation de la gravité. Il peut être difficile de repérer certains patients ayant une pathologie grave, mettant en jeu le pronostic vital, parmi une majorité de patients sans gravité. La difficulté est donc double, banaliser le < malaise» et méconnaître un diagnostic grave ou dramatiser ce risque et réaliser une prise en charge systématique trop lourde. Ceci explique la diversité considérable des procédures de prise en charge. Cette diversité est patente dans l’enquête prospective, incluant 270 patients dans dix services. Elle confirme la nécessité de préciser le cadre nosologique des malaises et, dans ce cadre, de proposer des recommandations. La Société Francophone des Urgences Médicales a organisé une Conférence de Consensus le 26 avril 1996 à Grenoble et a demandé au jury de répondre aux cinq questions suivantes: 1 Les « malaises », quelles situations pathologiques peut-on regrouper sous ce terme ? La perte de connaissance est-elle un cadre nosologique particulier? - 2 Quelles sont les données importantes de l’interrogatoire et de l’examen clinique ? Quels sont les critères de gravité immédiate? - 3 Quelle est la place des examens complémentaires dans la stratégie diagnostique étiologique ? Le bénéfice des investigations complémentaires est-il évalué? - 4 Quelle orientation doit être prévue / hospitalisation, sortie, consultations secondaires, dans quelles conditions? - 5 Quel est le rôle infirmier lors de la prise en charge des malaises au SAU? - Question 1. Les « malaises»: quelles situations pathologiques peut-on regrouper sous ce terme? La perte de connaissance est-elle un cadre nosologique particulier? Le terme de «malaise» est très imprécis mais largement utilisé. Il représente, parmi les admissions en urgence, un motif de recours apparent et fréquent (entre 3 et 10 p. 100 selon les études). Au sens le plus général, le «malaise» désigne une situation pathologique aiguë perçue par le malade ou par l’entourage comme une modification de son état antérieur. Il y a un accompagnement habituel, mais non obligatoire, par un trouble de la vigilance avec ou sans hypotonie et/ou chute. Lorsque le malade est admis, la symptomatologie a été habituellement résolutive mais peut persister. Ce cadre n’est pas opérationnel et doit être restreint. On entend par malaise, de façon restrictive, un épisode aigu, régressif, qui est caractérisé par un trouble de conscience ou de vigilance (perte de connaissance brève ou lipothymie), avec ou sans une hypotonie qui peut être responsable de chute. Le retour à l’état antérieur est spontané, rapide ou progressif Fig. 1. — Cadre nosologique des malaises Initial evaluation of fainting or swooning Il n’y a pas lieu d’isoler la perte de connaissance dans un cadre nosologique particulier. Elle n’a en effet pas de spécificité étiologique et n’implique pas en soi de gravité particulière. On regroupe dans ce cadre les termes habituels de syncope, lipothymie, perte de connaissance brève. C’est dans ce cadre restrictif que les recommandations sont émises. Cette restriction de définition par rapport au motif de recours apparent impose d’éliminer (fig. 1): — — — — les états pathologiques où l’apparition est progressive (plusieurs heures); les états pathologiques où les symptômes ne sont pas résolutifs mais persistants. L’interrogatoire et l’examen clinique permettent alors d’identifier des situations pathologiques définies guidant la conduite pratique. Ainsi en est-il des douleurs thoraciques ou abdominales aiguës, des dyspnées, des troubles de — vigilance persistants, des états neurologiques déficitaires, des états infectieux, des manifestations allergiques, des crises d’angoisse. de dépression ou de délire. Ces situations peuvent cependant s'accompagner de pertes de connaissance qui constituent alors un facteur de gravité — les états pathologiques aigus. régressifs. n’ayant pas comporté de trouble de vigilance, d’hypotonie ou de chute mais d’autres symptômes posent un problème diagnostique plus difficile. Ils sont souvent adressés pour «malaise». Ces signes doivent guider les investigations (Tabl. 1). Ces « pseudomalaises» ne font pas partie du cadre nosologique que nous avons défini. Au total Une réponse positive aux trois questions suivantes permet d’individualiser les malaises tels que nous les avons définis — Y a-t-il eu trouble de conscience ou de vigilance? — Le début a-t-il été aigu? — Les troubles ont-ils été régressifs ? Question 2. Quelles sont les données importantes de l’interrogatoire et de l’examen clinique? Quels sont les critères de gravité immédiate? L’interrogatoire L’interrogatoire est un élément capital du diagnostic. Il s’adresse au malade, à l’entourage, au médecin traitant, aux accompagnants et aux témoins, au besoin par téléphone. Il convient de rechercher et de consulter un éventuel dossier hospitalier antérieur. Quelles questions à poser? L’âge du patient Il oriente le raisonnement étiologique. Souvent, chez la personne âgée, la notion de malaise n’est pas dissociable de la notion de chute. L’appréciation du retour à la normale est difficile si l’état antérieur est inconnu. — — Les antécédents et facteurs de comorbidité Les facteurs personnels — On recherche la notion de malaise antérieur avec ou sans perte de connaissance, une pathologie associée et évolutive ou l’existence d’une pathologie antérieure cardiovasculaire, neurologique, psychologique, métabolique ou autre. Une étude minutieuse du traitement pris par le patient, y compris par automédication, est entreprise et particulièrement les médicaments cardiovasculaires, neuropsychotropes et anti-diabétiques. Tableau I Manifestations paroxystiques sans trouble de conscience: "pseudo-malaise” Acute clinical signs without loss of consciousness. Differential diagnosis Symptomatologie aiguë Etiologies à évoquer~ -Migraines (commune et Céphalées aiguës basilaire) Intoxication CO Epistaxis méningée HTA maligne - Phéochromocytome Déficit neurologique transitoire - Paresthésies - Déficit moteur -Accident ischémique transitoire -Troubles visuels - Migraines -Troubles du langage - Ictus amnésique -Trouble mnésique Palpitations Troubles du rythme cardiaque Dyspnée aiguë - Pneumothorax - Embolie pulmonaire - Pleuropneumopathie Fièvre, marbrures Bactériémie, état septique Douleurs thoraciques - Insuffisance coronarienne - Embolie pulmonaire - Pathologie aortique (dissection ou anévrisme) Douleurs abdominales Pathologies digestives aiguës (perforation d’un organe creux, embolie...) et/ou cardiaques et/ou pelviennes (GEU...) - Hémorragie interne (digestive Asthénie aiguë ou gynécologique) - Hypovolémie (intoxication alimentaire, gastro-entérite...) - Pathologie ORL Vertiges vrais - Insuffisance vertébro-basilaire Modification des téguments - Pâleur - Anémie - Rougeur - Flush (carcinoide, phéochromocytome...) - Cyanose - Hypoxie - Erythème, prurit, - Allergie oedéme - Toxiques Troubles - Médicaments psychiatriques aigus - Causes métaboliques (hypoglycémie) - Porphyries Liste non exhaustive. La notion de sevrage ou de modification thérapeutique récente est très importante. Il faut y associer la recherche de prise de toxiques ou de stupéfiants. Les facteurs familiaux Leur importance et leur analyse est fonction du contexte de survenue du malaise — - Les circonstances de survenue — Les prodromes Leur recherche doit être systématique. Les prodromes les plus fréquemment retrouvés sont des palpitations, une sensation de chaleur, des sueurs, un état vertigineux, des troubles visuels et auditifs. — Les circonstances physiologiques de survenue La position du patient au cours du malaise est recherchée de même que la notion d’un changement de position, tout particulièrement le passage de clinostatisme en orthostatisme. Le délai de survenue par rapport au repas permet d’évoquer, s’il est à distance, une hypoglycémie chez les diabétiques. En fin de repas le malaise chez une personne âgée est plutôt de type vaso-vagal. Les malaises vaso-vagaux peuvent être envisagés dans les situations suivantes: confinement, station debout prolongée, émotion. Un même mécanisme est impliqué dans les malaises survenant au cours d’une douleur aiguë dont l’étiologie ne peut être retenue comme cause directe du malaise. On en rapproche les malaises survenus au cours des quintes de toux, des fausses routes, des efforts de défécation ou de miction en particulier nocturnes. Des malaises survenant au cours d’un rasage, d’une compression cervicale, de mouvements de la tête ou du cou témoignent d’une hyperexcitabilité du sinus carotidien. L’insomnie, le sevrage éthylique ou médicamenteux (anti-épileptiques, benzodiazépines), une stimulation lumineuse intermittente sont des situations favorisantes des crises convulsives. La survenue d’un malaise à l’acmé d’un effort doit faire redouter une étiologie cardiaque ; par contre sa survenue à l’arrêt de l’effort en particulier chez le sujet jeune est évocatrice d’une hypertonie vagale. — Les circonstances environnementales Il convient de s’assurer de l’absence ou de la présence d’une source potentielle de monoxyde de carbone surtout lorsqu’il y a confinement: chauffage, chauffe-eau, véhicule en marche dans un garage... On ne peut exclure la possibilité d’intoxication oxycarbonée lorsque le malaise est survenu rapidement après la sortie du lieu de confinement. Le diagnostic est également à évoquer d’emblée en cas de malaises collectifs. La notion d’événements psychologiques doit être cherchée en particulier toute cause de stress, source de malaise d’ordre psychique sur terrain prédisposé. — Les signes d’accompagnement des malaises Une notion très importante concerne l’évaluation de la réalité et de la durée de la perte de connaissance. Elle est parfois difficile à faire préciser par le patient ou à estimer par l’intermédiaire des témoins. L’interrogatoire des témoins peut permettre de préciser la couleur du visage au moment du malaise (pâleur, cyanose, rubéfaction) la description de mouvements anormaux, la notion d’une prise initiale du pouls, ainsi que l’existence de manifestations respiratoires. La recherche de toute symptomatologie fonctionnelle, même fugace, et associée au malaise est capitale. La nature de ces signes est très variable (dyspnée, douleurs thoraciques ou abdominales, céphalées...). Les crises comitiales partielles peuvent avoir une sémiologie riche, polymorphe et trompeuse, notamment des crises partielles complexes à sémiologie psychique. C’est essentiellement le caractère stéréotypé du déroulement d’un malaise récidivant qui est le caractère le plus évocateur. — L’évolution du malaise L’interrogatoire apprécie la rapidité de la récupération, sa qualité, l’existence d’un état confusionnel post-critique et éventuellement d’un syndrome déficitaire transitoire observé par l’entourage. On précise le délai de recoloration après reprise de la conscience, la notion de palpitations, de douleurs thoraciques post-critiques. Au total Les données de cet interrogatoire permettent un diagnostic dans au moins 50 p. 100 des cas, c’est pourquoi il se doit d’être précis. L’absence de donnée anamnestique fiable et de témoin doit faire explorer ce malaise comme étant a priori organique et potentiellement grave. Un exemple de fiche d’interrogatoire d’un patient ayant présenté un malaise est proposé dans le tableau II. L’examen clinique On s’assure qu’il s’agit toujours d’un malaise tel qu’il est défini plus haut et qu’il ne s’accompagne pas de signes de gravité. L’examen clinique est orienté par les données recueillies à l’interrogatoire. Recherche de signes non spécifiques La recherche de lésions traumatiques dont il faut préciser s’il s’agit bien de la conséquence et non de la cause du malaise. La recherche d’une morsure de langue est importante, mais une morsure isolée du bout de la langue n a pas de valeur spécifique. S’il s’agit d’une morsure latérale avec des lésions importantes, le diagnostic d’épilepsie peut être évoqué. L’émission d’urines n’a qu’une valeur relative et n est pas spécifique. Associée à l’émission de selles, elle est le témoin, en général, de la profondeur de la perte de connaissance et représente un signe de gravité. Tableau Il Exemple de fiche d'interrogatoire d’un malade ayant fait un malaise Example of questioning sheet for a patient with fainting NOM: PRÉNOM: Age/Date de naissance : Sexe : Date 1° -Présence de témoins O Si oui, faire remplir une fiche aux témoins. 2° - Antécédents de maladies identiques O anciens O récents O nombre: 3° - Antécédents: - Cardiovasculaires O si oui : lesquels - Neurologiques O si oui : lesquels - Métaboliques O si oui: lesquels - Autres O si oui : lesquels : 4° - Avez-vous une maladie en cours? O laquelle ° si oui: lequel: . 5 -Traitement actuel? O 6°- Arrêt thérapeutique ou sevrage en cours O préciser: 7° - Antécédents familiaux de malaise ou de mort subite O nature: 8° - Prodromes: - palpitation O - sensation vertigineuse O - troubles visuels O - troubles auditifs O -sueurs O -chaleur O -autre O 9° - Position du patient au moment du malaise: 10° - Un changement de position a-t-il induit le malaise? O lequel ?: 11° - Le malaise est-il survenu à l’acmé d’un effort? O après un effort? O 12° - Le malaise est-il survenu au cours: d’une miction? O d’une défécation? O d’un repas? O Combien de temps avant le repas : h après le repas : h 13° - Retard de sommeil? O prise d’alcool, de toxique, d’un médicament? O préciser: 14° - Douleur déclenchante? O 15° - Existe-il un risque potentiel d’intoxication au CO ? O 16° - S’agit-il d’un malaise individuel ? O ou collectif? O 17° - Situation psychologique de stress: O préciser: 18° - Durée du malaise: min PC* complète? O partielle? O chute? O 19° - Téguments: pâleur? O cyanose? O marbrures? O 20° - Pouls: /min régulier? O irrégulier? O 21° - Syndrome post-critique? Non O Oui O nature 22° - Symptômes associés: dyspnée? O mouvements anormaux? O déficit séquellaire? O douleur thoracique ? O autre O nature : 23° - Conclusion / Remarques:…………………………………………………………………….. * PC: Perte de connaissance Recherche de signes cliniques d’orientation La deuxième partie de l’examen clinique va s’attacher à chercher des signes cliniques d’orientation étiologique - La palpation du pouls. - La mesure de la pression artérielle aux deux bras. - L’examen cardiovasculaire et neurologique doit être particulièrement minutieux, et comporte la recherche d’une thrombose veineuse profonde. - La recherche systématique d’un purpura cervico-facial, de signes de sevrage éthylique peut orienter, si elle est positive, vers une comitialité. - Après avoir éliminé toute contre-indication de l’examen clinique en orthostatisme, une recherche d’hypotension orthostatique s’impose avec prise de la tension couché, puis debout toutes les minutes pendant cinq minutes au minimum. - Un examen clinique minutieux permet de s’assurer de l’absence d’autre signe d’orientation qui feront rechercher éventuellement des diagnostics moins fréquents. Les orientations diagnostiques A la suite de l’interrogatoire et de l’examen clinique, on peut distinguer plusieurs situations qui orientent le diagnostic: Orientation cardiologique — Un malaise avec perte de connaissance à début brusque et retour rapide à la normale en moins de cinq minutes, avec pâleur extrême per-critique et recoloration rapide, est plutôt en faveur d’une cause cardiaque. Les antécédents de maladies cardiovasculaires, la survenue à l’effort, la prise de médicaments antiarythmiques, des signes d’accompagnement tels que douleurs thoraciques, palpitations, dyspnée doivent faire évoquer une origine cardiaque. Il faut souligner qu’un simple malaise peut conduire au diagnostic d’ischémie myocardique ou d’embolie pulmonaire. — Orientation neurologique Un malaise avec mouvements tonico-cloniques, cyanose ou rubéfaction cutanée per-critique ou confusion postcritique est plutôt en faveur d’une crise comitiale généralisée. L’existence d’un syndrome déficitaire transitoire, le caractère stéréotypé des manifestations critiques (épilepsie partielle) sont également évocateurs. Malaise vaso-vagal Les arguments forts en faveur d’un malaise vasovagal sont: — Le jeune âge. — L’existence de circonstances déclenchantes. — L’existence de prodromes. — Une phase de récupération plus ou moins prolongée avec asthénie et hypotension. — Des antécédents de malaises du même type. Des difficultés existent : le malaise vaso-vagal peut être brutal et sans prodrome apparent. Il peut également être trompeur et symptomatique d’une autre affection (infarctus du myocarde, embolie pulmonaire, hypovolémie). Hypotension orthostatique En faveur d’un malaise par hypotension orthostatique — La survenue lors du passage en orthostatisme. La reproduction du même malaise lors de l’épreuve d’orthostatisme, avec confirmation d’un phénomène hypotensif. — — L’existence de facteurs favorisants souvent retrouvée, notamment iatrogènes. Orientation psychiatrique Les arguments en faveur d’un malaise psychiatrique sont — L’absence d’autre cause décelable. — L’existence d’un stress ou d’un événement déclenchant. — Une sémiologie s’intégrant dans un syndrome psychiatrique identifiable. — Des antécédents de malaise du même type. Dans tous les cas La découverte à l’interrogatoire d’un autre symptôme (douleurs abdominales,...) peut amener à des diagnostics variés. Mention est faite de l’hypoglycémie qui doit être envisagée chez un patient diabétique, présentant des sueurs et/ou sous traitement hypoglycémiant. — Pour tout malaise, un facteur iatrogène doit être cherché et il est recommandé de consulter systématiquement une banque de données appropriée (Vidal,...). A l’issue d’un interrogatoire fouillé, d’un examen clinique minutieux et orienté, 50 à 70 p. 100 des malaises peuvent être rattachés à une étiologie. — Signes de gravité Immédiate La simple évocation d’une cause cardiaque est en soi un facteur de gravité, en raison de la surmortalité observée dans la population de patients dont l’étiologie est cardiaque. L’âge semble constituer un facteur de gravité. Il faut en rapprocher les problèmes associés à une polypathologie, source de comorbidité et de polymédication. Il est raisonnable de penser que l’absence d’anamnèse précise constitue une situation à risque potentiel. Question 3. Quelle est la place des examens complémentaires dans la stratégie diagnostique étiologique? Le bénéfice des investigations complémentaires est-il évalué? L’interrogatoire et l’examen clinique permettent de faire le diagnostic étiologique de 50 à 70 p. 100 des malaises admis dans un service d’urgences. Ainsi, les examens complémentaires doivent être limités dans leurs indications ; leur multiplication risque d’allonger les temps de passage aux urgences, d’augmenter le nombre d’hospitalisation et d’être faussement rassurants ou trompeurs. Ils peuvent être coûteux et surtout, leur rentabilité à titre systématique est très faible, inférieure à 10 p. 100 pour la plupart des auteurs. Les buts essentiels de l’exploration complémentaire sont de confirmer une suspicion clinique et d’éviter de méconnaître une pathologie grave dont le diagnostic n’a pu être éliminé du fait de difficultés à l’interrogatoire, d’imprécision sur l’état antérieur du malade, de doute sur une récupération totale. Les notions de terrain et de circonstances doivent être prises en considération afin d’en limiter au maximum le nombre et d’en augmenter la rentabilité. Dans le cadre d’une prise en charge au service d’accueil et d’urgence, ne peuvent se discuter que des examens simples, immédiatement disponibles, fiables, dont le résultat peut être obtenu rapidement. Ils doivent influencer la prise en charge, aider au pronostic immédiat ou faciliter l’orientation ultérieure. La pratique systématique des examens paracliniques est, à juste titre, beaucoup critiquée. Seront ainsi recommandés des examens, systématiques ou orientés, envisagés dans les premières heures de prise en charge du malaise, puis des explorations guidées par les résultats de l’examen initial. A l’admission Certains examens complémentaires doivent systématiquement se discuter en urgence dans les premières heures, d’autant que certains paramètres peuvent rapidement évoluer vers la normale. Ces examens envisagés sont l’électrocardiogramme, la glycémie. le ionogramme sanguin, l’hémogramme, la carboxyhémoglobinémie, l’alcoolémie, la recherche de toxiques, les dosages médicamenteux, la gazométrie artérielle et les bêta HCG. Seul l’électrocardiogramme est recommandé à titre systématique La rentabilité de l’électrocardiogramme est diversement appréciée de 3 à 15 p. 100 dans les différentes séries. La gravité des diagnostics recherchés et la surmortalité des causes cardiaques justifient cependant sa réalisation systématique. De plus, il peut conduire à la demande d’un avis cardiologique en urgence (Tabl. III) ou permettre l’orientation ultérieure du patient ; il doit être réalisé très précocement, interprété immédiatement car pouvant justifier — Tableau III Anomalies électrocardiographiques justifiant un recours immédiat au cardiologue Electrocardiograpic abnormalities requiring immediate rewiewing by a consulting cardiologist Troubles d’automatisme et de conduction - Conduction auriculoventriculaire BAV du 2e degré sauf Wenckebach BAV du 3e degré - Conduction intraventriculaire BBD + HBPG ± PR long BBG + PR long - Fonction sinusale Bradycardie sinusale < 40 min Pauses sinusales > 2 s ESV fréquentes polymorphes et/ou en salves (> 3) Tachycardies à QRS large Torsade de pointes Syndrome de WPW Hyperexcitabilité ventriculaire Tachycardies Anomalies de QRS Anomalies de repolarisation - Intervalle QT - Ondes T QT T négative dans tout le précordium BAV Bloc auriculo-ventriculaire. BBD Bloc de branche droite. BBG Bloc de branche gauche. HBPG Hémibloc postérieur gauche. ESV Extrasystoles ventriculaires. WPW: Wolff-Parkinson-White. un monitoring pour surveillance s’il met en évidence une anomalie grave. Bien entendu, si un ECG antérieur peut être récupéré, il devra être comparé avec le tracé actuel. Les manœuvres vagales (Valsalva, massage du sinus carotidien, compression des globes oculaires) ne sont pas indiquées de façon systématique opérateurs dépendants, leur sensibilité et leur spécificité n’ont jamais été évaluées. Le risque de migration embolique lors du massage carotidien ne peut jamais être formellement éliminé notamment chez le sujet âgé potentiellement athéromateux. Si le patient est porteur d’un pacemaker, un dysfonctionnement peut parfois être suspecté quand le rythme n’est pas électro-entraîné ; il n’est pas recommandé de pratiquer un test à l’aimant ; les progrès technologiques des stimulateurs et les difficultés d’interprétation du test imposent aujourd’hui l’avis du cardiologue. Le monitorage de l’ECG par surveillance scopique continue est exceptionnellement décisif, peu de patients récidivant leur malaise pendant l’enregistrement. — — — Le second niveau concerne les examens à discuter systématiquement L’hypoglycémie est, dans le cadre défini, un fait rare dans un service d’urgence. Le mythe du malaise hypoglycémique spontanément régressif chez le sujet antérieurement sain ne saurait justifier ni la glycémie capillaire par le dextrostix, ni le prélèvement veineux systématiques. L’association « glycémie capillaire abaissée et amélioration symptomatique après resucrage » ne permet absolument pas de porter rétrospectivement le diagnostic d’hypoglycémie, il risque d’être faussement rassurant ou générateur de bilans ultérieurs inutiles et coûteux. Au contraire, un dosage couplé, capillaire et veineux, est indispensable chez tout patient diabétique ou tout sujet prenant des médicaments à risque hypoglycémiant. Le ionogramme sanguin et l’hémogramme ont une rentabilité très faible : de 0 à 3,8 p. 100 pour le ionogramme et de 0 à 0,8 p. 100 pour l’hémogramme. Néanmoins, leur réalisation se justifie dans certaines circonstances dictées par le terrain (sujets âgés, dénutris...), les antécédents (hépatopathie, néphropathie...), les prises médicamenteuses (diurétiques, laxatifs, corticoïdes...), la symptomatologie (altération de l’état général, troubles de l’hydratation, pâleur, fièvre, tachycardie, troubles digestifs...). Deux situations pièges doivent être évoquées de principe par le médecin confronté à un malaise d’étiologie indéterminée: l’intoxication éthylique aiguë et l’intoxication au monoxyde de carbone. Les symptômes sont trompeurs et peuvent se limiter à un malaise ou une perte de connaissance isolés. Parfois, le diagnostic n’a été porté que par un dosage systématique. Si ces pathologies ne peuvent pas être définitivement éliminées par l’interrogatoire et l'examen clinique, le dosage — — — de l’alcoolémie et de la carboxyhémoglobinémie sont impératifs. Le bilan toxicologique non orienté n’a aucun intérêt dans cette situation ; le dosage plasmatique d’un médicament peut être demandé soit pour vérifier l’observance, soit pour dépister un éventuel sur-dosage (antiépileptique...). La gazométrie artérielle, le dosage des bêta HCG, des transaminases, de la calcémie ainsi que le bilan de la coagulation sont injustifiés dans le cadre strict du malaise isolé ; seul un contexte et/ou une comorbidité conduit à la réalisation d’un ou plusieurs de ces examens. — — Passées les premières heures Passées les premières heures et en l’absence de diagnostic de certitude, certains examens complémentaires ultérieurs seront proposés en fonction de leur rentabilité et du contexte dans lequel ils seront demandés. Le test d’inclinaison Le test d’inclinaison est un examen clé. Il analyse la réaction du système nerveux autonome et probablement hormonal au stress que représente pour l’organisme le passage de la position allongée à la position inclinée; il tend actuellement à être bien standardisé (60 à 700 d’inclinaison pendant 45 minutes, avec ou sans test pharmacodynamique) ; il est positif quand il reproduit un malaise contemporain d’une chute tensionnelle. Il est cependant inutile, pour confirmer une syncope vaso-vagale dont le diagnostic de certitude a été porté par l’interrogatoire sur un contexte évocateur et des signes cliniques typiques. Cependant certaines syncopes vaso-vagales n’ont pas une symptomatologie classique et peuvent prendre le masque d’une syncope à l’emporte-pièce du type Adams-Stokes, brutale et sans prodrome. Dans ces syncopes vaso-vagales, le test d’inclinaison est spécifique, mais sa sensibilité est variable de 40 à 87 p. 100. Par sa positivité, il permet d’une part de fixer un bon pronostic et d’autre part d’éviter la réalisation d’examens complémentaires invasifs et/ou coûteux, voire des traitements inutiles. Les études ont montré une rentabilité du test d’inclinaison allant jusqu’à 50 p. 100 dans le cadre des syncopes d’étiologie indéterminée. Son indication doit être très large et prioritaire, avant toute épreuve cardiologique, s’il n’existe pas d’anomalie cardiaque clinique ou électrique. Les examens cardiologiques L’origine cardiaque d’un malaise ou d’une syncope accroît le risque de morbidité à moyen terme. L’âge avancé, les antécédents cardiologiques, la brutalité de la syncope, les anomalies de l’électrocardiogramme orientent vers une exploration à visée cardiologique. La rentabilité de cette exploration est difficile à évaluer pour une population non sélectionnée (recrutée dans un service d’Urgence) et a surtout fait l’objet d’études chez des patients recrutés dans des milieux spécialisés. Le Holter rythmique donne des résultats décevants en terme de rentabilité, surtout si les électrocardiogrammes de base sont normaux: d’une part, la récidive du malaise se produit rarement durant l’enregistrement, d’autre part les anomalies détectées ne sont pas toujours significatives ou pertinentes. A ce stade, la pratique des autres examens (échocardiographie, électrocardiogramme à haute amplification, épreuve d’effort, épreuves électrophysiologiques intracardiaques) sera dictée par le cardiologue qui aura lui-même réinterrogé et réexaminé le patient. Les examens neurologiques L’électro-encéphalogramme et la tomodensitométrie cérébrale sont deux examens accessibles dans un service d’accueil et d’urgence. Néanmoins, ils n’ont absolument pas leur place de façon systématique devant un malaise inexpliqué. L’électro-encéphalogramme ne peut se discuter que si la suspicion de comitialité est forte ; sa rentabilité n’a jamais fait l’objet d’une étude rigoureuse dans ce contexte. Le risque de mauvaise interprétation d’anomalies non spécifiques est loin d’être négligeable et il semble préférable, en cas de doute, de confier le patient au neurologue pour un interrogatoire orienté et un examen clinique. Le scanner cérébral se justifie en cas de doute sur une lésion focale ou dans le bilan d’une comitialité accompagnée ou inaugurale. Le Doppler des troncs supra-aortiques sera réservé aux très rares cas où un accident ischémique transitoire de la fosse postérieure aura pu être raisonnablement argumenté. L’évocation de diagnostics plus rares (maladies de Gélineau, hypotension orthostatique neurogène de certaines maladies dégénératives...) pourront conduire à d’autres examens complémentaires plus spécialisés. Conclusion L’anamnèse est la pierre angulaire du diagnostic étiologique des malaises, permettant d’épargner des examens complémentaires inutiles, coûteux et faussement rassurants. La stratégie des examens complémentaires est illustrée par la figure 2. L’électrocardiogramme doit être systématique. La biologie est peu rentable, mais reste utile devant des tableaux trompeurs ou difficiles. Parmi les autres examens, le test d’inclinaison semble le plus intéressant. Fig. 2.— Stratégie des examens des examens complémentaires. Strategy of Iaboratory investigations. Question 4. Quelle orientation doit être prévue (hospitalisation, sortie, consultations secondaires) et dans quelles conditions ? Au terme du bilan anamnestique, clinique et des examens complémentaires réalisés au service d'Urgence, il faut décider si le patient doit être hospitalisé, s’il peut quitter l’hôpital, et selon quelles modalités. Les orientations possibles L hospitalisation de court séjour L’unité sera choisie en fonction de l’orientation diagnostique (Cardiologie, Neurologie, autres). Si le pronostic vital peut être engagé à court terme en raison d’une cause cardiologique, l’hospitalisation en Unité de Soins Intensifs s’impose. L ‘hospitalisation de courte durée du service d ‘urgence (HCD). Elle permet de surveiller le malade, d’administrer éventuellement un traitement nécessaire, de vérifier les conséquences de la suppression d’une thérapeutique en cours. Enfin, cette hospitalisation peut servir à compléter une anamnèse insuffisante, à réaliser les examens complémentaires, à prendre un avis spécialisé en fonction de l’orientation diagnostique. Le retour à domicile avec la prescription d’examen(s) ou consultation(s) spécialisée(s) dont la réalisation peut être différée de plusieurs jours, et dont le choix est guidé par l’orientation diagnostique. Le retour à domicile simple peut parfois s’envisager il existe alors une orientation diagnostique précise et on peut affirmer la bénignité du malaise. Dans tous les cas où le malade quitte l’hôpital, une information accessible sur la nature du problème présenté et sur les moyens de prévention lui sera fournie. Il est impératif dans le cas d’un retour à domicile que le médecin traitant soit associé à la prise en charge du malade. Éléments à prendre en compte pour l’orientation Plusieurs éléments interviennent dans le choix de l’orientation du malade Diagnostic établi ou suspecté au terme du bilan initial au service d’urgence — Il est souvent possible d’établir le diagnostic de malaise vaso-vagal, d’autant plus facilement que sont présents les éléments clés constitués par l’identification de la phase prodromique et des circonstances déclenchantes. Si l’origine vaso-vagale est affirmée par l’interrogatoire, aucun examen supplémentaire n’est nécessaire. Si l’origine vaso-vagale est seulement suspectée, sans argument pour une autre pathologie, le malade n’est pas hospitalisé et un test d’inclinaison sera réalisé secondairement. L’hypotension orthostatique sévère, souvent de cause neurologique, est rare. Elle nécessite une hospitalisation en court séjour. Souvent, l’hypotension orthostatique revêt une forme moins intense elle est fréquemment iatrogène. Dans ce cas, l’hospitalisation peut souvent être évitée. La prise en compte du terrain (âge) est déterminante. — Lorsque le malaise est dû à une pathologie cardiaque, celle-ci est presque constamment grave, à potentialité létale (trouble du rythme ou de la conduction, obstacle à l’éjection ventriculaire gauche). On en rapproche les formes syncopales de l’hyper-réflectivité sino-carotidienne. Le diagnostic ou même la seule suspicion de malaise d’origine cardiaque impose toujours une hospitalisation en milieu spécialisé. Des dérogations à cette règle ne peuvent être envisagées qu’après l’avis du cardiologue. — Dans les malaises d’origine neurologique, on distingue les crises comitiales, et rarement d’autres pathologies (accident ischémique transitoire) qui peuvent justifier l’hospitalisation en service de court séjour. — Lorsque l’on s’oriente vers un diagnostic de crise comitiale, on s’appuie sur les modalités de prise en charge telle qu’elles ont été définies au cours d’une précédente conférence de consensus (SFLJM, Genève 1991): L’hospitalisation en court séjour est indiquée lorsqu’il y a eu une répétition des malaises ou qu’il s’agit d’une crise convulsive accompagnée. L’hospitalisation s’effectue en HCD en cas de crise comitiale isolée occasionnelle ou inaugurale. En cas de crise comitiale chez un épileptique connu, lorsque la crise peut être rapportée à une non observance du traitement reconnue par le sujet qui est par ailleurs correctement suivi, il n’y a pas d’indication à l’hospitalisation. Une intoxication éthylique au premier plan du tableau clinique ne doit pas dispenser de la recherche d’une pathologie associée. En général, le malade doit être surveillé au cours d’une hospitalisation en HCD (Consensus SFUM Saint-Étienne, 1992). — Dans l’intoxication oxycarbonée, rentrant dans le cadre des malaises (forme non grave) la prise en charge peut être réalisée en HCD. — Dans les intoxications médicamenteuses et la pathologie iatrogène, la nature des effets toxiques ou latéraux, et les caractéristiques pharmacologiques des produits incriminés ainsi que les risques inhérents à un sevrage médicamenteux brutal seront pris en compte. Selon les cas, le malade peut retourner à son domicile (exemple : prise abusive de dérivés nitrés d’action rapide), ou être surveillé en UHCD (exemple : erreur dans la prise de médicaments psychotropes). Plus rarement, une surveillance en milieu spécialisé est justifiée (exemple : anti-arythmiques). Cette attitude est à moduler en fonction du terrain. Les malaises d’origine psychiatrique et/ou sans support somatique (hyperventilation psychogène, « spasmophilie ») ne nécessitent pas d’hospitalisation dans la majorité des cas. Lorsqu’ils semblent s’intégrer dans la décompensation d’une maladie psychiatrique, le recours au spécialiste est nécessaire pour déterminer l’orientation. Autres éléments à prendre en compte L’absence de diagnostic établi ou même suspecté (30 p. 100 des cas) est une situation à risque. La qualité et la fiabilité de l’anamnèse, le terrain (âge, contexte social et dépendance), la présence de critères de gravité déterminent l’orientation. Seul un interrogatoire fiable, l’absence de critère de gravité et de pathologie associée, — — — ainsi qu’un bon entourage familial et médical permettent de décider le retour à domicile avec prescription d’examens complémentaires et/ou de consultations spécialisées. Les critères de gravité tels qu’il ont été définis à la question 2 imposent une hospitalisation. Le terrain :il faut tenir compte de l’âge et de l’existence de problèmes sociaux et du suivi médical ainsi que de la qualité de l’entourage lors du retour à domicile. Une situation très fréquente est celle de la personne âgée, dépendante et isolée socialement. Des complications traumatiques du malaise peuvent en elle-même nécessiter une hospitalisation, indépendamment de la prise en charge du malaise. — — — Choix de l’orientation Le choix de l’orientation découle des éléments qui viennent d’être évoqués et peut être schématisé dans le tableau IV: Tableau IV Orientation du malade en fonction de l’étiologie Management and indications for admission Diagnostic Malaise vaso-vagal Hypotension orthostatique (1) Crise convulsive accompagnée isolée maladie épileptique connue Intoxication éthylique Intoxication oxycarbonée Intoxication médicamenteuse et pathologie iatrogène (2) Affection psychiatrique (1) Absence de diagnostic (1) - Sortie UHCD (3) Court séjour + + + + + + + + + + + + + + + + (1) En fonction du terrain et de la gravité potentielle. (2) En fonction de la nature du médicament et du pronostic. (3) Unité d’Hospitalisation de Courte Durée. Question 5. Quel est le rôle infirmier lors de la prise en charge des malaises au SAU? Le rôle infirmier recouvre plusieurs fonctions L ‘accueil L’accueil est la première fonction de l‘infirmière Idéalement, cette fonction devrait être assurée par l'infirmière d’accueil et d’orientation (IAO, première intervenante pour la prise en charge de tout patient arrivant au service d’accueil et des urgences (SAU). En l’absence de l’IAO. cette fonction est dévolue à l’infirmière qui prend en charge le patient. D’une manière générale, l’observation initiale du malade doit rechercher des signes de gravité altération de la vigilance, fréquence respiratoire anormale, pouls imperceptible et/ou irrégulier, anomalie de la coloration cutanée (pâleur, cyanose, marbrures), déficit neurologique patent, lésion traumatique. De façon spécifique, l’existence de signes de gravité et/ou de signes d’accompagnement élimine le fait que le malaise soit le seul motif apparent de recours aux urgences. Dans ce cas, il s’agit d’une situation clinique qui justifie une prise en charge médicale immédiate ou rapide, situation de priorité de niveau I ou 2 (Tal. V), selon la référence canadienne. En l’absence de signe de gravité et/ou de signe d’accompagnement, le malaise est classé habituellement en priorité 3 d’après la même référence. Le recueil des informations concernant le malade et son malaise est la deuxième fonction de l’infirmière à l’accueil Il doit permettre d’identifier le contexte de survenue du malaise (lieu, heure, durée, notion de chute, perte de connaissance). A cet égard, il est capital d’obtenir des renseignements auprès des témoins oculaires et/ou des accompagnants (famille, ambulancier, pompiers). En leur absence aux urgences, il est indispensable d’obtenir leurs coordonnées, notamment téléphoniques, afin qu’ils puissent être ultérieurement interrogés par le médecin. L’infirmière doit s’enquérir de tout élément qui permette d’appréhender le passé médical et le contexte social du malade. Il est notamment indispensable de consigner — la lettre du médecin traitant si elle est disponible, — la notion d’antécédent identique, — les hospitalisations antérieures, — l’existence d’une ordonnance, la nature du traitement actuel, — la nature et l’heure de la dernière prise médicamenteuse et/ou d’un éventuel toxique, — l’existence de documents médicaux antérieurs, principalement l’électrocardiogramme, — le contexte de vie habituelle et le degré de dépendance. En l’absence de ces éléments, l’infirmière doit demander à la famille de les communiquer le plus rapidement possible et d’apporter les documents disponibles. Toutes ces informations sont colligées par écrit dans le dossier de soins du malade en termes clairs et concis, dossier transmis à l’infirmière de soins et à l’équipe médicale. Les soins relationnels et de réconfort Ils débutent dès l’accueil par une attitude calme, confiante et rassurante. L’information du malade sur la nécessité d’un examen clinique et d’éventuels examens complémentaires est indispensable afin Tableau V Tri et priorités à l’accueil Triage and priorities on admission Priorité 1 Temps de tri Exemples - 30 à 60 s Arrêt cardiaque Arrêt respiratoire Dyspnée grave Cyanose Polytraumatisme Priorité 2 2 min Douleur thoracique Altération de la conscience, de la vigilance Douleur abdominale, nausées, vomissements Priorité 3 Plus de 2 min Étourdissement isolé Anxiété Malaise Priorité 4 Indéfini Contusions mineures Priorité 5 Indéfini Rendez-vous donné Priorité 1i situation aiguë. Priorité 2 : situation urgente. Priorité 3 : situation non urgente. Priorité 4 situation où t’on peur diriger la personne vers un autre service. Priorité 5 situation à traitement sur rendez-vous. d’obtenir sa collaboration et son adhésion, notamment pour éviter son départ prématuré. Il est informé de son admission en unité de soins des urgences et de la durée prévisible de sa prise en charge immédiate. Les soins Après déshabillage, le malade est installé dans un box de soins, dans la position qui lui est la plus confortable. On lui demande de ne pas se lever seul, et on veille tout particulièrement à sa sécurité, éventuellement en mettant les barrières de protection. Dès l’installation, le soin relationnel et le réconfort se poursuivent. Les constantes cliniques sont vérifiées et consignées par écrit fréquence cardiaque, pression artérielle au brassard, fréquence respiratoire, niveau de conscience, coloration cutanée, température. Il faut d’emblée envisager la réalisation d’un électrocardiogramme qui fait partie de la prise en charge de tout malaise. La surveillance continue de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle (mise sous scope), ainsi que la mise en place d’une voie veineuse ne doivent pas être systématiques. Il en est de même pour la vérification de la glycémie capillaire et le bilan sanguin en l’absence de prescription médicale et/ou d’un protocole écrit du service. La recherche d’une éventuelle hypotension orthostatique ne peut être faite qu’après prescription médicale et exclusion des contre-indications. L' éducation Le diagnostic clinique et la prise en charge médicale étant faits, Je médecin et l’infirmière expliquent au malade et/ou à son entourage les résultats des explorations cliniques et des éventuels examens complémentaires. Le devenir du malade peut être un transfert vers une autre unité de soins pour la poursuite des soins et des investigations appropriés à son état. En cas de retour à domicile, il convient d’expliquer au malade que, malgré l’absence d’éléments de gravité et de critères d’hospitalisation, la possibilité de récidive du malaise ne peut être écartée. La prévalence des malaises et leur caractère fréquemment iatrogène justifient la place des soins éducatifs et préventifs. Le risque de récidive doit être diminué par une information appropriée aux problèmes de santé du patient. Il lui est notamment recommandé — — d’identifier les circonstances dans lesquelles le malaise peut survenir, d’apprendre à en reconnaître les prodromes, et à prendre les pulsations, de se mettre en situation de sécurité et/ou s’allonger en cas d’existence de ces prodromes, — — de consulter son médecin traitant en cas de récidive, — de veiller à la bonne observance du traitement prescrit, — d’être conscient des dangers de l’automédication. Pour compléter le soin préventif, il est conseillé de faire appel au travailleur social si des problèmes sociaux ont été détectés. Toutes ces informations doivent faire l’objet d’instructions de sortie, validées par les acteurs du service de soins (médecins infirmières), et sont remises au malade et/ou à son entourage. Cette approche éducative est nécessaire pour un patient ayant fait un malaise, et sa généralisation permettrait peut-être d’en prévenir un nombre significatif. -