présentation ppp Pr Claude Njomgang seeac 2014

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6ème SEMINAIRE INTERNATIONAL
DU
SECRETARIAT POUR L’EVALUATION
ENVIRONNEMENTALE EN AFRIQUE CENTRALE (SEEAC)
THEME
« Evaluation Environnementale: intégrateur des enjeux
émergents dans les processus de développement durable: Changements
climatiques / REDD+, conflits d’usages, économie verte, égalité du genre et lutte
contre le VIH/ SIDA »
BUEA, 13 AU 14 NOVEMBRE 2014
L’ECONOMIE VERTE :
COMMENT COMPRENDRE CE CONCEPT
CLAUDE NJOMGANG
Membre du Conseil d’Orientation de l’Institut de la Francophonie pour le
Développement Durable (IFDD)
DEFINITION
•
Economie verte = cadre normatif de l’évaluation environnementale, entendue
comme processus systématique d’évaluation et de documentation des possibilités,
des capacités et des fonctions des ressources, des systèmes naturels et humains,
afin de faciliter la planification du développement durable.
•
Affinité avec le concept antécédent de développement durable dont les
indicateurs constituent la base critériologique de l’évaluation environnementale.
Toutefois, économie verte = feuille de route et non substitut du développement
durable.
•
Deux normes caractéristiques de l’économie verte dans ce cadre, la transition et
la transversalité, dont chacune nous sert de critère de classification des actions et
conditions nécessaires de réalisation :
–
–
La transition renvoie aux mutations (économiques, sociales, écologiques et institutionnelles) qui
conditionnent la durabilité des processus de développement. L’approche en termes de transition est
l’aboutissement d’une évolution profonde du statut de l’environnement dans les politiques
économiques, marquée par le passage d’une conception malthusienne de la croissance dans le
rapport Meadows (problématique de la « croissance zéro »), à une conception transitionnelle dans le
rapport Brundtland.
La transversalité renvoie quant à elle, à la fois au caractère transversal du thème de l’adaptation
(notamment aux changements climatiques) sous-jacente à la transition, et à l’optimalité intertemporelle des sentiers d’exploitation des ressources.
DEFINITION (suite)
•
Economie verte = nouveau paradigme (modèle de référence) qui émerge du processus
de Rio traduisant l’aspiration des peuples à un développement durable, par la prise en
compte effective des facteurs environnementaux dans l’élaboration et la mise en œuvre
des politiques nationales de développement.
•
Concept encore très controversé. Le document final de la conférence de Rio +20
intitulé « L’Avenir que nous voulons », a suscité de nombreuses critiques, notamment
celle de « marchandisation de la nature » (référence l’idée d’un « marché » du carbone
inhérente aux conventions de Rio). Toutefois, référence commune à la définition du
PNUE : « une économie qui entraîne une amélioration du bien-être humain et de
l’équité sociale tout en réduisant de manière significative les risques environnementaux
et la pénurie de ressources ».
•
Caractéristique essentielle de ce modèle économique = investissements (ou activités)
qui non seulement assurent la croissance des revenus et de l’emploi, mais réduisent
aussi les externalités environnementales (pollution et perte de biodiversité), renforcent
l’utilisation rationnelle des ressources et l’efficacité énergétique ainsi que l’inclusion
sociale.
L’ÉMERGENCE DE L’ÉCONOMIE VERTE COMME CADRE NORMATIF POUR
L’ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE
•
Profonde mutation du statut de l’économie verte à travers le processus de Rio. Initialement
conçue comme une feuille de route pour la mise en œuvre de l’Agenda 21 de Rio, elle tend à
devenir une conditionnalité et un cadre normatif de référence pour les stratégies nationales
de développement durable et pour l’évaluation environnementale.
•
Trois étapes dans ce processus :
1) Le Programme Action 21 de Rio (1992) souligne dans son paragraphe 40.4 les limites des indicateurs de développement tel que le
PIB, et la nécessité d’en construire de nouveaux pour évaluer la durabilité
2) Depuis Johannesburg (Rio + 10) Les États ont en effet pris l’engagement de se doter d’une stratégie de développement durable
s’appuyant sur des systèmes structurés d’indicateurs facilitant le suivi des progrès accomplis et pouvant servir d’objectifs
quantitatifs.
3) Rio +20 marque la concrétisation de l’économie verte comme cadre de référence pour un développement durable. plus de 700
engagements volontaires à l’appel de la conférence en vue de la création d’un fond international pour le financement de l’économie
verte globale . Plus de $513 milliards ont été mobilisés pour des projets de développements verts . Huit banques de développement
international ont promis d’investir $175 milliards sur une période de dix ans. Le secteur privé a promis $50 milliards pour le
développement d’énergies renouvelables jusqu’en 2030. La CEEAC est engagée dans le processus de mise en place du Système de
l’Economie Verte en Afrique Centrale (SEVAC) et du Fonds pour l’Economie Verte en Afrique Centrale (FEVAC).
I
L’ECONOMIE VERTE : UNE NORME DE TRANSITION
• Norme de transition = exigence d’efficience sociale et
écologique des activités économiques, distinct du problème
de la croissance zéro posé au début des années soixante-dix
par le Club de Rome.
• Transition vers l’économie verte interprétée comme le
passage d’une interface bilatérale (schéma 1) à une interface
multilatérale (Schéma 2) englobant toutes les permutations
des trois secteurs socio environnementaux (A  3! = 6).
L’interface bilatérale, c’est-à-dire la combinaison deux à deux
des trois sphères, représente un nombre bien moins élevé
d’interactions ( C = 3).
3
3
2
SCHÉMA 1
ECO
S
E
SCHÉMA 2
I
L’ECONOMIE VERTE : UNE NORME DE TRANSITION (suite)
• Les conditions d’une transition souple vers
l’économie verte classées selon les dimensions du
développement durable:
–
–
–
–
transition économique
transition écologique,
transition sociale,
transition institutionnelle
LA TRANSITION ECONOMIQUE
•
•
« verdissement » dans une optique d’écologie sectorielle, où secteurs
économiques considérés comme des écosystèmes particuliers (« éco-activités »),
avec un mécanisme incorporé de reproduction à restaurer ou à préserver. Les écoactivités visent alors à réduire l'empreinte écologique, c’est-à-dire la surface
productive nécessaire à une personne ou à une population pour répondre à sa
consommation de ressources et à ses besoins d’absorption de déchets.
Les principaux secteurs concernés par cette approche éco systémique sont :
–
–
–
–
–
–
l’industrie (mécanismes de recyclage des déchets) ;
l’agriculture (agriculture durable, faible consommatrice d’engrais chimiques) ;
l’énergie (maîtrise, transition et efficacité énergétique) ;
la gestion de l'eau (recyclage et rationalisation des usages) ;
les transports (substitution des bio-carburants aux carburants fossiles) ;
les bâtiments (renforcement de la « valeur verte », c’est-à-dire la valeur nette additionnelle d’un
logement traduite en termes financiers, résultant d’une meilleure performance environnementale,
en termes de performance énergétique, d’accès aux transports en commun, de qualité de ses
matériaux de construction …»).
LA TRANSITION ECONOMIQUE (suite)
•
La transition économique implique le « verdissement » des comptes nationaux.
La comptabilité environnementale intègre les « agrégats verts », ou « écoagrégats », qui sont les agrégats de la comptabilité nationale classique corrigés
des coûts de l’épuisement des ressources naturelles ainsi que des dommages dus à
la dégradation (perte de biodiversité) et à la pollution.
•
La comptabilité environnementale utilise deux principaux cadres comptables : les
comptes satellites et les comptes de revenu national modifiés.
–
–
Les comptes satellites sont dérivés du système de comptabilité économique et environnementale
intégrée (SCEE) des Nations-Unies. Ils consistent en un ensemble de comptes physiques
complémentaires des comptes nationaux classiques (établis en termes monétaires), et enregistrant
les stocks de ressources naturelles d’ouverture et de clôture, ainsi que l’évolution de la qualité de
l’environnement pour une période donnée.
Les comptes de revenu national modifiés font une évaluation monétaire des impacts permettant de
« corriger » les comptes nationaux pour éviter le double emploi et pour fournir une mesure plus
précise du niveau de bien-être et de la durabilité de l’économie nationale.
LA TRANSITION ECOLOGIQUE
• La transition écologique renvoie à l’efficience écologique des modes de
production, et à l’adoption de technologies plus respectueuses de
l’environnement.
• L’efficience écologique implique:
– l’utilisation d’un indice de performance environnementale (IPE) pour évaluer l’efficacité
des politiques environnementales dans les domaines suivants : ressources en eau
(gestion intégrée des ressources en eau [GIRE]), ressources naturelles, énergies
renouvelables, biodiversité, santé et environnement. Les IPE sont surtout constitués par
les séries de normes ISO (ici ISO 14031);
– le renforcement de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) en vue de
l’adoption volontaire des normes (ISO 26000) par des certifications ;
– l’incitation des populations locales à travers les mécanismes de paiements pour services
environnementaux (PSE) ;
– la promotion du commerce équitable sous l’égide de l’OMC (norme ISO 14001).
LA TRANSITION SOCIALE
• La transition sociale renvoie à l’efficience sociale des activités
économiques, c’est-à-dire à leur aptitude à produire une croissance
génératrice d’équité sociale et réductrice de pauvreté.
– Forte dépendance des pauvres vis-à-vis des biens environnementaux, avec pour
corollaire un lien étroit entre économie verte et transition sociale.
• L’efficience sociale implique notamment :
– l’accroissement des investissements et la création d’emplois dans les secteurs verts,
dont dépendent les pauvres pour la satisfaction des besoins fondamentaux ;
– le ciblage des petits exploitants pour le « verdissement » de l’agriculture;
– Le développement du tourisme « vert » afin de soutenir l’économie locale.
LA TRANSITION INSTITUTIONNELLE
•
La transition institutionnelle renvoie la capacité des institutions à assurer une
gouvernance environnementale nationale et globale, axée sur les actions
suivantes :
– la mise en place ou la consolidation de mécanismes de participation
citoyenne en environnement, afin de réduire ou compenser les défaillances
institutionnelles ;
– la mise en place de cadres juridiques et réglementaires efficaces ;
– la promotion de dépenses et investissements publics dans les éco-activités;
– le recours à la fiscalité écologique (« écotaxes ») et aux instruments
économiques pour modifier les préférences des consommateurs et
promouvoir l’innovation et les investissements verts ;
– l’investissement dans le renforcement des capacités et la formation ;
– le renforcement de la gouvernance internationale pour l’élaboration et la mise
en œuvre des conventions « vertes » ou conventions de Rio (CBD, CCNUCC,
CLCD), ainsi que pour l’élaboration des documents de stratégie nationale pour
le développement durable (SNDD).
II
L’ECONOMIE VERTE : UNE NORME DE TRANSVERSALITE
•
La transversalité spatiale (ou intersectorielle) se réfère à l’adaptation aux
changements climatiques, point focal de l’engagement des Etats dans le processus
de Rio.
–
•
Adaptation = thème essentiellement transversal, qui concerne d’une part tous les domaines
d’activités de conservation et de gestion des ressources, et d’autre part toutes les catégories
institutionnelles.
Sept principaux domaines de mise en œuvre sous-tendent les politiques
d’adaptation de changements climatiques :
–
–
–
–
–
–
–
la protection de l’atmosphère,
la lutte contre la sécheresse et la désertification,
la conservation et la gestion de la biodiversité,
la gestion des écosystèmes fragiles,
la conservation et la gestion des océans,
l’agriculture durable,
la gestion des ressources en eau.
L’ECONOMIE VERTE : UNE NORME DE TRANSVERSALITE (suite)
•
La transversalité inter temporelle (ou intergénérationnelle) est une norme
implicite à la définition du développement durable dans le rapport Brundtland :
–
–
–
–
le principe sous-jacent de non décroissance du revenu par tête est en effet une expression de la
condition de transversalité en horizon infini, qui implique que le flux de revenu généré par la
croissance soit indéfiniment soutenable.
La « croissance verte » devient alors synonyme de « croissance optimale », et implique que le taux
de préférence temporelle (arbitrage entre le présent et le futur) de la génération actuelle (ou taux
d’escompte social) soit nul, c’est-à-dire qu’elle soit indifférente entre le présent et le futur.
Elle est donc disposée à renoncer à une satisfaction présente (exploitation excessive des ressources
notamment), pour une satisfaction future (conservation pour les générations futures).
Une autre interprétation de cette indifférence temporelle est que la génération présente est
disposée à compenser les générations futures en supportant les coûts de restauration des ressources
exploitées pour la satisfaction des besoins présents
REFERENCES
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